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SF française et politique
Posté : jeu. févr. 08, 2007 6:48 pm
par Patrice
Salut,
Je me souviens plus très bien mais je me demande s’il n’y avait pas une collection qui s’appelé «Ici et maintenant»
C'était chez Kesselring, à la fin des années 1970, une collection centrée notamment autour de la revue
Alerte.
Or la dite collection et la dite revue ont tout de même fédéré les meilleurs auteurs de l'époque: Frémion, Andrevon, Jeury, etc., et les illustrateurs les plus prometteurs (Bilal).
On tire beaucoup sur la SF politisée des années 1970, mais à vrai dire, c'était quand même bien plus lisible que celle du groupe Limite. C'était une SF qui avait des choses à dire, et qui souvent était assez bien écrite.
Et quand Jean-Marc se démarque de ce genre, je note tout de même que personnellement, j'ai lu son premier roman,
Temps blanc comme un très bon roman de cette SF "politisée". Ben oui... Mais je me suis peut-être trompé dans mes impressions.
En tout cas c'était une SF à mon avis prenante dans son genre, libre, sauvage, crue, qui donnait claque sur claque. Dans ce style, ça rappelle un peu ce que faisait Thomas Day à ses débuts.
En tout cas, c'est un genre qu'il est absurde d'opposer aux autres. J'ai pu lire ça comme j'ai pu lire de grands space opera. Il faut savoir varier. La répétition est mortifère.
A+
Patrice
Re: SF française et politique
Posté : jeu. févr. 08, 2007 7:33 pm
par OapTao
Patrice a écrit :
Or la dite collection et la dite revue ont tout de même fédéré les meilleurs auteurs de l'époque: Frémion, Andrevon, Jeury, etc., et les illustrateurs les plus prometteurs (Bilal).
Oui, et aussi Joëlle Wintrebert, Pierre Pelot, Jean-Pierre Hubert...
Patrice a écrit :Et quand Jean-Marc se démarque de ce genre, je note tout de même que personnellement, j'ai lu son premier roman, Temps blanc comme un très bon roman de cette SF "politisée". Ben oui... Mais je me suis peut-être trompé dans mes impressions.
Non, d'ailleurs j'écris toujours de la SF politique (
Jihad, Aqua...) Simplement, la SF française avait le vent en poupe dans les années 70 (hé oui) et on a publié à peu près n'importe quoi, du meilleur (ceux cités plus haut) et du pire (que je ne citerai pas). J'ai eu personnellement ma deuxième nouvelle publiée dans
Alerte ! n°3. Kesselring n'avait peut-être pas un goût très sûr, mais il avait des couilles, faut le reconnaître.
Limite, en revanche, est apparu au moment où la SF française ne marchait plus très bien, comme "une tentative de renouvellement du genre". Ils se sont plantés, tant pis. Mais ils reviennent ! (chez La Volte, avec un CD en prime pour mieux faire passer la pilule). Ceci dit, de là aussi sont sortis de très bons auteurs, comme Francis Berthelot et Emmanuel Jouanne, s'il avait continué (je garde un très bon souvenir de [/i]Nuage
, paru chez Laffont A & D).
Toute expérience mérite a priori d'être tentée, et peut générer des perles. Cf La Volte justement.
Cela dit, gardons à l'esprit l'adage de Sturgeon : "90% de n'importe quoi est de la merde" (Il devait avoir reçu sa feuille d'impôts ce jour-là)
Jean-Marc
Re: SF française et politique
Posté : jeu. févr. 08, 2007 8:46 pm
par jerome
OapTao a écrit :Patrice a écrit :
Or la dite collection et la dite revue ont tout de même fédéré les meilleurs auteurs de l'époque: Frémion, Andrevon, Jeury, etc., et les illustrateurs les plus prometteurs (Bilal).
Oui, et aussi Joëlle Wintrebert, Pierre Pelot, Jean-Pierre Hubert...
[/i]
Oué, y'avait du bon. Tiens je rajouterais Patrice Duvic pour Naissez nous ferons le reste. Et puis après, et encore aujourd'hui, on a eu aussi les Wagner, Ayerdhal, Serge Lehman...
Re: SF française et politique
Posté : ven. févr. 09, 2007 12:05 am
par Eric
jerome a écrit :Tiens je rajouterais Patrice Duvic pour Naissez nous ferons le reste.
Tiens, en parlant de SFF ratée, justement...
Trop caricatural ou pas assez absurde, en tout cas, ce livre, pour moi, rate sa cible. Mais c'est vrai que l'exercice de la politique en SF est toujours assez casse-gueule (comme en polar d'ailleurs). Difficile d'éviter le didactisme ou le pontifiant.
Re: SF française et politique
Posté : ven. févr. 09, 2007 7:08 am
par jerome
Eric a écrit :jerome a écrit :Tiens je rajouterais Patrice Duvic pour Naissez nous ferons le reste.
Tiens, en parlant de SFF ratée, justement...
Trop caricatural ou pas assez absurde, en tout cas, ce livre, pour moi, rate sa cible. Mais c'est vrai que l'exercice de la politique en SF est toujours assez casse-gueule (comme en polar d'ailleurs). Difficile d'éviter le didactisme ou le pontifiant.
Marrant ça. Dans mon souvenir c'est un excellent bouquin. Il m'avait mis une bonne claque...
Posté : ven. févr. 09, 2007 8:01 am
par Eric
Alors ne le relis pas.
Re: SF française et politique
Posté : ven. févr. 09, 2007 11:51 am
par BC
Patrice a écrit : On tire beaucoup sur la SF politisée des années 1970, mais à vrai dire, c'était quand même bien plus lisible que celle du groupe Limite. C'était une SF qui avait des choses à dire, et qui souvent était assez bien écrite.
C'est ton opinion, on peut ne pas la partager. Moi j'y voyais une littérature dégoulinante de bons sentiments écologico-gauchos, qui illustrait bien l'idée qu'avec de bons sentiments, etc...
Je suis de ceux, nombreux, que ça a dégouté de la SF française à laquelle je ne reviens aujourd'hui qu'avec réticence. Du coup, j'ai raté l'épisode Limite, je n'ai pas d'avis là-dessus.
Cela dit, dans le monde anglo-saxon aussi on avait à la même époque de la SF politique sans intérêt. Mutatis mutandis (là bas, c'était plutôt le féminisme, l'anti-racisme, le militantisme homo...). Mais là-bas, il n'y avait pas que ça...
Re: SF française et politique
Posté : ven. févr. 09, 2007 1:27 pm
par marc
Patrice a écrit :On tire beaucoup sur la SF politisée des années 1970, mais à vrai dire, c'était quand même bien plus lisible que celle du groupe Limite. C'était une SF qui avait des choses à dire, et qui souvent était assez bien écrite.
Pour qui? Je suis du même avis que BC. Ce genre a plutôt découragé de lire de la SF Francophone. Je mettrai la New Wave des années 70 dans le même panier.
Re: SF française et politique
Posté : ven. févr. 09, 2007 1:28 pm
par OapTao
BC a écrit :Moi j'y voyais une littérature dégoulinante de bons sentiments écologico-gauchos, qui illustrait bien l'idée qu'avec de bons sentiments, etc...
Je suis de ceux, nombreux, que ça a dégouté de la SF française à laquelle je ne reviens aujourd'hui qu'avec réticence. Du coup, j'ai raté l'épisode Limite, je n'ai pas d'avis là-dessus.
Cela dit, dans le monde anglo-saxon aussi on avait à la même époque de la SF politique sans intérêt. Mutatis mutandis (là bas, c'était plutôt le féminisme, l'anti-racisme, le militantisme homo...). Mais là-bas, il n'y avait pas que ça...
Je pense que c'était l'époque qui voulait ça : on n'était pas encore très loin de Mai 68, les auteurs qui écrivaient à cette époque l'avaient vécu, et croyaient encore (naïvement) qu'à force d'enfoncer le clou ils finiraient par changer le monde. Ceci dit, les bons auteurs sont restés bons, et les mauvais ont disparu... Et ce malgré le méchant retour de bâton des années 80, années "fric" et golden boys, triomphe du capitalisme etc. La SF française a pris un méchant coup dans la gueule à cette époque. Puis - hormis le groupe Limite (à l'influence quand même très... limitée – sont arrivés plein de jeunes auteurs (grâce au Fleuve Noir notamment) qui n'en avaient rien à foutre de ces querelles de clocher entre "SF politique" et "SF littératurante", avaient juste envie de raconter de bonnes histoires comme celles qu'ils aimaient (peu importait d'où elles venaient) et qui en ont eu l'opportunité grâce au Fleuve surtout, à Denoël un peu, et à J'ai Lu parfois (les anthos "Univers").
Maintenant la donne a bien changé : les auteurs survivants de ces années-là (dont je suis) ont dû sacrément ramer pour survivre (du moins ceux qui n'ont pas un autre métier plus lucratif) et sont condamnés soit à faire des bouquins costauds qui se remarquent (et se vendent), soit à écrire vraiment beaucoup (donc un peu du tout-venant), soit à se diversifier dans leur métier (édition, animations scolaires, conférences etc). Et les "grands" éditeurs offrant leur chance aux nouveaux ayant à peu près déclaré forfait (Fleuve Noir, Denoël, J'ai Lu), sont apparus plein de "petits" éditeurs (en ligne ou sur papier) qui jouent justement ce rôle... mais n'en vivent pas ou mal, et en tout cas ne font pas vivre leurs auteurs. Les temps sont durs, ma bonne dame, et seuls les meilleurs survivront !
Re: SF française et politique
Posté : ven. févr. 09, 2007 1:48 pm
par marc
OapTao a écrit :Maintenant la donne a bien changé : les auteurs survivants de ces années-là (dont je suis) ont dû sacrément ramer pour survivre (du moins ceux qui n'ont pas un autre métier plus lucratif) et sont condamnés soit à faire des bouquins costauds qui se remarquent (et se vendent), soit à écrire vraiment beaucoup (donc un peu du tout-venant), soit à se diversifier dans leur métier (édition, animations scolaires, conférences etc). Et les "grands" éditeurs offrant leur chance aux nouveaux ayant à peu près déclaré forfait (Fleuve Noir, Denoël, J'ai Lu), sont apparus plein de "petits" éditeurs (en ligne ou sur papier) qui jouent justement ce rôle... mais n'en vivent pas ou mal, et en tout cas ne font pas vivre leurs auteurs. Les temps sont durs, ma bonne dame, et seuls les meilleurs survivront !
Question bête, Jean-Marc. Pourquoi tout ces auteurs ne se sont pas tourner vers une SF plus grand public, plus commerciale ? Maintenant ils font figure d 'espèce en voie d'extinction. Si ce n'est déjà le cas.
Posté : ven. févr. 09, 2007 1:55 pm
par Papageno
Effectivement mais les bons sont toujours la, (Pelot, Andrevon..) et d’autres sont partis. Je me suis toujours demandé pourquoi Michel Jeury (pour moi l’un des plus grands) à finalement choisi d’œuvrer de roman de Terroir. Ce qui fait que, chez les gens biens on écrira encore «Ecrivain qui après quelques œuvres de jeunesse dans le domaine fantastique…» (pas dire SF, ça fait sale)
Re: SF française et politique
Posté : ven. févr. 09, 2007 3:32 pm
par OapTao
marc a écrit :
Question bête, Jean-Marc. Pourquoi tout ces auteurs ne se sont pas tourner vers une SF plus grand public, plus commerciale ? Maintenant ils font figure d 'espèce en voie d'extinction. Si ce n'est déjà le cas.
Qu'est-ce que tu entends par "grand public" et "commerciale" ? Faire du Werber, du Dantec, du Star Wars ? Ou écrire ce que l'on aime, sur des sujets qui nous tiennent à cœur ? On souhaite tous, je pense, qu'après avoir passé x mois (ou années) à bûcher dur sur un bouquin qu'on juge ambitieux (comme Aqua™, comme ceux de Bordage ou d'Ayerdhal, comme Les futurs mystères de Paris de Roland par exemple), que notre éditeur les défende, que les critiques et le public les remarquent, qu'ils se vendent (voire - on peut toujours rêver - qu'ils soient traduits à l'étranger ou adapés au ciné ou à la télé). Si on avait la recette de ce qui est "grand public" ou "commercial" ou simplement marche, (on = les auteurs et les éditeurs), crois-moi, on l'appliquerait ! Mais il n'y en a pas. Il y a un système commercial qui privilégie ce qui marche déjà, des éditeurs qui vont "mettre le paquet" sur tel ou tel bouquin parce qu'ils "sentent" que ça va marcher (parfois ils se plantent), ou des "coups" en fonction de telle ou telle actualité... et le reste relève du plus grand mystère. Pourquoi Harry Potter, écrit par une instit au chômage, a-t-il cartonné de la sorte alors que
tous les éditeurs jeunesse disaient "le fantastique ça marche pas" et "un bouquin qui dépasse les 200 pages, c'est invendable". Maintenant ils veulent tous des séries à 500 pages le volume ! Mais ce qui fonctionne une fois ne fonctionnera pas forcément toujours. Actuellement c'est la fantasy qui cartonne, alors écrivons de la fantasy ! Mais le marché en devient tellement inondé (majoritairement de sous-merdes) que forcément le soufflé va retomber un jour. Pourquoi
Hypérion se vend-il mieux que
Le chant du cosmos ou
Omale ? C'est pas forcément parce qu'Hamilton est meilleur que Wagner ou Genefort, mais parce qu'Hamilton a un agent qui sait le vendre, un éditeur qui sait exporter, parce que nos éditeurs à nous sont frileux et ont de tout temps privilégié la SF anglo-saxonne, au prétexte justement qu'"ils" savaient mieux écrire de la SF que les français... Dans les années 50-60, si un auteur de SF français voulait avoir quelque chance d'être publié, il devait prendre un pseudo anglo-saxon et faire du sous-Asimov ou du sous-Van Vogt. Même si aujourd'hui ce genre d'ostracisme n'a plus trop court chez les éditeurs (quoique... cf J'ai Lu), le public a été conditonné à préférer la SF anglo-saxonne, qui bénéficie d'un sacré rouleau-compresseur commercial face aux petits motoculteurs que sont les éditeurs français. Mais heureusement, les choses bougent peu à peu, tout doucement, des auteurs français commencent à se faire un nom et atteindre des chiffres de ventes corrects, mais c'est long...
Posté : ven. févr. 09, 2007 3:32 pm
par rmd
Papageno a écrit :Je me suis toujours demandé pourquoi Michel Jeury (pour moi l’un des plus grands) à finalement choisi d’œuvrer de roman de Terroir.
Parce que ca permet de mieux vivre ? Quand tu vois l'audience qu'ont Jeury ou Pelot avec leurs romans de terroir, ca se comprend.
Posté : ven. févr. 09, 2007 3:35 pm
par OapTao
Papageno a écrit :Je me suis toujours demandé pourquoi Michel Jeury (pour moi l’un des plus grands) à finalement choisi d’œuvrer de roman de Terroir.
Parce que Jeury gagne 10 fois plus (au bas mot) en écrivant des romans de terroirs que de la SF... Y a pas de mystère, si on a choisi de devenir écrivain professionnel, faut en vivre ! Donc il y a parfois des choix douloureux à faire.
Ceci dit, il aurait pu mener de front ces deux "carrières". J'ignore pourquoi il a abandonné totalement la SF. Trop vieux, peut-être, plus assez d'idées, ou le roman de terroir est plus facile ? Je ne sais pas.
Re: SF française et politique
Posté : ven. févr. 09, 2007 4:21 pm
par marc
OapTao a écrit :Qu'est-ce que tu entends par "grand public" et "commerciale" ? Faire du Werber, du Dantec, du Star Wars ?
Oh non ! Je pensais simplement à du Bordage, Wagner ou Genefort à titre d'exemple.
OapTao a écrit :le public a été conditionné à préférer la SF anglo-saxonne
Dans mon cas cela fait 38 ans que je lis de la SF principalement anglo-saxonne. Avec quelques écarts francophones. Mais je compte bien rectifier le tir...
OapTao a écrit :Mais heureusement, les choses bougent peu à peu, tout doucement, des auteurs français commencent à se faire un nom et atteindre des chiffres de ventes corrects, mais c'est long...
J'ai l'impression qu'en fantasy ce fossé à déjà été comblé, alors qu'en SF cela tarde un peu.
OapTao a écrit :Pourquoi Hypérion se vend-il mieux que Le chant du cosmos ou Omale ? C'est pas forcément parce qu'Hamilton est meilleur que Wagner ou Genefort, mais parce qu'Hamilton a un agent qui sait le vendre, un éditeur qui sait exporter, parce que nos éditeurs à nous sont frileux et ont de tout temps privilégié la SF anglo-saxonne, au prétexte justement qu'"ils" savaient mieux écrire de la SF que les français...
Y a t-il une solution pour renverser la situation? Ce qui permettrait de ne plus avoir de préjugés face à la SFF (ou du moins d'en avoir beaucoup moins qu'actuellement).