akhenatonej a écrit :Donc, vous n'avez jamais emprunté un seul livre, ni jamais acheté un seul livre d'occasion, ni lu une seule ligne par-dessus l'épaule de quelqu'un ?
Si, mais j'achète 99% de ce que je lis pour les raisons que j'ai indiquées ci-dessus. Roland C. Wagner a pris de son temps pour écrire "La saison de la sorcière". J'ai pris du plaisir à le lire, il me parait donc juste au sens philosophique du terme de payer le livre pour qu'avec mon argent Roland C. Wagner puisse acheter une chose qui lui procurera autant de plaisir que j'en ai pris à lire son livre.
Je vais essayer d'être court, simple et concis — et donc, forcément réducteur.
Lorsque j'étais adolescent, je n'achetais pratiquement aucun livre neuf. C'était un luxe pour moi, et je me souviens encore avec émotion du jour où mon père m'a payé mon premier Ailleurs & Demain. J'osais à peine le lire.
Tout mon argent de poche passait dans l'achat de livres d'occasion. J'avais cinq francs d'argent de poche, un Fleuve Noir d'occasion en valait en général deux. Donc, la première semaine, j'en achetais deux au bouquiniste du marché, et je gardais le franc qui restait pour en acheter trois la semaine suivante.
De temps à autre, mes parents me payaient un livre neuf ; inutile de dire que je leur demandais alors un titre d'un de mes auteurs préférés : Thirion, Spinrad, Moorcock, Heinlein, etc.
Mais pour découvrir ces auteurs, il avait fallu que j'achète un de leurs livres d'occasion. Donc, que je les lise sans leur avoir apporté un seul centime.
Je suis tenté de faire le parallèle avec le téléchargement illégal.
Allez, je le fais.
Si j'avais pu télécharger sans payer des bouquins de science-fiction quand j'avais treize-quatorze ans, je l'aurais fait. Et puis j'aurais acheté les livres des auteurs que j'aimais, et de préférence dans de "belles" éditions : CLA, Ailleurs & Demain, Anti-Mondes, Dimensions, etc.
D'ailleurs, je l'ai fait.
Enfin, autant que possible.
Je ne pense pas que la culture doit être gratuite, mais je pense que l'accès à la culture doit pouvoir être gratuit pour ceux qui n'ont pas les moyens.
Un autre exemple qui me vient à l'esprit, c'est celui de ces nombreuses compilations de garage rock, éventuellement psychédélique, que j'ai achetées pendant des lustres sans savoir que la plupart d'entre elles étaient "illégales", car ceux qui les publiaient ne payaient pas un sou aux artistes concernés.
Du point de vue des artistes en question, ça n'aurait rien changé si j'avais téléchargé leurs morceaux. Ils n'auraient touché ni moins, ni plus.
Pourtant, j'ai
payé ces disques, permettant à des disquaires et des labels de gagner de l'argent. Et, si c'était à refaire, je le referai sans hésiter, quoique avec un petit pincement au cœur.
Quand l'industrie musicale a décidé d'assassiner le vinyle, dans les années 80, j'ai acheté énormément de vinyles d'occasion, parce qu'entre un CD à cent cinquante francs et un vinyle à dix francs sur une brocante, y avait pas photo.
Mais ça ne m'a pas empêché d'acheter des CD (ou, surtout, des vinyles
neufs) d'artistes auxquels j'étais très attaché, et je continue à le faire.
Alors, merci d'avoir acheté un de mes livres, et d'avoir versé une somme sur laquelle j'ai touché 7 ou 8 %. Honnêtement, ça me touche — et non seulement je respecte ton point de vue, mais je le partage.
Seulement, je comprends et je partage aussi le point de vue de celui qui n'a pas de sous et qui va acheter le même bouquin d'occase, ou l'emprunter à un ami ou en bibliothèque.
C'est pourquoi j'ai mis un certain nombre de textes en téléchargement libre et gratuit (ce qui ne m'empêchera pas de les republier sur papier tôt ou tard). Je ne mets pas le lien, parce que ce thread n'est pas l'endroit approprié, mais la page où les liens sont réunis (avec d'autres textes, le plus souvent théoriques, de Sylvie Denis, Claude Ecken, Ugo Bellagamba et même Norman Spinrad) n'est pas difficile à trouver.
Peut-être le fait de les mettre ainsi à disposition va-t-il à terme me faire perdre de l'argent, peut-être va-t-il m'en faire gagner… je n'en sais rien, et là n'est pas la question.
Mais, au moins, je laisse le choix à mes lecteurs potentiels. Je leur laisse la possibilité de prendre connaissance de mon travail et de décider s'ils veulent, en achetant mes livres, m'aider à continuer à le faire.
Télécharge-moi
Je t'en donne le droit
(Pour Hadopi, Olivier Paquet a posé l'une des bonnes questions.)