Les échelles sont différentes, c'est certain. Mais les problèmes peuvent être mis en parallèle. On ne fait pas le même film avec deux millions et vingt millions de budget. On ne fait pas le même livre avec deux mille et vingt-mille euros d'à-valoir. Ce n'est évidemment qu'une remarque générale, qui ne dit rien de la qualité des films ou des livres au final. On peut payer très cher une merde qui se plante et sous-financer un truc génial qui trouve finalement son public. Mais il me semble qu'en investissant correctement sur un domaine, on augmente en moyenne ses chances de faire quelque chose d'honorable.Shagmir a écrit :Il me semble que le parallèle avec le cinéma ne tient guère, ce sont deux économies radicalement différentes.
Autre parallélisme : le rapport complexe à la légitimité. Dans le cas du cinéma, ce rapport est incontournable parce que l'argent est avancé par ceux qui déterminent – pour ne pas dire incarnent – les catégories légitimes. Dans les années 90, j'ai beaucoup circulé dans les milieux télé, pour des projets originaux ou des adaptations de mes propres textes. J'entendais sans cesse "la SF, le fantastique, à la télé française, ça ne marche pas". En général, il me suffisait de sortir les programmes télé de la veille pour démonter le contraire : X-Files faisait des scores impressionnants, Blade Runner ou Stargate passaient en prime time, etc. Les producteurs me regardaient avec embarras. "Oui, d'accord. Mais c'est américain."
Et donc ? demandais-je.
Mais je n'avais jamais l'élucidation du lien de causalité. C'était comme ça, une sorte de détermination par principe. Les américains avaient le droit, pas nous.
C'est très possible. Je ne sais pas. Comme je l'ai dit, je ne suis pas un bon client, je ne connais pas les films. Je me demande juste si ceux qui viennent des US sont tellement supérieurs du point de vue de la mise en scène ou de la force du script ?le problème principal de cette jeune génération de réalisateurs, c'est qu'ils ne sont pas de très bons metteurs en scène…
Hmm. Je vois ce que tu veux dire – mais ne s'agit-il pas du même trompe-l'œil pris à la racine ? Truffaut adore Hitchock. Godard révère Fritz Lang. Mais hormis Vivement dimanche, Farenheit 451 et Alphaville, c'est quoi leur contribution au cinéma de genre ? Il me semble qu'il y a là au contraire une manifestation de ce syndrôme éternellement snob : c'est formidable quand (parce que) ça vient de "là-bas". Par contre, la même chose faite ici ne mérite même pas d'être mentionnée. La Nouvelle Vague a célébré le cinéma de genre US parce qu'il lui servait de bélier contre les films franchouilles de papa. Mais en a-t-elle fait elle-même ? Il suffit de penser au giallo italien pour voir la différence.Le film de genre a toujours occupé une place importante et reconnue dans le cinéma français ; c'était le cas après-guerre (policier, aventures, cape et épée…), ce fut le cas chez les ténors de la nouvelle vague (polar chez Truffaut, science-fiction chez Truffaut et Godard)
Je suis d'accord. Les choses seraient peut-être différentes si on faisait un inventaire serré de ce qui peut servir de point d'appui ici. Candidat idéal (sans remonter jusqu'à l'époque du muet) : Les yeux sans visage, qui fut longtemps jugé comme "le film le plus terrifiant".Le problème de nos zozos est qu'ils veulent faire un certain cinéma de genre, directement inspiré d'un courant qui n'existe pas en France