A leurs Claviers : HAPPINESS IN SLAVERY ...

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gutboy
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Message par gutboy » jeu. nov. 02, 2006 10:20 am

Intéressant le lien Natacha, merci.

J'aime bien le franglais, c'est assez amusant.

Mais le fond est ailleurs, on comprend bien mieux ce qui se passe, en fait.

Ce qui est frappant, c'est que quels que soient les arguments qu'elle met en avant, il faut toujours qu'elle les présente de manière insultante. Etonnant.

"Et quand j'écris, j'écris comme je parle. Comme dans la vie, tu vois ? Parce que l'écriture ne se doit pas, à moins de se vouloir une pute mercenaire, être inféodée à des règles de registre de langage, ou d'adéquation à ce que veut le lecteur."
Pour dire: "le travail de l'écrivain est d'explorer de nouvelles voies, et permettre au lecteur aussi d'évoluer dans ses choix et ses goûts", elle crache sur tout le monde avec une amertume rare.
C'est un exemple parfait de l'inadéquation entre l'intention et la méthode.
Extraordinaire, mais on comprend mieux la fin d'Oxymore.

Pour éduquer, il y a deux méthodes:
- t'es vraiment trop con, ce que tu fais est nul, laisse moi faire.
- c'est pas mal, mais tu peux aussi essayer comme ça, qu'en penses-tu?

Elle a choisi la première...
Listen now. Whoever you are, with these eyes of yours that move themselves along this line of text; whoever, wherever, whenever. If you can read this sentence, this one fragile sentence, it means you're alive. (Jeff Noon - Falling out of cars)

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Natacha
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Message par Natacha » jeu. nov. 02, 2006 12:11 pm

jerome a écrit :
Juste un mot pour dire que je ne crois qu'assez moyennement au militantisme des lecteurs et que la proportion de ceux qui vont acheter pour soutenir une petite maison d'édition est faible. D'ailleurs je suis persuadé que la plupart des lecteurs ne sont absolument pas au courant de qui est gros ou petit dans le monde de l'édition, de qui fait preuve d'investissement et d'audace dans ces choix, des lignes éditoriales de chacun...
Ca me semble assez réaliste, mais je crois tout de même au militantisme des lecteurs. Je pense également qu'il peut être contagieux. Cela se vérifie notamment dans l'impact des forums ou sites dédiés à la SF comme celui-ci, qui deviennent presque davantage des prescripteurs d'achat que les gros journaux.
Par ailleurs, j'ai vu également ce que donnait, dans les faits, le militantisme des lecteurs. Les lecteurs fans de Léa Silhol ont contribué, à eux seuls, à faire en sorte que la boîte perdure quelques mois de plus pendant qu'on cherchait des solutions pour s'en sortir. Et ils se sont bougés comme des fous pour participer à cette recherche de solutions, c'était vraiment beau à vivre.
Pour l'anecdote, eux qui n'avaient rien de plus à gagner que le maintien d'une maison d'édition dont ils aimaient le travail ont été plus concernés sur ce coup-là que 90% des auteurs que nous avons publiés. Plus concernés également par les discussions générales que nous avons eues ensemble sur les problèmes de l'édition à l'heure actuelle.

jerome a écrit : Evidemment, je suis pour que le Bélial, Les Moutons, Mnémos, Galaxies et tous les autres survivent, nous fasse découvrir des auteurs, des textes, des talents. J'ai pris un vrai plaisir avec les recueils d'Armand Cabasson ou de Jess Khan chez l'Oxy. J'irai même jusqu'à dire qu'il faut soutenir les micro-éditeurs comme Rivière Blanche, Eons, Dreampress ou nous... qui aujourd'hui proposent des livres interessants.
Je partage cette opinion.

jerome a écrit :Et attention, je ne juge en rien la politique éditoriale ou commerciale, ou la communication de l'oxy. Je m'en garderais bien. Il faudrait avoir été dans leurs comptes et dans leurs choix depuis toutes ces années pour se permettre de dire. Je rebondis juste sur la notion de Lecteur militant.
Mais j'avais bien compris :)
De toutes façons ni l'objet de la tribune ni celui de cette discussion ne consistent à "juger la politique de l'Oxymore". Que je me serve d'exemples nous concernant pour illustrer mon propos c'est une chose, mais je ne suis pas là pour parler de / juger / défendre nos (défuntes) fesses.
Jérôme a écrit : Oui mais le marché est également à prendre en compte. Sinon tu ne te lance pas dans une démarche commerciale.
Hum, pour les auteurs également donc ? Publier est une démarche commerciale, si créer est une démarche artistique.
Un artiste dont la production est à contre-courant du marché doit donc la ranger dans sa culotte en attendant des temps plus favorables à son travail ? Ou complaire et s'adapter ?
Jérôme a écrit : Je viens de lire une interview de Guy Delcourt dans le magazine de BD : Suprême Dimension. C'est le directeur de la maison d'édition du même nom, qui publie aussi bien From Hell, Donjon, Sillage que Star Wars. bon, on pense ce qu'on veut du bonhomme et de ses BD, mais il dit :
"Le métier de l'éditeur est d'être à l'écoute du public et d'y répondre. Il y a là dedans une part de pragmatisme et une part de vocation pour offrir aux lecteurs une typologie d'ouvrages qu'ils vont aimer".
En gros, il se place différemment. Lui dit : je publie ce qui plait aux lecteurs mais en plus je leur propose d'autres titres qui sont suceptibles d'aimer.
Je ne vois pas en quoi il se place différemment ? Il est le "troisième type d'éditeur", donc, qui a déjà été évoqué plusieurs fois. Entre les deux extrêmes. Commercialement plus viable. Plus populaire également.
On adhère ou pas à ce genre de politique selon que ça corresponde, ou pas, à ce qu'on cherche à accomplir en tant qu'éditeur.
Jérôme a écrit :On est d'accord ou pas. C'est juste une manière différent d'aborder le métier en mettant le lecteur au centre de la réflexion (à tord ou à raison). Ca permet de sortir du manichéisme Gros éditeur méchant/Petit éditeur gentil.
Ah oui, le lecteur est au centre de la réflexion, tout à fait. C'est pourquoi il est également question du lectorat dans la tribune.
Quant au manichéisme Gros éditeur méchant / Petit éditeur gentil, il ne m'a pas semblé qu'on soit tombé dans ce travers jusqu'à présent, dans la discussion. Un petit éditeur peut très bien choisir de ne répondre qu'aux attentes du marché. Un petit éditeur peut pratiquer des choses aussi rebutantes que l'édition à compte d'auteur, etc. Ou ne pas payer ses auteurs pendant cinq ans sous prétexte qu'il est "petit".
La taille en l'occurence ne fait rien à l'affaire (comme chanterait l'autre).

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Natacha
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Message par Natacha » jeu. nov. 02, 2006 12:27 pm

Patrice a écrit : On peut se demander pourquoi elle n'écrit pas carrément en anglais, pour les éditeurs anglo-saxons.
Elle écrit déjà beaucoup de choses en anglais, de fait. Et au vu de l'expérience récente des trois jours passés à corriger la traduction d'un texte à paraître outre-mer, faite par la traductrice que lui avait allouée Delia Sherman, je l'ai entendue dire, oui, que ça aurait été plus vite si elle l'avait directement fait elle-même ou écrite en anglais.
Mais bon, après il faudrait retraduire vers le français, donc le problème de traduction se pose à tous les étages finalement.
Patrice a écrit :J'ai le sentiment que cette façon de parler tient plus de l'effet de mode que d'un réel soucis de nuancer son langage. La preuve: les mots anglais employés sont des plus courants. Ils ne sont aucunement nécessaires.
Bref, ce sabir pseudo-branché m'agasse.
C'est un avis très original sur la question.
Patrice a écrit :Pourquoi ne pas écrire en SMS, pendant qu'elle y est? Ca aussi c'est "tendance".
Tu devrais lui écrire pour le lui suggérer.

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Message par Natacha » jeu. nov. 02, 2006 12:30 pm

gutboy a écrit : C'est un exemple parfait de l'inadéquation entre l'intention et la méthode.
Extraordinaire, mais on comprend mieux la fin d'Oxymore.
Je suis soufflée par la pertinence de cette analyse.
Damned, que n'y avons-nous pensé plus tôt.
Tu as raison, tout est là.

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Message par Patrice » jeu. nov. 02, 2006 12:36 pm

Salut,
Tu devrais lui écrire pour le lui suggérer.
Voilà une chose que je ne ferai que lorsque que j'aurai lu quelque chose de sérieux d'elle. Pour l'instant, ce n'est pas le cas et mon avis sur la langue qu'elle emploie ne se base que sur le texte qu'elle a publié sur Actusf et sur le lien que tu nous as donné. Donc pour l'instant, je n'ai rien à suggérer.
Patrice a écrit:
J'ai le sentiment que cette façon de parler tient plus de l'effet de mode que d'un réel soucis de nuancer son langage. La preuve: les mots anglais employés sont des plus courants. Ils ne sont aucunement nécessaires.
Bref, ce sabir pseudo-branché m'agasse.


C'est un avis très original sur la question.
Je ne sais pas si c'est original, mais c'est là un travers que j'ai pu observer chez quelques adeptes de la branchitude parisienne qui parfois même ne connaissaient pas plus l'anglais que le malgache ou le mandarin.
Quoi qu'il en soit, cette façon de s'exprimer deviendra vite incompréhensible (encore quelques années avant que la "fashion" ne passe), comme toute mode linguistique.
Elle écrit déjà beaucoup de choses en anglais, de fait.
Content pour elle. C'est bien, et trop rare pour les auteurs français.

A+

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Eric
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Message par Eric » jeu. nov. 02, 2006 1:13 pm

Natacha a écrit :
Hum, pour les auteurs également donc ? Publier est une démarche commerciale, si créer est une démarche artistique.
Un artiste dont la production est à contre-courant du marché doit donc la ranger dans sa culotte en attendant des temps plus favorables à son travail ? Ou complaire et s'adapter ?
J'interviens un peu tard, mais sur ce point, il me semble qu'il y a un malentendu à dissiper. Pour moi, c'est un mythe qui a la vie dure, et en France c'est quelque chose de presque obscène que den parler, mais il faut bien se rendre à l'évidence. Dès lors que son auteur le destine à une diffusion, et de quelque manière que ça soit, l'Art cesse d'être un acte gratuit.

Proposer son manuscrit à un éditeur dans l'espoir qu'il sera publié, c'est forcément espérer une forme de reconnaissance, et cette reconnaissance se matérialisera - en partie du moins - par sa capacité à se diffuser le plus largement possible. En conséquence, c'est accepter d'entrée de jeu des concessions commerciales. Et même si un certain nombre d'auteurs préféreraient se couper la langue que de l'admettre, c'est un fait.

Vouloir être publié est une démarche intrinsèquement commerciale.

Sans quoi, ils se contenteraient d'écrire pour eux et de garder leur manuscrit dans leur tiroir, tout comme le peintre du dimanche ne peint que pour le plaisir de peindre.
"Ueeuuggthhhg", laissa échapper Caity. Ce qui aurait pu vouloir dire n’importe quoi.

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Message par Natacha » jeu. nov. 02, 2006 1:57 pm

Eric a écrit : J'interviens un peu tard, mais sur ce point, il me semble qu'il y a un malentendu à dissiper. Pour moi, c'est un mythe qui a la vie dure, et en France c'est quelque chose de presque obscène que d'en parler, mais il faut bien se rendre à l'évidence. Dès lors que son auteur le destine à une diffusion, et de quelque manière que ça soit, l'Art cesse d'être un acte gratuit.
Hum, apparemment c'est surtout obscène d'en parler quand tu gagnes du fric avec ton art :)
Eric a écrit :Proposer son manuscrit à un éditeur dans l'espoir qu'il sera publié, c'est forcément espérer une forme de reconnaissance, et cette reconnaissance se matérialisera - en partie du moins - par sa capacité à se diffuser le plus largement possible. En conséquence, c'est accepter d'entrée de jeu des concessions commerciales. Et même si un certain nombre d'auteurs préféreraient se couper la langue que de l'admettre, c'est un fait.

Vouloir être publié est une démarche intrinsèquement commerciale.

Sans quoi, ils se contenteraient d'écrire pour eux et de garder leur manuscrit dans leur tiroir, tout comme le peintre du dimanche ne peint que pour le plaisir de peindre.
Ah mais je suis *entièrement* d'accord. Publier est une démarche commerciale. Même si je ne te rejoins par sur la recherche d'une "reconnaissance". Tu peux aussi publier pour des raisons plus triviales que ça : le constat par exemple que la dizaine de romans qui dorment dans tes placards et que tu écris la nuit / la centaine de toiles que tu peins dans ton garage, pourraient te faire gagner de l'argent, et te permettre de pratiquer à plein temps une activité autrement plus passionnante pour toi que ton actuel gagne-pain.

Mais oui, publier est un acte commercial.

Le truc c'est que si tu parcoures aussi bien les forums, que les blogs, les sites dédiés, les billets d'humeur, tu trouveras partout des auteurs s'exprimant sur le fait que tel éditeur ait voulu corriger leur manuscrit dans un sens qui travestissait leur travail. Et les artistes s'indignent de cela. Et des centaines de gens leur font écho : "Ouais, c'est dégueulasse !"
Et ils ont à mon sens parfaitement raison.
Les artistes sont en droit, intégralement, de revendiquer une démarche personnelle et de ne pas transiger dans l'expression de leur art juste pour pouvoir être publiés.

Des concessions, il y en a plein d'autres à faire quand on accepte d'entrer dans l'arène. Il faut accepter de se livrer à la presse. Il faut accepter de donner des interviews. Il faut accepter que dans n'importe quelle convention, les visiteurs se croient autorisés à flasher ta gueule avec leur kodac ou leur téléphone portable, y compris quand tu n'es *pas* en représentation, mais juste en train de boire un café avec tes potes au bar d'en face.
Et ce n'est pas rien, loin de là. J'ai vu beaucoup d'auteurs qui vivaient très mal cet aspect-là, corolaire inévitable du moment où tu passes dans la peau de "l'artiste publié". Mais ils les acceptent, qu'ils le vivent bien ou mal, autant que faire se peut.

Leur demander de trahir leur art, par contre, pour qu'ils soient plus vendables, c'est aller à l'encontre de toute la vérité intrinsèque que l'art peut contenir. Réduire les artistes au rang d'amuseurs de foules, qui devraient changer de costumes à chaque fois que la foule change d'humeur et de désirs.

Donc, oui, publier est un acte commercial, et oui, parce qu'ils le font, les auteurs se retrouvent avec des obligations, des à côtés désagréables, des concessions à faire sur des choses qui leur sont personnelles. Mais non, ça ne les oblige pas pour autant à s'adapter aux goûts du public. Et franchement, 90% de ce que je lis à droite et à gauche me laisse penser que quasiment tout le monde est d'accord sur ce sujet.

Il n'est pas antinomique de revendiquer une démarche de création authentique, et d'espérer pourtant qu'on puisse gagner de l'argent grâce à elle. Tout est là.
Et cette revendication est légitime pour tout le monde : l'auteur, le peintre, le chanteur, l'éditeur, l'artisan du coin.

Pour ceux qui réussissent, il n'y a qu'à dire "Bravo !" et se réjouir. Que peut-on souhaiter de mieux à quelqu'un que de pouvoir vivre en portant au monde une voix / voie unique ? Que peut-on souhaiter de mieux pour nous-mêmes que de trouver sans cesse dans les galeries, les librairies, les opéras, des choses nouvelles, uniques, différentes, qui nous surprennent et nous bousculent ? Et pas juste l'écho, sous quinze plumes différentes, quinze toiles, quinze CD, quinze films, de ce que, à cet instant précis, la foule a envie de manger ?

Pour ceux qui échouent, il n'y a qu'à dire "Bien essayé, tant pis." L'échec commercial ou la non-pérénité de l'auteur, de l'artisan, de l'éditeur, ne remettent pas en cause intrinsèquement la valeur de la voie qu'ils ont choisie.

Qu'il y ait des paramètres commerciaux est une évidence. Mais juger la démarche de tout créateur uniquement à l'aune de ces paramètres-là, et à la viabilité de cette démarche, me semble une appréciation faussée.

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Message par Natacha » jeu. nov. 02, 2006 2:04 pm

Patrice a écrit : Je ne sais pas si c'est original, mais c'est là un travers que j'ai pu observer chez quelques adeptes de la branchitude parisienne qui parfois même ne connaissaient pas plus l'anglais que le malgache ou le mandarin.
Tu ne devrais pas généraliser pour autant :)
Il y a des gens qui parlent couramment anglais et français, et pratiquent au quotidien les deux langues dans leur foyer, leurs discussions, leurs écrits et leurs lectures. Le mélange des deux langues devient une habitude, comme celle de passer de l'une à l'autre, employer un mot de l'une ou de l'autre. Tu parles comme ça parce que tu penses comme ça. Que ce soit pour des mots compliqués, des nuances, des injures, des jurons ou des expressions de tous les jours.
Patrice a écrit :Quoi qu'il en soit, cette façon de s'exprimer deviendra vite incompréhensible (encore quelques années avant que la "fashion" ne passe), comme toute mode linguistique.
J'ai de fort doutes à ce sujet, mais peu importe.
Il y a par contre à mon avis des modes qui méritent plus d'agacement que ce genre de choses, à moins d'avoir envie d'être agacé pour rien du matin au soir ^-^ Et puis ce genre d'agacement génère des a-priori dont les effets sont aussi délétères au final que les modes conspuées.

Pour ce que vaut mon avis sur ces choses.

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sandrine.f
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Message par sandrine.f » jeu. nov. 02, 2006 2:35 pm

désolée d'être terre à terre, mais, au vu des comptes de l'Oxymore, avec un résultat d'exploitation qui diminue continument jusqu'à devenir négatif alors que le CA augemente et des créances clients à hauteur de presque 5 mois de CA sur le dernier exercice connu, la cause est entendue sans qu'il ne s'y mêle des considérations artistiques.

Salomé
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Message par Salomé » jeu. nov. 02, 2006 2:43 pm

Proposer son manuscrit à un éditeur dans l'espoir qu'il sera publié, c'est forcément espérer une forme de reconnaissance, et cette reconnaissance se matérialisera - en partie du moins - par sa capacité à se diffuser le plus largement possible. En conséquence, c'est accepter d'entrée de jeu des concessions commerciales. Et même si un certain nombre d'auteurs préféreraient se couper la langue que de l'admettre, c'est un fait.
pas tellement d'accord.
Proposer un manuscrit à un éditeur ne veut pas dire chercher la reconnaissance, et encore moins "le plus largement possible".
C'est plutôt qu'une oeuvre d'art n'existe pas en soi. Elle n'existe que si elle est vue ou lue. Sans public, pas d'art.
Ca ne veut pas dire qu'il en faut beaucoup, ni qu'il faille que ça rapporte du fric (du point de vue de l'auteur, pas de celui de l'éditeur, bien sûr).

Quant au texte de Léa Silhol, je le trouve très bien, et je m'étonne qu'il suscite autant d'agacement.
Je préfère un énervement sain et un peu outré à un discours lénifiant.
Et je trouve qu'elle écrit pas mal et qu'elle est assez drôle.
Et ce qu'elle dit du marché de l'édition en ce moment est malheureusement vrai : toutes les maisons, quel que soit leur type d'édition, ont vu leur chiffres d'affaire se casser la gueule de manière dramatique ces dernières années.

jerome
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Message par jerome » jeu. nov. 02, 2006 2:58 pm

Natacha a écrit : Hum, pour les auteurs également donc ? Publier est une démarche commerciale, si créer est une démarche artistique.
Un artiste dont la production est à contre-courant du marché doit donc la ranger dans sa culotte en attendant des temps plus favorables à son travail ? Ou complaire et s'adapter ?
Je suis assez d'accord avec Eric, je ne vais donc pas m'étaler. Soit tu écris pour toi, et ça reste dans tes placards, soit tu écris avec l'idée d'être publié, et il y a des contraintes d'adaptation au lectorat. Je ne dis pas de chercher les thèmes qui marchent ou d'adopter des modes ou des courants, mais ça signifie soigner son style, bosser ses personnages, chercher un équilibre et lire un peu ce qui a été fait si tu utilises des sujets déjà évoqué par d'autres auteurs.

Donc non, un artiste à contre courant peut le rester, à condition 1- qu'il accepte si personne ne le prend de garder ses textes dans son placard, 2-qu'il ait suffisament bosser son texte pour espérer séduire éditeurs puis lecteurs. Mais je vais y revenir.
Jérôme a écrit : Je viens de lire une interview de Guy Delcourt dans le magazine de BD : Suprême Dimension. C'est le directeur de la maison d'édition du même nom, qui publie aussi bien From Hell, Donjon, Sillage que Star Wars. bon, on pense ce qu'on veut du bonhomme et de ses BD, mais il dit :
"Le métier de l'éditeur est d'être à l'écoute du public et d'y répondre. Il y a là dedans une part de pragmatisme et une part de vocation pour offrir aux lecteurs une typologie d'ouvrages qu'ils vont aimer".
En gros, il se place différemment. Lui dit : je publie ce qui plait aux lecteurs mais en plus je leur propose d'autres titres qui sont suceptibles d'aimer.

Je ne vois pas en quoi il se place différemment ? Il est le "troisième type d'éditeur", donc, qui a déjà été évoqué plusieurs fois. Entre les deux extrêmes. Commercialement plus viable. Plus populaire également.
On adhère ou pas à ce genre de politique selon que ça corresponde, ou pas, à ce qu'on cherche à accomplir en tant qu'éditeur.
Oué, disons que nos propos s'éloignaient de cette troisième voie peu à peu. Surtout, voilà, il a le mérite de le dire clairement.


Natacha a écrit : gutboy a écrit:
C'est un exemple parfait de l'inadéquation entre l'intention et la méthode.
Extraordinaire, mais on comprend mieux la fin d'Oxymore.
Je suis soufflée par la pertinence de cette analyse.
Damned, que n'y avons-nous pensé plus tôt.
Tu as raison, tout est là.
Oué ne confondons pas cette interview et sa démarche éditoriale.


Natacha a écrit : Le truc c'est que si tu parcoures aussi bien les forums, que les blogs, les sites dédiés, les billets d'humeur, tu trouveras partout des auteurs s'exprimant sur le fait que tel éditeur ait voulu corriger leur manuscrit dans un sens qui travestissait leur travail. Et les artistes s'indignent de cela. Et des centaines de gens leur font écho : "Ouais, c'est dégueulasse !"
Et ils ont à mon sens parfaitement raison.
Pas moi. Un auteur qui refuse de corriger son manuscrit, chez la plupart des éditeurs que je connais, c'est niet. C'est faux de croire que parce que tu écris sur le poulet et que dindon est à la mode, on va essayer de faire ton texte de dindon. Ca arrive, mais en gros, si tu parles du poulet et que ça interesse pas l'éditeur, il ne prendra pas du temps pour te faire changer du tout au tout. Y'a assez de manuscrits et de nouvelles à côté pour s'épargner ce genre de boulot.

Par contre le regard d'un éditeur sert normalement à bonnifier ton texte. A l'équilibrer, virer les longueurs que tu n'aurais pas vu, arranger la fin s'il y a besoin, recadrer ton travail, corriger les fautes d'orthographes s'il en reste, limiter les tournures de phrases un peu trop lourde. C'est un vrai boulot d'interrogation sur le texte avec cette question "comment le rendre meilleur" plutôt que "comment mieux le vendre". Peut-être qu'il y a des éditeurs qui ont les chiffres qui défilent en parcourant un texte. Peut-être. Mais à discuter avec les uns et les autres, je n'en ai pas particulièrement l'impression. Même si évidemment, leurs réflexions portent aussi à un moment ou un autre sur les ventes.

Natacha a écrit : Des concessions, il y en a plein d'autres à faire quand on accepte d'entrer dans l'arène. Il faut accepter de se livrer à la presse. Il faut accepter de donner des interviews. Il faut accepter que dans n'importe quelle convention, les visiteurs se croient autorisés à flasher ta gueule avec leur kodac ou leur téléphone portable, y compris quand tu n'es *pas* en représentation, mais juste en train de boire un café avec tes potes au bar d'en face.
Et ce n'est pas rien, loin de là. J'ai vu beaucoup d'auteurs qui vivaient très mal cet aspect-là, corolaire inévitable du moment où tu passes dans la peau de "l'artiste publié". Mais ils les acceptent, qu'ils le vivent bien ou mal, autant que faire se peut
Eh, la SF, c'est pas le star système non plus. Ca fait un bon bout de temps que je fréquente les conventions et j'ai vu peu d'agression de ce type. Je dis pas qu'il n'y a pas des lourdaux ou des réactions agaçantes. Mais pour l'heure, on est heureusement ou malheureusement épargné par le système. Prenons déjà le cas de la BD. Là oui je connais des dessinateurs qui refusent de faire des dédicaces. Parce qu'il y a des queues longues comme le bras, parce qu'ils sont sollicités de toute part, parce que certains lecteurs viennent juste pour la signature et revendre l'album plus tard plus cher sur le net...
Natacha a écrit : Donc, oui, publier est un acte commercial, et oui, parce qu'ils le font, les auteurs se retrouvent avec des obligations, des à côtés désagréables, des concessions à faire sur des choses qui leur sont personnelles. Mais non, ça ne les oblige pas pour autant à s'adapter aux goûts du public.

(...)
Pour ceux qui réussissent, il n'y a qu'à dire "Bravo !" et se réjouir. Que peut-on souhaiter de mieux à quelqu'un que de pouvoir vivre en portant au monde une voix / voie unique ? Que peut-on souhaiter de mieux pour nous-mêmes que de trouver sans cesse dans les galeries, les librairies, les opéras, des choses nouvelles, uniques, différentes, qui nous surprennent et nous bousculent ? Et pas juste l'écho, sous quinze plumes différentes, quinze toiles, quinze CD, quinze films, de ce que, à cet instant précis, la foule a envie de manger ?

Pour ceux qui échouent, il n'y a qu'à dire "Bien essayé, tant pis." L'échec commercial ou la non-pérénité de l'auteur, de l'artisan, de l'éditeur, ne remettent pas en cause intrinsèquement la valeur de la voie qu'ils ont choisie.
Oui on est d'accord. N'empêche qu'il ne faut pas trop jouer non plus les poètes maudits.
Natacha a écrit : Qu'il y ait des paramètres commerciaux est une évidence. Mais juger la démarche de tout créateur uniquement à l'aune de ces paramètres-là, et à la viabilité de cette démarche, me semble une appréciation faussée.
Evidemment. Sinon Werber et Levy seraient les meilleurs écrivains de la Terre.

Natacha a écrit : Elle écrit déjà beaucoup de choses en anglais, de fait. Et au vu de l'expérience récente des trois jours passés à corriger la traduction d'un texte à paraître outre-mer, faite par la traductrice que lui avait allouée Delia Sherman, je l'ai entendue dire, oui, que ça aurait été plus vite si elle l'avait directement fait elle-même ou écrite en anglais.
Mais bon, après il faudrait retraduire vers le français, donc le problème de traduction se pose à tous les étages finalement.
Ca me rappelle un débat sur le forum ;-)
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Message par jerome » jeu. nov. 02, 2006 3:01 pm

Salomé a écrit : pas tellement d'accord.
Proposer un manuscrit à un éditeur ne veut pas dire chercher la reconnaissance, et encore moins "le plus largement possible".
C'est plutôt qu'une oeuvre d'art n'existe pas en soi. Elle n'existe que si elle est vue ou lue. Sans public, pas d'art.
Ca ne veut pas dire qu'il en faut beaucoup, ni qu'il faille que ça rapporte du fric (du point de vue de l'auteur, pas de celui de l'éditeur, bien sûr).

Oui si tu considères que ce que tu écris est de l'art. Je connais des gens qui gardent bien au chaud dans leurs placards leurs nouvelles ou leurs romans. De temps en temps ils les font lire à des potes et c'est suffisant. Vouloir en faire un livre, ça signifie déjà croire qu'on est assez bon pour le pouvoir.
.
Salomé a écrit :
Quant au texte de Léa Silhol, je le trouve très bien, et je m'étonne qu'il suscite autant d'agacement.
Je crois que c'est surtout le passage où elle interpèlle les lecteurs qui fait réagir. Après, on a un peu dévié :-)
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Message par Eric » jeu. nov. 02, 2006 3:10 pm

Natacha a écrit :Le truc c'est que si tu parcoures aussi bien les forums, que les blogs, les sites dédiés, les billets d'humeur, tu trouveras partout des auteurs s'exprimant sur le fait que tel éditeur ait voulu corriger leur manuscrit dans un sens qui travestissait leur travail. Et les artistes s'indignent de cela. Et des centaines de gens leur font écho : "Ouais, c'est dégueulasse !"
Et ils ont à mon sens parfaitement raison.
Les artistes sont en droit, intégralement, de revendiquer une démarche personnelle et de ne pas transiger dans l'expression de leur art juste pour pouvoir être publiés.
Mais pourquoi est-ce que la direction éditoriale ne doit être vue que comme une trahison ? Evidemment pour les auteurs toucher un tant soit peu à son texte relève du crime de lèse-majesté, mais combien de livres ont été rendus meilleurs le regard totalement extérieur d'un éditeur compétent.

Si tu proposes ton manuscrit c'est que déjà, tu penses qu'il a des chances de plaire à un public quelconque. C'est que déjà tu l'as écris pour quelqu'un. Dès cet instant tu es dans le commerce. Pas nécessairement dans le mercantilisme, mais dans le commerce.
"Ueeuuggthhhg", laissa échapper Caity. Ce qui aurait pu vouloir dire n’importe quoi.

Salomé
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Message par Salomé » jeu. nov. 02, 2006 3:22 pm

Vouloir en faire un livre, ça signifie déjà croire qu'on est assez bon pour le pouvoir.
Oui. Mais penser qu'on est bon ne veut pas dire qu'on pense tenir un best seller. Je ne crois pas.

La conversation sur le rapport auteur/éditeur me fait penser à Hervé Guibert se foutant de la gueule de Jérôme Lindon, créateur des éditions de Minuit :
"Conseil de l'éditeur : écrire un chef-d'oeuvre".

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Natacha
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Message par Natacha » jeu. nov. 02, 2006 3:29 pm

Eric a écrit : Mais pourquoi est-ce que la direction éditoriale ne doit être vue que comme une trahison ? Evidemment pour les auteurs toucher un tant soit peu à son texte relève du crime de lèse-majesté, mais combien de livres ont été rendus meilleurs le regard totalement extérieur d'un éditeur compétent.
Hey, ce n'est pas ce que je dis !
Il y a des éditeurs, oui, bien sûr, qui respectent le travail des auteurs, *encore heureux*. Encore faut-il pour ça, comme pré-requis, qu'ils ne cherchent pas justement à satisfaire les goûts du public, mais à permettre à l'auteur de sortir son livre sous la forme la plus parfaite possible.
Eric a écrit :Si tu proposes ton manuscrit c'est que déjà, tu penses qu'il a des chances de plaire à un public quelconque. C'est que déjà tu l'as écris pour quelqu'un. Dès cet instant tu es dans le commerce. Pas nécessairement dans le mercantilisme, mais dans le commerce.
Non Eric, tu te trompes. Je t'assure que tu te trompes. Pour avoir écouté pendant sept ans des auteurs, avoir "corrigé" des manuscrits, avoir reçu des confidences. Et parce que je continue à cotoyer certains d'entre eux au quotidien. On n'écrit pas, nécessairement, pour quelqu'un. On écrit pour soi. Et dans l'acte de l'écriture, les auteurs (les vrais auteurs, ceux qui sont transcendés par leur art, par opposition peut-être à ceux qui envisagent la publication avant même d'envisager l'écriture) n'écrivent pas pour quelqu'un d'autre.
L'épreuve du commerce, le jugement du "vendable ou pas", ils l'éprouvent quand ils sont dans l'arène. Et même "vendus", et même "publiés", ils sont rarement compris pour ce qu'ils voulaient véritablement exprimer dans leur travail.

Natacha

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