Plagiat ou influence ?

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Fred Combo
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Plagiat ou influence ?

Message par Fred Combo » lun. sept. 04, 2006 3:55 pm

Allez, c’est la rentrée, je lance un sujet.

Ce week-end, j’ai lu “la vallée hors du temps”, une novella de Robert Silverberg. En gros, c’est l’histoire d’un groupe de personnes, humains et E.T. qui se retrouvent, pour des raisons mystérieuses, dans une vallée entourée d’un champ de force infranchissable (sauf en un point). Tant qu’ils restent dans cette vallée, ils se trouvent à l’abri des maladies et de la mort. Si l’un d’entre eux est tué, il ressuscite, s’il y a un blessé, ses blessures cicatrisent presque instantanément. Question nourriture, pas de problème non plus, à heures régulières, une « manne » tombe du ciel pour les sustenter.

Ca vous rappelle quelque chose ?

Nombre d’entre vous auront certainement fait le rapprochement avec la série « le monde du fleuve » de Philip José Farmer.

Alors une certaine question, qui me taraude l’esprit depuis pas mal de temps, a refait surface. Comment tracer la limite entre l’influence, le pastiche, l’hommage et le plagiat ? Entre "Le seigneur des anneaux" et "l'épée de Shannara" ?

Loin de moi l’idée de jeter la pierre à l’un ou l’autre de ces auteurs, dont j’admire l’œuvre depuis longtemps, (sauf pour l'épée de Shhhhh…) Mais quiconque s’est essayé à la création a pu se trouver un jour ou l'autre face à ce problème : on transpire sur une histoire, on la termine tant bien que mal, on la peaufine et, essayant modestement de dissimuler sa fierté derrière le prétexte d’une critique franche et sans détour, on la fait lire à un(e) pote(esse) qui vous rétorque sans pitié : « Ca a déjà été fait par Phil Dick (ou Iain Banks, ou Robert Sheckley, etc…)

Aaaaarrrrggghhhh !!!!! :evil:

Et vous, les amis, qu’en pensez-vous ?

Et même si vous n’en pensez rien (ce dont je doute), n’avez-vous jamais été troublés par ce genre de lectures (dans Hypérion, pour citer un exemple « au hasard ») ?
En avez-vous d’autres exemples à citer ?
Et finalement, est-ce que ça vous dérange vraiment ? :roll:
Si tu ne fais pas une histoire de ta vie, un jour tu seras dans l'histoire de quelqu'un d'autre.
Sir Terry Pratchett

jeanser
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Message par jeanser » lun. sept. 04, 2006 4:10 pm

Bizarrement, ce qui me fait dire comme toi que ça ressemble à Farmer, c'est qu'il s'agit d'une vallée...
Par ce que sinon, le côté immortel et nourriture tombée du ciel, après tout, j'imagine qu'il existe d'autres cas similaires, non ? Le côté vallée (donc indirectement on pense à la présence d'un cours d'eau...), ça, c'est limite, oui...

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Message par jlavadou » lun. sept. 04, 2006 4:39 pm

La première question à se poser est : la nouvelle de Silverberg est-elle parue avant ou après le bouquin de Farmer ?

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sandrine.f
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Message par sandrine.f » lun. sept. 04, 2006 6:27 pm

1957 pour le Silverberg, 1953 pour la toute première version du Farmer.

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Eric
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Message par Eric » lun. sept. 04, 2006 6:59 pm

Ce n'est pas parce que le genre de littérature que nous lisons offre des possibilités sinon virtuellement infinies, au moins plus développées qu'en blanche, que le nombre d'histoires à raconter n'en est pas moins fini.

Puisque tu citais le Silverbob, c'est lui qui disait dans l'itw qu'il nous avait accordée - mais il n'est pas le seul - qu'une bonne histoire naît d'un conflit (avec une autre personnage ou avec un état de fait quelconque). Il est donc fatal, qu'à un moment ou un autre, deux auteurs ait la même idée d'un conflit. C'est le traitement qui en fait toute la valeur.

On peut, dans le même ordre d'idée - et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres - rapprocher Kalimantan de Shepard, de la Cité des Crânes de Day, mais ce sont deux traitements différents.

Après, on peut être influencé par un auteur. Toujours dans le cas de Silverberg, il a avoué avoir voulu avec Les Profondeurs de la Terre, faire son Au coeur de Ténèbres de Conrad. Il faut le savoir pour le voir. Alors certes, les influences sont parfois mal digérées, et ça se remarque, mais c'est simplement embarassant pour l'auteur influencé.

Le plagiat en revanche, correspond à une définition stricte, parfaitement cadrée par la loi. C'est la repompe pure et simple.
"Ueeuuggthhhg", laissa échapper Caity. Ce qui aurait pu vouloir dire n’importe quoi.

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Fred Combo
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Message par Fred Combo » mar. sept. 05, 2006 9:43 am

Il est donc fatal, qu'à un moment ou un autre, deux auteurs ait la même idée d'un conflit. C'est le traitement qui en fait toute la valeur.
Oui, bien sûr. Silverberg a raison. Eric aussi, du même coup. C'est avant tout une question de "talent".

Un roman sur les vampires n'est pas (forcément) une resucée (hinhinhin) de Dracula. Dans un roman policier, il y a forcément un meurtre et une enquête : heureusement que ces histoires ne sont pas toutes traitées de la même façon.

Mais dans le cas Farmer vs Silverberg, le filet se resserre un peu plus.

Ca m'a fait un peu la même impression que si quelqu'un avait écrit une histoire qui se passe sur la lune, avec des personnages schizophrènes, paranoïaques, hébéphrènes, etc... Ca m'aurait immédiatement fait penser à Dick (les clans de la lune Alphane). D'ailleurs, c'est un peu ce qui se passe dans Requiem pour PK Dick de M. Bishop, si je me souviens bien, mais là, c'était voulu.

C'est un peu comme en musique, finalement. Si une reprise des Ramones traitée comme du doo-wop "a capella" peut donner un résultat intéressant, il n'y a pas de raison pour qu'une reprise de Silverberg par Farmer soit mauvaise.

O.S. Card le dit dans son manuel d'écriture (il est en ce moment dans le tiroir de mon bureau) : "Si vous essayez de tout lire en vue de ne pas répéter une idée dont on s'est déjà servi, cela vous rendra fou." Et plus loin "les idées véritablement neuves sont rares".

D'ailleurs, les idées neuves existent-elles vraiment ? Les catégories actuelles de la SF (planet op'; space op'; cyberpunk; steampunk et autres) ne sont pas nées d'idées nouvelles. On peut en trouver les traces en remontant jusqu'à Lucien de Samosate ou même la bible (encore une histoire de vallée et d'immortels...), ou moins loin, Mary Shelley, Wells, Gustave Le Rouge, etc...

Bon, en simplifiant, si on considère que la naissance d'un sous-genre (type cyberpunk) coïncide avec une idée nouvelle, depuis combien de temps n'y-a-t-il rien eu de neuf en SF ?

Est-ce que vous voyez une nouvelle tendance se dessiner ? Quel sera le prochain sous-genre ?
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Eric
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Message par Eric » mar. sept. 05, 2006 11:02 am

Est-ce que le Cyberpunk correspond à l'émergence d'une idée neuve ?

Perso, je suis assez sceptique. C'est plus probablement l'emergence d'une nouvelle esthétique, donc d'un nouvelle mise en forme d'une intrigue classique. Neuromancien n'a rien de révolutionnaire dans l'histoire. C'est même assez classique. En revanche c'est assemblage de références parfaitement assimilées, et surtout de références qui ne sont pas exclusives au genre.

Des idées neuves... mmmoui... large débat. Je ne pense pas que la source soit tarie, du moins dans le propos. Ne serait-ce que parce qu'il arrive encore à l'homme de penser de temps en temps. Egan est indéniablement un des grands agitateurs de concepts du moment, Vinge aussi lorsqu'il avance l'idée de la Singularité. Maintenant, si l'on excepte les variations de mise en forme, est-ce que la manière dont ils mettents leurs idées en oeuvre d'un point de vue scénaristique est si neuve que ça ?

La manière d'écrire une histoire n'a pas réellement changée depuis qu'Aristote l'a formalisé dans la Poétique (si l'on excepte les tentatives des quelques vrais expérimentateurs comme Burroughs ou Joyce, et qui ont souvent laissé les lecteurs perplexes). Donc fatalement, on se retrouve souvent avec une impression de familiarité.

Mais est-ce que la recherche de la nouveauté à tout prix n'est pas un peu vaine, et même parfois dangereuse pour l'intégrité de l'histoire ?
"Ueeuuggthhhg", laissa échapper Caity. Ce qui aurait pu vouloir dire n’importe quoi.

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