Francis Mizio s'explique sur Actusf à propos des festivals

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Tout d'abord merci à ceux qui ont été constructifs.
Mon deuxième message vise toutefois à reformuler quelques angles car la toxicité de quelque imbécile a réussi à totalement orienter le débat :
- A vous lire on dirait que je ne parle que d'une chose : faire payer les dédicaces. On me fera grâce d'avoir été plus large, plus nuancé. Je dis : on ne fait plus venir les auteurs que pour des dédicaces, or les auteurs sont les seuls à ne rien gagner sur ce coup là, ni financièrement, ni humainement, ni en terme d'image ou de promotion. Je dis donc, payez les auteurs pour venir, ou inventez autre chose, ou payez les pour faire autre chose, et signer alors à l'occasion. Je pose aussi des questions aux festivaliers sur le sens de la vente massive comme alibi officiel du culturel, etc. Je pose plusieurs problèmes, dont celui de la rémunération des auteurs, oui, à travers ce prisme.
- Si des auteurs veulent signer gratos, qu'ils le fassent. C'est leur droit. Je considère simplement que la dédicace massive est sans intérêt pour le lecteur et l'auteur.
- Des réactions ici m'ont fait réfléchir à propos du contact avec le lecteur. Je suis du milieu polar : nous sommes, nous sans l'esprit du fandom (cette nuance me semble importante). On a beaucoup écrit sur le fandom : son ghetto qui se plaint d'être un ghetto... mais qui a en revanche ses propres liens sociaux, ses propres usages, ses propres et différentes relations auteurs/lecteurs que nous n'avons nous pas de façon similaire dans le polar. Dans le polar, depuis 95, j'ai vu évoluer un "fandom" qui dérivé en une exploitation cynique des bénévoles et des auteurs. Je le maintiens. Et dans le polar il sort plus de 1600 nouveautés par an. Les auteurs ne sont plus que de la bidoche. Le polar est saturé. Alors on en est à faire de l'abattage et dans un milieu qui se dit de gauche (mais qui doit gagner sa vie, je le dis à l'adresse d'un crétin qui sévit ici) on reproduit un système inégalitaire d'exploitation humaine et de perversité économique (les marges) qu'on prétend dénoncer. Y'a problème.
- Il y a plusieurs années, je gagnais agréablement bien ma vie, même sans être riche : les a valoir étaient honnêtes, il y avait des a-côtés. Je n'étais pas le seul. Nous en vivions sans avoir à monter en charge jusqu'à la nausée les ateliers d'écriture, toutes les combines, les interventions. Aujourd'hui, (par exemple on me payait pour écrire des chroniques en France et à l'étranger dans des magazines papier, aujourd'hui c'est du blog officiel et c'est gratos, presque la moitié de mes revenus a disparu) c'est devenu très dur. Et même des conférences ou des ateliers sont payés à plus de 6 mois... Alors oui, on regarde où ça merde. Sur la page FB d'Ayerdhal j'ai répondu aussi au point qu'il lève justement : c'est la distrib qui fausse tout. Ben oui, mais moi je vois aussi que dans un festival, sans être bénévole, je suis celui qui ne gagne rien, or, et Fabrice le confirmera sans doute, je travaille directement ou indirectement tous les jours. TOUS LES JOURS et pas que 8h. Car le métier d'auteur pro, ce n'est pas qu'écrire, c'est aussi fabriquer les conditions pour placer ou inspirer l'écriture, qu'elle qu'elle soit, et c'est pas du 35 h. /semaine.
Enfin, j'insiste : mon billet appelle aussi et surtout à repenser les festivals, les salons dans leurs aspects financiers, culturels, même politiques (vis à vis du politique : vendre c'est pas de la culture, ça c'est l'amalgame des publicitaires de Virgin). Son audience me dépasse toutefois, je ne m'y attendais pas. Je sens que j'ai appuyé sur un abcès non dit. Des festivaliers et pas des moindres me disent du coup vouloir y réfléchir. Des auteurs (polar ; jeunesse) approuvent et relaient...
On ne peut pas faire intervenir l'auteur autrement, le faire mieux découvrir qu'en signant seulement ? On ne peut pas le faire moins signer (ou signer après un débat, un "live" quelconque genre, si vous y tenez aux signatures) et mieux valoriser son travail? Pourquoi enfin peut-on parler d'argent dans tous les domaines artistiques et pas en écriture ? Pourquoi cela doit-il être si fortement une vocation que c'est sale de parler de fric ? Regardez les anglo-saxons et sortons-nous les doigts du cloaque de la littérature sacralisée comme un hobby bourgeois. Le monde a évolué depuis le livre de poche, et les livres côtoient les surgelés dans le chariot.

Francis Mizio
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