Lensman a écrit :Tu ne m'as pas dit comment tu verrais les choses si au lieu de "transparence", on nommerait "sprutz", dans un roman de SF, le pouvoir de passer inaperçu au milieu des gens. Est-ce que cela changerait grand chose à l'aspect SF du roman? Il n'y aurait pas de métaphore sur "transparence", et le roman ne serait pas moin SF pour autant.
Oui, c'est vrai. Je complète.
Ce que ça changerait ?
Ça :
Mon nom est Temple Sacré de l’Aube Radieuse, mais vous pouvez m’appeler Tem. J’exerce avec plus ou moins de bonheur la profession de détective privé depuis le début des années soixante… Deux mille soixante, bien entendu ; je ne suis pas si âgé.
Alors que mes confrères partagent leur temps entre enquêtes financières et filatures de conjoints adultères, et que le nombre de crimes de sang est en chute libre depuis la Grande Terreur primitive, il se trouve que j’ai une fâcheuse tendance à buter sur des malheureux que l’on a… disons aidés à quitter cette vallée de larmes.
Mon parrain, ce vieil escroc de Ludwig, dit que c’est un comble pour un végétarien de découvrir autant de viande froide. Selon lui, il s’agirait même d’un Talent. Mais il se trompe : comme tous les mutants, je ne dispose en effet que d’un seul pouvoir parapsychique.
Le sprutz.
La partie SF est inchangée.
La partie littéraire est ridiculisée et le texte et n'est pas publié. Du coup, la partie SF non plus n'est pas publiée car RCW n'est pas un scientifique, c'est un écrivain.
La SF, c'est de la littérature.
Bye.
Edité :
Sand a écrit :dans mon cas, ce n'est pas le système critique que je disqualifais (osef, comme dit l'autre), mais l'assertion comme quoi du moment qu'on arrive au même résultat, on se fout de la méthode.
On "ne se fout pas de la méthode". On considère que si la méthode permet d'aboutir au même résultat, elle donne un nouvel accès à l'œuvre. C'est ce que fait toute la théorie moderne des formes. C'est ce qui permet à Borgès de raconter que Pierre Ménard réinvente
Don Quichotte alors qu'apparemment, il en fait que le réécrire mot pour mot. C'est ce que fait Jasper Johns dont ne sait pas…
… s'il peint le drapeau US ou une peinture qui en a exactement l'apparence et pousse à regarder cet objet autrement, à changer son regard sur lui. C'est ce que fait Gus Van Zant quand il re-tourne
Psychose plan par plan. Et sur le plan critique, c'est le principe même de toute interprétation : on postule que le moteur de la création n'est pas celui que l'auteur expose objectivement.
Dans
Alien, il y a une merveille de dialogue qui n'apparaît vraiment que dans le doublage vf. C'est le moment où Ash – l'androïde – est percé à jour et décapité à coups d'extincteur. Sa tête repose sur le sol, dans une mare de liquide blanchâtre. On le rebranche. Il gargouille et balbutie, puis révèle le plan de la maison-mère qui consiste à ramener l'alien sur Terre, même si ça doit coûter la vie à tout l'équipage. Avant de le débrancher pour la dernière fois, Ripley apostrophe Ash avec mépris :
"Tu l'admires, n'est-ce pas ?" (en parlant de la créature).
Ash répond avec un étrange demi-sourire :
"
J'admire sa pureté.
Un prédateur qui n'est pas souillé
Par la peur, les regrets,
Les illusions de la moralité"
En français, c'est de la poésie.
Mais ce n'est pas dans le texte original. Faut-il en parler ? Faut-il ne serait-ce que le remarquer ? Cette qualité de dialogue a-t-elle quelque chose à voir avec la qualité de l'œuvre elle-même ?
Ces choses vous laissent indifférents ou vous font rire. Pas moi. Je trouve que c'est un étage normal de l'interprétation et je suis parfaitement conscient de la part subjective que j'y apporte : elle fait partie du geste critique aujourd'hui.
(Mais apparemment pas ici.)