Lem a écrit :parce que tu n'étais pas là
C'est ce que dit Fabrice à la fin de son papier. A un moment, il faut se jeter à l'eau pour savoir si on sait nager. Moi, j'aurais employé une autre métaphore : on ne passe pas toute sa vie chez sa maman. Quand on est grand, on s'en va essayer de plaire à d'autres femmes.
Donc oui, je suis allé faire un tour dehors. En gros, c'est comme ici. Fermé, plein de préjugés sur les gens et les choses et de "bouh, personne ne me comprend". Mais si on insiste un peu, si on cherche, on finit en général par trouver l'ouverture et tout le monde se sent mieux après.
Ce que je veux dire par là, c'est que la littérature blanche ne reconnaîtra JAMAIS la valeur de EE Doc Smith. Faire de cette reconnaissance un sine qua non n'est qu'une façon de dire qu'on n'a pas envie d'établir le contact. La valeur de Doc Smith, c'est celle d'un point de passage dans un processus historique dont tout le monde se fout – sauf ceux d'entre nous qui font l'histoire du genre. C'est normal, c'est logique, c'est très bien comme ça. A quelqu'un qui serait curieux des tendances actuelles de la blanche, on ne commencerait pas par imposer la lecture d'une obscure nouvelle de Charles Nodier parce que c'est là qu'a pris forme le romantisme français qui explique ceci ou cela deux cents ans plus tard.
On ouvre les portes. On laisse les gens de la blanche lire ce qui leur plaît chez nous et démolir ce qui ne leur plaît pas. On fait la même chose avec eux. Tout le monde circule. Et voyons ce qui se passe.
Argh !
Non mais là, non, Serge !
Autant je fais partie de ceux qui ont regretté qu'on ne se réjouisse pas de la critique du Monde avant de râler, autant je ne peux pas laisser passer ça...
J'en viens moi, de la blanche. Je sais, ça ne se voit pas forcément beaucoup, parce que justement, j'ai fait le choix de lui tourner le dos ces dernières années pour embrasser pour de bon la SF.
Les critiques de blanche se construisent
évidemment sur une base culturelle commune ! et on ne pardonnerait à aucun critique professionnel de critiquer le dernier Fuentes sans avoir jamais lu ses œuvres précédentes, ni Carpentier, ni Marques, ni Borgès ou Bioy Casares !! Et ferait-il un contre-sens sur la question, par manque de culture générale, il se ferait conspuer ! Et oui, il est tenu de comprendre ou ad minima d'avoir des notions élémentaires sur les passages majeurs des articulations littéraires, ou sinon, il fait du Beigbeder et tous ceux qui lisent les critiques de Beigbeder avec un peu de culture passent leur temps à le trouver lamentable, ce n'est pas pour rien !
La critique est un boulot (je ne parle pas des écrivains qui s'auto-promotionnent entre eux et que seuls les lecteurs de Marie-Claire (paix à son âme) prennent au sérieux.) qui demande une solide culture et de savoir se cantonner à ce qu'on maîtrise.
Certes, je me réjouis de celle du Monde. Pas parce qu'elle est bonne, mais parce que son existence peut laisser espérer qu'un jour, on puisse trouver au Monde des critiques qui savent de quoi il parlent quand ils causent SF (oui, je sais, il y avait Baudou, mais Baudou, il était largué depuis un moment, faut pas déconner). Fussent-ils par ailleurs aussi critiques de blanche.
Surtout s'ils sont par ailleurs aussi critiques de blanche : il est là, l'enjeu : espérer avoir un jour un critique qui puisse parler de n'importe quel livre, y compris de SF avec la même aisance et le même bagage que quand il parle de blanche.