Vous avez certainement échappé à ce phénomène qui hante ma région et une partie de la Belgique: la promotion (le matraquage médiatique) pour une série de romans jeunesse écrits par une personne de la région de Tournai, Carole Bonnet. On en parle partout. Sur la télévision locale, dans la presse locale, et ce depuis des mois et des mois. La ville de Tournai, qui s'est associée (je n'arrive pas à comprendre pourquoi) à l'auteur, organise des projets couteux dans les écoles primaires, des ateliers d'écriture pour que les élèves de diverses écoles composent un titre de la série. On retrouve dans les Carrefour et autres des présentoirs immenses comme seul Harry Potter en avait connu. D'ailleurs, la presse locale s'amuse à comparer Carole Bonnet à J.K. Rowling (oui, pas moins).Sans oublier que les écoles (comme les librairies) sont relancées régulièrement et de manière insistante, même si elles ont dit ne pas vouloir participer à la chose ni acheter le livre (qui a été donné en masse par la ville aux directions en échange de leur présence à la soirée de lancement du livre).
Si la série "Les Aventurêves" avait été bien écrite, je dois dire que je ne me serais pas plus émue que ça de cette médiatisation à outrance (pour une fois qu'on met un écrivain en avant dans ma région...). Mais le fait est que le premier livre que j'ai lu de la série est tout bonnement catastrophique (et je pèse mes mots). C'est l'un des plus mauvais romans jeunesse (et même romans tout court) que j'ai lus (et j'en ai lu...). L'histoire est tellement ennuyante que je ne connais aucun autre adulte à l'avoir lue jusqu'au bout (si ce n'est une directrice d'école qui a fait un rapport à la Ville en signalant les nombreuses fautes du livre, mais elle n'a pas été entendue). L'écriture, justement, laisse énormément à désirer, surtout d'un point de vue grammatical. On dirait un premier jet qui n'a pas été corrigé et pour lequel on a utilisé le dictionnaire des synonyme de Word pour éviter quelques répétitions. Les virgules sont placées au petit bonheur la chance, le vocabulaire est pauvre, il y a même des fautes d'orthographe et les paragraphes sont coupés n'importe comment (même parfois en plein dialogue), ce qui rend le tout très pénible à lire.
Sans oublier le fait que le roman, bien qu'écrit par une femme, est assez sexiste: les filles, ça geint, ça jacasse, ça ennuie, ça ne sert à rien. Et au final, la seule fille du groupe ne sert qu'à faire la Castafiore pour casser une vitre et permettre aux garçons d'aller de l'autre côté chercher leur "trésor".
Bref, ce livre (très) mal écrit sert pourtant de base pour faire des animations d'écriture dans les écoles primaires, avec l'écrivain (qui était esthéticienne avant - non que je veuille juger, mais elle n'a aucune formation littéraire lui permettant de faire ce genre d'animation, et rien que le folder envoyé pour demander aux écoles de participer à celles-ci comporte 5 fautes d'orthographe. Sur deux pages...) ou avec des animateurs qu'elle a formés.
Comment se fait-il qu'un livre aussi catastrophique soit soutenu par les autorités et connaisse autant de publicité quand d'autres livres d'auteurs de la région sont complètement ignorés alors qu'ils sont de qualité? (je crois que la réponse tient en partie dans le fait que peu de personnes ont réellement lu le livre...)
Avez-vous déjà connu un phénomène similaire en France?
Je parle plus en détail du livre
ici.
Cachou