bormandg a écrit :Puisque tu as expliqué le cas général, Jérôme, ne serait-ce pas le moment de détailler plus précisément le cas d'ActuSF? On devine à travers tes généralités les énormes risques que présente la loi pour votre maison, mais tu pourrais développer ce cas précis; laisser à Gilles Dumay ou à Olivier Girard le soin d'expliquer ce qu'il en est pour le Bélial, qui est dans un autre cas de figure...
Pour nous, les choses se passent à deux niveaux.
D'abord on a quelques titres chez Relire. On va donc faire opposition. Cela concerne aussi des titres qu'on va ou qu'on a publié uniquement en numérique.
Ensuite les risques sont pour nous de deux ordres.
- On y regardera à deux fois avant de rééditer un titre. Imaginons qu'on ait des vues sur un vieux Vance ou Silverberg. S'il existe déjà en numérique, on se posera de plus en plus la question d'une réédition en papier. En gros, on prend de plus en plus en compte dans un projet de livre la part de la version numérique. Si cette part est enlevée, à voir si on fera quand même le papier. Pour rééditer un titre, il faut qu'il soit indisponible depuis quelques années. S'il est dispo en numérique, on perd un argument... Rééditer un livre, c'est aussi faire un boulot sur le fond, faire redécouvrir un titre ou un auteur, bosser sur une trad si c'est un étranger... Tout ça, Relire le balaie... En terme de patrimoine, s'il y aura beaucoup plus de choses disponibles, il vivra moins.
- Dans les premières discussions, il était question via cette loi de mettre en numérique 600 000 titres en 3 - 4 ans. Cela pose donc le souci de la visibilité de nos titres en numérique. Le numérique c'est un marché qui est tout petit et qui touche un petit nombre de lecteurs. On sent bien aujourd'hui que la problématique, ce n'est pas tant de mettre en ligne un fichier ebook, mais bien de lui donner une chance de se vendre avec un peu de visibilité. Sur le site emaginaire.com que l'on gère, on a aujourd'hui en magasin 170 000 livres disponibles (dans tous les genres, cuisine, jeunesse, bd, sf...). Imaginez ce chiffre multiplié par quatre. En tant qu'éditeur cela va accroître nos difficultés à être visible. C'est le même phénomène que la surproduction en librairie et tous les problèmes que cela pose (et là je parle en tant qu"éditeur hein. Cela a aussi des avantages pour les lecteurs en terme d'offre). Comme nous sommes de petits éditeurs, nous sommes d'autant plus sensibles à tout cela. Parce que les gros best sellers ne sont pas chez nous. Les gens continueront à acheter en numérique le Trône de Fer. Continueront-ils à acheter Skin Trade ou Dragon de Glace ?
On est bien d'accord que ces deux écueils sont secondaires par rapport aux auteurs qui doivent défendre leurs droits. Simplement Relire est pour nous une difficulté supplémentaire. Mais ce n'est qu'une difficulté de plus. La situation en librairie est bien plus inquiétante. En tant que "petit éditeur", on est très sensible au marché dans sa globalité. Et en ce moment, les signaux ne sont pas très bons. La situation de Virgin par exemple est très très inquiétante. On perd pas mal de points de ventes. Idem pour Chapitre. Ce sont des gros clients.