Un fait culturel n'est pas un fait ?Roland C. Wagner a écrit :[Dieu est un fait culturel, pas un fait
Du sense of wonder à la SF métaphysique
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Je ne comprends pas ton exemple, à cause de cette phrase:Lem a écrit :tout est envisageable sauf la surnature = Si la surnature se définit comme la sphère des phénomènes dont les causes et les circonstances échappent à l'étude scientifique et ne peuvent être reproduits à volonté (par exemple, l'invocation d'un démon), je m'interdis de la désigner comme la cause de mes observations car cette cause serait, par essence, invérifiable.Lensman a écrit :Et quelle différence fais-tu entre ces deux propositions? Peux-tu donner un exemple?Lem a écrit :Le matérialisme ne postule pas que tout est envisageable sauf la surnature ; il postule que rien n'est envisageable sauf la matière (d'où son nom). Il faut bien qu'on se mette d'accord sur le vocabulaire.
rien n'est envisageable sauf la matière = tout les phénomènes que je peux observer sont causés par la matière.
"la sphère des phénomènes dont les causes et les circonstances échappent à l'étude scientifique et ne peuvent être reproduits à volonté (par exemple, l'invocation d'un démon)"
Comment peut-on parler de phénomènes, si on ne parvient pas à les observer? (ne pas confondre le fait de l'observation d'un personnage en train d'invoquer un démon, et le fait qu'un démon est effectivement invoqué).
oncle Joe
- Roland C. Wagner
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Les "dieux transcendants", en SF, il faut se lever tôt le matin pour les trouver, et donner ce statut à Ubik, pourquoi pas? Mais on peut ne pas donner d'interprétation, ou en imaginer des différentes (les lecteurs de SF ont souvent de l'imagination, autant que les auteurs... en moins talentueux...)Lem a écrit :Moi non plus. C'est toi qui a écrit : "rien ne peut être divin dans le monde de la SF, qui est matérialiste".Lensman a écrit :Par ailleurs, je ne vois pas quel rapport cela a avec tes histoires de dieux, de mythes, etc.
Maintenant que le malentendu est dissipé, j'imagine que tu voulais en fait écrire : "rien ne peut être divin dans le monde de la sf, qui s'efforce d'être plausible scientifiquement". Et je réponds : le fait que la sf ait consacré un grand nombre d'œuvres, dont certaines absolument déterminantes pour l'histoire du genre, à inventer des dieux plausibles scientifiquement (et aussi quelques dieux transcendants, comme Ubik) mais conservant la plupart de leurs attributs "classiques" est un trait de fonctionnement qui, comme l'a remarqué GK, la distingue aussi du reste de la littérature et mériterait d'être étudié.
"Dieux plausible scientifiquement"; Pour moi, ce ne sont pas des "dieux plausibles scientifiquement", mes des hommes ou des extraterrestres, ou tout autre créature naturelle ou artificielle, auxquels on prête des attributs qui ressemblent (je dis bien ressemblent) à ceux que l'on attribue à Dieu (ou au dieux, mais bon, on va rester dans le monothéisme sur cet exemple). Par exemple, l'immortalité. Sauf que l'immortalité divine (pour moi en tout cas), c'est un truc absolu, qui se moque, par exemple, de la durée de vie de l'univers (Dieu est au-dessus de ces problèmes de durée, de taille, etc). En SF, l'immortalité, elle dure le temps de la durée de l'univers, dans le modèle que l'on accepte scientifiquement (qui peut changer, selon les données que l'on récolte, c'est cette activité qui s'appelle la science).
L'emploi du terme dieu, dans la, c'est comme ça que je le vois, en général. Et dans Farmer en particulier.
Après, il y a des oeuvres de Fantasy, qui peuvent être étonnantes, du genre "En remorquant Jéhovah", où là on s'inscrit dans une donnée religieuse en faisant mine de la prendre à moitié au sérieux. C'est très intéressant et ça demande à être étudié avec soin, mais là, on est en train de parler de science-fiction. J'ai donné cet exemple pour montrer qu'il y a des auteur qui, lorsqu'il parlent de "dieu", font bien allusion à un tradition religieuse, et pas à une espèce de concept vague.
Puisque on veut être précis, appelons un dieu, un dieu. quand on dit "les dieux du stades", en parlant de sportifs, ce ne sont pas des dieux, le "dieu du bricolage", pour Leroy-Merlin, ce n'est pas une entreprise divine, et "les hommes-dieux" de Farmer, ce ne sont pas des dieux. Ce sont des métaphores. Elles sont employées partout, massivement, dans tous les domaines.
Oncle Joe
Modifié en dernier par Lensman le jeu. nov. 19, 2009 8:20 pm, modifié 1 fois.
Navire > La venue à l'existence (culturelle) du Dieu des chrétiens, pour ne prendre que cet exemple, le basculement de l'idéologie impériale romaine en sa faveur, les milliiers d'édifices qui lui sont consacrés, les millions de livres écrits à son sujet, les guerres de religion livrées en son nom, l'aventure intellectuelle violente qu'a représenté sa répudiation, ne forment pas un fait ?
Qu'appelles-tu un fait ? Glisser sur le parquet le matin ?
Atv'> Je suis mal équipé pour aborder l'auteur dont tu parles. Je n'ai lu que son premier roman qui n'est qu'archaïque, pas métaphysique ; tous ceux que j'ai essayés ensuite m'ont échappé dès les premières pages mais j'imagine d'après leurs titres qu'il a des ambitions dans cette direction. Cet auteur prend d'ailleurs souvent soin de signaler sa filiation avec Dick. Cela contribue-t-il à son succès ? Si je comprends bien sa stratégie de com, sans aucun doute mais il me semble plus sur le terrain de quelqu'un comme Paolo Coello – chacun de nous porte un dieu, etc. Plus de la mystique populaire que de la métaphysique. Mais encore une fois : ayant échoué sur tous ses livres sauf les Fourmis, je ne peux pas juger le fond et n'en ai d'ailleurs pas l'intention (ma conviction profonde, c'est que dans son cas, le fond, s'il existe, n'excède pas la com, comme dans ces films dont la bande annonce contient tout le propos).
Dans la préface de l'anthologie, j'ai souligné qu'une rupture s'était produite au début des années 90 : l'essai de Guy Lardreau a signalé le monopole de la SF sur les questions métaphysiques pour le regretter : en d'autres termes, a signalé la possibilité d'un retour de ces problématiques sur le devant de la scène intellectuelle. Ce n'est évidemment pas Lardreau qui a déclenché le phénomène mais le simple fait qu'il l'ait entrevu me semble significatif et l'adjectif "métaphysique" s'est graduellement remis à circuler, un peu en dépit du bon sens comme le remarque Frédéric Nef dans son propre essai, mais plus exclusivement de façon négative. Dans les années qui ont suivi, on a vu l'auteur dont tu parles s'emparer de ces sujets. On a vu apparaître Dantec. On a vu apparaître Houellebecq (dont Les particules élémentaires commencent par une déclaration générale sur les révolutions métaphysiques). On a vu peu à peu Dick passer en collection blanche. A peu près au même moment, je me souviens avoir entendu un intellectuel (Touraine, peut-être ?) dire quelque chose comme : "jusqu'à il y a peu, quand je parlais métaphysique et religion à mes étudiants, ils riaient ou bâillaient ; ce qu'ils voulaient, c'était de la politique. Maintenant, c'est l'inverse." Le propos essayait, si je me souviens bien, d'évaluer le changement d'ambiance consécutif à la fin de l'URSS, la fin de la dernière grande bataille idéologique du XXème siècle. Tout ceci n'a aucune valeur objective et ne prouve rien (j'ai sans doute retenu ce qui m'arrange) mais suggère qu'à un moment, pendant les années 90, quelque chose est redevenu possible dans ce domaine en ce qui concerne la production intellectuelle et littéraire.
Roland pendant que j'écris > Je ne botte pas en touche, je ne comprends absolument pas ce que signifie ta remarque. Pour moi, un fait culturel est un fait. Ta proposition me semble une contradiction dans les termes, aussi absurde que si tu écrivais "un fait scientifique n'est pas un fait". Explique.
Qu'appelles-tu un fait ? Glisser sur le parquet le matin ?
Atv'> Je suis mal équipé pour aborder l'auteur dont tu parles. Je n'ai lu que son premier roman qui n'est qu'archaïque, pas métaphysique ; tous ceux que j'ai essayés ensuite m'ont échappé dès les premières pages mais j'imagine d'après leurs titres qu'il a des ambitions dans cette direction. Cet auteur prend d'ailleurs souvent soin de signaler sa filiation avec Dick. Cela contribue-t-il à son succès ? Si je comprends bien sa stratégie de com, sans aucun doute mais il me semble plus sur le terrain de quelqu'un comme Paolo Coello – chacun de nous porte un dieu, etc. Plus de la mystique populaire que de la métaphysique. Mais encore une fois : ayant échoué sur tous ses livres sauf les Fourmis, je ne peux pas juger le fond et n'en ai d'ailleurs pas l'intention (ma conviction profonde, c'est que dans son cas, le fond, s'il existe, n'excède pas la com, comme dans ces films dont la bande annonce contient tout le propos).
Dans la préface de l'anthologie, j'ai souligné qu'une rupture s'était produite au début des années 90 : l'essai de Guy Lardreau a signalé le monopole de la SF sur les questions métaphysiques pour le regretter : en d'autres termes, a signalé la possibilité d'un retour de ces problématiques sur le devant de la scène intellectuelle. Ce n'est évidemment pas Lardreau qui a déclenché le phénomène mais le simple fait qu'il l'ait entrevu me semble significatif et l'adjectif "métaphysique" s'est graduellement remis à circuler, un peu en dépit du bon sens comme le remarque Frédéric Nef dans son propre essai, mais plus exclusivement de façon négative. Dans les années qui ont suivi, on a vu l'auteur dont tu parles s'emparer de ces sujets. On a vu apparaître Dantec. On a vu apparaître Houellebecq (dont Les particules élémentaires commencent par une déclaration générale sur les révolutions métaphysiques). On a vu peu à peu Dick passer en collection blanche. A peu près au même moment, je me souviens avoir entendu un intellectuel (Touraine, peut-être ?) dire quelque chose comme : "jusqu'à il y a peu, quand je parlais métaphysique et religion à mes étudiants, ils riaient ou bâillaient ; ce qu'ils voulaient, c'était de la politique. Maintenant, c'est l'inverse." Le propos essayait, si je me souviens bien, d'évaluer le changement d'ambiance consécutif à la fin de l'URSS, la fin de la dernière grande bataille idéologique du XXème siècle. Tout ceci n'a aucune valeur objective et ne prouve rien (j'ai sans doute retenu ce qui m'arrange) mais suggère qu'à un moment, pendant les années 90, quelque chose est redevenu possible dans ce domaine en ce qui concerne la production intellectuelle et littéraire.
Roland pendant que j'écris > Je ne botte pas en touche, je ne comprends absolument pas ce que signifie ta remarque. Pour moi, un fait culturel est un fait. Ta proposition me semble une contradiction dans les termes, aussi absurde que si tu écrivais "un fait scientifique n'est pas un fait". Explique.
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Un fait culturel n'est pas un fait au sens propre, me semble-t-il : mais précisément, si quelqu'un me trouve un fait authentique dans un récit de science-fiction, je suis prêt à lui offrir mon poids en cacahuètes. Le fait est de l'ordre de la vérité objective, celle que nous utilisons au quotidien pour désigner des objets réels, concrets. Mais peut-être Lem voulait-il dire ceci (je m'avance peut-être un peu, mais ce n'est jamais qu'un "peut-être") : la fiction ne relève pas de cette vérité factuelle ; mais son objet n'est pas pour autant dépourvu de vérité. "Dieu" étant un concept, il correspond à une vérité qui n'est pas celle du monde au sens matériel et concret du terme. C'est une vérité abstraite, proprement humaine il est vrai et en ce sens métaphysique, mais elle n'en est pas moins valide dans l'absolu. Et "dans l'absolu", ça pourrait signifier notamment : en littérature, et plus particulièrement en SF...
EDIT : Lem m'a devancé, je m'en doutais un peu...
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Donc, si je te suis bien, les ovnis sont un fait ?Lem a écrit :Roland pendant que j'écris > Je ne botte pas en touche, je ne comprends absolument pas ce que signifie ta remarque. Pour moi, un fait culturel est un fait. Ta proposition me semble une contradiction dans les termes, aussi absurde que si tu écrivais "un fait scientifique n'est pas un fait". Explique.
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Je crois que par fait, elle voulait parler de l'existence du dieu des chrétiens en temps que dieu ayant vraiment les attributs d'un dieu, intervenant vraiment dans la vie de tous les hommes, et pas seulement par l'intervention de ceux qui y croient. (Tu me corriges si je déforme ta pensée, Le Navire).Lem a écrit :Navire > La venue à l'existence (culturelle) du Dieu des chrétiens, pour ne prendre que cet exemple, le basculement de l'idéologie impériale romaine en sa faveur, les milliiers d'édifices qui lui sont consacrés, les millions de livres écrits à son sujet, les guerres de religion livrées en son nom, l'aventure intellectuelle violente qu'a représenté sa répudiation, ne forment pas un fait ?
Qu'appelles-tu un fait ? Glisser sur le parquet le matin ?
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Oncle Joe
PS: d'ailleurs, glisser sur le parquet (enfin, mon Linoleum pourri...) le matin me paraît souvent un fait plus flagrant que l'existence de dieu. Mais bon, c'est une opinion personnelle (mais je fais attention, pour le parquet, et pas assez, ou bien pas de la bonne manière, pour Dieu, ça doit être ça...)
Tu as raison, mauvais exemple. Je reformule :Lensman a écrit :Comment peut-on parler de phénomènes, si on ne parvient pas à les observer? (ne pas confondre le fait de l'observation d'un personnage en train d'invoquer un démon, et le fait qu'un démon est effectivement invoqué).
tout est envisageable sauf la surnature = tous les phénomènes que je peux observer sont causés par quelque chose mais en aucun cas par la surnature dont l'existence est invérifiable.
rien n'est envisageable sauf la matière = tous les phénomènes que je peux observer sont causés par la matière.
J'imagine que tu protesteras : si tous les phénomènes sont causés par quelque chose sauf par la surnature, alors il ne reste que la matière.
Je te réponds donc par anticipation : quand, en physique, on remonte la chaîne des causalités successives jusqu'aux particules élémentaires, il n'y a plus de matière.
Tu veux dire par là que, par exemple, un auteur de SF catholique romain peut écrire une histoire de SF se passant dans le futur, un futur dans lequel le dieu des chrétiens (son dieu) existe (pour lui), et conditionne le futur en question (tout comme le passé et le présent, d'ailleurs) ? Evidemment, qu'il le peut. Il écrit une histoire de SF dans le même monde que tout le monde, reste à voir ensuite si sa conviction chrétienne s'y repère, et de quelle manière.Shalmaneser a écrit :Un fait culturel n'est pas un fait au sens propre, me semble-t-il : mais précisément, si quelqu'un me trouve un fait authentique dans un récit de science-fiction, je suis prêt à lui offrir mon poids en cacahuètes. Le fait est de l'ordre de la vérité objective, celle que nous utilisons au quotidien pour désigner des objets réels, concrets. Mais peut-être Lem voulait-il dire ceci (je m'avance peut-être un peu, mais ce n'est jamais qu'un "peut-être") : la fiction ne relève pas de cette vérité factuelle ; mais son objet n'est pas pour autant dépourvu de vérité. "Dieu" étant un concept, il correspond à une vérité qui n'est pas celle du monde au sens matériel et concret du terme. C'est une vérité abstraite, proprement humaine il est vrai et en ce sens métaphysique, mais elle n'en est pas moins valide dans l'absolu. Et "dans l'absolu", ça pourrait signifier notamment : en littérature, et plus particulièrement en SF...
EDIT : Lem m'a devancé, je m'en doutais un peu...
Où est le problème?
Oncle Joe
Tu as une vieille conception de la matière...Lem a écrit :Tu as raison, mauvais exemple. Je reformule :Lensman a écrit :Comment peut-on parler de phénomènes, si on ne parvient pas à les observer? (ne pas confondre le fait de l'observation d'un personnage en train d'invoquer un démon, et le fait qu'un démon est effectivement invoqué).
tout est envisageable sauf la surnature = tous les phénomènes que je peux observer sont causés par quelque chose mais en aucun cas par la surnature dont l'existence est invérifiable.
rien n'est envisageable sauf la matière = tous les phénomènes que je peux observer sont causés par la matière.
J'imagine que tu protesteras : si tous les phénomènes sont causés par quelque chose sauf par la surnature, alors il ne reste que la matière.
Je te réponds donc par anticipation : quand, en physique, on remonte la chaîne des causalités successives jusqu'aux particules élémentaires, il n'y a plus de matière.
Oncle Joe
- Roland C. Wagner
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- Enregistré le : jeu. mars 23, 2006 11:47 am
J'imagine que dans la discussion en cours, l'emploi du terme "matière" désigne en fait le couple matière/énergie.
Moi aussi, je peux reformuler :
L'idée de Dieu est un fait culturel, l'existence de Dieu n'est pas un fait.
Et ça marche aussi pour les ovnis.
Moi aussi, je peux reformuler :
L'idée de Dieu est un fait culturel, l'existence de Dieu n'est pas un fait.
Et ça marche aussi pour les ovnis.
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