Certes, mais la finalité (qui est dans l'œil du spectateur) peut ne s'observer que dans le passé sans rien engager de l'avenir. Quand je pense, avec Gould par exemple, qu'il y a eu "progrès" en un sens relativement précis, celui de complexification, du virus originel à l'homme, je ne préjuge en rien de ce qui va venir, l'évolution en biologie comme en arts voire en sciences étant aussi imprévisible (correction: impénétrables) que les desseins ( ou, correction: voies) de Dieu. Il n'y a pas de finalité définissable. On peut raisonnablement penser que le passé dessine une tendance qui se poursuivra mais rien ne dit que l'avenir confirmera cette tendance et qu'elle ne s'infléchira pas dans une toute autre direction.Shalmaneser a écrit :J'avais effectivement déformé ton propos, mais c'est de bonne guerre, puisque j'avais moi-même été réduit à un créationniste dans ton précédent message...Gérard Klein a écrit : Ce que j’ai écrit, c’est que l’univers, la sphère, l’ensemble culturel (employez le mot que vous voulez) et ses sous-ensembles dans l’art, la littérature, la philosophie, sont plus riches et plus complexes de nos jours qu’à l’époque de la Vénus ou de Platon, et qu’à ce titre, il y a progrès. Aucun être humain individuel ne peut percevoir de tels ensembles dans le champ de la culture, sauf loci très particuliers, si bien que pour la plupart des gens cela se ramène, bêtement, à la confrontation d’œuvres singulières.
Donc, le progrès, c'est simplement une complexification des productions humaines, liée au passage du temps ? La définition du progrès a peut-être changé, et Lalande n'est peut-être pas une source très fiable, mais enfin, l'idée de finalité, je l'ai retrouvée dans toutes les définitions que j'ai croisées. Ce qui ne fait pas non plus de moi un "pharisien" ; il faut simplement qu'on s'entende sur les termes ; si chacun a sa conception très particulière du progrès, excluant par là celle de l'autre, alors à chacun sa langue, et il ne nous reste plus grand chose en commun...
EDIT : et puisque nous en sommes là, autant rappeler, à toutes fins utiles, l'étymologie latine de progrès (dans pro-gredior, la préposition pro évoque dans chacune de ses acceptions un mouvement vers, et le verbe gradior, qui signifie principalement "avancer", fait écho à gradus, le degré, la marche d'un escalier)... Etymologiquement, comme pour les fondateurs du positivisme conquérant du XIXe siècle, "progrès" ne se résume donc pas à une complexification dénuée de finalité, simplement associée au passage du temps - à un sens purement quantitatif, en fin de compte. Il me semble un peu hasardeux de modifier le sens des mots à ce point, comme si leur origine et leur histoire n'avaient qu'une importance très relative...
En avant pour l'escalier. Dans celui en colimaçon d'une tour médiévale, on n'est jamais sûr qu'un ennemi ne se cache pas au tournant, ou qu'il ne va pas soudain bifurquer, démasquer une trappe ou prendre le virage opposé. (Je vire fantasy, l'horreur).
Le terme de progrès n'est peut-être pas le meilleur. Je n'en ai pas d'autre à ma disposition pour écrire simple et je crois avoir été assez clair sur le point qu'il s'agissait pour moi d'un progrès sans finalité ultérieure. Sinon, en effet, on tombe dans la téléologie que je n'accepte pas, sauf cas très particuliers et en général triviaux. Dire que le projet d'un pont est téléologique me semble un peu court.
Je n'ai nulle part employé à ton égard le terme de créationniste bien que ton finalisme ou du moins ton insistance sur la présence de finalisme dans tel ou tel terme ou processus puisse suggérer une déviation aussi atroce. J'aimais assez la formule d'Althusser dans la dernière phrase de sa lettre à John Smith (dont il m'avait filé le tapuscrit, excusez du peu)," l'histoire sans fin ni fins", ou qq chose comme ça. Je cite de mémoire. Le reste, pas trop.
J'ai écrit ailleurs pourquoi je n'étais pas d'accord avec le terme de raffinement proposé par Silmaril.
Si nous revenons à la science-fiction, il y a eu, à mes yeux, indiscutablement progrès, par ruptures et raffinements, au sens de Silmaril, non seulement parce que des œuvres sont meilleures que dans le passé, mais parce que l'univers de la science-fiction s'est prodigieusement enrichi et complexifié. Mais je ne sais pas si elle survivra ni où elle va. Et je trouve ça fort heureux.
Je suis par ailleurs d'accord avec MF sur le fait que l'inédit ajoute (en général et en première approximation) à la complexité. Encore qu'on peut se poser la question dans le cas d'une catastrophe comme un holocauste nucléaire ou la parution du dernier Werber.
Mais je tenais à marquer la différence entre une rupture, l'inédit, et la complexification par retouches, genre raffinement.
Enfin, toujours pour MF, je n'avais pas encore lu l'article paru dans Pour la science, décembre 2009 que je viens seulement de parcourir, sur les algorithmes d'apprentissage, qui m'a confirmé dans mes convictions, à savoir que de grands progrès étaient faits et à venir mais que côté proprement sémantique, nada.