Patrice a écrit :Salut,
Je viens de visionner la petite vidéo de promo concernant ce livre, et je dois avouer que mes craintes semblent se concrétiser (mais reste à voir si ce qui est dit dans la vidéo se retrouve dans le livre)...
Ainsi, que les deux auteurs s'expriment sur l'Antiquité et le Moyen Âge, c'est à la limite du n'importe quoi. Circé, par exemple, n'a absolument rien d'une fée: c'est, comme Médée, une magicienne, une sorcière (voir Alain Moreau, Le Mythe de Jason et Médée. Le va-nu-pied et la sorcière, 1994, Paris, Les Belles Lettres, pour une bonne définition). Quand à Lilith, son cas est bien différent: il s'agit vraisemblablement d'une ancienne déesse-mère sumérienne passée à la moulinette biblique et donc diabolisée.
Pourtant les exemples de créatures féériques abondent dans la mythologie gréco-romaine: nymphes, dryades, hamadryades, méliades, etc. Sans compter les autres mythologies.
De même, pour le Moyen Âge, la situation n'est pas aussi simple. Voir la thèse de Laurence Harf-Lancner à ce sujet (Les Fées au Moyen Âge. Morgane et Mélusine ou la naissance des fées, 1984, Paris, Champion). La sexualité ici n'est pas ce qui importe le plus (même si elle est bien présente dans les récits qui en parle). C'est surtout la maternité: la fée est à l'origine d'un lignage (comme Mélusine pour les Lusignan).
Par contre explorer les aspects psychanalytiques pour l'époque moderne me semble une bonne idée. Mais là, ça sort de mes compétences.
Je suis chiant, hein?
A+
Patrice
Bonjour Patrice,
A propos du Moyen-Age tout d'abord, nous développons l'aspect duel de la fée, d'un côté les fées maternelles, rassurantes, dont la figure emblématique est bien sûr Mélusine (voir la fiche consacrée à Mélusine comme figure du matriarcat), et de l'autre le versant sexué de la fée à travers le modèle morganien, les "fées amantes" telles que les nomme Laurence Harf-Lancner (dont l'excellent travail est effectivement une de nos sources principales!).
Pour ce qui est de Circé, tu as tout à fait raison: elle est définie comme magicienne, mais elle vient nourrir les personnages de fées que l'on retrouve au Moyen-Age (dans les lais en particulier) puis au 16ème siècle, dans le Roland furieux. La fée Alcine, dans cette oeuvre de l'Arioste, est une exhumation de la magicienne, de même qu'Armide dans La Jérusalem libérée. (voir à ce sujet l'article de Didier Souiller, Circé après Jean Rousset, du corps maniériste à la théâtralité baroque). C'est au regard de ces références intertextuelles que nous avons intégré la magicienne au corpus des "ingrédients" qui ont donné naissance à un certain modèle de fée!
Voilà quelques éléments de réponses, tout est bien sûr développé dans le guide
Pour le reste, le guide des fées, s'il se base sur un travail de recherche appronfondi a pour vocation de s'adresser au grand public, et il est un ouvrage synthétique, un voyage qui se veut précis mais agréable à lire autour de la construction plurielle et surprenante du "corps" de la fée!
Virginie