Joëlle Wintrebert et ses trois projets de romans...

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Joëlle Wintrebert est la fabuleuse auteur de Pollen et des Olympiades truquées (et de nombreux autres romans et recueil). C'est aussi la traductrice de Black-out et de All Clear de Connie Willis. Et que ses lecteurs se réjouissent. Elle a des projets dans ses cartons...

Quel est ton bilan de 2014 ?
Mon bilan de 2014 est assez mitigé, pour pas mal de raisons plutôt personnelles sur lesquelles je ne m'étendrai donc pas.
Rien à voir avec l'extraordinaire passe d'armes qui a suivi la publication de l'epub Rêver 2074, controverse qui m'a été rapportée de très loin : je ne suis ni sur les réseaux sociaux ni sur les forums, ça m’évite de m’enflammer. J'ai toujours pensé qu'on s'y déchaînait bien trop vite et que ça favorise rarement la réflexion.
Comme je l'écrivais à un ami qui me citait quelques commentaires, j'avais pas mal de préventions sur le Luxe avec la majuscule, en tant qu'entité symbole du grand Satan, mais je suis curieuse et le projet Rêver 2074 me donnait la possibilité de pénétrer un monde pour moi complètement opaque. Il se trouve qu'on a eu la chance de visiter les ateliers, de rencontrer ceux qui y bossent, des artisans passionnés, très souvent de vrais artistes, créateurs au sens fort. Ils ont un désir de perfection et/ou de beauté qu'on n'imagine pas quand on ne les a pas vus travailler.
 
Je dois reconnaître que je n'avais pas imaginé le bouchon poussé si loin, et que je comprenais mieux, du coup, le prix de telle ou telle pièce, robe, orfèvrerie, bijou, vin (la visite au Château d'Yquem, ah !)

J'ai aussi réalisé quelque chose dont je n'avais pas conscience : le vrai luxe se fabrique en France, pas au Pakistan ni au Bangladesh. Ce sont à peu près les seules entreprises françaises qui créent encore massivement des emplois. Les petites mains du luxe ne sont pas salariées à la hauteur des merveilles qu'elles élaborent, mais dans l'ensemble elles font un boulot qui les branche, ne sont pas traitées comme des esclaves, et ne sont guère menacées de licenciement.

À comparer avec les 1 133 personnes mortes dans l'accident du Rana Plaza à Dacca, aux 1 900 blessés dont 1 000 très gravement, qui travaillaient pour des clopinettes pour plusieurs groupes textiles... qui se délocalisent aujourd'hui en Asie ou en Afrique au lieu de verser des indemnités. Groupes chez qui nos chers camarades qui criaient au loup contre tous ces suppôts du luxe se servent peut-être avec assez peu de mauvaise conscience : Auchan, Carrefour, Benetton, Bershka, Bonmarché, Camaïeu, C & A, H & M, Lidl, Mango, Zara, etc. Comme ils utilisent sans doute des smartphones fabriqués grâce aux petits doigts d'enfants maltraités et payés au lance-pierres.
 
Bref, il y a vraiment une *grosse* confusion, de mon point de vue.
Même si l'univers du luxe me paraît toujours aussi improbable et scandaleusement inaccessible, même si le contraste entre une minorité de nantis et une majorité de crève-la-faim reste impossible à avaler pour une résistante comme moi, il n'en demeure pas moins que ces réalisations fabuleuses participent à l'aura de la France, au même titre que son art. Les merveilles que nous avons vu créer ne sont pas accessibles à tous, c'est l'évidence. Doit-on pour autant dire qu'elles ne doivent pas exister ? De tout temps, la richesse a permis l'expression de l'art.:-)
 
Cela dit, tout à fait entre nous, j'en ai pas mal rien à foutre, de l'aura de la France. Finalement, mon ambivalence est totale, dans cette histoire, ce que ma nouvelle traduit bien, il me semble.
 
Sur quoi travailles-tu ? Quels sont tes projets ?  
Travail actuel, le roman resté en suspens depuis bien trop longtemps (pour le Diable vauvert), et que j'ai beaucoup de mal à reprendre efficacement, trop de décades ont passé (et quand je parle de décades… Je devais le finir avant mon énorme traduction de Connie Willis). Je vais devoir m'enfermer en février pour réussir enfin à le terminer.
En projet, un roman jeunesse SF qui devrait être accompagné d'un cahier pédagogique d'Estelle Blanquet. L'idée est de réaliser un roman pour les jeunes qui permette à des enseignants de sciences et de lettres de bosser avec eux. Un projet un peu oulipien dans l'esprit. Le défi m'amuse, et ce sera une façon pour moi de revenir au secteur jeunesse, abandonné depuis 1998.
 
Autre projet, mon premier roman de fantasy... dont tu as sans doute entendu parler. (^_^)
  
Et quelles sont tes prochaines dédicaces et apparitions à venir ? 
 Je viendrai en visiteuse au Salon de Paris et à la Comédie du livre à Montpellier, et je serai sûrement à Saint-Malo en tant que présidente du GPI, mais sinon plus question de lever le nez de quelque temps ni de me disperser.
 
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