Du sense of wonder à la SF métaphysique
Modérateurs : Eric, jerome, Jean, Travis, Charlotte, tom, marie.m
-
- Messages : 240
- Enregistré le : mer. nov. 14, 2007 10:59 pm
Au bout de 400 pages d'une lecture qui, dans le fond, est très intéressante, j'aimerais proposer une synthèse qui n'a d'autre ambition que de traduire ma compréhension du débat. Pour en faciliter la lecture, je réduis les positions en présence à deux termes : Serge et Roland.
- la position de Serge, davantage que métaphysique, me semble être influencée par l'idéalisme, d'inspiration européenne, plus précisément franco-allemande.
- la position de Roland me semble relever de l'empirisme anglo-saxon.
Chacun reconnait que la science-fiction est un questionnement sur l'action et la condition humaine dans le temps.
-pour Serge, le questionnement central de la SF serait idéaliste, motivé par des questionnements abstraits.
- pour Roland, le questionnement central de la SF serait empiriste, motivé par des questionnements concrets.
- pour Serge le recours à des situations concrètes serait pour la SF éventuellement un moyen, en vue d'aborder ce questionnement abstrait considéré comme fin en soi.
- pour Roland, le recours à des situations concrètes serait pour la SF une fin en soi, le questionnement abstrait étant éventuellement un moyen.
Serge reconnaît volontiers qu'il y a des oeuvres majeures de SF sans véritable questionnement idéaliste, mais que l'essence du genre est idéaliste.
Roland reconnaît volontiers qu'il y a des oeuvres majeures de SF sans véritable questionnement empiriste, mais que l'essence du genre est empiriste.
Bref, nous sommes en présence de deux lectures que l'on jugera soit antagonistes, soit complémentaires.
- la position de Serge, davantage que métaphysique, me semble être influencée par l'idéalisme, d'inspiration européenne, plus précisément franco-allemande.
- la position de Roland me semble relever de l'empirisme anglo-saxon.
Chacun reconnait que la science-fiction est un questionnement sur l'action et la condition humaine dans le temps.
-pour Serge, le questionnement central de la SF serait idéaliste, motivé par des questionnements abstraits.
- pour Roland, le questionnement central de la SF serait empiriste, motivé par des questionnements concrets.
- pour Serge le recours à des situations concrètes serait pour la SF éventuellement un moyen, en vue d'aborder ce questionnement abstrait considéré comme fin en soi.
- pour Roland, le recours à des situations concrètes serait pour la SF une fin en soi, le questionnement abstrait étant éventuellement un moyen.
Serge reconnaît volontiers qu'il y a des oeuvres majeures de SF sans véritable questionnement idéaliste, mais que l'essence du genre est idéaliste.
Roland reconnaît volontiers qu'il y a des oeuvres majeures de SF sans véritable questionnement empiriste, mais que l'essence du genre est empiriste.
Bref, nous sommes en présence de deux lectures que l'on jugera soit antagonistes, soit complémentaires.
- bormandg
- Messages : 11906
- Enregistré le : lun. févr. 12, 2007 2:56 pm
- Localisation : Vanves (300 m de Paris)
- Contact :
@Xavier. Et quid de ceux qui, comme moi, voient les deux façons d'écrire de la SF, reconnaissent parfaitement l'existence d'une interrogation métaphysique fréquente en SF (mais aussi présente hors SF), mais ne voient absolument pas dans ce fait un motif de déni et, encore moins, dans le redémarrage de la philo métaphysique un motif de voir diminuer le déni?
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."
-
- Messages : 240
- Enregistré le : mer. nov. 14, 2007 10:59 pm
Il me semble que, si les deux positions sont recevables en soi, mais pas en même temps et sous le même rapport, alors effectivement la question du deni n'a plus lieu d'être.bormandg a écrit :@Xavier. Et quid de ceux qui, comme moi, voient les deux façons d'écrire de la SF, reconnaissent parfaitement l'existence d'une interrogation métaphysique fréquente en SF (mais aussi présente hors SF), mais ne voient absolument pas dans ce fait un motif de déni et, encore moins, dans le redémarrage de la philo métaphysique un motif de voir diminuer le déni?
- bormandg
- Messages : 11906
- Enregistré le : lun. févr. 12, 2007 2:56 pm
- Localisation : Vanves (300 m de Paris)
- Contact :
Ce que je veux dire, c'est que la thèse M de Serge porte, d'abord, sur la responsabilité qu'il attribuerait à la présence de métaphysique dans la SF comme source du déni; et que la plus grande partie de la contestation de cette thèse a porté non, comme faisait semblant de le croire Serge, sur la présence de thèmes métaphysiques en SF, mais sur leur rôle dans l'apparition et, éventuellement, la disparition, du déni.Xavier Mauméjean a écrit :Il me semble que, si les deux positions sont recevables en soi, mais pas en même temps et sous le même rapport, alors effectivement la question du deni n'a plus lieu d'être.bormandg a écrit :@Xavier. Et quid de ceux qui, comme moi, voient les deux façons d'écrire de la SF, reconnaissent parfaitement l'existence d'une interrogation métaphysique fréquente en SF (mais aussi présente hors SF), mais ne voient absolument pas dans ce fait un motif de déni et, encore moins, dans le redémarrage de la philo métaphysique un motif de voir diminuer le déni?
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."
-
- Messages : 240
- Enregistré le : mer. nov. 14, 2007 10:59 pm
Je n'essaye pas de questionner les positions, juste de les définir.bormandg a écrit :Ce que je veux dire, c'est que la thèse M de Serge porte, d'abord, sur la responsabilité qu'il attribuerait à la présence de métaphysique dans la SF comme source du déni; et que la plus grande partie de la contestation de cette thèse a porté non, comme faisait semblant de le croire Serge, sur la présence de thèmes métaphysiques en SF, mais sur leur rôle dans l'apparition et, éventuellement, la disparition, du déni.Xavier Mauméjean a écrit :Il me semble que, si les deux positions sont recevables en soi, mais pas en même temps et sous le même rapport, alors effectivement la question du deni n'a plus lieu d'être.bormandg a écrit :@Xavier. Et quid de ceux qui, comme moi, voient les deux façons d'écrire de la SF, reconnaissent parfaitement l'existence d'une interrogation métaphysique fréquente en SF (mais aussi présente hors SF), mais ne voient absolument pas dans ce fait un motif de déni et, encore moins, dans le redémarrage de la philo métaphysique un motif de voir diminuer le déni?
- bormandg
- Messages : 11906
- Enregistré le : lun. févr. 12, 2007 2:56 pm
- Localisation : Vanves (300 m de Paris)
- Contact :
Ben oui, mais entre tous les intervenants, réduire l'enfilade aux premiers échanges entre Serge et Roland, ça ne résume, au mieux, que les trente premières pages.Xavier Mauméjean a écrit :Je n'essaye pas de questionner les positions, juste de les définir.bormandg a écrit :Ce que je veux dire, c'est que la thèse M de Serge porte, d'abord, sur la responsabilité qu'il attribuerait à la présence de métaphysique dans la SF comme source du déni; et que la plus grande partie de la contestation de cette thèse a porté non, comme faisait semblant de le croire Serge, sur la présence de thèmes métaphysiques en SF, mais sur leur rôle dans l'apparition et, éventuellement, la disparition, du déni.Xavier Mauméjean a écrit :Il me semble que, si les deux positions sont recevables en soi, mais pas en même temps et sous le même rapport, alors effectivement la question du deni n'a plus lieu d'être.bormandg a écrit :@Xavier. Et quid de ceux qui, comme moi, voient les deux façons d'écrire de la SF, reconnaissent parfaitement l'existence d'une interrogation métaphysique fréquente en SF (mais aussi présente hors SF), mais ne voient absolument pas dans ce fait un motif de déni et, encore moins, dans le redémarrage de la philo métaphysique un motif de voir diminuer le déni?
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."
- Roland C. Wagner
- Messages : 3588
- Enregistré le : jeu. mars 23, 2006 11:47 am
Moi, ça pourrait m'aller, à la louche.Xavier Mauméjean a écrit :Au bout de 400 pages d'une lecture qui, dans le fond, est très intéressante, j'aimerais proposer une synthèse qui n'a d'autre ambition que de traduire ma compréhension du débat. Pour en faciliter la lecture, je réduis les positions en présence à deux termes : Serge et Roland.
- la position de Serge, davantage que métaphysique, me semble être influencée par l'idéalisme, d'inspiration européenne, plus précisément franco-allemande.
- la position de Roland me semble relever de l'empirisme anglo-saxon.
Chacun reconnait que la science-fiction est un questionnement sur l'action et la condition humaine dans le temps.
-pour Serge, le questionnement central de la SF serait idéaliste, motivé par des questionnements abstraits.
- pour Roland, le questionnement central de la SF serait empiriste, motivé par des questionnements concrets.
- pour Serge le recours à des situations concrètes serait pour la SF éventuellement un moyen, en vue d'aborder ce questionnement abstrait considéré comme fin en soi.
- pour Roland, le recours à des situations concrètes serait pour la SF une fin en soi, le questionnement abstrait étant éventuellement un moyen.
Serge reconnaît volontiers qu'il y a des oeuvres majeures de SF sans véritable questionnement idéaliste, mais que l'essence du genre est idéaliste.
Roland reconnaît volontiers qu'il y a des oeuvres majeures de SF sans véritable questionnement empiriste, mais que l'essence du genre est empiriste.
Bref, nous sommes en présence de deux lectures que l'on jugera soit antagonistes, soit complémentaires.
Et je ne vais certainement pas réfuter l'influence anglo-saxonne, qui est à la base de ma réflexion, et pas seulement sur le genre. En tant qu'auteur, je suis clairement plus proche de quelqu'un comme Norman Spinrad que de Bernard Werber.
J'ajouterai cependant ceci :
- la position de M. Serge Lehman est classique, disons gurdjieffienne
- ma position est plus moderne, dis post-koestlerienne
« Regarde vers Lorient / Là tu trouveras la sagesse. » (Les Cravates à Pois)
الكاتب يكتب
الكاتب يكتب
-
- Messages : 1595
- Enregistré le : ven. oct. 06, 2006 6:06 pm
- Localisation : En face de la Fac Jussieu
Bien que je perde du temps et le vôtre au lieu de poursuivre ma réflexion de fond et accessoirement de répondre à Shalmeneser qui me semble bien naïf ou bien attardé, je voudrais évoquer le bas de la page une du Monde des Livres aujourd'hui qui m'a fait tomber sur le cul et qui n'est pas sans rapport avec notre débat.
À gauche, une descente en flammes qui semble entièrement justifiée d'un thriller bidon publié néanmoins au Seuil, La Route de Gakona, dont l'auteur prend soint de préciser "Science-fiction? pas du tout". Alors que manifestement c'en est, de la mauvaise et mal documentée d'accord, versant écolo-espionnnage, sur les méchants savants qui détruisent l'environnement à coup d'ondes électro-magnétiques. Mânes de Tesla, révoltez-vous. Et j'ai déjà lu ça dans Radio-terreur, immortel chef d'œuvre que, certes, seuls Versins, Oncle Joe et moi avons lu.
Gakona, on aimerait que ce ne soit pas de la sf, en effet, mais hélas… C'est comme le dernier Marc Lévy. Plus d'un million d'exemplaires, à en croire le Figaro.
À droite, une pub pour Des corps en silence, de Valentine Goby que je ne résiste pas à citer in extenso malgré le gaspillage de mon temps et de bande passante:
"Elle imagine possible un mari fidèle, pour ça elle est prête à faire sa fille des rues, sa prostituée, sa courtisane. Tout plutôt que ça: qu'il couche ailleurs. Elle dit tout, elle pense tout, elle l'aime à se tuer."
À deux siècles d'écart, deux femmes en résistance contre la fin du désir amoureux.
C'est Gallimard, en blanche. (Il est vrai que Valentine a l'air d'une jolie blonde, un peu fadasse mais pas mal.)
Harlequin n'aurait pas osé.
Admirable contraste. Où est la science-fiction?
Le Seuil? Gallimard?
Nous vivons une époque formidable.
Et tout ça, comme je disais au départ, n'est pas si étranger à notre réflexion.
À gauche, une descente en flammes qui semble entièrement justifiée d'un thriller bidon publié néanmoins au Seuil, La Route de Gakona, dont l'auteur prend soint de préciser "Science-fiction? pas du tout". Alors que manifestement c'en est, de la mauvaise et mal documentée d'accord, versant écolo-espionnnage, sur les méchants savants qui détruisent l'environnement à coup d'ondes électro-magnétiques. Mânes de Tesla, révoltez-vous. Et j'ai déjà lu ça dans Radio-terreur, immortel chef d'œuvre que, certes, seuls Versins, Oncle Joe et moi avons lu.
Gakona, on aimerait que ce ne soit pas de la sf, en effet, mais hélas… C'est comme le dernier Marc Lévy. Plus d'un million d'exemplaires, à en croire le Figaro.
À droite, une pub pour Des corps en silence, de Valentine Goby que je ne résiste pas à citer in extenso malgré le gaspillage de mon temps et de bande passante:
"Elle imagine possible un mari fidèle, pour ça elle est prête à faire sa fille des rues, sa prostituée, sa courtisane. Tout plutôt que ça: qu'il couche ailleurs. Elle dit tout, elle pense tout, elle l'aime à se tuer."
À deux siècles d'écart, deux femmes en résistance contre la fin du désir amoureux.
C'est Gallimard, en blanche. (Il est vrai que Valentine a l'air d'une jolie blonde, un peu fadasse mais pas mal.)
Harlequin n'aurait pas osé.
Admirable contraste. Où est la science-fiction?
Le Seuil? Gallimard?
Nous vivons une époque formidable.
Et tout ça, comme je disais au départ, n'est pas si étranger à notre réflexion.
Modifié en dernier par Gérard Klein le ven. janv. 15, 2010 2:53 pm, modifié 2 fois.
Mon immortalité est provisoire.
-
- Messages : 361
- Enregistré le : jeu. oct. 11, 2007 2:11 pm
- Contact :
Gérard Klein a écrit :Bien que je perde du temps et le vôtre au lieu de poursuivre ma réflexion de fond et accessoirement de répondre à Shalmeneser qui me semble bien naïf ou bien attardé,

Je te remercie de me laisser le choix entre les deux, dans ta grande magnanimité.
François - http://malioutine.overblog.com/
- dracosolis
- Messages : 7417
- Enregistré le : mar. févr. 07, 2006 8:08 pm
- Contact :
"... la présence de métaphysique dans la SF comme source du déni..." ?bormandg a écrit :Ce que je veux dire, c'est que la thèse M de Serge porte, d'abord, sur la responsabilité qu'il attribuerait à la présence de métaphysique dans la SF comme source du déni; et que la plus grande partie de la contestation de cette thèse a porté non, comme faisait semblant de le croire Serge, sur la présence de thèmes métaphysiques en SF, mais sur leur rôle dans l'apparition et, éventuellement, la disparition, du déni.
Je crois que Lem a, constamment, précisé "... UNE DES sourceS..."
Et il me semble que la contestation a surtout porté sur le fait que le caractère explicitement métaphysique (assumée par l'auteur) d'une partie du corpus (celui qui avait pu être un de éléments porteurs du rejet) était (à l'époque de ce rejet) positionné à l'interface SF-ésotérisme-occultisme.
Mais je peux me tromper...
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.
En tout cas, c'est de la conjecture… Et il est intéressant de noter que ce n'est pas l'auteur, MAIS le personnage qui imagine. Il y a là un vertige métaphysique authentiquement bluffant, quant au statut de l'univers où on se place (pour ne rien dire de l'interrogation posée par le terme "possible").Gérard Klein a écrit : "Elle imagine possible un mari fidèle
La grande force de la littérature française, dans ses élans les plus audacieux, c'est de ne pas faire appel à la quincaillerie de la SF. Il y a bien longtemps que le déni est terminé. Il n'a, en fait, jamais existé: la littérature française était déjà passé, depuis longtemps, à un niveau supérieur (un progrès littéraire, même si le terme de "lit..", pardon, le terme de "progrès" est sujet à discussion, je l'admets…). Et on est là à se plaindre!
Oncle Joe
- Eons
- Messages : 6338
- Enregistré le : sam. févr. 17, 2007 6:49 pm
- Localisation : Le cœur de Flandre
- Contact :
Et quid des romans de SF dont l'auteur voulait simplement raconter une histoire ?Xavier Mauméjean a écrit :Chacun reconnait que la science-fiction est un questionnement sur l'action et la condition humaine dans le temps.
-pour Serge, le questionnement central de la SF serait idéaliste, motivé par des questionnements abstraits.
- pour Roland, le questionnement central de la SF serait empiriste, motivé par des questionnements concrets.
Les beaux livres, c’est aussi par ici : www.eons.fr
dans la mesure où il considère que c'est celle qui explique que la réfutation des autres n'ait jamais marché, j'aurais tendance à penser que tu te trompes. Mais comme des fois, c'est pas évident de suivre le fil de la pensée de Serge, il se peut que ce soit moi...MF a écrit :
Je crois que Lem a, constamment, précisé "... UNE DES sourceS..."
Mais je peux me tromper...
"Ils ne sont grands que parce que vous êtes à genoux"