Je ne le désignais pas.Lem a écrit :Par curiosité, quand tu travaillais sur le concept en amont de l'écriture ou même du scénario du roman, comment le désignais-tu avant de te mettre à chercher le bon terme et de choisir finalement "transparent" ?Roland C. Wagner a écrit :Je l'avais d'ailleurs envisagé à l'époque lorsqu'il s'est agi de donner un nom au Talent de Tem, mais la transparence, c'est plus neutre émotionnellement que la furtivité ou la discrétion.Lem a écrit :On pourrait aussi envisager "furtif".
Du sense of wonder à la SF métaphysique
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- Roland C. Wagner
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« Regarde vers Lorient / Là tu trouveras la sagesse. » (Les Cravates à Pois)
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- Roland C. Wagner
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Je suis prêt à parier que les "prescripteurs", s'il leur venait l'idée sans doute saugrenue à leurs yeux, d'ouvrir un volume des Futurs Mystères, n'auraient pour la plupart aucun mal à saisir le concept de transparence et n'iraient pas y chercher une quelconque métaphore.Erion a écrit :Tu trouves que prendre les textes et les manipuler pour servir tes intérêts, ça va aider à la compréhension du genre par les prescripteurs ?
Par contre, le coup du mec qui "glisse entre les mailles du filet de la réalité", ça devrait les interpeller métaphoriquement parlant.
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Pour préciser un peu...Lem a écrit :Comme l'a dit Silramil, la transparence est une métaphore simple qui se laisse facilement analyser (à condition d'accepter la distinction entre sens propre et figuré).
La transparence comme talent de se faire oublier est métaphorique, étant donné que "homme transparent = homme difficile à repérer dans une foule ou à oublier" n'existe pas du tout dans le langage. ça n'existe pas, c'est-à-dire que quand on l'écrit, c'est une nouveauté : c'est prêter à un objet les qualités d'un autre, d'une manière qui n'est pas programmée dans le langage.
Ce n'est ni propre ni figuré ; lorsqu'une métaphore rentre dans la langue, elle produit un sens figuré, et cesse d'être métaphore. La métaphore étant une figure de style, il faut qu'elle marque un acte de langage spécifique et non simplement une possibilité inscrite dans le lexique.
Employer le terme de transparence de manière simplement métaphorique, c'est ce que fait Ayerdhal quand il reprend le terme : son héroïne est tellement capable de se faufiler dans une foule qu'elle en devient impossible à discerner.
Dans le cas de Tem, sa transparence n'est à proprement parler plus métaphorique, parce qu'elle est concrète. Comme MF tend à le montrer dans son dialogue comique, la métaphore réifiée n'est plus métaphore ; il serait peut-être plus approprié de décrire ce phénomène comme "prêter une réalité concrète à ce qui serait, hors d'un texte, une métaphore".
Donc, il n'y a pas de métaphore dans la transparence de Tem. Il y a un pouvoir concret, avec des conséquences concrètes dans le monde inventé par Roland.
Mais comme en dehors de ce monde ce pouvoir concret serait une image, une simple figure de style, Lem peut parler de "métaphore réifiée" à son sujet...
mais ça a plusieurs défauts, à régler avant tout usage généralisé :
- ça entraîne de très nombreux malentendus, puisque cette "métaphore réifiée" n'est pas une métaphore.
- ça n'explique rien sur le roman lui-même.
- ça n'est qu'un phénomène parmi d'autres de la science-fiction.
Mais si, mais tu ne le sais pas.Roland C. Wagner a écrit :Sauf que le texte ne fonctionne pas comme ça.Lem a écrit :Je ne veux rien de tel.dracosolis a écrit :Tu sais Lem, je crois que tu gagnerais du temps et de l'énergie en cessant de vouloir à toute force que Roland ait mis en place une métaphore réifiée dans le perso de Tem
Je fais ce que fait n'importe quel critique : je lis son texte à ma manière. J'ai déjà dit que ce regard n'avait pas pour but de dire ce que l'auteur fait ou croit faire mais de regarder comment son texte fonctionne comme texte. Que ça lui plaise ou non, qu'il s'y reconnaisse ou non, est indifférent, ou alors, il n'y a aucun acte critique possible en dehors de l'auto-analyse.
Mais alors, pas du tout.
La transparence de Tem n'est pas une métaphore, et elle ne l'a jamais été.
Tem symbolise l'angoisse métaphysique de l'inexistence, de vivre sans reconnaissance, de devoir toujours se battre pour exister. Cela traduit des parents qui n'ont pas suffisament encouragé leur enfant, c'est évident.
Il est aussi la métaphore des masses laborieuses invisibles qui fabriquent nos vêtements, nos aliments, nos meubles...
Et bien entendu, c'est une critique des touristes occidentaux qui vont se faire dorer au soleil dans des pays où tout le monde manque de tout, mais ils n'en verront rien, bien planqués dans leur plages-bastions. D'ailleurs dans ce cas la Transparence est double : les touristes ne voient pas les pauvres qui ne voient pas les touristes.
(Tu devrais utiliser ce dernier argument pour vendre des Futurs mystères aux donateurs pour Haïti)

Bon sang.
Une métaphore réifiée.
Modifié en dernier par fabrice le dim. févr. 07, 2010 7:20 pm, modifié 1 fois.
Hmm… Transposé dans le domaine pictural, ça donnerait ceci.
1) L'auteur X peint une nature morte.
2) Le critique Y remarque : "on discerne dans ce tableau un assemblage intéressant de diverses formes géométriques, des sphères, des cônes, des cylindres.
3) L'auteur X proteste : "Vous n'avez pas le droit de dire ça, c'est une trahison ! J'ai peint des fruits et rien d'autre que des fruits."
1) L'auteur X peint une nature morte.
2) Le critique Y remarque : "on discerne dans ce tableau un assemblage intéressant de diverses formes géométriques, des sphères, des cônes, des cylindres.
3) L'auteur X proteste : "Vous n'avez pas le droit de dire ça, c'est une trahison ! J'ai peint des fruits et rien d'autre que des fruits."
Tout dépend s'il s'agit de Chardin, Matisse ou Cézanne. Si un critique discerne des formes géométriques dans un Chardin, alors ce critique est un imbécile. S'il en discerne chez Cézanne, c'est qu'il sait que ça a donné naissance à l'art moderne. Et s'il voit un assemblage de couleurs dans l'"Intérieur aux aubergines", c'est normal, il n'y a pas de distinction entre sujet et décor.Lem a écrit :Hmm… Transposé dans le domaine pictural, ça donnerait ceci.
1) L'auteur X peint une nature morte.
2) Le critique Y remarque : "on discerne dans ce tableau un assemblage intéressant de diverses formes géométriques, des sphères, des cônes, des cylindres.
3) L'auteur X proteste : "Vous n'avez pas le droit de dire ça, c'est une trahison ! J'ai peint des fruits et rien d'autre que des fruits."
Un critique, c'est pas quelqu'un qui dit n'importe quoi sur une oeuvre, sous prétexte qu'il est libre de dire n'importe quoi. Il y a une oeuvre, son contexte, et la critique doit tenir compte de l'oeuvre, de son contexte.
Quand Kandinsky a inventé l'art abstrait, c'était l'effet de sidération face à une peinture vue dans l'ombre (une peinture figurative). Mais Kandinsky était un artiste, il n'a pas CHANGE l'oeuvre qui a produit cet effet, il a créé une nouvelle oeuvre qui tenait compte de cet effet. Ensuite, il peut relire l'histoire de l'art à l'aune de cette découverte, mais c'est pour produire une oeuvre nouvelle, pas pour modifier ce que furent les oeuvres anciennes.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/
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C'est loin, tout ça…Lem a écrit :Peux-tu préciser ? (C'est intéressant en soi.)Roland C. Wagner a écrit :Je ne le désignais pas.
Tu avais la notion flottante à l'esprit, sans un nom même provisoire ?
Ou tu y pensais comme : "Tem a un pouvoir parapsychique qui rend sa présence difficilement décelable / nom à trouver" ?
Alors, bon, ça devait être un truc du genre : "Les gens ne font pas attention à lui (1) alors il s'habille comme le croisement d'un hippie et d'un caméléon du Swinging London."
Et puis j'ai écrit le projet et j'ai choisi d'appeler le Talent en question la transparence.
Car il est bel et bien transparent, sauf que ça ne se passe pas au niveau visuel, mais lors de la reconstruction par le cerveau de ce qu'il reçoit du nerf optique.
(1) Je passe sur les développements de science imaginaire qui sous-tendent le concept.
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Le moins que l'on puisse dire, c'est que c'est un bien piètre critique, fort peu imaginatif (je ne sais pas, par contre, la valeur de l'artiste…)Lem a écrit :Hmm… Transposé dans le domaine pictural, ça donnerait ceci.
1) L'auteur X peint une nature morte.
2) Le critique Y remarque : "on discerne dans ce tableau un assemblage intéressant de diverses formes géométriques, des sphères, des cônes, des cylindres.
3) L'auteur X proteste : "Vous n'avez pas le droit de dire ça, c'est une trahison ! J'ai peint des fruits et rien d'autre que des fruits."
Cela me rappelle (même si c'est décalé) cette anecdote:
"Après la première représentation du singspiel L'enlèvement au sérail en 1782 à Vienne, une phrase de l'empereur Joseph II est restée très célèbre : « Une musique formidable mon cher Mozart, mais il y a cependant quelque chose... Il y a je pense trop de notes dans cette partition ! ».Sur quoi, Mozart répondit : "mais quelles notes voulez-vous donc que j'enlève ?", ce qui laissa quelque peu l'empereur dans l'embarras..."
A mener la critique d'un texte à partir de considérations techniques sur le sens des mots dans le langage, je me demande si on ne passe pas complètement à côté de ce qui fait l'intérêt de la SF… Même dans le mainstream, je crois que les gens essaient surtout de comprendre ce que veut dire l'auteur…
La SF se traine AUSSI une réputation de littérature "cérébrale", en sus de celle de littérature pour adolescents attardés (c'est sa double nature, comme pour la lumière…). Je ne vois pas très bien en quoi une théorie aussi absconse pourrait faire diminuer la méfiance…
Oncle Joe