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Je viens (enfin!) de le finir.
L'impression globale est très positive.
C'est un roman très dense (même sur 450 pages...! j'ai pas fini de jouer aux devinettes pour retrouver toutes les références bibliques et philo disséminées dans le texte), qui tourne autour de la cruauté, du feu, de Prométhée (heureux télescopage de thèmes avec la VF de Velum, donc... la rentrée SF fut prométhéenne, allez savoir pourquoi!), de la joie et de la haine.
Une espèce de sérénité cruelle et hallucinée devant la mort...
J'ai beaucoup aimé le non-personnage de Sebastian qui "est" sans "exister".
Et cette façon d'assumer quelque chose de l'ordre du mystère, de l'impossibilité d'apporter des réponses autres qu'étranges, absurdes et pourtant comme définitives. (voir les toutes dernières lignes du livre).
Et bien sûr l'inversion malsaine du parc de plaisirs, de joie, en camp de mort et de haine.

Pas lu.
Tu conseilles de le commander ?
Sans "spoilers", pourquoi ?

Je précise que cette crainte du "spoiler" fait que je ne lis quasiment jamais les citiques/chroniques d'un livre avant de l'acheter.

Bull a écrit :Pas lu.
Tu conseilles de le commander ?
Sans "spoilers", pourquoi ?

Je précise que cette crainte du "spoiler" fait que je ne lis quasiment jamais les citiques/chroniques d'un livre avant de l'acheter.

C'est un livre faussement simple, je crois. Beaucoup de dialogues, beaucoup d'action, et de nombreuses descriptions, souvent étoffées par des éléments historiques: voilà pour la forme. C'est rapide, bien rythmé (parfois trop?), ultra-violent par moments.
Mais je crois que tout ou presque s'analyse.
Sans spoiler: regarde le passage chez Field, il y a un pitch efficace.
Sans spoiler toujours: le livre propose quelque chose comme un passage vers quelque chose de plus que notre existence concrète mue par des rapports pragmatiques: on s'approche de l'onirique, d'un rêve et d'une cruauté premiers, régis par les symboles, où le temps ne passe plus pareil.
On est dans la continuité de ce que XM avait écrit dans un de ses textes de théorie (la théorie de l'inquiétude, ou le Scopas): tout ce qui est ne se résume pas à ce qui existe; l'être ne se résume pas au réel. Il y a aussi tout le possible. Avec la question: que peut-on y faire et en faire? C'est de cela que s'approche, par ajouts successifs, par coups de sonde toujours plus profonds, Lilliputia, AMHA.

systar a écrit :Mais je crois que tout ou presque s'analyse..

Attention, on va t'accuser de surinterpréter !
Non, sérieusement, les derniers romans de Xavier Mauméjean sont très riches, mais, si j'ai pris grand plaisir à lire Gotham et les Mémoires d'un Homme-éléphant (Ganesha), L'Ere du dragon était souvent prodigieux mais me perdait parfois en route, La Vénus anatomique était décevant, sous-tendu par des idées passionnantes, mais trop faiblement exploitées, et j'ai eu du mal avec Car je suis légion, que je trouvais très intéressant là encore, mais aussi assez ennuyeux... Sans doute un problème de forme, mais que je ne saurais identifier sans m'y replonger. Ce que je vais donc faire. Et lire Lilliputia, bien sûr...

Oui, c'est à lire, même si le roman peut être décevant si on s'attend à un récit dramatisé, centré sur l'évolution d'un personnage, le devenir d'un héros. Ces fils narratifs sont bien présents dans Lilliputia, mais j'ai l'impression que l'auteur a plutôt privilégié le déploiement de l'espace, comme s'il s'agissait d'amener le lecteur à percevoir, à la fin du récit, les différentes régions d'un paysage allégorique (avec des personnages relativement immuables associés à chacune d'entre elles), comme en vue aérienne - ou plus précisément comme si tout se résumait à la maquette de Dreamland ébauchée dans la chambre d'Amador.
L'intérêt de ce livre n'est pas là où je l'attendais, mais il est effectivement très riche... truculatif, même (à la fois truculent et spéculatif).

"Truculatif" est assez bien trouvé! Je suis d'accord avec ta critique.
Oncle Joe

J’ai lu il n’y a pas longtemps Car je suis légion, et j’avoue avoir été un peu déçu. L’argument du livre est littéralement extraordinaire, le prologue est vraiment idéal, mais une fois passés les premiers chapitres, las… XM embraye sur une intrigue policière plutôt convenue. En ouvrant le livre je m’attendais à un récit apocalyptique (un peu comme dans Ces hommes dans la jungle de Spinrad), et finalement je me suis retrouvé chez Agatha Christie…
Bon, j’exagère un peu, c’est un roman de bonne tenue, mais il a quand même un vrai problème de rythme. Si certaines personnes sont de mon avis, mais ont par ailleurs aimé Lilliputia, j’aimerais leur opinion. Sinon je crois que je vais me passer encore de lui quelque temps…

"L'intérêt de ce livre n'est pas là où je l'attendais, mais il est effectivement très riche... truculatif, même (à la fois truculent et spéculatif). "
Pareil.J'attendais un Radix (pour citer une référence SF) mais le personnage évolue peu ou pas suffisamment , et j'ai l'impression de me retrouver avec une chronique américaine.
Il y a par ailleurs une épaisseur romanesque, un savoir faire sans égal (AMHA) dans le domaine français.
Concernant "Car je suis légion" je vous trouve injuste.Quel dommage que XM n'ait pas ajouté une bibliographie à cette balade dans Babylone.XM est un "puit de connaissance" qui ne tient pas à le faire savoir.

Soleil vert a écrit : Concernant "Car je suis légion" je vous trouve injuste.Quel dommage que XM n'ait pas ajouté une bibliographie à cette balade dans Babylone.XM est un "puit de connaissance" qui ne tient pas à le faire savoir.

Je considère pour ma part "Car je suis légion" comme un pur bijou!
Oncle Joe

J'ai énormément aimé le début de "Car je suis Légion" mais la fin m'a déçue aussi.
"Ganesha" était absolument magnifique, et un vrai jeu de piste qui vous stimulait les neurones jusqu'à rendre la lecture jouissive.
"Liliputia" est du même tonneau pour moi. Moins précieux, plus brut et viscéral, mais les effets en sont donc modifiés en conséquence. Là où "Ganesha" séduit par son élégance et vous laisse un peu extatique, "Liliputia" vous entraine dans un univers en spirale qui vous colle par terre en vous coupant le souffle.
Systar a raison, les références fourmillent aussi, mais elles sont moins directes que dans les" mémoires de l'homme éléphant", et on les voit souvent a posteriori, quand on pose le livre, parce qu'on est trop dans le rythme de la lecture pour s'y attacher en cours de route.
Bref, ne pas hésiter sur la lecture du machin. Je doute qu'on puisse vraiment le regretter, même si on a pas la même sensibilité que moi.

Shalmaneser a écrit : L'intérêt de ce livre n'est pas là où je l'attendais, mais il est effectivement très riche... truculatif, même (à la fois truculent et spéculatif). :arrow: :arrow:

Alors si il y a bien un qualificatif qui ne me serait jamais venu à l'esprit pour décrire Lilliputia, c'est bien celui de "truculent".

J'ai du mal à trouver un équivalent romanesque à Liliputia (ailleurs que dans l'oeuvre de XM).Tournier, Pynchon ... ?
Par contre "Car je suis légion" cotoie thématiquement certains romans "historiques" de Silverberg, à la différence près que les personnages du romanciers américain transcendent leur époque.L'universalisme, la modernité de leurs préoccupations trouvent un aboutissement dans des récits comme "Thèbes aux cent portes" qui met en scène un voyageur temporel. De fait les personnages imaginés par Silverberg ( préhistoriques, sumériens, egyptiens... ou éloignés dans le futur comme dans "Les Monades urbaines") sont proches de nous.A l'inverse le héros de "Car je suis légion" est bien immergé dans Babylone.

systar a écrit : la rentrée SF fut prométhéenne, allez savoir pourquoi!)

Bah, ça, c'est juste la tragédie en prime time.

Attendons la farce dans les rediffs.

Pauvre SF, que de choses son dites en ton nom.

Quant à Mauméjean, voilà quelqu'un qui comprend de quoi on parle lorsqu'il est question de style et d'écriture, contrairement à d'aucuns.

Terminé il y a peu, j'ai passé un très bon moment. Un vocabulaire riche et passionnant. Et j'aime beaucoup la dernière phrase.

Merci Mr Mauméjean.