Du sense of wonder à la SF métaphysique

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bormandg
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Message par bormandg » mar. févr. 09, 2010 2:31 pm

Lem a écrit :
Roland C. Wagner a écrit :Tu inverses le processus.
Ça s'appelle la critique.
AMA, c'est une forme de critique qui n'est pas acceptable. Avec cette façon de critiquer, je prouverais que la Bible a été écrite par un athée militant, et que Marx défendait l'esclavagisme latin.
Si tu fais de la rhétorique scholastique, tu n'étudies pas les textes, tu les déformes en fonction de tes a priori. :twisted:
J'aurais voulu pouvoir croire que Descartes avait mis fin à ce mode de (dé)raisonn ement.
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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bormandg
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Message par bormandg » mar. févr. 09, 2010 2:36 pm

Roland C. Wagner a écrit :
Je commence à pencher pour la déformation.
C'est l'influence d'un trou noir. La pensée de Lem est tellement massive.... :wink:
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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Lensman
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Message par Lensman » mar. févr. 09, 2010 2:40 pm

bormandg a écrit :
Lem a écrit :
Roland C. Wagner a écrit :Tu inverses le processus.
Ça s'appelle la critique.
AMA, c'est une forme de critique qui n'est pas acceptable. Avec cette façon de critiquer, je prouverais que la Bible a été écrite par un athée militant, et que Marx défendait l'esclavagisme latin.
Cela me rappelle un peu ce dessin d'humour où on voit des rats rigoler en lisant "La Peste" de Camus.
Oncle Joe

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dracosolis
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Message par dracosolis » mar. févr. 09, 2010 2:44 pm

bormandg a écrit :
Roland C. Wagner a écrit :
Je commence à pencher pour la déformation.
C'est l'influence d'un trou noir. La pensée de Lem est tellement massive.... :wink:
dense, on dit dense^^
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Lem

Message par Lem » mar. févr. 09, 2010 2:45 pm

Lensman a écrit :Biens sûr, Dieu existe, pour ceux qui en reconnaissent l'existence. Je ne comprends pas bien ce que tu veux dire.
C'est le problème du mot exister (ou être) depuis l'origine. Il est tellement vaste qu'il ne peut être utilisé de façon discriminante. C'est comme quand on me dit que la transparence sociale "existe" et qu'il ne s'agit donc pas d'une métaphore. Mais dans ce cas-là, rien n'existe ou tout existe. Les ovnis existent puisqu'on en voit. Dieu existe puisqu'on y croit. (1) On n'ira pas très loin comme ça. La seule manière de s'en tirer, c'est entre autres d'utiliser la distinction entre sens propre et sens figuré. C'est la seule qui permette de dire : la transparence qui existe (au sens propre), c'est la capacité des matériaux à laisser passer la lumière. La transparence de certains individus en société, c'est une métaphore, c'est à dire une chose qui existe-comme (un usage figuré).

Je n'ai pas l'intention de pousser plus loin sur les FMP. L'amorce sur les associations surréalistes à partir de "Transparent" était vraiment spontanée. Je ne voulais que montrer que la réification comme point de départ permet bien "d'extraire des significations nouvelles de l'œuvre", ce qui est le but de la critique. Je ne sais pas où pourrait mener un tel article mais rien qu'avec ce qui a déjà été mis sur la table, il y a de quoi faire. Si on trouve que c'est une déformation, une dénaturation ou une falsification de l'œuvre, je n'y peux rien.

(1) Je remarque que ton affirmation "Dieu existe quand on y croit" contraste avec tes protestations du début du fil, quand on parlait des dieux de Lovecraft et que tu m'expliquais que "ils existent" signifiait "ils ont une existence matérielle". Dans le cas de Breton, les Transparents n'ont pas plus d'existence matérielle que les Idées de Platon ou les Archétypes de Jung. Mais un être humain peut accéder à eux en pensée et en donner une image. Soutiendras-tu que cette image est "une trace matérielle de l'existence des Archétypes ou des Idées" – donc prouve leur "existence" ?

JDB
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Message par JDB » mar. févr. 09, 2010 2:53 pm

Lem a écrit :C'est le problème du mot exister (ou être) depuis l'origine. Il est tellement vaste qu'il ne peut être utilisé de façon discriminante
Ah ! ça me rappelle quelque chose...

MODE "HS VELU MAIS JAI PAS PU RESISTER ON"
Les grands moments de l'analyse sémiotique
"It depends on what the meaning of the word 'is' is. If the--if he--if 'is' means is and never has been, that is not--that is one thing. If it means there is none, that was a completely true statement....Now, if someone had asked me on that day, are you having any kind of sexual relations with Ms. Lewinsky, that is, asked me a question in the present tense, I would have said no. And it would have been completely true."
Et, dans un certain sens, ce fil me rappelle le rapport Starr.
MODE "HS VELU MAIS JAI PAS PU RESISTER OFF"
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dracosolis
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Message par dracosolis » mar. févr. 09, 2010 2:58 pm

:shock: pas le rapport kinsey partie "rapports sado masochistes?" :shock:
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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » mar. févr. 09, 2010 3:08 pm

Lem a écrit :Les ovnis existent puisqu'on en voit.
Ben oui.
Lem a écrit :Je ne voulais que montrer que la réification comme point de départ permet bien "d'extraire des significations nouvelles de l'œuvre", ce qui est le but de la critique.
Désolé, mais je n'ai vu aucune signification nouvelle. Pas même l'amorce d'une.

Et j'avoue que ramener une série d'une conception théorique… disons "métamoderne" au primitivisme surréaliste me dérange quelque peu.

Bon, c'est une manière de voir les choses, ou de les vendre. Mais aussi, peut-être, sans doute, de passer à côté de l'essentiel.
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Message par Lensman » mar. févr. 09, 2010 3:10 pm

Lem a écrit : (1) Je remarque que ton affirmation "Dieu existe quand on y croit" contraste avec tes protestations du début du fil, quand on parlait des dieux de Lovecraft et que tu m'expliquais que "ils existent" signifiait "ils ont une existence matérielle". Dans le cas de Breton, les Transparents n'ont pas plus d'existence matérielle que les Idées de Platon ou les Archétypes de Jung. Mais un être humain peut accéder à eux en pensée et en donner une image. Soutiendras-tu que cette image est "une trace matérielle de l'existence des Archétypes ou des Idées" – donc prouve leur "existence" ?
Où vois-tu un contraste? Les dieux lovecraftiens ont une existence matérielle et sont des extraterrestres. Cela n'empêche en rien des gens de les considérer comme des dieux dans les histoires de Lovecraft.
Pour les archétypes, oui, cela peut être avancé comme preuve, mais je ne la trouve pas convaincante. Je trouve contestable l'interpétation de cette trace.
Oncle Joe

Lem

Message par Lem » mar. févr. 09, 2010 3:33 pm

Sand a écrit :Comme le modèle de Ptolémée et le modèle de Copernic ?
Draco a écrit :omme la théorie de l'évolution et le créationisme, je dirais plutôt
George a écrit :Avec cette façon de critiquer, je prouverais que la Bible a été écrite par un athée militant, et que Marx défendait l'esclavagisme latin.
RCW a écrit :Soit exactement le genre de choses allant à l'encontre de la cosmologie locale.
Waouh !
Disqualifier un système critique littéraire parce qu'il ne s'applique pas aux théories scientifiques, je n'avais encore jamais vu ça.
Dire d'un concept surréaliste qu'il va à l'encontre de la cosmologie non plus.
(Juste en passant : les FMP, c'est de la science ?)

On ne parle pas de la même chose ; tant pis. Je vais travailler un peu, à plus tard.

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Sand
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Message par Sand » mar. févr. 09, 2010 3:41 pm

dans mon cas, ce n'est pas le système critique que je disqualifais (osef, comme dit l'autre), mais l'assertion comme quoi du moment qu'on arrive au même résultat, on se fout de la méthode.

heu... comment dire...

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Message par dracosolis » mar. févr. 09, 2010 3:44 pm

Sand a écrit :dans mon cas, ce n'est pas le système critique que je disqualifais (osef, comme dit l'autre), mais l'assertion comme quoi du moment qu'on arrive au même résultat, on se fout de la méthode.

heu... comment dire...
pareil
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Message par Lensman » mar. févr. 09, 2010 3:47 pm

Lem a écrit : La seule manière de s'en tirer, c'est entre autres d'utiliser la distinction entre sens propre et sens figuré. C'est la seule qui permette de dire : la transparence qui existe (au sens propre), c'est la capacité des matériaux à laisser passer la lumière. La transparence de certains individus en société, c'est une métaphore, c'est à dire une chose qui existe-comme (un usage figuré).
Tu ne m'as pas dit comment tu verrais les choses si au lieu de "transparence", on nommerait "sprutz", dans un roman de SF, le pouvoir de passer inaperçu au milieu des gens. Est-ce que cela changerait grand chose à l'aspect SF du roman? Il n'y aurait pas de métaphore sur "transparence", et le roman ne serait pas moins SF pour autant.
L'auteur veut mettre en scène un pouvoir: passer inaperçu au milieu des gens. L'auteur peut choisir de ne pas donner de nom et laisser le lecteur comprendre tout seul. Mais s'il désire donner un nom, il n'a que deux possibilités: en inventer un, ou en prendre un qui existe déjà et l'employer métaphoriquement (je persiste à trouver que "par analogie" va mieux que métaphoriquement).
Mais que dire de plus? En quoi est-ce important?
Oncle Joe

Lem

Message par Lem » mar. févr. 09, 2010 3:56 pm

Lensman a écrit :Tu ne m'as pas dit comment tu verrais les choses si au lieu de "transparence", on nommerait "sprutz", dans un roman de SF, le pouvoir de passer inaperçu au milieu des gens. Est-ce que cela changerait grand chose à l'aspect SF du roman? Il n'y aurait pas de métaphore sur "transparence", et le roman ne serait pas moin SF pour autant.
Oui, c'est vrai. Je complète.
Ce que ça changerait ?
Ça :
Mon nom est Temple Sacré de l’Aube Radieuse, mais vous pouvez m’appeler Tem. J’exerce avec plus ou moins de bonheur la profession de détective privé depuis le début des années soixante… Deux mille soixante, bien entendu ; je ne suis pas si âgé.
Alors que mes confrères partagent leur temps entre enquêtes financières et filatures de conjoints adultères, et que le nombre de crimes de sang est en chute libre depuis la Grande Terreur primitive, il se trouve que j’ai une fâcheuse tendance à buter sur des malheureux que l’on a… disons aidés à quitter cette vallée de larmes.
Mon parrain, ce vieil escroc de Ludwig, dit que c’est un comble pour un végétarien de découvrir autant de viande froide. Selon lui, il s’agirait même d’un Talent. Mais il se trompe : comme tous les mutants, je ne dispose en effet que d’un seul pouvoir parapsychique.
Le sprutz.
La partie SF est inchangée.
La partie littéraire est ridiculisée et le texte et n'est pas publié. Du coup, la partie SF non plus n'est pas publiée car RCW n'est pas un scientifique, c'est un écrivain.
La SF, c'est de la littérature.
Bye.

Edité :
Sand a écrit :dans mon cas, ce n'est pas le système critique que je disqualifais (osef, comme dit l'autre), mais l'assertion comme quoi du moment qu'on arrive au même résultat, on se fout de la méthode.
On "ne se fout pas de la méthode". On considère que si la méthode permet d'aboutir au même résultat, elle donne un nouvel accès à l'œuvre. C'est ce que fait toute la théorie moderne des formes. C'est ce qui permet à Borgès de raconter que Pierre Ménard réinvente Don Quichotte alors qu'apparemment, il en fait que le réécrire mot pour mot. C'est ce que fait Jasper Johns dont ne sait pas…

Image

… s'il peint le drapeau US ou une peinture qui en a exactement l'apparence et pousse à regarder cet objet autrement, à changer son regard sur lui. C'est ce que fait Gus Van Zant quand il re-tourne Psychose plan par plan. Et sur le plan critique, c'est le principe même de toute interprétation : on postule que le moteur de la création n'est pas celui que l'auteur expose objectivement.

Dans Alien, il y a une merveille de dialogue qui n'apparaît vraiment que dans le doublage vf. C'est le moment où Ash – l'androïde – est percé à jour et décapité à coups d'extincteur. Sa tête repose sur le sol, dans une mare de liquide blanchâtre. On le rebranche. Il gargouille et balbutie, puis révèle le plan de la maison-mère qui consiste à ramener l'alien sur Terre, même si ça doit coûter la vie à tout l'équipage. Avant de le débrancher pour la dernière fois, Ripley apostrophe Ash avec mépris :

"Tu l'admires, n'est-ce pas ?" (en parlant de la créature).

Ash répond avec un étrange demi-sourire :

"J'admire sa pureté.
Un prédateur qui n'est pas souillé
Par la peur, les regrets,
Les illusions de la moralité
"

En français, c'est de la poésie.
Mais ce n'est pas dans le texte original. Faut-il en parler ? Faut-il ne serait-ce que le remarquer ? Cette qualité de dialogue a-t-elle quelque chose à voir avec la qualité de l'œuvre elle-même ?
Ces choses vous laissent indifférents ou vous font rire. Pas moi. Je trouve que c'est un étage normal de l'interprétation et je suis parfaitement conscient de la part subjective que j'y apporte : elle fait partie du geste critique aujourd'hui.
(Mais apparemment pas ici.)
Modifié en dernier par Lem le mar. févr. 09, 2010 4:21 pm, modifié 1 fois.

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Shagmir
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Message par Shagmir » mar. févr. 09, 2010 4:10 pm

Lem a écrit :Tu me rappelles que la NV a fait une place importante aux genres, à quoi j'émets un doute. Tu me suggères de ne pas ramener cette place à une simple admiration, que des films sont réalisés et tu me cites des exemples en enchaînant sur Melville et Clouzot : j'ai lu ça comme leur inscription dans la catégorie : "auteurs de la NV faisant du genre". Dont acte.
Je reconnais et revendique un racourci, dont le sens était : les incursions de la nouvelle vague dans le cinéma de genre ne sont pas que suscitées par l'admiration de ses ténors pour le cinéma américain, mais s'inscrit dans un contexte français solide qui se développe depuis les débuts du cinéma de manière parallèle à la littérature populaire. Selon moi, en simplifiant à l'extrême, c'est Allain & Souvestre puis Boileau & Narcejac puis la Série noire qui nous conduisent de Feuillade aux polars de Truffaut (ainsi qu'à son admiration pour Hitch).

J'ajoute que la nouvelle vague a également subi, si difficile soit-elle à déceler dans les oeuvres, une influcence surréaliste. Au-dessus du jeune Truffaut plane l'ombre de Cocteau, qu'il admirait et qu'il a fréquenté. Or les surréalistes étaient de grands consommateurs d'art populaire (roman et cinéma), Fantômas par exemple, mais de toutes sortes de minables productions que nous qualifierions aujourd'hui de série Z et dont ils raffolaient.

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