Nébal a écrit :
4° Mais ça ne m'empêchera pas de parler du style dans ces articles-là. Parce que c'est un élément indispensable à prendre en compte, tout simplement. L'exclure de l'équation, je maintiens que c'est pratiquer le nivellement par le bas. Et ça, en tant que lecteur, je n'en veux pas. Moi, en tant que lecteur, quand je lis une critique, j'espère bien qu'on va me toucher quelques mots du style de l'auteur, s'il a son importance dans le résultat final. Bien sûr, si la critique en question porte sur un roman de gare, de pur divertissement, le style, j'y prêterai moins d'attention, voire pas du tout. Mais quelqu'un qui me parlerait de, disons, Pierre Michon sans me dire un mot de sa plume, m'est avis qu'il passerait à côté de quelque chose de vaguement important...
Combien de fois faudra-t-il le dire ? Quand tu parles de "style", c'est loin d'être une évidence. Le fait de citer Pierre Michon est révélateur, tu apprécies UN style, pas "le style" en général. Des tas d'auteurs sont de très bons, voire de très grands écrivains sans écrire comme Pierre Michon, et ils savent écrire.
Le style, je le répète, n'est pas un critère pertinent.
Les "romans de gare" ONT un style, les Harlequin aussi. Ils peuvent ne pas te plaire, mais ils ont un style, et même qu'on fait bien attention à ce que rien ne vienne modifier ce style.
Certains auteurs ne veulent pas qu'on voit quoi que ce soit qui ressemble à un effet de style, ils veulent être transparents. C'est un effort d'écriture, une volonté propre, et ça fait d'eux tout autant des écrivains que ceux qui ont un style très marqué.
Alors dire "c'est bien/mal écrit", ça n'a pas de valeur objective. Comme t'y invites Lensman, regarde un peu l'histoire littéraire, regarde combien d'auteurs aujourd'hui dans les manuels étaient critiqués pour leur mauvais style.
Ce terme même de "style" n'a pas de contenu qui fasse l'unanimité. Tout le monde est capable de savoir à quoi correspond le terme "personnage" ou "intrigue", mais le "style", c'est un vaste flou. Et c'est au nom de ce flou que certains disent "mais Houellebecq, c'est mal écrit" ou "Djian, c'est mal écrit". Tout ça ne repose que sur du vent.
Et quand on regarde les oeuvres marquantes, en Science-fiction, il est rapidement évident que ce n'est pas le style qui rentre en ligne de compte, entre Van Vogt, Bradbury, Asimov ou Silverberg. La diversité des auteurs est grande, et l'attrait du lecteur se fonde sur des critères variés. Non, en SF, on peut très bien faire une critique sans se préoccuper du style, ça ne pose aucun problème. (J'ai encore eu trois étudiants cette année qui m'ont fait des fiches de lecture sur Hypérion, Martiens Go Home et Fahrenheit 451, ils ont aimé les ouvrages, et aucun n'a évoqué le style.)