De quoi la fantasy est-elle le nom?

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systar
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Message par systar » mar. nov. 24, 2009 5:51 pm

Mélanie a écrit :
Erion a écrit :Tolkien a toujours revendiqué que le SDA était non-allégorique.
Je ne parlais pas seulement d'allégorie "directe", plutôt d'éléments qui peuvent imprégner le récit de manière moins consciente. L'auteur est le fruit de son époque, et il me semble que ça doit avoir une influence sur son rapport particulier aux mythes.
D'où la question que je posais en ouverture de thread:

en quoi la fantasy est-elle culturellement fille de son époque (et du côté des auteurs, et du côté des lecteurs)?

systar
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Message par systar » mar. nov. 24, 2009 5:53 pm

kemar a écrit :"Donc pas le monde réel."

Comme la SF, donc.
Sauf erreur la science utilisée dans les livres de SF est une science fantasmée, fausse et inapplicable la plupart du temps.
Sauf: en hard science.

(et sinon, va voir sur le site de Roland ce que Sylvie a écrit sur la "bulle de présent", sinon je pense que tu vas entendre parler du pays... :wink: )

Gérard Klein
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Message par Gérard Klein » mar. nov. 24, 2009 6:00 pm

Eons a écrit :
Gérard Klein a écrit :Réflexion faite,
c'est comme Proust traduit en Japonais par un Indonésien qui aurait appris le français à Berne à travers l'enseignement d'un Suisse allemand qui ne connaissait que l'italien comme seconde langue.
T'es sûr ? Parce que le scénar du film ressemblait quand même furieusement à ce que j'avais lu en LdP quelques décennies plus tôt...
Serait-ce une simple coïncidence ? :lol:
J'ai bien écrit:
Il reste l'anecdote. Sans grand intérêt.
Mon immortalité est provisoire.

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Erion
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Message par Erion » mar. nov. 24, 2009 6:04 pm

Mélanie a écrit :
Erion a écrit :Tolkien a toujours revendiqué que le SDA était non-allégorique.
Je ne parlais pas seulement d'allégorie "directe", plutôt d'éléments qui peuvent imprégner le récit de manière moins consciente. L'auteur est le fruit de son époque, et il me semble que ça doit avoir une influence sur son rapport particulier aux mythes.
Oui, mais ça, ce n'est précisément "que" de la littérature. J'ai la flemme de rechercher mon cours, mais si on compare Brazil de John Updike et Good News from Outer Space de John Kessel, on a dans ces deux romans, des cas de changements de couleur de peau. Ca parle dans les deux cas du racisme, sauf que chez Updike, c'est lié à une histoire chamanique, tandis que chez Kessel, c'est une drogue. Le fait de choisir un instrument (en anglais on dirait "device") est typique de l'approche SF.

Chez Tolkien, tout témoignait de sa volonté de créer une mythologie autochtone anglo-saxonne. Il y avait bien une volonté particulière qui a présidé à la structuration du mythe de la Terre du Milieu, une volonté politique, si tu veux. C'est ce qui se rapproche le plus de ce que tu veux dire, j'ai l'impression.

Mais fondamentalement, les outils utilisés ne sont pas les mêmes, le réel est une matière pour la SF, un instrument qui va manipuler nos fantasmes, alors que le fantastique aura tendance à faire l'inverse (se servir des fantasmes pour manipuler le réel), la fantasy n'a pas la prétention de jouer avec le réel (peu de gens se préoccupent de savoir si des gamins peuvent manipuler des épées à deux mains, voyager pendant des mois, et accomplir de tas d'exploits. On sait dès le départ qu'on est dans l'arbitraire de l'auteur). Peut-être que dans la fantasy on établit un jeu entre les fantasmes et les mythes, que l'on met à jour les fantasmes à travers les mythes, que sais-je encore, mais le réel a peu à voir avec ça. Le réel est un décor, le plus souvent, pas un acteur (et dans les rares cas où cela peut arriver, la solution n'est pas dans le monde réel, mais dans le monde alternatif).
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Patrice
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Message par Patrice » mar. nov. 24, 2009 6:11 pm

Salut,
Chez Tolkien, tout témoignait de sa volonté de créer une mythologie autochtone anglo-saxonne.
Euh... Elle existait avant Tolkien cette mythologie.

Il s'est plus créé quelque chose de personnel.

A+

Patrice

kemar
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Message par kemar » mar. nov. 24, 2009 6:17 pm

Erion:

Pas tout à fait d'accord. En SF, combien de vaisseaux se déplaçant à la vitesse de la lumière, de source d'énergie inépuisables, de reconstruction à base de microbots implantés dans les humains?
Et en fantasy on peut prendre nombre de contre exemples où justement on comptabilise le nombre de jours de marches forcées d'une armée( "troie" de Gemmell, "le seigneur des runes"), ou le simple fait de devoir se trouver à manger en route ("le nom du vent", "le banni de recluce", "gagner la guerre"), où les personnages sont traités de façon réaliste pour ce qui est du maniements des armes ("le trône de fer", "gagner la guerre", " la trilogie Loredan", etc, etc)
Si l'on veut comparer SF et fantasy, pitié de ne pas comparer littérature jeunesse/ado fantasy, et romans reconnus de SF.(sinon on peut partir dans du L Sprague de Camp, ou du "Niuork" de Stefan Wul)

La Sf introduit des singularités "expliquées" par des phénomènes pseudo scientifiques, et la fantasy des singularités expliquées par de la magie.(sauf peut être la hard science, je n'en ai jamais lu, ou alors je n'en étais pas conscient)

Célia
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Message par Célia » mar. nov. 24, 2009 6:20 pm

systar a écrit :
Mélanie a écrit : Je ne parlais pas seulement d'allégorie "directe", plutôt d'éléments qui peuvent imprégner le récit de manière moins consciente. L'auteur est le fruit de son époque, et il me semble que ça doit avoir une influence sur son rapport particulier aux mythes.
D'où la question que je posais en ouverture de thread:
en quoi la fantasy est-elle culturellement fille de son époque (et du côté des auteurs, et du côté des lecteurs)?
Une réponse assez contre-intuitive : parce qu'elle porte, à mon avis, un discours profondément subjectif et introspectif qui colle avec celui de la psychanalyse. Je songe à une intuition exprimée par André-François Ruaud dans son récent essai sur la science-fiction chez Mnémos (rétro-pub, s'cusez moi) : une des quasi-constantes de la SF est sa préoccupation pour le devenir de l'humanité, en tant qu'entité collective. (C'est une des raisons pour lesquelles je l'aime bien.)
La fantasy, celle dont je parle ici et que j'apprécie, se focalise sur les processus d'individuation en utilisant ces fameux outils symboliques/métaphoriques - comment devenir soi à partir, et en tenant compte, d'un héritage collectif. Ça correspond à un besoin de régression, au sens de "retour sur soi", qui est peut-être propre à notre époque. Sauf que, comme je l'évoquais plus haut, ça peut répondre tout autant à un besoin de réassurance si l'on y cherche que la confirmation d'un système établi, qu'à une recherche de sens si on s'aventure un tant soit peu au-delà.

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Mélanie
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Message par Mélanie » mar. nov. 24, 2009 6:30 pm

Célia a écrit :Une réponse assez contre-intuitive : parce qu'elle porte, à mon avis, un discours profondément subjectif et introspectif qui colle avec celui de la psychanalyse. Je songe à une intuition exprimée par André-François Ruaud dans son récent essai sur la science-fiction chez Mnémos (rétro-pub, s'cusez moi) : une des quasi-constantes de la SF est sa préoccupation pour le devenir de l'humanité, en tant qu'entité collective. (C'est une des raisons pour lesquelles je l'aime bien.)
La fantasy, celle dont je parle ici et que j'apprécie, se focalise sur les processus d'individuation en utilisant ces fameux outils symboliques/métaphoriques - comment devenir soi à partir, et en tenant compte, d'un héritage collectif. Ça correspond à un besoin de régression, au sens de "retour sur soi", qui est peut-être propre à notre époque. Sauf que, comme je l'évoquais plus haut, ça peut répondre tout autant à un besoin de réassurance si l'on y cherche que la confirmation d'un système établi, qu'à une recherche de sens si on s'aventure un tant soit peu au-delà.
Donc ce serait une littérature de construction de l'individu, là où à l'inverse le fantastique (autre littérature au discours subjectif et introspectif, mais à la démarche différente) parle de désintégration de l'individu ?

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Message par Célia » mar. nov. 24, 2009 6:32 pm

Mélanie a écrit :Donc ce serait une littérature de construction de l'individu, là où à l'inverse le fantastique (autre littérature au discours subjectif et introspectif, mais à la démarche différente) parle de désintégration de l'individu ?
Tu connais mille fois mieux le fantastique que moi, mais oui, ça me paraît une excellente synthèse.

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » mar. nov. 24, 2009 6:33 pm

kemar a écrit :"Donc pas le monde réel."

Comme la SF, donc.
Euh, un postulat c'est comme un axiome.
kemar a écrit :Sauf erreur la science utilisée dans les livres de SF est une science fantasmée, fausse et inapplicable la plupart du temps.
Quel rapport avec le premier postulat ?
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Mélanie
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Message par Mélanie » mar. nov. 24, 2009 6:37 pm

Célia a écrit :
Mélanie a écrit :Donc ce serait une littérature de construction de l'individu, là où à l'inverse le fantastique (autre littérature au discours subjectif et introspectif, mais à la démarche différente) parle de désintégration de l'individu ?
Tu connais mille fois mieux le fantastique que moi, mais oui, ça me paraît une excellente synthèse.
En continuant la comparaison entre les deux genres (et de fait, je connais un peu mieux le fantastique que la fantasy), je dirais qu'un constituant essentiel de la fantasy tient au rapport du personnage avec le monde auquel il appartient - la notion de création d'univers étant au centre du genre - là où dans le fantastique, on peut concevoir des personnages totalement coupés du monde qui les entoure (ce n'est pas systématiquement le cas, mais c'est une des approches possibles). Ce qui rejoint à mon avis, pour la fantasy, cette idée d'héritage collectif par rapport auquel on se construit.

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » mar. nov. 24, 2009 6:38 pm

Mélanie a écrit : je dirais qu'un constituant essentiel de la fantasy tient au rapport du personnage avec le monde auquel il appartient - la notion de création d'univers étant au centre du genre - là où dans le fantastique, on peut concevoir des personnages totalement coupés du monde qui les entoure (ce n'est pas systématiquement le cas, mais c'est une des approches possibles).
Je dirais bien vu.
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kemar
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Message par kemar » mar. nov. 24, 2009 6:42 pm

Roland C. Wagner a écrit :
kemar a écrit :"Donc pas le monde réel."

Comme la SF, donc.
Euh, un postulat c'est comme un axiome.
kemar a écrit :Sauf erreur la science utilisée dans les livres de SF est une science fantasmée, fausse et inapplicable la plupart du temps.
Quel rapport avec le premier postulat ?
Tout à fait, je constate simplement que l'on oppose ici la SF et la fantasy en mettant en avant la crédibilité de la SF de part sa justification "pseudo-scientifique".
La science fantasmée n'est pas plus basée sur les lois naturelles que la magie.

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » mar. nov. 24, 2009 6:43 pm

kemar a écrit :La Sf introduit des singularités "expliquées" par des phénomènes pseudo scientifiques, et la fantasy des singularités expliquées par de la magie.
Ne pas confondre la science imaginaire de la science-fiction et la pseudo-science des hétéroclites, merci.

Sinon, la magie n'explique rien du tout.
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Transhumain
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Message par Transhumain » mar. nov. 24, 2009 6:45 pm

Célia a écrit :La fantasy, celle dont je parle ici et que j'apprécie, se focalise sur les processus d'individuation en utilisant ces fameux outils symboliques/métaphoriques - comment devenir soi à partir, et en tenant compte, d'un héritage collectif. Ça correspond à un besoin de régression, au sens de "retour sur soi", qui est peut-être propre à notre époque. Sauf que, comme je l'évoquais plus haut, ça peut répondre tout autant à un besoin de réassurance si l'on y cherche que la confirmation d'un système établi, qu'à une recherche de sens si on s'aventure un tant soit peu au-delà.
Hum, ça correspond surtout au Bildungsroman, qu'utilse abondamment la fantasy. S'il y a d'ailleurs un socle commun à la SF et à la fantasy, c'est l'articulation de deux modes de découverte d'un monde : "le récit réaliste de l'expérience aveugle dans le monde fictif, et l'éclairage axiomatique du cadre de cette expérience" (JM Salanskis, « FICTION DES MONDES » in ALLIAGE n° 60, juin 2007). Salanskis ne parlait que de la SF, mais on retrouve le même processus en fantasy : le monde fictif se prend lui-même pour objet, en tant que parallèle au nôtre, et en tant que tel, il nécessite une approche systématique et totalisante : l'auteur nous donne un aperçu de ce monde comme monde. Les bons romans de SF et de fantasy font se croiser habilement ces deux modes opposés, l'expérience aveugle, et le regard global. La grande différence entre SF et Fantasy, est évidemment scientifique. Le monde fictif de SF est un monde technique, fondé sur la connaissance actuelle. Le monde fictif de fantasy est un monde magique (et ce, même si aucune magie n'y apparaît).

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