Audrey Alwett : autrice et directrice de collection
Audrey Alwett est une auteure (ou autrice) française, scénariste de BDs (le cycle Princesse Sara), directrice de la collection aux Editions Soleil, directrice de la collection Bad Wolf aux éditions ActuSF. Passionnée de Terry Pratchett (Les Annales du Disque-Monde), elle dédie son premier roman Les Poisons de Katharz au grand auteur britannique décédé en 2015.
Ce roman, c’est aussi une œuvre autonome qu’elle gardait à l’esprit depuis longtemps. Elle décide de le reprendre, et quoi de mieux que d’écrire un roman et d’en profiter pour lancer sa propre collection ? Et pourquoi pas, pendant qu’on y est, demander à Christophe Arleston (le scénariste de la série des Lanfeust) qu’elle côtoie au Gottferdom Studio, de sortir de son tiroir une idée de roman qui prenait la poussière ? Plus on s’ameute, plus on ricane, Bad Wolf inaugure sa création par trois adoptions : Les Poisons de Katharz (Audrey Alwett), Le souper des maléfices (Christophe Arleston), Anasterry (Isabelle Bauthian).
La meute adopte en 2017 : Sorcières associées d’Alex Evans, Boudicca de Jean-Laurent Del Socorro, La fée, la pie et le printemps d’Elisabeth Ebory (roman présenté au prix Goncourt 2017).
L’auteure (ou autrice) tient également un blog intitulé « Page Seauton ».
Le label Bad Wolf, aux Editions ActuSF
L’auteure (ou autrice) tient également un blog intitulé « Page Seauton ».
Le label Bad Wolf, aux Editions ActuSF
Dirigé par Audrey Alwett, Bad Wolf était à l’origine un label indépendant de fantasy pour adultes avant de devenir une collection aux Editions ActuSF en octobre 2016. Une fantasy « qui fait un pas de côté » : pas de héros mâle qui démolit ennemis sur ennemis et remporte tous les succès dans une trame politique faible, par exemple.
Le label avait été créé l’été 2015 et publiait des romans sur support numérique afin de leur donner une première vie, avec possibilité d’impressions à la demande. Il était possible de « modifier le texte après publication, après avoir eu une première vague » plutôt que d’attendre une réédition pour le corriger. Pratique, quand on sait que grâce à des retours de lecture, Christophe Arleston a pu éclaircir certains points de son récit.
De nombreuses informations sur la collection et ses auteurs sont disponibles sur le site ActuSF :
La ville-prison débarrasse !
A cause d’une malédiction désormais oubliée, le démon Sälbeth a été emprisonné sous terre et seule la présence simultanée de cent mille âmes sur son dos pourra le libérer. Depuis, la ville-prison de Khatarz a été bâtie sur son échine et la jeune tyranne en place, l’une des seules personnes au courant de la malédiction, a développé une obsession naturelle pour les chiffres. Ténia Harsnik s’échine en effet à maintenir le nombre d’habitants en-dessous du seuil des cent mille mais malgré tous ses efforts, les chiffres ne cessent d’augmenter. Dans cette cité-repoussoir où croupissent les pires crapules de la société : meurtriers, créatures, sorcières, zombies, croquemitaines, elle a bien entendu rendu le meurtre légal et joué de la guillotine mais ces mesures ne sont pas assez drastiques pour éviter l’apocalypse. Bientôt réveillé, le démon sous la ville lui gronde son triomphe dans l’esprit et lui flanque des migraines pas possibles.
Si encore la fin du monde était son unique préoccupation… Un marchand de sortilèges a décidé de fomenter un coup d’Etat et un prince voisin n’a rien trouvé de mieux que d’essayer de raser la ville. Après avoir gravement mesuré l’ampleur de ces ennuis, Dame Carasse, la seule sorcière capable de venir à bout du chaos, a pris ses cliques et ses claques. Ténia ne peut plus compter que sur son apprenti pas très fût-fût et sur quelques fidèles alliés. Il faut faire vite. Car décidément, cette Sälbeth lui fait fichtrement mal à la tête…
Katharz legenda est !
Un hommage à Terry Pratchett mais pas seulement
Pas de disque-monde, pas de tortue portant des éléphants qui supportent la sphère terrestre, mais un démon changé en portefaix d’une ville-prison qui n’a rien de céleste. Au lieu d’un Rincevent, d’un Deuxfleurs, d’une Mort grand-père ou d’un père Porcher, une Ténia, une Dame Carasse, un Azarel maladroit et même un zombie d’entrée. Le point commun avec les Annales du Disque-Monde : des sourires ! Un Terry Pratchett sans en être tout à fait un, un hommage tout à fait libre et déjanté, du Alwett à la sauce Pratchett. Qui tend à du Alwett tout court, grâce à un univers et des personnages qu’elle se réapproprie et un registre de style plus familier que celui de sir Pratchett. C’est une boisson délectable qui nous est offerte sur un plateau.
Le roman tire sa force de ses personnages bien trempés, qui n’hésitent pas à vitupérer, à se démener, et à empoisonner quatre cents pages d’encre avec conviction. Mais ils sont loin d’être la seule qualité du roman : c’est bien l’art de la narration et le style qui transportent le lecteur tout au long du récit. Les plaisanteries, les jeux d’esprit et les clins d’œil sont si présents qu’ils charpentent presque à eux seuls toute l’histoire. Les premières lignes du chapitre 1, disponibles en extrait, donnent immédiatement le ton. Le style est en général plein de surprises : à chaque détour de phrase, de paragraphe, de page, il se trouve toujours une pépite cachée qui relance l’intérêt et redonne le sourire. Qu’en est-il de l’intrigue, est-elle complètement farcesque, absurde, au point de caracoler sans jamais retourner au bercail ? Oui, mais non. Toute la fantaisie est maîtrisée. L’auteure ne perd pas de vue la trame principale dans cette histoire pensée comme l’isba de Dame Carasse : elle retombe toujours sur ses pattes.
L’imagination débordante de l’auteure constitue l’ingrédient principal de cette recette explosive. Si le monde décrit est essentiellement loufoque, il convainc parfaitement : rien n’est ridicule alors que certaines références délibérément enfantines auraient pu l’être. Tous les personnages sont séduisants, où qu’ils soient, quelles que soient leurs motivations, quels que soient leurs tocs : une Baba-Yaga sur isba, une tyranne au cœur très humain, un zombie qui embrasse la paperasse, une « princesse » qui agite la ceinture de chasteté, un sénateur qui ne cherche qu’à mater les Katharzinois à coups de Caton…
Un roman qui touche
Certes, les sorcières, les chevaliers, les croquemitaines, les licornes, c’est bien beau, mais c’est encore mieux quand ça sert à quelque chose. Derrière une certaine allure absurde, le roman aborde des sujets qui font réfléchir, telles que la guerre, le sens du sacrifice individuel, le poids des responsabilités, le bien de la communauté, les rapports de genre… Une grande place est en effet accordée aux personnages féminins, maîtres de leur destin, tels que Ténia qui ne manque pas de panache et Dame Carasse, une fé…sorcière qui n’a de Carabosse que le boss. L’auteure combat par ailleurs toujours le sexisme dans ses œuvres.
La couverture
La couverture de la seconde édition (2016, avec la représentation de Ténia sur fond blanc, dessinée par Jean-Baptiste Andréae) semble bien plus correspondre à l’esprit du roman que la première (2015, verte avec une pomme rouge, qui fait trop penser à un conte et surtout à une histoire d’amour à l'eau-de-rose qui n’a rien à voir avec le roman.)
Deux simples remarques concernant la couverture de 2016 : le visage de Ténia est un peu trop rond et enfantin (la couverture fait très jeunesse) ; la représentation du protagoniste associée au titre laisse supposer que Katharz serait le nom de la tyranne (un prénom atypique, certes, mais le roman malmène assez la notion de normalité). Cependant, une étrange nécessité pousse à lire la quatrième de couverture, ce qui finit par lever tous les doutes.
Une fin attendue
Celle-ci est si attendue que le sourire franc laisse place à un léger sourire, bienveillant (ce qui est déjà pas mal), en souvenir de ce qui a été lu avant. Le grand épisode final serait un peu trop hyperbolique et la transformation d’un des personnages à la fois un peu trop radicale et bienvenue pour convaincre. Quant à l’épilogue, on aurait préféré s’attarder plus longtemps sur les personnages, histoire d’en garder une dernière image plus amusante. Mais personne ne boude les quatre cents pages de plaisir qui ont précédé.
Si vous avez le cafard, vous savez quoi lire
Si vous finissez la lecture avec la fourche qui langue, préférant recommander du Karthaz ou du Katharge, c’est normal, vous aurez tout compris. En somme, Les Poisons de Katharz est un roman drôle et rafraîchissant que vous ne devriez pas tarder à vous inoculer. Vous pouvez aussi en verser chez le voisin, le vendre sous le manteau, il y en a pour tous les goûts.
Ce peut également être un bonne (ré)introduction à la lecture des tomes des Annales du Disque-Monde parce que ça aussi, c’est très bien. Ainsi, l’hommage aura été complet.
Une fin attendue
Celle-ci est si attendue que le sourire franc laisse place à un léger sourire, bienveillant (ce qui est déjà pas mal), en souvenir de ce qui a été lu avant. Le grand épisode final serait un peu trop hyperbolique et la transformation d’un des personnages à la fois un peu trop radicale et bienvenue pour convaincre. Quant à l’épilogue, on aurait préféré s’attarder plus longtemps sur les personnages, histoire d’en garder une dernière image plus amusante. Mais personne ne boude les quatre cents pages de plaisir qui ont précédé.
Si vous avez le cafard, vous savez quoi lire
Si vous finissez la lecture avec la fourche qui langue, préférant recommander du Karthaz ou du Katharge, c’est normal, vous aurez tout compris. En somme, Les Poisons de Katharz est un roman drôle et rafraîchissant que vous ne devriez pas tarder à vous inoculer. Vous pouvez aussi en verser chez le voisin, le vendre sous le manteau, il y en a pour tous les goûts.
Ce peut également être un bonne (ré)introduction à la lecture des tomes des Annales du Disque-Monde parce que ça aussi, c’est très bien. Ainsi, l’hommage aura été complet.