Fabien Lyraud a écrit :
Comme je l'ai dit, les chercheurs en science de l'information ont posé ce principe : pour chercher une information il faut savoir qu'elle existe. Il en va de même pour une oeuvre pour la chercher il faut savoir qu'elle existe. Cela pose le problème du point d'entrée.
Désolé, Fabien, mais ce n'est plus exactement vrai. Je dirais même que ça devient beaucoup plus complexe que ça.
Je m'explique : les bases de données permettent évidemment de chercher un bouquin précis, par exemple "le dernier roman de Machin". Elles peuvent aussi chercher des "bouquins d'auteurs que je ne connais pas mais dont les sujets ressemblent à ceux de Machin", voire même un sous-ensemble de cette liste classés par "la note obtenue par les évaluateurs du net". Voire même quelque chose d'inattendu, mais dont un échantillon représentatif de la population l'a corrélé avec ce que je cherche. Et les algorithmes sont suffisamment élaborés pour que le résultat soit de plus en plus pertinent. N'en déplaise à ceux qui croient le contraire, le système n'est pas fait pour me vendre obligatoirement le dernier Marc Levy mais pour me vendre "quelque chose qui va me plaire", car ce quelque chose va me fidéliser, me pousser à suivre les recommandations du système et m'encourager à acheter encore. Et ce quelque chose est spécifique à moi, à mes goûts, à mon profil d'achat. Il n'est pas orienté par l'éditeur mais par le marchand, qui se fout en général que j'achète X ou Y, surtout quand X et Y sont des fichiers que je télécharge. Il vaut mieux pour le système que j'achète celui qui me plaît.
L'univers numériques est à base de pointeurs de pointeurs de pointeurs, et ta recherche ou ton surf est un reflet de cela : si tu passes par des portails bien faits, tu trouves des infos ou des références que tu n'as pas cherchées mais qui sont pertinentes par rapport à tes goûts. Et nous sommes tous des contributeurs du système - il suffit de commander sur Amazon, de consulter une page de pub ou de critique, voire de faire une recherche google pour enrichir son profil, pour apporter de la connaissance exploitable par le système.
Je peux donner un exemple voisin : les compagnies aériennes. Je prends souvent l'avion et je finis par avoir un profil passager assez détaillé sur diverses compagnies Européennes. Du coup, quand je prends un billet, je suis pré-réservé sur mes places préférées, j'ai le menu X au lieu du menu Y (que j'aime moins), et tout un tas d'options sont calibrées d'emblée en fonction de mes goûts et desiderata. Je n'y fais même plus attention, sauf quand je décide, comme lors de mon dernier voyage, de prendre un hublot au lieu d'un couloir car il faisait si beau à Amsterdam que j'ai voulu profiter de la vue de la ville. En quelques clicks, j'ai changé mon siège et le système a noté que ce jour-là, j'avais envie d'autre chose - il a également noté que j'effectue le plus souvent ce genre de modification au retour (à l'aller, je bosse dans l'avion donc le hublot ne me sert à rien). Je le sais parce que je suis allé éditer mon profil conservé par la compagnie aérienne... Un jour il saura que, par beau temps, la probabilité que je prenne un hublot est nettement plus élevée.
Le problème du point d'entrée se pose par contre avec un libraire que tu ne connais pas. Si tu demandes, par exemple, "qu'est-ce que vous avez lu de bon en SF ces derniers temps, j'adore les bouquins de Spinrad et la SF prospective à court terme" à un échantillon de libraires, les réponses ne vont pas nécessairement te convenir. Et si tu demandes "de la SF métaphysique", on ne te recommandera peut-être pas "Retour sur l'Horizon"... Sauf si tu connais bien le libraire, et surtout si lui te connaît bien !
Un bon système de recherche et de suggestion, c'est l'équivalent de ton libraire personnel - enfin, ça le deviendra dès que tu lui auras appris ce que tu es et ce que tu aimes.
On a le droit de hurler à cette perspective... Ou d'apprécier les pages d'accueil Amazon customisées...