silramil a écrit :Je comprends tes réticences, mais je pense qu'elles sont en fait infondées. Il faudrait un fil consacré au rapport entre humour et "real deal" pour évoquer ça, mais fondamentalement je pense que la SF d'humour et la SF sérieuse sont des exemples presque de même qualité.
Bien sûr, mes réticences ne proviennent pas d'une question de qualité, et je ne vais pas chipoter sur le caractère fondamentalement SF de certaines oeuvres de Brown, Sheckley ou Roland C. Wagner (les autres sont maintenant inoffensifs, mais ce dernier pourrait encore me tuer!).
Ce que je veux dire, c'est que, lorsque on donne dans le pastiche, la satire, etc, on le fait avec une complicité particulière du lecteur, que l'on pose déjà comme connaisseur d'un genre donné. Quand, dans Brown, une machine à voyager dans l'espace est conçue à partir d'une machine à coudre, ce n'est pas, pour qu'au cours du roman, le lecteur fasse semblant de croire à cette possibilité, mais pour plaisanter sur tous les textes où des scientfiques bricolent des inventions faramineuses dans leur garage. Par contre, dans ces derniers textes, oui, on demande au lecteur de trouver ça plus ou moins plausible. Avec des gradations, mais au moins plausible, et cela participe, de manière fondamentale à mon sens, du fonctionnement de la SF: le lecteur réfléchit à ce qui lui est proposé, et jauge d'une possibilité, probabilité, etc, voire d'une impossibilté assumée (nous ne sommes pas omniscients, non plus...) en fonction de sa vision du monde. Et cette attitude de réflexion n'est pas, comme on lit bizarrement parfois, une prise de tête, mais tout au contraire, un des principaux plaisirs de la SF! (Pour ses lecteurs les plus alumés, on se comprend).
Parce que ce que recherchent les lecteurs en général (de l'aventure, du sentiment, de la poésie, de l'imaginaire débridé, de la belle écriture, du cu, etc.), ça peut se trouver dans TOUTE la littérature. Mais la spéculation, pratiquement pas, il n'y a guère que la SF (je parle de littérature de fiction). On va me sortir Borges, bien sûr. On peut en discuter.
De son côté, la Fantasy (en gros, hein) se préoccupe peu ou pas de sa cohérence vis à vis de la réalité telle que nous la percevons. Ce n'est guère son sujet principal, et il serait bien malvenu de lui reporcher. Elle peut piocher dans tout ce qui peut lui servir (y compris les connaissances les plus sérieuses, les plus documentées) pour son élaboration, évidemment, ce n'est pas le problème.
Par contre, le rapport entre une oeuvre de SF et notre perception de ce qui est "possible" constitue souvent un sujet de débat entre amateurs, et ce n'est pas par hasard: c'est fondamental, ça participe à ce qui fait l'intérêt véritable de la SF.
Maintenant, on peut très bien lire des bouquins de SF et se régaler, sans se préoccuper tellement de cet aspect de la question, et je ne m'en offusque pas du tout! Mais si on veut la caractériser et l'analyser, cela n'a pratiquement aucun sens de ne pas placer cet aspect au centre de l'analyse de la SF.
Oncle Joe