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The Clockwork Rocket - Greg Egan

Posté : lun. sept. 05, 2011 10:54 pm
par Matthieu
Yalda étudie la physique à l'université de Zeugma. En étant célibataire, en refusant d'avoir des enfants et en fréquentant les milieux féministes, elle mène une vie libérée tout juste tolérée en ville mais pas dans la campagne dont elle est originaire. A sa décharge, il faut dire que le mode de reproduction de son espèce n'est pas très favorable au sexe féminin. Ah, et la physique qu'elle étudie n'est pas celle de notre univers. Déjà la vitesse de la lumière dépend de sa couleur. Cela, n'importe quel enfant qui regarde les trainées colorées que font les étoiles le sait. Yalda, à la suite d'une série d'observations, va établir une nouvelle théorie de la lumière qui bouleverse l'intégralité de la physique. Cette théorie va être mise à l'épreuve par l'apparition de phénomènes astronomiques étranges. Phénomènes qui, d'après Yalda, pourraient s'avérer dangereux pour le monde lui-même, à moins qu'une solution ne puisse venir de sa nouvelle théorie.

"The Clockwork Rocket" est le premier volet de la trilogie "Orthogonal". Greg Egan repousse encore une fois les frontières de la science-fiction, du coté de la hard-science extrême. Tout ce que vous avez lu jusqu'à présent et que vous avez qualifié de "hard-science" n'est que du "soft" comparé à Orthogonal. A part peut-être "Incandencence", du même auteur, qui était déjà bien corsé. Cette fois-ci, Egan va encore plus loin, mais parvient à mieux intégrer ses spéculations scientifiques au récit.

La physique alternative de l'univers d'Orthogonal est un véritable tour de force. Ce n'est pas juste la description de quelques propriétés différentes de la notre. Tout est cohérent. Le lecteur suit le cheminement des personnages qui créent les théories et les expliquent avec moult diagrammes. Ce n'est pas un vain exercice, chacun des points abordés sur le monde de la fiction est l'occasion de réfléchir sur les théories équivalentes du notre. Sachez de plus que ce qui est décrit dans le roman n'est que la partie émergée de l'iceberg. Le reste se trouve sur le site de Greg Egan. Je cite "Ces liens comprennent l'ensemble des notes : un texte de plus de 80000 mots et plus d'une centaine d'illustrations. Les pages marquées [extra] vont considérablement plus dans le détail, et ciblent les lecteurs ayant fait des études de physique et de mathématique au niveau universitaire".
http://gregegan.customer.netspace.net.a ... AL.html#CC

Nul autre que Greg Egan n'était capable d'aller aussi loin dans la création d'un univers doté d'une physique différente de la notre, tout en ne sacrifiant pas l'intérêt de l'histoire et la profondeur des personnages. J'ose affirmer qu'il a atteint avec ce roman un optimum et que dans le genre il n'est pas possible de le dépasser. Bien entendu, ce n'est pas un modèle : c'est un extrême. Il n'y a nul besoin d'aller jusque-là pour écrire d'excellents romans de science-fiction. Egan est lui-même capable d'aborder des registres très différents, comme le prouve son précédent roman "Zendegi".

Posté : mar. sept. 06, 2011 6:04 am
par phael
Un des romans les plus surprenants que j'aie jamais lu ! A réserver aux férus de sciences quant même, la représentation géométrique des lois de l'espace temps n'est pas donnée à tout le monde... les personnages sont eux aussi d'une biologie surprenante.

Du coup, ça fait presque trop pour un seul roman!

Posté : ven. sept. 09, 2011 2:54 pm
par Pete Bondurant
Argh... vite, une trad' !

Posté : ven. sept. 09, 2011 9:45 pm
par Papageno
Argh... vite, une trad' !
Oui, on va mettre un cierge à l'église et on va prier!
Il faut dire que les éditeurs ne se pressent pas trop pour traduire Egan. Quand on pense au temps qu'il a fallu pour avoir une édition potable de ses nouvelles! (Merci, au Belial pour cette entreprise héroïque). Évidemment, il y a l'alibi économique - cela ne se vends pas, pas de public..,etc! Peut-être! Mais il y en a bien d'autres auteurs qui ne se vendent pas et qui sont quand même édités, alors! Je pense plutôt qu'Egan ne correspond pas à une conception de la littérature bien ancrée (et depuis longtemps) dans leur inconscient - Hard-Science... pouah!
Bon, même si c'est au compte goutte, cela fini quand même par arriver.. quatre romans, les nouvelles - rien n'est perdu, il suffit de vivre longtemps !

Posté : ven. sept. 09, 2011 11:03 pm
par Herbefol
La difficulté ici tient aussi au texte d'origine. Il faudrait déjà commencer par trouver un traducteur qui comprend ce qui est raconté en anglais. Parce que si c'est pour faire des contre-sens à la pelle parce qu'il n'aura rien pigé aux concepts développés par l'auteur, ce n'est pas la peine.

Posté : ven. sept. 09, 2011 11:17 pm
par Gérard Klein
Papageno a écrit :
Argh... vite, une trad' !
Oui, on va mettre un cierge à l'église et on va prier!
Il faut dire que les éditeurs ne se pressent pas trop pour traduire Egan. Quand on pense au temps qu'il a fallu pour avoir une édition potable de ses nouvelles! (Merci, au Belial pour cette entreprise héroïque). Évidemment, il y a l'alibi économique - cela ne se vends pas, pas de public..,etc! Peut-être! Mais il y en a bien d'autres auteurs qui ne se vendent pas et qui sont quand même édités, alors! Je pense plutôt qu'Egan ne correspond pas à une conception de la littérature bien ancrée (et depuis longtemps) dans leur inconscient - Hard-Science... pouah!
Bon, même si c'est au compte goutte, cela fini quand même par arriver.. quatre romans, les nouvelles - rien n'est perdu, il suffit de vivre longtemps !
Je ferai quand même remarquer que Ailleurs et demain et le Livre de Poche ont très généreusement, comme Le Bélial, accueilli Greg Egan.
Au public de le reconnaître et de les encourager.

Posté : ven. sept. 09, 2011 11:40 pm
par Matthieu
"Diaspora" est traduit en allemand, en italien, en grec et en japonais, "Schild's Ladder" en italien et en roumain, "Incandescence" en italien.

Je ne connais pas les spécificités du marché de la SF en Italie, mais cela ne doit pas être très différent du notre.

Posté : sam. sept. 10, 2011 7:21 am
par Lensman
Matthieu a écrit :"Diaspora" est traduit en allemand, en italien, en grec et en japonais, "Schild's Ladder" en italien et en roumain, "Incandescence" en italien.

Je ne connais pas les spécificités du marché de la SF en Italie, mais cela ne doit pas être très différent du notre.
.. en grec... on voit enfin où est passé l'argent!
N'empêche, tu as raison. Des masses de trucs qui ne se vendent pas sont traduites en français tout le temps, pourquoi pas Egan ? (en tenant compte de la remarque d'Herbefol).
Il suffit de convaincre plusieurs éditeurs que les Egan sont des best-sellers potentiels. Ils se battent et paient très cher tous les Egan inédits. Ensuite, certes, ils sont ruinés, mais je trouve qu'il vaut mieux être ruiné par des publications d'Egan que par je ne sais quel truc de littérature générale...

Oncle Joe

Posté : sam. sept. 10, 2011 7:26 am
par dracosolis
tu viens d'inventer la notion de qualité littéraire de la ruine ou je me goure?

Posté : sam. sept. 10, 2011 7:44 am
par Lensman
dracosolis a écrit :tu viens d'inventer la notion de qualité littéraire de la ruine ou je me goure?
... ça m'est peut-être venu avec la théorie des belles ruines architecturales à prévoir pour l'avenir...

Oncle Joe

Posté : sam. sept. 10, 2011 9:09 am
par Papageno
Je ferai quand même remarquer que Ailleurs et demain et le Livre de Poche ont très généreusement, comme Le Bélial, accueilli Greg Egan.
Au public de le reconnaître et de les encourager.
En effet, Ailleurs et demain a publié trois des quatre romans (La cité des permutants, l'énigme de l'univers et Téranésie) on ne l'oublie pas ! (et Denoël, avait édité Isolation en 'Lune d'encre'). Je suis désolé de ne pas l'avoir mentionné . Cependant, une remarque - méchante ;-) - Le dernier, c'est Téranésie, et cela fait plus de dix ans si je ne me trompe!
Le livre de poche, lui, a tout réédité - plus à ce jour, deux des trois recueils de nouvelle et je suppose que le troisième est prévu. Je ne sais pas ce qui est encore disponible, mais quelque soit le titre, précipitez-vous dessus!!

Posté : sam. sept. 10, 2011 7:16 pm
par Gérard Klein
J'ai en effet tout réédité au Livre de Poche.

J'ai lu la plupart, pas tous, des Egan récents dont Incandescence, Schild's ladder et Diaspora. Je n'en ai pas vu vraiment l'intérêt. En tout cas pour le public français qui largement boudé les précédents chez Laffont. Pour être honnête, je n'ai pas du tout aimé Schild's ladder et Incandescence. Et je n'ai pas vraiment compris Diaspora en son temps. Personne n'est parfait.

En effet, Océanique, le troisième recueil de Egan, publié par Le Bélial,, sortira au Livre de Poche en 2012 comme les précédents.

Posté : sam. déc. 10, 2011 1:38 am
par pierocha
Il y a des contraintes éditoriales ; ça, c'est fait.
Ce qui est malheureux, c'est que les romans récents d'Egan, à part Zendegi ("bulle de présent", pas super, toute proportion gardée, et comme par hasard le seul qui soit prévu en traduction...), sont en quelque sorte des romans de l'après-singularité de Vinge. Il y a quelque chose de finalement très "moderne" dans sa première période (Axiomatique, Permutants, Enigme de l'Univers...) : le doute, une sorte d'existentialisme, un recours in extremis à l'individu au terme des textes (même s'il s'agit pour ce dernier d'accepter une condition inhumaine et désindividuée - Le coffre-fort, par exemple)... Très bien, on le sait, les Français ont toujours adoré Dick.
Or les romans non-traduits me semblent reprendre (quelques dizaines de milliers d'années) après que les autres se sont terminés : le futur dont il parle n'est pas notre futur, mais un futur possible où l'humanité est une race disparue (ou ressuscitée ironiquement avec les Anachronautes de Schild's ladder). Alors oui l'obsession scientifique y est parfois écrasante, mais je crois que celle-ci figure surtout (au-delà des détails) une complexité positive, une complexité intelligible pour qui souhaiterait s'y confronter, une complexité allégorique de l'humanité au présent.
Je n'ai pas encore lu Clockwork rocket, et je recule de peur d'être déçu ; mais je le lirai, parce que je veux tout lire d'Egan. Diaspora est clairement mon roman d'Egan préféré (voire de SF en général), avec une incroyable description d'orage apocalyptique. Peu importent d'ailleurs les goûts personnels des uns ou des autres : l'oeuvre d'un auteur, c'est une continuité et des ruptures, et il est bien évident qu'on n'a fait que la moitié du chemin quand on s'est attaché à la lettre de textes singuliers - reste la dynamique entre eux (je caricature, mais il y a lire Un amour de Swann et il y a lire La recherche du temps perdu). Bref, il est regrettable que la passion suscitée par le premier Egan chez beaucoup de lecteurs ne puisse pas être mise en perspective avec ce deuxième Egan, l'actuel Egan, celui qu'annonçaient La plongée de Planck, ou Les tapis de Wang, et au seuil duquel s'arrêtaient les nouvelles d'Axiomatique et les premiers romans.

Posté : sam. déc. 10, 2011 9:41 am
par Lensman
pierocha a écrit : Alors oui l'obsession scientifique y est parfois écrasante, mais je crois que celle-ci figure surtout (au-delà des détails) une complexité positive, une complexité intelligible pour qui souhaiterait s'y confronter, une complexité allégorique de l'humanité au présent.
.
Evidemment. Si le lecteur croit comprendre quelque chose aux explications scientifques, c'est qu'il doit se tromper, vu l'état formidablement avancé des sciences dans cet univers futur. C'est un problème banal auquel sont confrontés les auteurs qui s'attaquent à ce type de futur: il faut être peu bon illusionniste. Moi, j'aime bien !

Oncle Joe

Posté : sam. déc. 10, 2011 11:46 pm
par Hoêl
Heu...
On a le droit de dire qu'on s'ennuie profondément à le lecture d'Egan ?
Ou de Chiang ?
Parce que , perso. , j'ai rien contre la Hard-Science , j'en ai lu pas mal et ça m'a ouvert des horizons ; mais le romanesque boudiou !
Parcequ'il faudrait en revenir aux bases :
Les lecteurs de romans , que veulent-ils ?
Des histoires !
Alors , si par la même occasion , ils glanent des informations scientifiques , c'est pas plus mal -et c'est même mieux ! mais ne faut-il pas se demander si le déclin de notre genre si chéri ne viendrait pas de son abandon de l'amour du romanesque ?

Je n'ai rien contre Egan , Chiang ou autres du même acabit , mais ils m'ennuient à force de gommer l'impact des personnages sur l'histoire... et je suis parfaitement conscient qu'on pourriat faire le reproche inverse à Hobb , Martin ou Morgan , mais , allez savoir pourquoi... je les préfère , tout comme je préférai Dumas à Sue...