Le truc, c'est que c'est une question d'éducation de l'oreille. Dans ma jeunesse le comble du
tough guy c'était de se ballader avec un patch
AC/DC sur sa veste en jean. L'assurance de se faire repérer comme un ultra violent à tendance déviante qui écoutait de la musique de barbare.
Il y a eu une escalade de la violence musicale ces 15 dernières années, et aujourd'hui,
AC/DC est vu pour ce qu'il est, un groupe qui joue un bon boogie rock pour un public de 7 à 77 ans.
Mais qu'est-ce qui nous dit que ce ne sera pas le cas pour
Slipknot dans 15 ans ?
Bon, ça m'étonnerait, mais l'approche du problème est la même. Continuons avec cet exemple qui est particulièrement parlant. Pour ceux qui ne connaissent pas
Slipknot c'est 9 musiciens (1 chanteur, 1 claviers/sample/machine, 1 bassiste, 1 batteur, 2 percus, 2 guitaristes et 1 DJ), tous masqués et habillés en combinaison de taulards. Tempo moyen 140 bpm (c'est plutôt rapide), rythmique typique Trash avec double grosse caisse, guitare accordée en Do (c'est 2 tons plus "grave" que l'accordage standard), saturation de basse sur les guitares et tout, et tout. Bref : la totale. Première approche quand tu arrives direct de
Richie Blackmore : brutal ! Réaction de rejet quasiment assurée.
Seulement, au lieu d'en rester là, pourquoi ne pas chercher le motif musical ? Chercher le riff, essayer de comprendre la démarche. Et au final pourquoi ne pas se laisser aller sur ce que c'est, un déferlement libérateur de brutalité canalisée ? Une fois l'oreille habituée aux sonorités, l'écoute devient active, et intéressante.
C'est la même chose sur les musiques éléctroniques.
"C'est froid et impersonnel". Stéréotypes ! Parce que
Keith Emerson se branlant la nouille trois quart d'heure derrière son Hammond B3 c'est pas impersonnel peut-être ?
Brian Eno bricolant son Moog pendant un 1/4 d'heure c'est super chaleureux ? Quand on dit musique éléctronique vous pensez
Dance pourrave. Mais c'est exactement le même esprit que les petits groupes de rock qui expérimentent dans leurs garages, seuls les instruments changent, et avec les sonorités qui sont nouvelles et auxquelles il faut parfois s'habituer. Ecoutez une chanson comme
Karma Coma de
Massive Attack,
All Mine de
Portishead, où même la reprise de
Whole Lotta Love par
Perry Farrell (qui d'ailleurs vient du rock, puisque c'était le chanteur de
Janes Addiction), et vous me direz si c'est dénué d'émotion. Ecoutez
Firestarter de
Prodigy, ou
Where's Your Head At de
Basement Jaxx, et vous verrez si ça envoie pas le bois. Jetez aussi une oreille sur les
Wiseguys ou les
Dub Pistols et vous verrez que ça peut aussi être ludique.
C'est marrant parce que vous êtes tous capables de faire preuve de vachement de curiosité sur un livre, mais en musique la première approche est définitive. N'en restez pas aux premières impressions, creusez. C'est comme quand j'entends un mec me dire en parlant de groupes de rock qui ont des DJ's :
"Ouais, j'écoute pas, c'est du rap !". Je ne relève même plus et je me contente de noter dans un coin de ma tête de ne plus parler musique avec le sieur. Et quand bien même ce serait du rap, où est le problème ?
Après, on est libre d'aimer ou de ne pas aimer, par exemple 95% de ce qui se fait en rap m'emmerde, mais au moins je sais pourquoi, et je sais pourquoi j'aime bien les 5% restants.
Jean a écrit :Je trouve plutôt l'état actuel de la scène musicale étonnant de mièvrerie.
Exemple ? Parce qu'en ce moment, ce que j'entends aurait plutôt tendance à se radicaliser.
"Ueeuuggthhhg", laissa échapper Caity. Ce qui aurait pu vouloir dire n’importe quoi.