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par Patrice » mar. nov. 24, 2009 10:42 am
Salut,
Depuis pas mal de temps, j'ai appris dans le cadre de mon travail de recherche, à fonctionner par archétypes. En mythologie et folklore, on classe tout, selon diverses méthodes. Le classement le plus couramment utilisé est celui de Anti Aarne et Stith Thompson, concernant les contes populaires (Paul Delarue et Marie-Louise Ténèze l'ont adapté aux contes français), puis celui de Stith Thompson concernant les seuls motifs, éléments eux-mêmes intégrés aux contes ou aux mythes.
Ensuite, il existe d'autres approches comme celle de Propp, brillantes mais un peu trop partiales. Ces classements vont de pair avec l'étude structuraliste des contes et mythes telle qu'elle a été proposée depuis plus d'un demi-siècle par Georges Dumézil ou Claude Lévy-Strauss. Et dans ce domaine, on apprend qu'il n'y a jamais rien de bien neuf, et quand nouveauté il y a, elle fonctionne souvent par inversion de l'ancien. Je généralise, bien sûr, mais c'est pour faire simple.
Du coup, par déformation professionnelle, lorsque je lis une œuvre de fiction, j'ai tendance à la considérer avec un regard structuraliste, à analyser les motifs. Et bien souvent je me retrouve à dire (je l'ai d'ailleurs fait à plusieurs reprises sur ce forum) "Ah, tiens, c'est le conte-type AT xxx".
Et genre de remarque (c'est mon expérience personnelle qui parle, cette fois-ci, je me garderai de généralisé) m'arrive bien plus souvent avec la Fantasy qu'avec la SF. Le "coupable" en est sans doute Tolkien, qui du fait de son activité de scientifique a lui-même construit son œuvre d'éléments tirés du folklore et de la mythologie européenne. Mais lui avait du talent. C'est de ce fait que bien souvent les autres œuvres de Fantasy me tombent des mains, car j'ai souvent l'impression d'un bête recyclage. Mais on ne peut pas toujours faire du neuf avec du vieux. Il faut du talent et de l'imagination pour cela. Je schématise à l'extrême, mais on se retrouve bien trop souvent avec la sempiternelle combinaison prince / dragon / épée / mage.
Autrement dit, j'ai le sentiment que sous couvert d'évasion, de dépaysement, la Fantasy offre en réalité plus au lecteur un terrain connu, déjà balisé et donc rassurant, car très ancien et fréquenté depuis longtemps pour ce qui concerne ses schémas narratifs. On a peu de chance d'y trouver des prises de risques réelles en matière d'idées, contrairement à ce qui se fait en SF. Du coup, seul le style peut faire la différence.
Je le répète, pour qu'on ne me tombe pas dessus en disant que j'assène des vérités, il ne s'agit pas d'un avis général, mais bien de mon regard personnel et donc forcément subjectif. Je n'ai pas la prétention de connaître toute la Fantasy.
A+
Patrice