eleanore-clo a écrit: |
Bonjour Jo Walton nous ici livre un hymne à la science-fiction que les prix les plus prestigieux (Hugo, Nebula, British Fantasy Awards) se devaient d'honorer. Un peu comme The Artist a gagné l'Oscar du meilleur film. Certes pour ses qualités mais aussi et surtout parce que le cinéma se mettait lui même en scène. La mise en abyme est décidément à la mode et faute de livre dans le livre, le lecteur a droit à une liste ininterrompue des chefs d’œuvres de la Fantasy et de la SF. Les goûts de l'auteur étant éclectiques, nous bénéficions de conseils éclairés pour pouvoir se constituer LA collection de SF et il est fort amusant qu'une bibliothécaire conseille la jeune héroïne sur les "bons coups" ! Manifestement, le message subliminal est que nous devrions aussi suivre ses conseils ! Morwenna est aussi un travail sur le deuil, sur le deuil d'une sœur jumelle, sur le deuil de l'enfance avec l'arrivée dans une nouvelle école et les premiers émois sexuels (la petite mort..), sur le deuil de la mère lorsque les parents divorcent. L'ouvrage se termine lorsque l’héroïne, ayant fini son deuil, se tourne vers l'avenir, abandonnant les fées de son enfance, vers son père et son petit ami. La dernière page tournée, je reste insatisfaite. Certes le message est brillant. Certes la construction est impeccable. Certes, quelques belles phrases fleurissent ici où là (de futures citations ?). Mais l'assemblage hétéroclite d'une journal intime d'une adolescente avec la mythologie galloise et la méta-SF ne fonctionne pas. La mayonnaise ne prend pas. Le livre semble artificiel à force de trop vouloir bien faire et la crédibilité de Morwenna en souffre. Sa famille (lointaine réminiscence de la famille Adams) est par trop tirée par les cheveux. Le grand père juif tombe comme un cheveu sur la soupe. Les relations de Morwenna avec son corps, source ambigüe de plaisir (sexuel ? culinaire ?) sont trop complexes ou trop floues pour qu'on soit émue. La relation mère-fille est caricaturale et simpliste. La vie quotidienne dans une école britannique sent le vécu mais on se perd dans les méandres des notes de Morwenna. La culture SF est omniprésente, lourde au point d'en être lassante. Les titres d'ouvrages sont mitraillés à une cadence infernale ce qui ne permet pas de creuser le parallèle entre cette vie de papier et la propre vie de Morwenna. Walton insiste beaucoup trop lourdement sur le refuge livresque, sur le livre source d'évasion, d'apprentissage voire même de contact avec l'autre (le club de lecture). Au final, Morwenna est une construction brillante, intelligente mais par trop artificielle et hétéroclite pour que se dégage une humeur, une mélancolie douce-amère que l'auteur cherche pourtant désespérément à créer. Sturgeon est cité, Tiptree aussi. Ces auteurs, à travers leurs nouvelles, savent mieux émouvoir, peut être en étant plus simples. Walton veut trop bien faire, trop explorer de fils parallèles. La conclusion est dans le même registre et on se demande bien ce que Les portes d'Ivrel de CJ Cherry viennent y faire de même que le "combat" magique. Cordialement Eléanore-clo |