Le_navire a écrit: |
J'ai le sentiment qu'il y a beaucoup de toi dans ton travail d'écriture ; c'est toujours plus ou moins vrai, quel que soit l'écrivain, mais on cherche souvent l'homme derrière le personnage, là où - envoie moi aux gémonies si je me trompe - j'ai le sentiment que c'est dans le mélange à la base même de la construction de tes textes, entre retenue intelligente et cultivée et foisonnement libératoire, qu'on peut te lire entre les lignes. D'où ma question people du jour : est-ce que tu vis en affinité avec tes personnage, ou les considères-tu en démiurge, en les objectivant ? |
Une nouvelle réponse de Normand, mais plus subtile : un peu des deux, mais successivement.
En règle générale, la naissance du personnage s'opère de façon objectivée. Je le construis en fonction du projet d'ensemble dans lequel il s'inscrit : il faut qu'il serve le récit. D'ailleurs, dans ce processus créatif, je reconnais volontiers qu'il y a des points communs avec la construction du personnage de jeu de rôle, qu'il soit joueur ou non joueur. Le personnage doit participer à une dynamique, et pour cela, j'ajoute et je retranche, je polis, j'ajuste, je rabote ou je maquille, comme je fabriquerais une marionnette.
Ensuite, une fois que j'ai la poupée, je l'investis. J'essaie d'adopter son point de vue, d'entrer en empathie avec ses pensées et ses sentiments. Dans ce cas, si je suis amené à fréquenter longtemps un personnage, j'entre en affinité avec lui. Pire : il déteint plus ou moins sur moi.
C'est peu ou prou ce qui s'est passé avec Benvenuto. J'ai d'abord construit un type qui est vraiment à l'opposé de ce que je suis, en tout cas sur le plan moral, comportemental et langagier. Puis, première personne oblige, j'ai essayé de voir le monde par les yeux du personnage, et le personnage a fini par m'apprendre plein de choses. Parler l'argot, par exemple.
Le_navire a écrit: |
[mode fangirlie on] C'est pour quand le prochain, tu as une idée ? non, parce que je piétine, là. [mode fangirlie off] |
Comme je suis un cheval de labour assez lourd, ce n'est pas pour tout de suite. Disons que j'ai collecté une énorme doc, que je l'ai mise en ordre (ce qui est déjà une part considérable du travail), que j'ai déjà un plan très détaillé du roman, et que je suis en train de commencer à écrire. Comme je suis un pervers qui aime les jeux que je suis (quasi) le seul à reconnaître dans mes babillardes, il n'est pas exclu que l'écriture soit parfois ralentie par des fantaisies acrobatiques. Comme la cynghanedd, par exemple, que j'ai découverte récemment, avec un ravissement d'autant plus grand que je mesure combien je vais souffrir dessus…
Je me donne encore au moins un an d'écriture. Au moins. En étant sans doute d'un optimisme déraisonnable…