A leurs Claviers : HAPPINESS IN SLAVERY ...

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Papageno
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Message par Papageno » mer. nov. 01, 2006 11:40 am

Simplement pour savoir qui je suis ;-), c'est quoi un lecteur frileux?
Si je dit qu'un échantillon (tout Petit) des auteurs SF que je lis c'est:

ER bouroughs,W Bouroughs, E hamilton, P hamilton, EE Smith, C Priest, R silverberg, JG Ballard, RC Wagner,V Evengelisti, AE Van vogt, Lea Silhol, W Gibson, HP lovecraft, R Zelazny, J Verne, HG Wells, G Egan, J Brunner, A Reynold, M Peake, I asimov, L Kloetzer, J Ray, Rabelais, J Vance, UK Le Guin, S Delany, N Gaiman, C Palahniuk, T Pratchett, K Vonnegut, M Renard, F Colin, JL Borges,T BSwann, G Orvell, JR Tolkien, ............... Bon j'arrête ici sinon il faudrait plusieurs pages.

Alors, frileux ou pas, qui-suis-je?
Faut pas rigoler la, c'est important, il faut que décide si je doit acheter des pulls pour cet hiver ;-)

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Natacha
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Message par Natacha » mer. nov. 01, 2006 11:58 am

gutboy a écrit :---> Natacha : sans agression de ma part, la différence entre Fantagraphics et Oxymore, c'est que Fantagraphics existe encore pour proposer de nouveaux et bons auteurs. Comme tu le dis, c'est une question de choix.
Hum, déjà partons d'un principe de base, c'est que je ne me sens pas agressée de prime abord par ce qui se dit ici :). Ca planifiera le chemin de la discussion.
Pour le reste, j'ai tout à fait compris le sens de cette comparaison que tu fais, et le fait que, pour toi, la démarche de Fantagraphics est plus louable (ou du moins, plus réaliste on va dire) que celle qu'avait choisie l'Oxymore, et que choisissent l'ensemble des éditeurs "à conviction".

Je ne partage pas par contre ta conclusion ou ton ressenti sur cette situation qui consiste finalement à dire que la "bonne" méthode est celle qui s'avère la plus pérenne. C'est une méthode, pas nécessairement la bonne si on regarde d'autres critères que ceux de la réussite ou de la durée à long terme.
gutboy a écrit :Bon, moi je suis un pragmatique (pour ne pas dire bêtement terre à terre): entre un éditeur qui publie de la merde ET de l'or, et un éditeur qui ne publie plus... J'ai choisi (à la fois l'éditeur ET parmi ce qu'il publie).
Pourquoi ?
Que tu achètes les livres que tu aimes chez l'éditeur qui publie aussi de la merde, c'est une chose. Mais pourquoi dire qu'on choisi cet éditeur plutôt que celui qui ne fait pas de concession ?

Celui qui ne publie plus, et bien il ne publie plus, donc il n'entre pas en ligne de compte dans ce choix, forcément.
Mais avant le dépôt de bilan (qui n'est pas forcément une fatalité inévitable), pourquoi faudrait-il choisir d'encourager l'éditeur qui sécurise ses arrières avec n'importe quoi, plutôt que celui qui fait le choix du risque sur chaque titre qu'il publie ? Comme s'il fallait cautionner une attitude économique ? Choisir de dire "oui, c'est ça qu'il faut faire" à un éditeur qui accepte de se compromettre ?

Mon avis sur ces choses est, évidemment, que si on fait un choix en prenant sciemment en compte ces paramètres, il faut choisir l'éditeur qui ne publie pas de la merde, tant qu'il était encore là pour faire son job. Ce qui lui permettra peut-être d'être encore là dans dix ans, voire, ce qui lui permettra de ne pas céder à la tentation de faire de la merde, tentation qui se présente toujours sous le visage des manuscrits potentiellement vendeurs que j'évoquais plus tôt.

Comme presque tout le monde depuis quelques années, j'ai considérablement diminué mon budget d'achat en livres. D'autant plus que je m'intéresse à des domaines comme la poésie, la psycho, la philo etc. où la norme est de sortir un minimum de 20 à 25 euros pour des bouquins de 200 pages. Mon choix depuis la restriction budgétaire est clairement de soutenir l'édition indépendante. Les éditeurs sécuritaires s'en sortiront très bien sans moi. J'achète les livres des Moutons électriques, par exemple, parce que j'admire la politique éditoriale d'André-François Ruaud. Je trouve sa politique graphique audacieuse, ses choix littéraires intéressants, Fiction est une revue superbe à tous les égards. Devant les linéaires de livres, je choisis sciemment de ne pas acheter les poches de Stephen King que je pourrais trouver d'occas à Gibert dans cinq ans encore, et d'acheter les livres des éditeurs à risque. Parce qu'à ce stade chaque décision d'achat individuelle fait pencher la balance d'un côté ou de l'autre.

Chacun est évidemment libre de faire ainsi ou non, de se sentir concerné ou non par les problèmes de l'édition. Mais il y a ce constat : ça va mal. Et, issu de ce simple constat, l'alerte : si vous aimez ce qui est différent, et la possibilité d'avoir encore demain le choix d'acheter du Bélial, du Nesti, des Moutons, etc., ne vous endormez pas sur l'impression qu'ils seront toujours le paysage dans un an, trois ans, cinq ans. Faites du lobbying, que ce soit en argent ou en temps.
gutboy a écrit :D'où sort cette théorie? Le responsabilité est chez l'éditeur, pas chez l'auteur. Les auteurs continuent d'écrire, la publication ce n'est pas leur domaine.
Ah mais je suis bien d'accord (sur un point du moins).
L'éditeur qui fait ce genre de choix est parfaitement responsable, oui, du visage que prend le marché, comme en sont responsables les lecteurs qui ne demandent que ça. Ou les auteurs qui acceptent eux aussi de jouer ce jeu.
Et c'est tout le problème de ce genre de démarche.
gutboy a écrit :C'est aux éditeurs de trouver le moyen de proposer les bons auteurs.
Ce n'est pas le fait que le marché soit saturé de merde qui fait que les bons auteurs ne sont pas publiés. Ce qui fait que les bons auteurs ne sont pas publiés, c'est quand il n'y a plus personne pour le faire.
Et non, pas seulement. C'est aussi le moment où il reste des éditeurs, mais où leur survie tient tellement à leurs collections "lamentables" qu'il leur reste peu de créneaux pour publier le reste. Voire, le moment où ils font le choix, pour honorer les salaires de leurs 300 employés, etc., d'arrêter purement et simplement de se prendre la tête à vouloir faire de la qualité, se contentant de sortir de l'ombre de temps en temps un auteur talentueux, tout en passant le plus clair de leur activité à nourrir la machine avec le reste.

Maintenant, regardons de près les implications du raisonnement suivant : pour produire quelques livres de qualité peut-être difficilement vendables, il faut être prêt à faire aussi de la merde.
Ok.

On peut cautionner ça. Mais ça revient alors à cautionner également :
- les maisons d'édition qui demandent à leurs traducteurs de dénaturer le travail d'origine de l'auteur pour le rendre plus vendable dans leur propre pays (je n'arrive pas à remettre la main dessus mais il y avait à l'époque au moins deux interviews en ligne de traducteurs qui racontaient comment ils avaient été priés sur certains titres de supprimer des scènes, ou d'en rajouter (!!!) pour que les livres traduits soient mieux reçus par le public.
- les maisons d'édition qui demandent aux auteurs publiés de consentir à de subséquents changements de leur travail pour qu'il soit plus vendable.

A partir du moment où on accepte de s'asseoir sur la qualité au profit du rendement ou de la viabilité, c'est valable pour tout le monde. Qu'est-ce qu'on dit de Spielberg ? Qu'il fait régulièrement des bouses pour pouvoir financer les quelques chefs-d'oeuvre qui lui tiennent vraiment à coeur ? Oui, c'est une façon de travailler. Il y a des auteurs qui adoptent aussi cette démarche. Pour pouvoir vendre leurs "invendables" ou supposés tels, ils produisent aussi des conneries, les unes finançant les autres.

La démarche d'un éditeur n'est en rien, par essence, moins créative, moins investie émotionnellement, moins passionnelle, que celle d'un auteur. Son aspiration à avoir une identité dans son travail est tout aussi légitime que celle de n'importe quel créateur.
Pourquoi aurait-il plus de raison de se prostituer que l'auteur ?
Parce qu'on est dans un monde économique et qu'il faut être réaliste ?

Mais ce constat est alors valable également pour les auteurs. Pourquoi veulent-ils publier ? Tu n'as pas besoin de sortir tes manuscrits de ton tiroir pour être un artiste, même la loi reconnaît l'existence d'une oeuvre intellectuelle qui n'est jamais sortie d'un placard. En publiant, ils acceptent "le jeu" d'une machine économique, et donc il faut qu'ils soient prêts à concéder ? Eux aussi ont des factures à payer à la fin du mois, alors, pour mieux vendre, ajouter une petite scène de cul / de politique / de cuisine aux navets dans leur bouquin parce que c'est ce qui fait vendre en ce moment ? Quelques éléments fantasy si c'est la mode ?

Tout artiste est en droit de vouloir conserver son intégrité en publiant une oeuvre qui lui ressemble, et pas qui se conforme au marché. Il est en droit de faire ceci sans qu'automatiquement on lui dise : "tu n'es qu'un doux rêveur impropre à survivre dans ce monde de brutes". Il est en droit d'espérer trouver des éditeurs qui croiront en lui, et tenteront de porter son oeuvre au monde sans la trahir ou la travestir.

Tout éditeur est de même en droit de vouloir conserver son intégrité en ne publiant que des oeuvres qui ressemblent à ses critères de goût, qualité, et pas des oeuvres qui répondent aux attentes du marché. Et sans qu'automatiquement on lui dise "tu es un irréaliste qui n'acceptes pas les lois du marché, et tu mérites de te casser la gueule".
gutboy a écrit :Pardon de l'écrire crûment, mais quand un éditeur s'arrête, il fait du tort aux auteurs qu'il prétend défendre.
Qu'il "prétend" défendre ?
Il les a défendus, de fait, tant qu'il était là. Et à sa manière, une manière que les auteurs ont accepté lorsqu'ils ont choisi de soumettre là leur manuscrit, et d'éditer dans le cadre qui leur était proposé.

Dans les faits, bien qu'il soit commode de se représenter l'éditeur comme une grosse machine pleine de devoirs et de dettes envers le talent littéraire qu'elle exploite, l'éditeur qui s'arrête se fait avant tout du tort à lui-même : aux salariés qui se retrouvent au chômage, aux associés qui perdent leurs billes, à tous ceux qui se retrouvent à pointer à l'ANPE. Et s'il s'arrête, dans le cas de figure dont on parle, c'est aussi parce qu'il a choisi de défendre des auteurs qui se vendent mal, ou peu, ou pas, quelle que soit la qualité de leur travail.

Il n'y a pas là, je crois, de quoi lui tendre le miroir de sa responsabilité face aux pauvres auteurs abandonnés en chemin.

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Message par marc » mer. nov. 01, 2006 11:58 am

Papageno a écrit :Simplement pour savoir qui je suis ;-), c'est quoi un lecteur frileux?
Quelqu'un qui n'a pas installé le chauffage et qui a oublié son manteau.:)
Frileux, est-ce que cela ne s'appliquerait pas davantage aux lecteurs qui restent dans une niche? Je ne pense pas que ce soit notre cas.
Papageno a écrit :Si je dit qu'un échantillon (tout Petit) des auteurs SF que je lis c'est:

ER bouroughs,W Bouroughs, E hamilton, P hamilton, EE Smith, C Priest, R silverberg, JG Ballard, RC Wagner,V Evengelisti, AE Van vogt, Lea Silhol, W Gibson, HP lovecraft, R Zelazny, J Verne, HG Wells, G Egan, J Brunner, A Reynold, M Peake, I asimov, L Kloetzer, J Ray, Rabelais, J Vance, UK Le Guin, S Delany, N Gaiman, C Palahniuk, T Pratchett, K Vonnegut, M Renard, F Colin, JL Borges,T BSwann, G Orvell, JR Tolkien, ............... Bon j'arrête ici sinon il faudrait plusieurs pages.
Ma liste n'est pas triste non plus, et elle est loin d'être complète !
Papageno a écrit :Alors, frileux ou pas, qui-suis-je?
Faut pas rigoler la, c'est important, il faut que décide si je doit acheter des pulls pour cet hiver ;-)

Je te soutiens entièrement :)
Modifié en dernier par marc le mer. nov. 01, 2006 2:33 pm, modifié 1 fois.
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Message par Bull » mer. nov. 01, 2006 12:04 pm

/HS/
"Je ronronne avec Harrington"
Marc : j'aime beaucoup ta définition et ta vision de la miss Harrington.
Et je pense que c'est bien comme ça qu'il faut aborder ce cycle.
/HS/

Sinon, je suis ce débat avec beaucoup d'intéret, même si les affirmations type "livres de merde" ou "lecteurs frileux" me laissent songeur.

Par ailleurs, cette tribune est avant tout un "coup de gueule" que je respecte tout à fait.
Mais commencer à analyser/décortiquer/justifier les excès d'un coup de gueule, ça n'a aucun sens.

Enfin, je ne sais pas si l'analyse de Gutboy, basée sur cette tribune, est juste (en gros, je garde ma conscience pour moi et donc ... "fuck les lois du marché"), mais si c'est le cas, il a raison, c'était un pari audacieux certes, mais voué à l'echec, et donc dans une certaine mesure, "inconscient".

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Message par marc » mer. nov. 01, 2006 2:41 pm

Bull a écrit :"Je ronronne avec Harrington"
Marc : j'aime beaucoup ta définition et ta vision de la miss Harrington.
Et je pense que c'est bien comme ça qu'il faut aborder ce cycle.
Je voulais faire la même remarque à Thomas Day, qui avait aussi remarqué la présence de David Weber dans ma signature sur le forum du cafard.
Ce n'est rien de plus que ma pizza, mon spaghetti, mon hamburger SF. Je n'ai pas trouvé mieux que de faire un parallèle culinaire :)
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jerome
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Message par jerome » mer. nov. 01, 2006 4:12 pm

Natacha a écrit : Mais avant le dépôt de bilan (qui n'est pas forcément une fatalité inévitable), pourquoi faudrait-il choisir d'encourager l'éditeur qui sécurise ses arrières avec n'importe quoi, plutôt que celui qui fait le choix du risque sur chaque titre qu'il publie ? Comme s'il fallait cautionner une attitude économique ? Choisir de dire "oui, c'est ça qu'il faut faire" à un éditeur qui accepte de se compromettre ?

Mon avis sur ces choses est, évidemment, que si on fait un choix en prenant sciemment en compte ces paramètres, il faut choisir l'éditeur qui ne publie pas de la merde, tant qu'il était encore là pour faire son job. Ce qui lui permettra peut-être d'être encore là dans dix ans, voire, ce qui lui permettra de ne pas céder à la tentation de faire de la merde, tentation qui se présente toujours sous le visage des manuscrits potentiellement vendeurs que j'évoquais plus tôt.

Comme presque tout le monde depuis quelques années, j'ai considérablement diminué mon budget d'achat en livres. D'autant plus que je m'intéresse à des domaines comme la poésie, la psycho, la philo etc. où la norme est de sortir un minimum de 20 à 25 euros pour des bouquins de 200 pages. Mon choix depuis la restriction budgétaire est clairement de soutenir l'édition indépendante. Les éditeurs sécuritaires s'en sortiront très bien sans moi. J'achète les livres des Moutons électriques, par exemple, parce que j'admire la politique éditoriale d'André-François Ruaud. Je trouve sa politique graphique audacieuse, ses choix littéraires intéressants, Fiction est une revue superbe à tous les égards. Devant les linéaires de livres, je choisis sciemment de ne pas acheter les poches de Stephen King que je pourrais trouver d'occas à Gibert dans cinq ans encore, et d'acheter les livres des éditeurs à risque. Parce qu'à ce stade chaque décision d'achat individuelle fait pencher la balance d'un côté ou de l'autre.

Chacun est évidemment libre de faire ainsi ou non, de se sentir concerné ou non par les problèmes de l'édition. Mais il y a ce constat : ça va mal. Et, issu de ce simple constat, l'alerte : si vous aimez ce qui est différent, et la possibilité d'avoir encore demain le choix d'acheter du Bélial, du Nesti, des Moutons, etc., ne vous endormez pas sur l'impression qu'ils seront toujours le paysage dans un an, trois ans, cinq ans. Faites du lobbying, que ce soit en argent ou en temps.
Juste un mot pour dire que je ne crois qu'assez moyennement au militantisme des lecteurs et que la proportion de ceux qui vont acheter pour soutenir une petite maison d'édition est faible. D'ailleurs je suis persuadé que la plupart des lecteurs ne sont absolument pas au courant de qui est gros ou petit dans le monde de l'édition, de qui fait preuve d'investissement et d'audace dans ces choix, des lignes éditoriales de chacun...

Si on y arrive tant mieux. Et après tout, on vit une période ou l'achat "militant" se développe. Mais la littérature reste loin du commerce équitable. Et quand on a qu'un budget littérature limité, je comprends qu'on ait du mal à être curieux.

Evidemment, je suis pour que le Bélial, Les Moutons, Mnémos, Galaxies et tous les autres survivent, nous fasse découvrir des auteurs, des textes, des talents. J'ai pris un vrai plaisir avec les recueils d'Armand Cabasson ou de Jess Khan chez l'Oxy. J'irai même jusqu'à dire qu'il faut soutenir les micro-éditeurs comme Rivière Blanche, Eons, Dreampress ou nous... qui aujourd'hui proposent des livres interessants.

Mais pour tous ces éditeurs, on ne peut pas juste demander aux gens d'être curieux. A eux aussi de nous faire envie.

Et attention, je ne juge en rien la politique éditoriale ou commerciale, ou la communication de l'oxy. Je m'en garderais bien. Il faudrait avoir été dans leurs comptes et dans leurs choix depuis toutes ces années pour se permettre de dire. Je rebondis juste sur la notion de Lecteur militant.

Natacha a écrit : Tout artiste est en droit de vouloir conserver son intégrité en publiant une oeuvre qui lui ressemble, et pas qui se conforme au marché. Il est en droit de faire ceci sans qu'automatiquement on lui dise : "tu n'es qu'un doux rêveur impropre à survivre dans ce monde de brutes". Il est en droit d'espérer trouver des éditeurs qui croiront en lui, et tenteront de porter son oeuvre au monde sans la trahir ou la travestir.

Tout éditeur est de même en droit de vouloir conserver son intégrité en ne publiant que des oeuvres qui ressemblent à ses critères de goût, qualité, et pas des oeuvres qui répondent aux attentes du marché. Et sans qu'automatiquement on lui dise "tu es un irréaliste qui n'acceptes pas les lois du marché, et tu mérites de te casser la gueule".
Oui mais le marché est également à prendre en compte. Sinon tu ne te lance pas dans une démarche commerciale.

Je viens de lire une interview de Guy Delcourt dans le magazine de BD : Suprême Dimension. C'est le directeur de la maison d'édition du même nom, qui publie aussi bien From Hell, Donjon, Sillage que Star Wars. bon, on pense ce qu'on veut du bonhomme et de ses BD, mais il dit :

"Le métier de l'éditeur est d'être à l'écoute du public et d'y répondre. Il y a là dedans une part de pragmatisme et une part de vocation pour offrir aux lecteurs une typologie d'ouvrages qu'ils vont aimer".

En gros, il se place différemment. Lui dit : je publie ce qui plait aux lecteurs mais en plus je leur propose d'autres titres qui sont suceptibles d'aimer.

On est d'accord ou pas. C'est juste une manière différent d'aborder le métier en mettant le lecteur au centre de la réflexion (à tord ou à raison). Ca permet de sortir du manichéisme Gros éditeur méchant/Petit éditeur gentil.




Qu'il "prétend" défendre ?
Il les a défendus, de fait, tant qu'il était là. Et à sa manière, une manière que les auteurs ont accepté lorsqu'ils ont choisi de soumettre là leur manuscrit, et d'éditer dans le cadre qui leur était proposé.

Dans les faits, bien qu'il soit commode de se représenter l'éditeur comme une grosse machine pleine de devoirs et de dettes envers le talent littéraire qu'elle exploite, l'éditeur qui s'arrête se fait avant tout du tort à lui-même : aux salariés qui se retrouvent au chômage, aux associés qui perdent leurs billes, à tous ceux qui se retrouvent à pointer à l'ANPE. Et s'il s'arrête, dans le cas de figure dont on parle, c'est aussi parce qu'il a choisi de défendre des auteurs qui se vendent mal, ou peu, ou pas, quelle que soit la qualité de leur travail.

Il n'y a pas là, je crois, de quoi lui tendre le miroir de sa responsabilité face aux pauvres auteurs abandonnés en chemin.

Natacha
Oui. Et encore une fois, qu'auraient été Armand cabasson, Lélio, Jess Khan, Clauder Mamier, Mélanie Fazi, Léo Henry et tous les autres sans l'oxymore..
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Mélanie
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Message par Mélanie » mer. nov. 01, 2006 4:49 pm

Je rebondis peut-être à côté de la plaque, et je ne peux parler que de mon point de vue personnel, j'ai du mal à prendre du recul là-dessus. Mais pour revenir sur cette idée selon laquelle l'éditeur qui ferme boutique fait du tort aux auteurs, ce n'est pas du tout comme ça que je le ressens. En même temps, je reconnais que, dans la mesure où j'ai aussi publié chez d'autres éditeurs, c'est peut-être plus facile pour moi que pour d'autres de mes camarades concernés. Mais en tout cas, ce qui me reste de tout ça, c'est l'impression qu'on m'a ouvert une porte à un moment où ça a vraiment compté. Se voir proposer de publier un recueil quand on est un jeune auteur qui n'a encore aucun livre à son nom, c'est énorme. Quand on est, comme moi, nouvelliste avant tout, et qu'on peine à le faire accepter dans un contexte éditorial qui mise tout sur le roman, ça l'est deux fois plus. Si Léa Silhol ne me l'avait pas proposé à ce moment donné, ça aurait sans doute attendu des années. Je n'aurais peut-être même jamais trouvé d'éditeur pour un recueil. Ce qui me restera de l'aventure de l'Oxymore, à titre personnel, c'est ce livre, cette carte de visite que je peux montrer. Et c'est parce qu'il y eu ce premier recueil qu'il pourra y en avoir d'autres. Alors franchement, non, je ne ressens pas du tout la fin de l'Oxymore comme un abandon, même si ça m'attriste énormément pour d'autres raisons. Ce n'est pas parce que l'éditeur qui a ouvert une porte n'existe plus que la porte se referme soudainement.

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gutboy
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Message par gutboy » mer. nov. 01, 2006 5:37 pm

Pourquoi ?
Que tu achètes les livres que tu aimes chez l'éditeur qui publie aussi de la merde, c'est une chose. Mais pourquoi dire qu'on choisi cet éditeur plutôt que celui qui ne fait pas de concession ?

Celui qui ne publie plus, et bien il ne publie plus, donc il n'entre pas en ligne de compte dans ce choix, forcément.
Ne pas me faire dire ce que je n'ai pas dit. J'ai dit que je ne pouvais pas acheter celui qui a disparu, alros que l'autre me permet de choisir.
Tu te place sur un terrain moral "pas de concessions", ce sont tes propres mots, et moi sur celui de l'efficacité - durer pour proposer les auteurs que je juge valables.

Ce que tu appelles "pas de concession", si cela conduit à la mort de l'éditeur je dis que l'éditeur s'est trompé à la fois dans son choix perso (il n'existe plus, ce qui n'était pas son but) et vis à vis des auteurs qu'il veut défendre (il n'existe plus, donc il ne les publie plus). Si le principe moral personnel est plus important que la cause qu'on défend, on est dans l'erreur.

Pardon pour cette citation, mais les mots "pas de concession" dénotent une drôle de façon de voir le monde:
"No. Not even in the face of Armageddon. Never compromise"
Rorschach, dans Watchmen d'Alan Moore
Maintenant, regardons de près les implications du raisonnement suivant : pour produire quelques livres de qualité peut-être difficilement vendables, il faut être prêt à faire aussi de la merde.
Ok.

On peut cautionner ça. Mais ça revient alors à cautionner également :
- les maisons d'édition qui demandent à leurs traducteurs de dénaturer le travail d'origine de l'auteur pour le rendre plus vendable dans leur propre pays (je n'arrive pas à remettre la main dessus mais il y avait à l'époque au moins deux interviews en ligne de traducteurs qui racontaient comment ils avaient été priés sur certains titres de supprimer des scènes, ou d'en rajouter (!!!) pour que les livres traduits soient mieux reçus par le public.
- les maisons d'édition qui demandent aux auteurs publiés de consentir à de subséquents changements de leur travail pour qu'il soit plus vendable.
Complètement d'accord avec tes objections. Sauf que tu décris des situation extrèmes et que je parle de trouver un équilibre entre ce que l'on aime faire et ce que l'on doit concéder pour y arriver. On peut toujours trouver plein d'exemples d'excès et d'abus dans tous les domaines. Cela ne signifie pas pour autant qu'il faut jeter le bébé avec l'eau du bain. Le monde n'est pas divisé en deux catégories (mes excuses encore, cette fois pour le mauvais jeu de mots). Tout est en nuance de gris. Voir en noir est blanc est une erreur.

Bon, je ne convaincrais personne, mon avis reste que dans une équation telle que "Auteurs - Editeurs - Acheteurs", refuser d'admettre (dans le sens de " en tenir compte dans nos propres choix") les besoins/envies de CHACUN des 3 niveaux (qu'on les aime ou pas), c'est aller au devant d'un échec. Jouer avec ces trois termes pour les influencer me parait plus efficace.
Listen now. Whoever you are, with these eyes of yours that move themselves along this line of text; whoever, wherever, whenever. If you can read this sentence, this one fragile sentence, it means you're alive. (Jeff Noon - Falling out of cars)

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Message par Papageno » mer. nov. 01, 2006 6:44 pm

Tenir compte du marché n'est pas facultatif mais obligatoire tant qu'on veut rester dans une économie de marché, et c'est le bien suer le cas des éditeurs.
Oui mais la littérature est EN PLUS un art. Il faut savoir qui existe des arts qui échappent a cette économie de marché (enfin partiellement) Par exemple: je connais bien l'opéra - qui est un art qui justement est subventionné (en Europe du moins, au USA il est Sponsorisé ce qui revient au même) - sans ces autres sources de financement - l'opéra aurait disparu depuis au moins un demi siècle (pour l'O.N.P. c'est environ 60% de subventions)
Alors pour des éditeurs de SF le sponsoring (pour les subventions faut pas rêver) ; est-ce possible?- est-ce une alternative? est-ce souhaitable?, cela existe-il déja?

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Message par jerome » mer. nov. 01, 2006 6:50 pm

Papageno a écrit : Alors pour des éditeurs de SF le sponsoring (pour les subventions faut pas rêver) ; est-ce possible?- est-ce une alternative? est-ce souhaitable?, cela existe-il déja?
Oui, ils sont plusieurs à avoir le soutient du Centre National du Livre. Bifrost et Les Moutons notamment je crois...
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Message par Anne » mer. nov. 01, 2006 7:58 pm

Vous n'avez vraiment rien à foutre le 1er novembre... :shock: :lol:

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Message par Natacha » jeu. nov. 02, 2006 9:43 am

jerome a écrit : Oui, ils sont plusieurs à avoir le soutient du Centre National du Livre. Bifrost et Les Moutons notamment je crois...
Hum, je peux me tromper, mais à ma connaissance c'est avant tout une aide aux revues. Donc Bifrost, oui, et Fiction pour les Moutons électriques. Et à moins que les choses n'aient changé, l'aide équivaut à 1/4 de la facture annuelle d'impression de la revue.

Pas non plus franchement de quoi se rouler par terre de bonheur :?

Il y a aussi moyen de demander des aides plus ponctuelles pour certains livres, mais les critères sont assez spécifiques.

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Message par Patrice » jeu. nov. 02, 2006 9:53 am

Salut,

Ca n'a rien à voir avec le fond du problème, mais en lisant le texte de Léa Silhol, je me suis posé une question: parle-t-elle français? ou parisien? ou franglish?

N'ayant lu aucune oeuvre de cette auteure, quelqu'un peut-il me dire si on y retrouve un pareil baragouin?

A+

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Message par Natacha » jeu. nov. 02, 2006 10:04 am

Patrice a écrit :Salut,
Ca n'a rien à voir avec le fond du problème, mais en lisant le texte de Léa Silhol, je me suis posé une question: parle-t-elle français? ou parisien? ou franglish?
N'ayant lu aucune oeuvre de cette auteure, quelqu'un peut-il me dire si on y retrouve un pareil baragouin?
A+
Patrice
Ah non c'est clair que ça n'a rien à voir avec le fond du problème, mais c'est tellement passionnant comme question.
Un lien direct sur la Foire aux Cakes de son site, où tu trouveras toutes les réponses à cette remarque qui revient si souvent.

http://www.unseelie.net/faqc.html

Par ailleurs, surtout n'achète pas ses livres. Ca ressemble trop au niveau esprit, si ce n'est au niveau langage. Mieux vaut s'abstenir d'une immersion dans ce baragouin.

Natacha, "je suis de bonne, bonne, bonne, bonne humeur ce matin, y a des matins comme ça"

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Patrice
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Message par Patrice » jeu. nov. 02, 2006 10:13 am

Salut,

Merci pour ce lien.

Je note:
LS : Saperlotte, c'est vrai ! Et tu sais pourquoi ? C'est *moi* qui parle. Et quand j'écris, j'écris comme je parle. Comme dans la vie, tu vois ? Parce que l'écriture ne se doit pas, à moins de se vouloir une pute mercenaire, être inféodée à des règles de registre de langage, ou d'adéquation à ce que veut le lecteur (à supposer que tous les lecteurs veuillent la même chose, neh ? - ça c'est du japonais, tiens). Or chez moi, on parle franglais comme d'autres respirent. Mon mari est en partie made in UK, et moi, j'aime l'anglais plus que je n'aime le français, notamment parce qu'ils ont 5 mots pour une même action, là où on n'en a qu'un. Pour les "nuances". C'est la langue de mon coeur, ce qui est mon droit le plus strict. J'utilise les mots qui me semblent le plus adéquats pour traduire des ambiances et des sentiments, et je revendique complètement ma mixité culturelle.
On peut se demander pourquoi elle n'écrit pas carrément en anglais, pour les éditeurs anglo-saxons.
J'ai le sentiment que cette façon de parler tient plus de l'effet de mode que d'un réel soucis de nuancer son langage. La preuve: les mots anglais employés sont des plus courants. Ils ne sont aucunement nécessaires.
Bref, ce sabir pseudo-branché m'agasse. Non pas que je veuille faire du cocorico, mais un emprunt, ça doit se justifier. Et si elle écrit réellement comme ça: pouah!
Pourquoi ne pas écrire en SMS, pendant qu'elle y est? Ca aussi c'est "tendance".


A+

Patrice

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