Simon Bréan - La Science-fiction en France

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bormandg
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Message par bormandg » mer. janv. 30, 2013 9:51 am

MF a écrit : Pour la partie théorique, je m'autorise quelques commentaires, réflexions, questions... principalement associées aux objets.

Il me semble qu'il y a deux aspects des objets qui ne sont pas développés par ta théorie et qui gagneraient probablement à l'être, en particulier parce qu'ils peuvent concourir à définir certaines caractéristiques des macro-textes locaux :

1°) l'objet « orienté objet »

Je vais faire une analogie avec l'informatique (attention, c'est une analogie ; ne pas le prendre au pied de la lettre pour sodomiser les diptères).
La science-fiction relève, au plan du langage, d'un paradigme de programmation « orienté objet » alors que le reste du champ littéraire relève d'un paradigme de programmation « impératif ».

Pour donner un exemple concret, je vais prendre (en tout bien tout honneur) Emma Bovary que tu cites par ailleurs.
Lorsque Flaubert invoque la robe d'Emma, il va en décrire la couleur, la tournure, la texture... tous attributs qui sont ceux d'un vêtement.
Mais la robe d'Emma Bovary restera cela : un objet du type vêtement.
Jamais cette robe ne tentera d'étrangler celle qui la porte si elle se met à tromper Charles, jamais elle ne pourra envoyer au même Charles un message par infra-ondes en donnant sa géolocalisation dans le cas où Emma déposerait sa robe dans la journée, jamais elle ne se mettra à émettre des phéromones sexuels en présence de Rodolphe, jamais elle ne sera un alien symbiote tirant sa subsistance du plaisir d'Emma, jamais elle ne permettra à celle qui la porte de passer dans un monde alternatif où Léon est curé...
Permets moi que, même si une telle déformation du rôle des objets est effectivement impossible dans le roman réaliste, certaines possibilités auraient été l'objet de romans fantastiques (celles qui bne se réfèrent pas explicitement à un objet scientifique ou science-fictif); il ne s'agit pas d'une spécificité de la SF. De plus, sauf cas exceptionnel, un t'l usage des objets est toujours motivé par le sujet du roman. L'oeil bleu de la porte a un rôle d'ambiance, nous mettre dans le cadre futuriste. Une porte vers un autre monde ne pourrait intervenir que si les mondes parallèles font partie du sujet du roman...
Sans être totalement inexistant, cet usage des objets n'est AMA qu'un moyen accessoire et non une généralité caractéristique de la science-fiction.
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Message par MF » mer. janv. 30, 2013 12:19 pm

Le court chapitre sur l'axiologie m'a laissé un étrange sentiment.
J'ai l'impression que tu l'a posé là sans trop y croire ; presque par devoir.

L'approche axiologique, telle que tu la présentes, me semble conduire à la nécessité d'avoir des personnages qui soient des héros (ou des "evil lord", ce qui revient au même).

Si on a bien là un élément caractérisant le domaine de la fantasy, il me semble que ce n'est plus le cas (plus toujours) dans le domaine de la science-fiction depuis l'apparition, de l'objet "individu". (1)

Souvent confronté à l'objet "société", l'objet "individu", qu'il soit simple personnage ou même narrateur, va pouvoir acquérir un attribut de "neutralité axiologique", l'ambition du récit étant de faire s'interroger le lecteur sur sa propre échelle de valeur. Et l'on va trouver, en particulier dans les années 70-80, nombre de récits pour lesquels l'approche axiologique ne me semble pas pertinente.

Je ne mets toutefois pas de coté toute la SF "politique" qui elle, purrait relever complètement de cette analyse.

Mais je n'ai peut être rien compris à ton axiologie...

(1) je ne méconnais pas le fait que, par exemple, le space-opera continue à faire une grande consommation de héros et d'anti-héros ; mais même pour le spac'op, ce n'est plus une généralité
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

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silramil
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Message par silramil » mer. janv. 30, 2013 1:49 pm

MF a écrit :J'ai rarement mis un livre dans un tel état. Je n'ai pas un chapitre dont plusieurs pages qui ne soient cornées, et des pattes de mouches ont envahi toutes les espace libres comme je prenais des notes. Sérieusement, ils ne pourraient pas faire de marges plus grandes chez PUPS ? ^^

Rien à dire sur la partie histoire qui ne l'ai déjà été.

Pour la partie théorique, je m'autorise quelques commentaires, réflexions, questions... principalement associées aux objets.
merci pour cette lecture attentive... je te dirais bien d'en racheter un pour plus tard, mais là c'est en rupture de stock... pas pour longtemps j'espère.

Pour plus de lisibilité, je vais décomposer tes remarques dans des messages distincts.
1°) l'objet « orienté objet »

Je vais faire une analogie avec l'informatique (attention, c'est une analogie ; ne pas le prendre au pied de la lettre pour sodomiser les diptères).
La science-fiction relève, au plan du langage, d'un paradigme de programmation « orienté objet » alors que le reste du champ littéraire relève d'un paradigme de programmation « impératif ».

Pour donner un exemple concret, je vais prendre (en tout bien tout honneur) Emma Bovary que tu cites par ailleurs.
Lorsque Flaubert invoque la robe d'Emma, il va en décrire la couleur, la tournure, la texture... tous attributs qui sont ceux d'un vêtement.
Mais la robe d'Emma Bovary restera cela : un objet du type vêtement.
Jamais cette robe ne tentera d'étrangler celle qui la porte si elle se met à tromper Charles, jamais elle ne pourra envoyer au même Charles un message par infra-ondes en donnant sa géolocalisation dans le cas où Emma déposerait sa robe dans la journée, jamais elle ne se mettra à émettre des phéromones sexuels en présence de Rodolphe, jamais elle ne sera un alien symbiote tirant sa subsistance du plaisir d'Emma, jamais elle ne permettra à celle qui la porte de passer dans un monde alternatif où Léon est curé...
Un objet, dans les domaines rationnel ou extraordinaire, lorsqu'il est instancié par un auteur, ne peut hériter que des propriétés du type dont il relève.

Alors qu'en science fiction, un objet peut hériter, lors de son instanciation par l'auteur, des attributs et méthodes de n'importe quelle classe d'objet du macro-texte. Un objet, dans le régime spéculatif, est polymorphe : il peut appartenir à plus d'un type.
Un objet de la classe vêtement peut aussi être un alien, une arme de guerre, un moyen de transport (pas seulement amoureux), un monde... selon la capacité spéculative de l'auteur.
« Le bouton de porte ouvrit un oeil bleu et me regarda. » Combien de récit de SF utilise-t-il cette capacité polymorphique des objets « orientés objet » pour créer du SoW ?

Il me semble donc que les objets du régime spéculatif offrent des capacités des gestion de propriétés et méthodes fort différentes des objets des autres régimes ontologiques. Un auteur de SF, à chaque fois qu'il instancie un objet, a la possibilité de le doter de la totalité du polymorphisme offert par l'intertextualité (devrais-je dire le macro-texte?)

Cette analogie expliquerait aussi que les textes basés sur les « merveilles scientifiques » ne relèvent pas du régime spéculatif et que les textes qui en usent ne ressortissent pas de la SF telle que tu la dates.
C'est gentil de faire une analogie, mais je ne comprends pas de quoi tu parles - c'est quoi un paradigme de programmation "impératif"?

Quelques remarques générales tout d'abord.

L'exemple de la robe d'Emma est un peu limitatif, comme le fait remarquer Georges : un tel cumul de fonctions nouvelles ou décalées est envisageable dans des textes de fantasy, de fantastique... ici, ce qui est déterminant est la contrainte que s'impose le texte réaliste - une robe dans un texte doit avoir les caractéristiques d'une robe de l'époque.
Restons un peu du côté de la contrainte réaliste. Un objet peut avoir plusieurs fonctions si c'est le cas dans la réalité (un téléphone/appareil photo/ordinateur etc.). Un objet peut voir sa fonction initiale disparaître (un parapluie réduit à ses baleines...) ou être détourné de sa fonction initiale (une robe peut servir à étrangler sa propriétaire...). Il peut également y avoir des fonctions spécifiques : le bouton arraché au meurtrier sert à identifier le vêtement de celui-ci... une rose blanche peut déclencher une scène de sexe... Ces fonctions peuvent être symboliques (on ne parle pas à un monsieur bien habillé comme à un bouseux...) ou narratives (c'est grâce à la photo de mes six ans que j'ai retrouvé ma mère...).
Revenons un peu du côté de la science-fiction. Le fait qu'un objet ait des fonctions supplémentaires suit la logique du monde réel, même si l'extrapolation ajoute des fonctions inattendues. On a rarement un frigo servant simultanément de four - les ajouts/modifications doivent être compatibles et explicables, même avec du technobabble. Tout le reste suit la même logique que pour le récit réaliste, et que pour tous les autres récits, en fait : au sein du récit, modification/disparition de la fonction initiale ; fonction symbolique ou narrative.

Ainsi, la différence que tu évoques ne se situe en tout cas pas du côté de la narration - de l'évolution de l'objet au sein du récit.

Maintenant, je suis assez d'accord avec ce que tu dis du macro-texte. Les écrivains de science-fiction élaborent leurs mondes en opérant des glissements et des recombinaisons d'objets connus. Ils peuvent aussi bien s'appuyer sur des objets du réel que sur des créations antérieures. Mais je dirais que le phénomène d'accumulation que tu évoques est une conséquence, un symptôme de l'existence de ce macro-texte, plutôt qu'un facteur de définition. Cela ne correspond pas tant à une méthode d'écriture, qu'à un raffinement, une évolution, de la méthode d'écriture initiale.
Les textes évoquant des merveilles scientifiques suivent le régime spéculatif, mais ils se contentent souvent d'un glissement/ajout unique. Néanmoins, c'est aussi le cas des premiers textes de science fiction; ce n'est qu'à partir d'une certaine masse critique que les transferts/combinaisons de propriété apparaissent, à mon sens.

A ce stade, je dirais donc que cette remarque est éclairante (je n'avais pas fait très attention au chimérisme des objets SF), mais qu'elle ne me semble pas apporter un critère décisif de délimitation de la SF par rapport à d'autres textes suivant le régime spéculatif.

A discuter, je n'ai peut-être pas saisi les finesses de ton raisonnement.
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silramil
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Message par silramil » mer. janv. 30, 2013 2:28 pm

MF a écrit : 2°) l'épuisement spéculatif des objets lors de leur progression hiérarchique
La taxinomie des objets de science-fiction que tu exposes me semble figée : 6 catégories dans une matrice 3x2. Comme cela, j'ai le sentiment de quelque chose de rigide alors qu'il m'a toujours semblé que l'histoire de la science-fiction avait montré une évolution des objets dans une hiérarchie basée sur leur capacité spéculative.
Ce tableau propose une répartition fonctionnelle des objets au sein d'un même récit, et non "en soi". Un mutant peut être anodin (bien sûr qu'il y a des mutants chez nous, mais parlons plutôt de ce cyborg en fuite) ; il peut être problématique (tant que ce télépathe sera susceptible de saisir nos pensées, nous ne serons pas tranquille) ; il peut être crucial pour l'histoire (moi, mutant, je suis détesté par mes parents, et voici mon histoire).
L'important à mes yeux ici était de poser une réflexion sur les objets de SF non pour eux-mêmes (dans ces trois récits, il y a des mutants, thème de SF bien connu), mais dans l'économie générale de leurs textes respectifs.
C'est justement une façon de rompre avec une "histoire thématique de la science-fiction".
Ceci explique, pour moi, les changements de paradigme que tu as notés. Le changement de paradigme s'opère lorsqu'une classe d'objet a vu son potentiel spéculatif épuisé par les auteurs et que collectivement, ils vont se reporter sur une classe plus riche, plus prometteuse, plus productive.
Je ne serais pas si catégorique. je dirais plutôt que l'un des symptômes du changement de paradigme est l'évolution de certaines classes d'objets associés au paradigme dominant.
Par ex : les enjeux techniques liés aux vaisseaux spatiaux sont notables dans le paradigme des "aventures spatiales" des années 50, moins cruciaux pour "l'exploration socio-planétaire" des années 60, presque inexistants pour les "réalités truquées" des années 70. Dans le même cadre, les extraterrestres passent du statut de civilisations concurrentes nécessitant la guerre ou la négociation, à celui de civilisation nettement moins ou plus avancée, et surtout différente, puis à celui de civilisation mystérieuse et trompeuse.
Là, je raisonne en grandes catégories.
Il n'y a pas épuisement d'un potentiel spéculatif, à mon sens, il y a une lassitude due à plusieurs facteurs, qui se traduit par des manières différentes d'intégrer des objets à un récit.
Les objets vont souvent commencer dans un rôle banal, puis devenir exotique ou structurant, et suivre une évolution qui leur permettra d'achever leur carrière comme objet complexe. Lorsqu'apparait un objet essentiel, à la fois « objet isolé » et « phénomène collectif » (je reprends ta taxinomie), alors le potentiel spéculatif de cet objet est épuisé. On en a fait le tour.

L'exemple qui me semble emblématique est celui des « mondes piégés ». De Simulacron 3 à Mais si les papillons trichent, s'écoule une décennie, ce qui correspond à l'échelon temporel que tu as retenu. Mais au milieu de cette décennie est apparu Ubik, qui réussi l'exploit dans le même récit d'être un « objet isolé », un « phénomène collectif », un « objet mineur », un « objet stimulant » et un « objet essentiel ». Un objet englobant de toute la hiérarchie.
Alors, la messe est dite ; les « mondes piégés » ont fait leur temps ; leur potentiel spéculatif a été exploré et les auteurs partent à la recherche d'autres territoires/objets à coloniser. La comète est passée pendant une demi décennie et nous avons continué à en voir la queue pendant encore une demi décennie. Il restera bien sur des traces de cette comète, des textes qui utiliseront des « mondes piégés », mais plus de cette ampleur.

Je pense qu'il y aurait un travail à faire sur chacune de ces décennies que tu as caractérisées afin d'examiner si ce phénomène [évolution dans la hiérarchie taxinomique]/[épuisement spéculatif] est bien à l’œuvre pour expliquer les changements paradigmatiques.
Il serait intéressant de croiser spécifiquement certains objets et leur type d'utilisation dans la plupart des textes d'une époque, mais je ne suis pas très convaincu par la trajectoire que tu évoques. Ici, tu ne parles pas d'un objet, mais d'un thème.
Je suis peut-être à l'origine de la confusion, alors voici la clarification que je propose.

Certains objets ne sont manifestement pas des thèmes : la chronolyse de Jeury, Ubik... sont des objets ultraspécifiques.
Mais ils peuvent faire partie d'un thème... la chronolyse fait partie du thème "voyage dans le temps", mais aussi de celui du "voyage dimensionnel"...

Certains objets peuvent pararaître se confondre avec des thèmes: les robots, les mutants... font partie d'un continuum d'une oeuvre à l'autre ; et pourtant aucun mutant n'est vraiment identique d'une oeuvre à l'autre (mettons de côté les séries, bien sûr).

certains thèmes sont trop abstraits pour vraiment correspondre à l'objet d'un récit : le voyage dans le temps ne peut que difficilement être un objet - je distinguerais volontiers entre le paradoxe temporel (qui est un objet au statut différent d'un monde à l'autre) et le concept même de voyage dans le temps.

Je dirais donc que la société piégée est plutôt un concept (c'est pour cela que je l'associe au paradigme dominant) qu'un objet spécifique. Réfléchir à son évolution serait intéressant, mais ne dirait rien sur les objets eux-mêmes.
J'ai le sentiment que ce que j'affirme ici pourrait se voir contester de multiples manières, j'attends avec plaisir les contradictions.

Néanmoins, de toute façon ton exemple ne correspond pas du tout à l'histoire littéraire: Ubik, publié en France en 1970, se trouve plutôt au point de départ du thème de la réalité piégée. L'évolution serait plutôt la suivante : le concept dans toute son ampleur, puis des variations de plus en plus raffinées, qui mêlent les objets les plus évidents (drogues, jeux sur la perception, dégénérescence de la société) à d'autres moins immédiatement évidents (manipulations politiques, effondrement écologique, ultra-violence...), pour finalement donner naissance à un nouveau concept, ici la violence brute et parfois délirante des années quatre-vingt.

Il y aurait probablement aussi une réflexion à avoir (pour peu que cette hypothèse ne soit pas balayée d'un revers de main) sur la répartition des rôles entre nouvelle et roman : la nouvelle étant le vecteur privilégié de l'exploration spéculative (test de polymorphisme des objets « orientés objet ») et le roman celui de la progression hiérarchique des objets.
je ne suis pas sûr que nous soyons d'accord sur cette idée de progression hiérarchique, mais l'aspect "expérimentation un peu gratuite" des nouvelles me semble acceptable.
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Message par silramil » mer. janv. 30, 2013 2:37 pm

MF a écrit :L'approche axiologique, telle que tu la présentes, me semble conduire à la nécessité d'avoir des personnages qui soient des héros (ou des "evil lord", ce qui revient au même).
Je ne vois pas trop ce qui a pu te faire penser ça : l'axiologie correspond à l'étude des valeurs à l'oeuvre dans le texte. Cela renvoie aux motivations, aux croyances, aux règles morales. Cela peut aussi bien concerner les valeurs associées à des personnages et à a des sociétés, que les valeurs "trahies" par le dispositif narratif général.
Le fait que des valeurs reçues le plus souvent comme "positives" (générosité, courage, respect, solidarité) soient associées aux personnages principaux n'est qu'une manière de les rendre sympathiques. Il n'y a aucune nécessité à cela pour la science-fiction, mais c'est assez courant par facilité.
Si on a bien là un élément caractérisant le domaine de la fantasy, il me semble que ce n'est plus le cas (plus toujours) dans le domaine de la science-fiction depuis l'apparition, de l'objet "individu".

Souvent confronté à l'objet "société", l'objet "individu", qu'il soit simple personnage ou même narrateur, va pouvoir acquérir un attribut de "neutralité axiologique", l'ambition du récit étant de faire s'interroger le lecteur sur sa propre échelle de valeur. Et l'on va trouver, en particulier dans les années 70-80, nombre de récits pour lesquels l'approche axiologique ne me semble pas pertinente.
Il me semble au contraire que l'étude des valeurs est cruciale pour ce type de texte. L'axiologie ne se restreint pas à une étude des motivations du personnage principal, il s'agit de réfléchir aux valeurs des sociétés dans la fiction ; la confrontation de ces valeurs avec celles du lecteur est indispensable, même si elle ne peut pas être menée aisément.
Je ne mets toutefois pas de coté toute la SF "politique" qui elle, purrait relever complètement de cette analyse.
je me demande si tu ne confonds "identification des valeurs défendues par le texte" et "étude des valeurs présentes dans le texte".
Ce dont on ne peut parler, il faut le faire.

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Message par MF » mer. janv. 30, 2013 8:06 pm

silramil a écrit :
MF a écrit :L'approche axiologique, telle que tu la présentes, me semble conduire à la nécessité d'avoir des personnages qui soient des héros (ou des "evil lord", ce qui revient au même).
Je ne vois pas trop ce qui a pu te faire penser ça : l'axiologie correspond à l'étude des valeurs à l'oeuvre dans le texte. ...
...
...
je me demande si tu ne confonds "identification des valeurs défendues par le texte" et "étude des valeurs présentes dans le texte".
ce qui m'y a fait penser, c'est ce passage :
"Le moindre intérêt d'un récit de science-fiction pour la psychologie de ses personnages s'expliquent par les questions d'équilibre narratif. En raison des situations extrêmes, souvent périlleuses, où sont plongées les héros, ce que pensent et souhaitent ces personnages apparaît moins déterminant pour leur survie et le déroulement du récit que ce qu'il sont capable de faire. Ils aiment, craignent et désirent des objets (1) se rapportant à des enjeux universels : la vie et la mort, le bonheur et le malheur. L'assise morale commune à tous les récits sert de fondation à toute la partie humaine des récits de science-fiction"

Et là, je me demande si ce que tu décris n'est pas un effet de la limitation de ton étude à la science-fiction française. Je ne sais pas bien identifier cette assise morale commune. J'avais même cru que la SF s'était affranchi de la morale. (quoique, chassez le naturel, il revient en canot...) J'ai beaucoup de mal à faire entrer dans ce passage des récits de, par exemple, Sheckley ou Lem, dans lesquels sont justement balayé une notion de "morale commune".

(1) au passage, ces "objets" là ont-ils à voir avec les "objets" évoqués plus haut ? je ne crois pas...
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
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Message par Erion » mer. janv. 30, 2013 8:13 pm

MF a écrit : J'avais même cru que la SF s'était affranchi de la morale. (quoique, chassez le naturel, il revient en canot...) J'ai beaucoup de mal à faire entrer dans ce passage des récits de, par exemple, Sheckley ou Lem, dans lesquels sont justement balayé une notion de "morale commune".
Tiens, j'aurais plutôt dit l'inverse, le rapport à une morale commune est un élément essentiel de la SF, et encore plus dans la SF américaine que dans la SF française. Il y a une morale chez Bradbury, chez Heinlein, chez Le Guin.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
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Message par dracosolis » mer. janv. 30, 2013 8:34 pm

c'est lam choisi ses non morales de références
entre varley et bradbury, y'a comme un gap^^
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Message par bormandg » mer. janv. 30, 2013 8:40 pm

Que ce soit dans la SF américaine ou dans la SF française, il y a des auteurs qui se réfèrent à la morale traditionnelle et d'autres qui la remettent en question et cherchent à créer une morale adaptée aux réalités futures.
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Message par Erion » mer. janv. 30, 2013 8:56 pm

Le fait de dire "l'assise morale commune à tous les récits sert de fondation" n'est pas infirmé si des auteurs se positionnent contre.
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Message par bormandg » mer. janv. 30, 2013 9:02 pm

Décrire une autre morale n'est pas toujours se positionner contre l'ancienne. On peut aussi l'ignorer totalement dans les bases de création...
Certains réagissent et partent de la morale ancienne pour expliquer leurs changements. Pas tous.
Modifié en dernier par bormandg le mer. janv. 30, 2013 9:03 pm, modifié 1 fois.
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Message par Erion » mer. janv. 30, 2013 9:03 pm

bormandg a écrit :Décrire une autre morale n'est pas toujours se positionner contre l'ancienne. On peut aussi l'ignorer totalement dans les bases de création...
Dans ce cas, ce n'est pas de la SF, mais de la fantasy.
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Message par MF » mer. janv. 30, 2013 9:04 pm

Erion a écrit :Le fait de dire "l'assise morale commune à tous les récits sert de fondation" n'est pas infirmé si des auteurs se positionnent contre.
je n'évoquait pas un positionnement contre une "assise morale commune", concept que j'aurais d'ailleurs bien de la difficulté à définir

simplement, j'ai le sentiment que certains auteurs, dans certains récits, ont fait tout leur possible pour s'affranchir du concept même de morale

sauf en le détournant au profit du récit, la "morale" devenant un "objet" (c;f., par exemple, Ijon Tichy)


mais ça nous emmène bien loin du propos initial : l'axiologie !
Modifié en dernier par MF le mer. janv. 30, 2013 9:05 pm, modifié 1 fois.
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Message par bormandg » mer. janv. 30, 2013 9:04 pm

Erion a écrit :
bormandg a écrit :Décrire une autre morale n'est pas toujours se positionner contre l'ancienne. On peut aussi l'ignorer totalement dans les bases de création...
Dans ce cas, ce n'est pas de la SF, mais de la fantasy.
Absolument pas; il ne s'agit pas d'ignorer ou de changer les lois physiques.
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Message par MF » mer. janv. 30, 2013 9:06 pm

Erion a écrit :
bormandg a écrit :Décrire une autre morale n'est pas toujours se positionner contre l'ancienne. On peut aussi l'ignorer totalement dans les bases de création...
Dans ce cas, ce n'est pas de la SF, mais de la fantasy.
bon, ben voilà, ça va partir en sucette ^^


[edit]C'EST parti en sucette ^^[/edit]
Modifié en dernier par MF le mer. janv. 30, 2013 9:17 pm, modifié 1 fois.
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