Message
par Gérard Klein » ven. août 31, 2012 1:13 pm
Je n'ai pas examiné la question récemment mais je ne crois pas que les choses aient beaucoup changé à quelques % près.
Disons que l'écart extrême sur la marge brute HT peut aller de 33% à 50% mais presque toujours s'établit entre 35 et 45%.
Le circuit est plus compliqué qu'il n'a été dit.
À côté des distributeurs gros et moins gros, il y a les grossistes.
Les petits libraires n'ont généralement pas accès à l'office des éditeurs et à leurs distributeurs et ils se fournissent donc auprès de grossistes qui prennent évidemment leur marge au passage.
D'autre part, il est évidemment beaucoup moins coûteux pour les distributeurs de fournir une palette d'un best-seller voire de quelques titres à une grande surface, spécialisée ou alimentaire, que de faire parvenir à un libraire trois exemplaires d'un titre. Cela se répercute dans les marges. Sans même parler des frais de gestion qui sont les mêmes pour un exemplaire et pour mille livrés d'un coup.
Tout cela pousse à la gestion par ordinateur qui est évidemment catastrophique pour les petits et moyens tirages.
Le rôle d'Amazon, s'agissant des livres papier est loin d'être négligeable, tout spécialement en province où il y a ou y avait beaucoup de petites librairies et où le choix des disponibles est limité. En deux clics et trois jours, le client obtient tout ce qu'il veut. Dans un cas que je connais bien mais sur lequel je ne peux pas être plus explicite (non ce n'est pas Ailleurs et demain), 15% des ventes se font désormais par Amazon, et la croissance est rapide.
Je dois dire que quand je suis en Bretagne et que j'ai besoin d'un livre, je passe par la FNAC ou Amazon, ce que je ne faisais pas il y a cinq ou dix ans. Comme je l'ai déjà expliqué, aller le chercher et plus que probablement le commander à Lannion, représente une à deux heures de déplacement et deux à trois litres d'essence.
Ces phénomènes sont cumulatifs. Dans le cas de Borders, même si le réseau était sans doute fragile, Amazon (entre autres) l'a achevé. Et dans un pays où il y a déjà très peu de librairies, la commande via Internet devient obligatoire pour la majorité des acheteurs. Dans les grandes surfaces, on ne trouve que les best-sellers, voire que les super best-sellers.
C'est aussi un facteur qui pousse au numérique aux USA. Pourquoi attendre deux ou trois jours, voire une semaine, pour recevoir le livre acheté alors qu'il peut être obtenu quasi instantanément. La situation en Europe est très différente, avec des réseaux denses de librairies et de maisons de la presse, sauf peut-être en G.B.
Bury my heart at ... disait mon ami Brian Aldiss.
Pour répondre à la question redoutable de je ne sais plus qui, ma boule de cristal me suggère que le basculement du papier vers le numérique, soit à plus de 50%, se fera en France dans les cinq à dix ans (plutôt dix, probabilité très asymétrique), ce qui prolonge ce que j'écrivais il y a environ cinq ans.
Toute la question est de savoir 50% sur quoi.
Le nombre de titres? Aucun intérêt.
Le C.A.? Les droits d'auteur? C'est ça qui compte.
Mon immortalité est provisoire.