Du sense of wonder à la SF métaphysique

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Lensman
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Message par Lensman » ven. janv. 15, 2010 11:26 am

Le_navire a écrit :
MF a écrit :
Je crois que Lem a, constamment, précisé "... UNE DES sourceS..."

Mais je peux me tromper...
dans la mesure où il considère que c'est celle qui explique que la réfutation des autres n'ait jamais marché, j'aurais tendance à penser que tu te trompes. Mais comme des fois, c'est pas évident de suivre le fil de la pensée de Serge, il se peut que ce soit moi...
Et puis, il n'y a pas de raison que ce soit le mélange de différents aspects qui provoque un déni, mais leur dosage respectif. Ou aussi, parce qu'il manque quelque chose, à la SF. Etc...
On pourrait se lancer dans cette voie: qu'est-ce qu'il manque à la SF pour ne pas être déniée par... par... par qui? par un ensemble flou d'imbéciles?
Oncle Joe

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Erion
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Message par Erion » ven. janv. 15, 2010 11:37 am

La discussion me fait penser au coup de fil d'un éditeur jeunesse qui avait vu que j'avais publié des textes et même eu un prix pour une nouvelle. Il voulait que je lui écrive un roman jeunesse "mais faut pas qu'il y ait des trucs trop délirants dedans, faut que ça reste dans le réel".
Je lui ai expliqué que j'écrivais de la science-fiction, il n'avait pas de problème avec ça, mais fallait pas que j'invente un monde imaginaire ou des trucs trop futuristes.

Bref, la SF d'accord, mais faut pas trop d'imagination.

J'avoue qu'encore maintenant, ça me laisse perplexe. Visiblement, il voulait publier de la littérature jeunesse sérieuse, pas des trucs avec des vaisseaux spatiaux ou sur des mondes étranges.

Si on écrit pas ce genre de choses pour les jeunes, pour qui on les écrit ?
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
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Don Lorenjy
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Message par Don Lorenjy » ven. janv. 15, 2010 12:01 pm

Eons a écrit :
Xavier Mauméjean a écrit :Chacun reconnait que la science-fiction est un questionnement sur l'action et la condition humaine dans le temps.

-pour Serge, le questionnement central de la SF serait idéaliste, motivé par des questionnements abstraits.

- pour Roland, le questionnement central de la SF serait empiriste, motivé par des questionnements concrets.
Et quid des romans de SF dont l'auteur voulait simplement raconter une histoire ?
Tu n'empêcheras jamais les lecteurs d'y trouver des questionnements concrets ou abstraits.
Si la littérature est un voyage, l'auteur décrit le parcours, mais c'est le lecteur qui définit la destination. A sa mesure.
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MF
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Message par MF » ven. janv. 15, 2010 12:07 pm

Erion a écrit :Si on écrit pas ce genre de choses pour les jeunes, pour qui on les écrit ?
Pour Draco, Joe et moi ?
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

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Lensman
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Message par Lensman » ven. janv. 15, 2010 12:09 pm

Erion a écrit :La discussion me fait penser au coup de fil d'un éditeur jeunesse qui avait vu que j'avais publié des textes et même eu un prix pour une nouvelle. Il voulait que je lui écrive un roman jeunesse "mais faut pas qu'il y ait des trucs trop délirants dedans, faut que ça reste dans le réel".
Je lui ai expliqué que j'écrivais de la science-fiction, il n'avait pas de problème avec ça, mais fallait pas que j'invente un monde imaginaire ou des trucs trop futuristes.

Bref, la SF d'accord, mais faut pas trop d'imagination.

J'avoue qu'encore maintenant, ça me laisse perplexe. Visiblement, il voulait publier de la littérature jeunesse sérieuse, pas des trucs avec des vaisseaux spatiaux ou sur des mondes étranges.

Si on écrit pas ce genre de choses pour les jeunes, pour qui on les écrit ?
Je suis en train de lire une biographie de C.M. Kornbluth. Il y a au début une longue description d'une réunion des Futurians, en 1938, avec des personnages qui s'appellent Daniel Wollheim, Frederic Pohl, Isaac Asimov, Richard Wilson… Le plus vieux a vingt-quatre ans, et Kornbluth, qui vient pour la première fois à une réunion de fans, a… quinze ans.
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marypop
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Message par marypop » ven. janv. 15, 2010 12:09 pm

Erion a écrit :Si on écrit pas ce genre de choses pour les jeunes, pour qui on les écrit ?
Pour une autre collection jeunesse ?

Ca ne me choque pas "tant que ça" qu'un dircoll jeunesse ait une ligne éditoriale.
Au contraire toutes les collections jeunesse semblent assez uniformes en style.
si on commence à mélanger sf archaïque et proto-sf, personne ne s'y retrouvera plus.
Dieu.

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Erion
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Message par Erion » ven. janv. 15, 2010 12:16 pm

marypop a écrit : Ca ne me choque pas "tant que ça" qu'un dircoll jeunesse ait une ligne éditoriale.
Au contraire toutes les collections jeunesse semblent assez uniformes en style.
Oh, c'est pas sa ligne éditoriale qui me gêne, c'est de demander à un auteur SF de ne PAS suivre son imagination, sous prétexte d'écrire des choses réalistes. Comme si on avait peur que si on faisait lire des choses trop "hors de la réalité", il se produirait des choses terribles pour les jeunes.

Ca rejoint, l'idée de Gérard sur l'inhumain. Parce que, ce que j'ai cru comprendre en discutant avec ce dircoll, c'est sa crainte qu'en explorant un monde imaginaire, on écrive pas sur l'humain et les relations entre les personnages. Je pouvais parfaitement écrire de la SF, aucun problème (pas de déni), mais "me faut de l'humain, coco".
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Lensman
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Message par Lensman » ven. janv. 15, 2010 1:15 pm

Erion a écrit : Ca rejoint, l'idée de Gérard sur l'inhumain.
Il y a toute une SF où la distance est prise avec l'anthropomorphisme, et notamment qui relativise, voire peut aller jusqu'à vider de son sens la notion de métaphysique (dans la mesure où on aurait compris...) , ce qui peut être vu comme une position philosophique, soit dit en passant... Mais ce n'est qu'une partie de la SF, il y a bien d'autres courants (et des voitures volantes…).
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Le_navire
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Message par Le_navire » ven. janv. 15, 2010 2:11 pm

Allez hop, je vais faire chier mon monde. Comment ça comme d'hab ?

Je ne sais pas vous, mais en suivant l'argument de Gérard, je retombe moi sur ma chère politique...

Serge lie sa théorie du déni de la SF à l'évolution de la perception de cette branche de la philosophie. Et il considère que nous sortons peu à peu du déni en même temps que la métaphysique retrouve une certaine légitimité intellectuelle. En même temps son raisonnement ne prend pas en compte la réalité éditoriale : il y a 30 ans les lecteurs de SF permettaient de faire vivre un nombre important de collections et de titres, aujourd'hui que couic.

Selon Serge, c'est parce que la SF est prête pour une intégration dans la littérature hors genre. D'autres y voient une dilution liée à la surproduction éditoriale en générale, qui renie les genres à la marge et font de la littérature hors genre un gros gloubiboulga indigeste (il y a donc des passerelles entre les deux visions, même si elles n'entrainent pas les mêmes conclusions).

Première question : est-ce qu'on peut vraiment voir le déni d'hier et celui d'aujourd'hui de la même manière ? Celui des élites littéraires qui n'a jamais empêché la littérature de SF de vivre et de prospérer, et celui d'aujourd'hui qui voit la mort de collections entières et la frilosité de certains éditeurs à publier de la SF grimper en flèche ?

Si je reprends la théorie de l'altérité de Gérard (et que j'y ajoute les nuances par genre de MF qui me semblent pertinentes) en regardant l'adéquation entre les périodes où la Sf a trouvé son public et l'évolution du rapport politique à l'altérité de notre société, j'y vois personnellement des accointances qui me semblent, à moi, évidentes.

Première grande époque, le XIX.
C'est aussi la grande époque du colonialisme triomphant. L'altérité est reconnue et définie, pour être mieux maîtrisée, dominée, elle est là pour prouver la supériorité du monde occidental et de ses valeurs sur le reste du monde, et si on en analyse les textes majeurs, on y retrouve bien, en général cette même notion du dépassement par assimilation ou domination.

Deuxième grande époque, l'après guerre jusqu'à la fin des années 70.
Il faudrait la découper en deux phases.
Juste après guerre, on est dans la période où l'on voit les premières grosses contradictions fleurir : l'autre est encore l'ennemi, mais on rêve d'un monde en paix et on espère avec la mise en place des prémisses de l'Europe et de l'ONU, qu'il ne le sera plus demain. On développe une confiance infinie dans la science pouvoyeuse de bien être mais l'atome fait peur et Hiroshima a marqué les esprits. L'altérité fascine, même si le sentiment est mêlé de crainte et de confusion.
La Sf de l'époque est en phase avec la conception du monde...

Entre les années 60 et 70, c'est la grande époque politique du rêve de village global, des Droits de l'homme, du tous égaux. Les lois envers les étrangers s'assouplissent, le monde rêve de fraternité transfrontières.
La SF est pile poil dans la ligne.

Les années 80 et 90 entament une phase de repli sur soi. La fin des idéologies, la chute du mur, les déceptions politiques, la montée en puissance des craintes de l'impact de la science sur notre vie de tous les jours accompagnent une indifférence à l'altérité.
La SF qui fonctionne bien est, sans beaucoup de surprise, celle de la déliquescence du monde réel et du refuge dans le virtuel.

Depuis dix ans, on en est à un pic : dénonciation des acquis de 68, refuge dans les religions, communautarisme, écologie du not in my backyard, montée des racismes et durcissement des lois envers les étrangers.
La Sf d'aujourd'hui, elle, continue à célébrer les valeurs de l'altérité, quand partout autour d'elle, l'altérité fait peur et rebute.

Je vous fais la conclusion ou vous concluez vous-même ? (ou vous démolissez le tout, hein ? Parce que je n'ai pas la prétention d'être gouroute, moi :P )

Alors ? Je sais pas, mais je trouve que ça se tient, mon machin...
"Ils ne sont grands que parce que vous êtes à genoux"

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dracosolis
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Message par dracosolis » ven. janv. 15, 2010 2:13 pm

marypop a écrit :
Erion a écrit :Si on écrit pas ce genre de choses pour les jeunes, pour qui on les écrit ?
Pour une autre collection jeunesse ?

Ca ne me choque pas "tant que ça" qu'un dircoll jeunesse ait une ligne éditoriale.
Au contraire toutes les collections jeunesse semblent assez uniformes en style.
Syros n'aime pas trop les voyages dans l'espace^^, mais ils ne sont pas maniaques non plus :))
n'empêche que j'aimerai bien faire un space op un jour et que je sais que selon toute proba, ce ne sera pas avec eux :wink:
tanpiche


sinon j'ai tendance à penser comme le navire
je rajouterai ceci, "c'est uniquement bon pour la france" ou la sf (barjavel étant mis de côté) est un repaire de sales gauchistes athées depuis pas mal de temps
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Message par Eons » ven. janv. 15, 2010 2:22 pm

Don Lorenjy a écrit :
Eons a écrit :Et quid des romans de SF dont l'auteur voulait simplement raconter une histoire ?
Tu n'empêcheras jamais les lecteurs d'y trouver des questionnements concrets ou abstraits.
Et d'y trouver/voir des choses que l'auteur n'a jamais eu l'intention d'y mettre, et parfois même réellement pas mis du tout. :wink:
Les beaux livres, c’est aussi par ici : www.eons.fr

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dracosolis
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Message par dracosolis » ven. janv. 15, 2010 2:23 pm

Eons a écrit :
Don Lorenjy a écrit :
Eons a écrit :Et quid des romans de SF dont l'auteur voulait simplement raconter une histoire ?
Tu n'empêcheras jamais les lecteurs d'y trouver des questionnements concrets ou abstraits.
Et d'y trouver/voir des choses que l'auteur n'a jamais eu l'intention d'y mettre, et parfois même réellement pas mis du tout. :wink:
il n'y a pas d'histoire innocente
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Message par Eons » ven. janv. 15, 2010 2:28 pm

dracosolis a écrit :
Eons a écrit :
Don Lorenjy a écrit :
Eons a écrit :Et quid des romans de SF dont l'auteur voulait simplement raconter une histoire ?
Tu n'empêcheras jamais les lecteurs d'y trouver des questionnements concrets ou abstraits.
Et d'y trouver/voir des choses que l'auteur n'a jamais eu l'intention d'y mettre, et parfois même réellement pas mis du tout. :wink:
il n'y a pas d'histoire innocente
Mais il peut y avoir erreur sur la nature du crime.
Les beaux livres, c’est aussi par ici : www.eons.fr

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Message par Lensman » ven. janv. 15, 2010 2:35 pm

Eons a écrit :
Don Lorenjy a écrit :
Eons a écrit :Et quid des romans de SF dont l'auteur voulait simplement raconter une histoire ?
Tu n'empêcheras jamais les lecteurs d'y trouver des questionnements concrets ou abstraits.
Et d'y trouver/voir des choses que l'auteur n'a jamais eu l'intention d'y mettre, et parfois même réellement pas mis du tout. :wink:
D'un autre côté, ça, c'est un des grands plaisirs de la littérature de fiction, que d'y mettre ce qu'on a envie d'y mettre en tant que lecteur, parfois au grand étonnement des auteurs et d'autres lecteurs…
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Message par bormandg » ven. janv. 15, 2010 3:27 pm

Shalmaneser a écrit :
Gérard Klein a écrit :Bien que je perde du temps et le vôtre au lieu de poursuivre ma réflexion de fond et accessoirement de répondre à Shalmeneser qui me semble bien naïf ou bien attardé,
:lol:

Je te remercie de me laisser le choix entre les deux, dans ta grande magnanimité.
Je propose une troisième possibilité: d'une mauvaise foi cosmique. :twisted:
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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