silramil a écrit :Sur le carnet de recherches de
ReS Futurae, un appel aux chercheurs intéressés par la science-fiction,
pour l'exploitation des archives et manuscrits déposés à la BnF.
Début de cette note :
De tous les possibles qui s’ouvrent à la recherche littéraire sur la science-fiction, l’une des voies encore les moins explorées en France est celle de la génétique des textes. Génétique doit bien sûr s’entendre ici dans un rapport à la genèse de l’art : l’étude des carnets, correspondances et manuscrits sert à reconstituer l’élan créateur ayant abouti à l’engendrement d’œuvres remarquables. Plus qu’une exhumation de documents d’archive, la génétique littéraire vise à ressusciter les actes et les choix des auteurs. Le chercheur s’efforce de détecter sous les hésitations, les ratures et les ajouts les processus délicats qui ont déterminé la forme définitive des textes.
Bon, je n'ai pas d'hostilité particulière contre le projet... mais la métaphore-support hérisse littéralement le prof de bio en moi.
Pourquoi invoquer l'ADN et la génétique dans ce genre de projet ? scientifiquement, l'image ne tient pas. A quelques exceptions prêt, l'ADN, les causes génétiques constituent la part innée des fonctions biologiques. Du coup, la génétique littéraire recouvrirait alors tout ce qui
ne dépend pas de la volonté de l'auteur ou de son vécu, mais découle de son hérédité.
Et même si on va chercher les sens modernes donnés à l'ADN hors contexte biologique, c'est ambigu : "c'est dans notre ADN" évoque généralement quelque chose qu'on ne peut changer, qui est constitutif (d'une entreprise, d'un parti politique, d'une catégorie sociale).
Bien plus, en biologie l'approche "génétique" prend aujourd'hui un sens quasi-péjoratif, puisqu'il s'agirait de l'approche la plus réductionniste d'un mécanisme, avec une lecture des causalités reposant sur un dogme écrit dans les années 1960, selon lequel toute l'information suit immuablement un flux ADN => ARN => Protéines. Aujourd'hui, pour ne pas paraître primaire un scientifique se doit de prendre en compte d'autres flux d'information, qu'il appellera édition d'ARN, épigénétique, plasticité génomique, épissage alternatif...
Bref, je peux comprendre que l'adjectif "génétique" soit utilisé dans un sens inhabituellement large de "qui a trait à la genèse". Je peux même comprendre qu'on file la métaphore en parlant d'ADN.
Mais je ne peux que le déplorer.
Allez, j'arrête de râler et je laisse les "vrais littéraires" s'exprimer...