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par Le_navire » ven. juin 20, 2008 10:57 am
Aldaran, je ne considérais pas que tu m'attaquais, ma réponse n'était donc en rien réactive, et si elle t'a paru agressive, je te prie de m'en excuser.
Je vais donc considérer, jusqu'à plus ample informée, que l'agressivité de ton post à mon égard n'est due qu'à cette mauvaise interprétation de départ : on respire, on recommence...
Des gens qui se suicident, il y en a tous les jours, et les raisons d'arriver à ce geste extrême sont toujours multiples et compliquées. Quand bien même on a voulu accuser les éditeurs d'avoir étés de gros méchants de ne pas prendre La Conjuration, les rendre par leur soi-disant aveuglement, responsables du suicide du garçon, hein... y a de la marge. Et puis on s'en fout ce n'est pas le sujet. Le sujet, c'est que ce livre méritait ad minima d'être retravaillé, que l'auteur a toujours refusé de le faire, mais que son suicide a bel et bien servi d'argument de vente aux éditeurs. Je n'en conclue qu'une chose, c'est que ce n'est pas le bon contre-exemple pour traiter du problème suivant : peut-il y avoir des manuscrits de qualités qui ne trouvent pas preneurs ? Oui, si l'auteur ne vise pas le bon éditeur, mais non s'il a vraiment une démarche globale et ne s'arrête pas aux deux ou trois qu'il a choisi pour des raisons obscures et variées, et encore moins s'il est capable de travailler main dans la main avec un éditeur qui aimera son livre pour l'améliorer.
Quant à passer à côté de "petites merveilles", un éditeur est aussi une personne qui a des sensibilités propres, des goûts particuliers, et aucun livre au monde ne faisant l'unanimité, il pourra ne pas aimer un titre que son voisin préfèrera, ou trouver qu'il ne correspond pas à sa politique éditoriale. D'où l'intérêt d'avoir des éditeurs différents, variés, et multiples dans leurs choix. D'où aussi le problème de certains auteurs qui ont tendance à mal piger le système et à n'envoyer leur texte qu'à trois ou quatre grandes maisons.
Autre cas de figure, celui de l'auteur qui (pour de bonnes ou de mauvaises raisons), ne veut pas toucher son texte. J'ai dans mes cartons un manuscrit que j'adore mais qui mérite d'être sérieusement découpé. L'auteur (et lui, j'aurais tendance à comprendre son point de vue) ne veut plus y toucher. Résultat, je me tâte, et je me tâte encore... Alors en plus, quand l'auteur vous prend de haut parce qu'il a pondu un chef d'œuvre, hein ?
Ce n'est donc en effet pas l'expérience qui est la seule donnée du jugement d'un éditeur, je confirme. MAIS, seul un éditeur d'expérience aura la capacité à retravailler un texte avec l'auteur de manière que je qualifierai de professionnelle : amener un auteur à donner le meilleur de lui même sans être directif, c'est un boulot qu'on apprend pas en claquant des doigts. Faut pas déconnéner...
Et ne t'en déplaise, je ne mets pas ma modestie dans mes qualités d'éditeur, cher Aldaran. J'ai plein d'endroits où la coller, mais je ne vois pas en quoi mon expérience et la qualité de mon travail devraient être rabaissées pour s'ajuster à tes critères ou à ceux de quelqu'un qui n'a aucune expérience de la chose. Ce serait au mieux, hypocrite, au pire, ridicule. Tu ne demanderais pas à un médecin de reconnaitre les qualités d'un première année de médecine comme équivalente aux siennes, que je sache.
Editeur, c'est un métier, point barre.
D'où l'importance qu'à pour moi, l'affichage "non pro" de quelqu'un qui démarre avec son cœur plutôt qu'avec son expérience : comme ça, les auteurs sont prévenus ; leurs exigences devront être différentes, leurs attentes aussi et comme ce sera leur choix, personne ne risquera d'être blessé et le travail éditorial sera respecté à sa juste valeur. Et les pros, pas seulement les éditeurs, pourront du coup être attentifs et protecteurs, plutôt que méfiants et vexés qu'on rabaisse leurs compétences avec autant de légèreté...
Donc Fredericque, tu m'as comprise, j'espère : le problème n'est pas les "plates-bandes" piétinées, mais bien le respect du métier...
"Ils ne sont grands que parce que vous êtes à genoux"