ansset a écrit: |
Qu'est-ce qui t'a décidé à choisir le point de vu de Don Benvenuto ? |
Sa voix. C'est la moitié du roman, au moins.
Son statut intermédiaire, qui lui permet de frayer aussi bien avec les bas fonds qu'avec la crème.
Sa fonction de spadassin, qui permet de saupoudrer l'intrigue de capes et d'épées.
Sa position de serviteur du Prince, qui permet de deviner l'intimité de celui-ci tout en ménageant son mystère.
ansset a écrit: |
L'illustration du machiavélisme n'est pas affectée par ce choix mais pas contre sa condamnation.... Au fond tant que le Prince tient les rênes, tout va bien : il faut simplement être du bon côté de la barrière. Il doit bien être un peu saigné de remords le podestat, non ? |
En fait, il s'agit d'un pervers narcissique. Il se place au-dessus du peuple, de l'aristocratie et des lois, parce qu'il se voit comme le père de la patrie. Les crimes qu'il commet ne sont à ses yeux que des sacrifices nécessaires pour le souverain bien - c'est-à-dire lui, puisque l'Etat et lui, c'est la même chose. Il souffre un peu, c'est vrai, parce que c'est un homme sensible et intelligent ; mais la nature viciée de son tempérament induit que cette souffrance rehausse encore l'estime qu'il se porte, l'assure dans la représentation idéalisée qu'il se fait de lui-même, et le confirme donc dans sa dynamique criminelle.
Ses remords sont donc un luxe d'aristocrate et finissent par flatter sa démesure.
ansset a écrit: |
Don Benvenuto masque bien son âme et au moment où l'on espère que le voile se déchire (même s'il est un peu troué), il nous ferme la porte violemment : refus catégorique. C'est ce petit supplément d'âme, si j'avais un petit bémol personnel à placer, qui manque à Gagner la guerre et que j'ai trouvé dans Janua Vera. |
Je trouve qu'il y a de l'âme, dans Gagner la Guerre : celle des vainqueurs. Pas seulement celle du Podestat et de sa clique : celle des vainqueurs en général. Ce qu'il faut de dureté, de rouerie, de duplicité et de bonne conscience pour se montrer plus féroce que les autres. Une belle tranche d'humanité !
