Jean-Claude Dunyach a écrit :kibu a écrit :Ceci dit, Le grand vaisseau est très en dessous des autres romans de Reed.
Ce n'est pas du tout mon avis
Le contraire aurait été étonnant

:
Néanmoins, je suis d'accord avec kibu.
En particulier, je trouve que Reed a du mal avec l'immensité de son vaisseau. Elle le dépasse, il ne parvient jamais à faire ressentir cette vastitude. Ceci dit, le titre original est
Marrow, ce qui pourrait signifier que le sujet du roman n'est pas la grandeur du Vaisseau mais son coeur.
Toute la partie après la reconnection de Marrow au Grand Vaisseau est confuse. Tout le monde s'agite beaucoup, ça court partout, mais les tenants et les aboutissants sont présentés et enchainés un peu mécaniquement et déservis par le brouhaha de l'action, elle-même trop hâchée.
Les personnages principaux se ressemblent tous dans leurs réactions, leurs défauts, leurs obsessions, leurs désirs, etc. Leurs liens de parenté sont insipides alors que ce sujet était si bien traité, des personnages si humains, dans son dyptique
Le Voile de l'espace/Béantes portes du ciel.
Là, j'avais l'impression d'assister à la querelle familiale stérile d'Immortels rendus fous par leur longévité et qui patinent dans des passions que ces post-humains auraient dû transcender depuis longtemps. Les résolutions des drames en tombent à plat, parce qu'on sent bien qu'ils ne résoudront rien, parce qu'ils ne placent pas leurs acteurs dans des trajectoires de libération mais des cercles vicieux.
Je crois que ça vient du fait que Reed ne fait qu'effleurer, qu'évoquer (je ne trouve pas de terme vraiment adéquat) ses personnages, entre autres. Tout comme la partie strictement Marrow, qui m'a fait penser à un "mini"-
Creuset du Temps de Brunner. Elle aurait gagné à être approfondie, elle tient sur quand même 5000 ans !
Du coup, elle perd un peu en crédibilité. Et qu'une civilisation si avancée puisse s'épanouir sur un monde à l'écologie aussi éprouvante, à la composition si exotique et extrème, ça a eu du mal à passer. Très beau, très fun, très NSO, mais il faut bien suspendre son incrédulité pour que ça passe. AMHA, il faut être un Hard Scientist pour faire tenir Marrow debout, et Robert Reed ne l'est peut-être pas assez.
Enfin les grandes révélations cosmologico-métaphysiques sur la véritable nature du Grand Vaisseau m'ont déçu. Trop vagues, mentionnées au lieu d'être exposées,
a fortiori mises en scène, elles donnent l'impression qu'elles sont là parce qu'il le faut bien. Reed semble botter en touche, noyer le poisson. Quant au Morne, il porte magnifiquement son nom ; jamais vu un
deus ex machina si transparent.
Un roman frustrant, donc, en ce qui me concerne parce qu'il laisse l'impression que son auteur ne s'y est pas investi à 100 % ou qu'un ou deux jets supplémentaires n'auraient pas été de trop.
Il y a bien sûr de bons morceaux : Marrow malgré ce que j'en ai dit est un passage plutôt magique, à la fois rude et gracieux. Comment Pamier est arrivé sur le Grand Vaisseau est une chouette histoire, elle a un petit côté
Schismatrice qui m'a bien plû. Miocène est très réussie, l'Habitat des Sangsues saisissant. Et les Rémoras fascinants (d'ailleurs la nouvelle éponyme dans
SF 2006 est ma préférée du recueil). Assez en tout cas pour que je lise la suite que vous nous promettez.
Je vous poutoune,
Moi de même !