UNE DEMI-COURONNE de Jo Walton

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eleanore-clo
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UNE DEMI-COURONNE de Jo Walton

Message par eleanore-clo » sam. avr. 30, 2016 2:51 pm

Bonjour

Joe Walton conclut la trilogie du subtil changement avec ce nouvel opus. Autant les deux premières visites de l’auteure dans cet étrange Royaume-Uni m’ont séduite, autant cette ultime promenade aurait pu être évitée.
Tout d’abord, l’ouvrage est truffé d’invraisemblances et les talents de Walton ne suffisent plus à les rendre crédibles. Certes, Sir Guy est un moderne Günther Guillaume. Certes, le double jeu de Carmichael est concevable. Quoique le rôle du Guet soit calqué sur celui de la Gestapo, et que le chef de cette dernière, Heinrich Müller, n’a jamais, au grand jamais, emprunté la voie de la trahison… Mais… Mais... Peut-on, un seul instant, imaginer qu’Elisabeth II ait pu intervenir avec force dans la vie politique britannique ? Ou qu’Edouard VIII complote? Certes, la reine est populaire (enfin, aujourd’hui, car ce ne fut pas toujours le cas), mais de là à la transformer en Wonder Woman… De plus, les coïncidences s’accumulent durant l’intrigue, faisant perdre toute créance à l’intrigue. La rencontre fortuite entre Carmichael et un des terroristes irlandais de Hamlet au paradis, dans un Bed and Breakfast, frise le ridicule. Enfin, d’un point de vue géopolitique, le subtil changement est plutôt un magistral retournement. Oppenheimer, le père de la bombe atomique américaine, est né aux États-Unis, et il était totalement logique que la 1ère puissance économique mondiale emprunte cette voie avec un temps d’avance sur toutes les autres nations. Les grands physiciens ayant fui les pays totalitaires (Einstein et Frisch en 1933, Meitner en 1938, Fermi en 1939), l’Axe n’a jamais perçu l’importance décisive de cette arme, et n’a donc jamais mobilisé autant de moyens que les américains l'ont fait avec Manhattan.

La construction narrative est conforme à celle déjà utilisée dans les deux autres opus : une double trame narrative. Un premier fil nous permet de suivre la vie d’Elvira, la nièce de Carmichael, et son entrée dans la haute société. Pour le second fil, Walton nous invite à emboiter les pas de Carmichael. La jeune femme incarne le changement, la nouvelle société et une certaine innocence, face au policier qui symbolise le passé et doit assumer les compromis imposés par le pouvoir. Mais le choix pose souci. L’écrivaine insiste trop sur la dimension sociétale de la jeune noblesse britannique, sur l’importance de la couleur des robes ou encore de la virginité (bis repetita non placerem quant au besoin de placer systématiquement quelques références sexuelles) au point que le basculage dans le drame semble artificiel, illogique même. Alan Bellingham, le soupirant d’Elvira, est un deus ex machina bien trop facile. La chute de Carmichael est totalement rocambolesque. Là encore, imagine-t-on un seul instant que la Gestapo ait cédé la préséance à Kriminalpolizei ? Et pourtant, le Guet semble en grande difficulté face à Scotland Yard. Le rôle ambigu de Jacobson relève de la fantasmagorie. Certes, certains juifs ont pu survivre dans les camps de la morts en devant kapo, mais de là à les voir accéder à des postes éminents de la police politique, il y a là un pas que personne ne peut faire.

La conclusion est précipitée et on sent qu’il fallait tenir dans un format imposé ou choisi.
Bref, un roman mal ficelé.

Malgré cela, on peut saluer le travail remarquable de Lunes d’Encre. La couverture est magnifique, pleine d’intelligence. Les célèbres bus à impériale londoniens sont dans le smog, comme l’est un pays, qui hésite entre fascisme et démocratie. Et la traduction de Florence Dolisi est parfaite, fluide, très littéraire.

Bien cordialement
Eléanore-clo

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Hoêl
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Message par Hoêl » jeu. mai 05, 2016 3:04 pm

Bon, j'ai lu Hamlet au paradis il y a deux jours, ça m'a déjà pas mal déçu, l'héroïne falotte qui n'arrive pas à la cheville des soeurs Mitford sur le plan de l'originalité délirante, un côté harlequinesque gonflant et la trop grande similitude avec Le cercle de Farthing, je regrette d'avoir déjà acquis le 3ème...
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