News 30 : manipulation médiatique (merci Systar)

Insolites, drôles ou étonnantes, voici les news scientifiques sélectionnées régulièrement par l'ami Bull. Mais vous pouvez vous aussi y poster vos infos. (attention à la rigueur scientifique)

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Bull
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News 30 : manipulation médiatique (merci Systar)

Message par Bull » dim. oct. 12, 2008 4:51 pm

Tout d'abord les faits :

1) La dépêche AFP qui a fait la "Une" de Yahoo :
Un gène responsable de l'éjaculation précoce identifié

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Utrecht, Pays-Bas - Des chercheurs de l'université d'Utrecht, aux Pays-Bas, pensent avoir identifié un gène responsable de l'éjaculation précoce.
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L'étude a permis de mettre en évidence une version d'un gène, contrôlant la sécrétion de sérotonine, différente chez les hommes souffrant d'éjaculation précoce. Près de deux cents hommes ont été étudiés suite à cette découverte. 89 d'entre eux, souffrant d'éjaculation précoce ont ainsi été chronométrés par leurs partenaires afin de savoir au bout de combien de temps ils éjaculaient lorsqu'ils faisaient l'amour. Leurs résultats ont ensuite été comparés à ceux de 92 hommes qui n'ont jamais connu de troubles de l'éjaculation. Au final, les chercheurs ont mis en évidence un taux de sérotonine plus faible chez les hommes souffrant d'éjaculation précoce.

Pour la psychothérapeute sexuelle Paula Hall, cette découverte génétique n'exclut pas totalement les causes psychologiques de ce désordre : "Il n'est peut-être pas purement psychologique mais il peut tout de même y avoir des facteurs psychologiques." Pour la thérapeute, l'éjaculation précoce aurait cependant des aspects positifs. Selon elle, les hommes souffrant de ces troubles auraient "de très bons réflexes" et "seraient de très bons joueurs de tennis ou de jeux vidéo par exemple".
2) l'abstracte de l'article :
Serotonin Transporter Promoter Region (5-HTTLPR) Polymorphism is Associated with the Intravaginal Ejaculation Latency Time in Dutch Men with Lifelong Premature Ejaculation

Paddy K.C. Janssen, Pharm.D,*† Steven C. Bakker, MD, PhD, † Janos Réthelyi, MD, ‡ Aeilko H. Zwinderman, PhD, § Daan J. Touw, Pharm.D, PhD, ¶ Berend Olivier, PhD,*,** and Marcel D. Waldinger, MD, PhD*††

*Section of Psychopharmacology, Department of Pharmaceutical Sciences and Rudolf Magnus Institute for Neurosciences, Utrecht University, Utrecht, the Netherlands; † Complex Genetics Section, DBG-Department of Medical Genetics, University Medical Center Utrecht, Utrecht, the Netherlands; ‡ Department of Psychiatry and Psychotherapy, Semmelweis University, Budapest, Hungary; § Department of Medical Statistics, Clinical Epidemiology and Biostatistics, Academic Medical Center, University of Amsterdam, Amsterdam, the Netherlands; ¶ Apotheek Haagse Ziekenhuizen, The Hague, the Netherlands; **Department of Psychiatry, Yale University School of Medicine, New Haven, Connecticut, USA; †† Department of Psychiatry and Neurosexology, HagaHospital Leyenburg, The Hague, the Netherlands
Correspondence to Marcel D. Waldinger, MD, PhD, Department Psychiatry and Neurosexology, HagaHospital Leyenburg, Leyweg 275, 2545 CH The Hague, the Netherlands. Tel: +31-70-210-2086; Fax: +31-70-210-4902; E-mail: md@waldinger.demon.nl

Copyright © 2008 International Society for Sexual Medicine
KEYWORDS
Premature Ejaculation • 5-HTTLPR Polymorphism • Genetics • Genotype




Introduction. Lifelong premature ejaculation (LPE) is characterized by persistent intravaginal ejaculation latency times (IELTs) of less than 1 minute, and has been postulated as a neurobiological dysfunction with genetic vulnerability for the short IELTs, related to disturbances of central serotonin (5-hydroxytryptamine [5-HT]) neurotransmission and 5-HT receptor functioning.

Aim. To investigate the relationship between 5-HT transporter gene-linked polymorphism (5-HTTLPR) and short IELTs in men with lifelong PE.

Methods. A prospective study was conducted in 89 Dutch Caucasian men with lifelong PE. IELT during coitus was assessed by stopwatch over a 1-month period. Controls consisted of 92 Dutch Caucasian men. All men with LPE were genotyped for a 5-HTT-promoter polymorphism. Allele frequencies and genotypes of short (S) and long (L) variants of 5-HTTLPR polymorphism were compared between patients and controls. Association between LL, SL, and SS genotypes, and the natural logarithm of the IELT in men with LPE was investigated.

Main Outcome Measures. IELT measured by stopwatch, 5-HTTLPR polymorphism.

Results. In men with lifelong PE, the geometric mean, median, and natural mean IELTs were 21, 26, and 32 seconds, respectively. There were no significant differences in the 5-HTT polymorphism alleles and genotypes between 89 Dutch Caucasian men with LPE (S 47%, L 53%/LL 29%, SL 48%, SS 22%) and 92 Dutch Caucasian controls (S 48%, L 52%/LL 29%, SL 45%, SS 26%). In men with lifelong PE there was a statistically significant difference between LL, SL, and SS genotypes in their geometric mean IELT (P ≤ 0.027); the LL genotypes had significantly shorter IELTs than the SS and SL genotypes.

Conclusions. The 5-HTTLPR polymorphism is associated with significant effects on the latency to ejaculate in men with lifelong PE. Men with SS and SL genotypes have 100% and 90% longer ejaculation time, respectively than men with LL genotypes. Janssen PKC, Bakker SC, Réthelyi J, Zwinderman AH, Touw DJ, Olivier B, and Waldinger MD. Serotonin transporter promoter region (5-HTTLPR) polymorphism is associated with the intravaginal ejaculation latency time in Dutch men with lifelong premature ejaculation. J Sex Med **;**:**–**.


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DIGITAL OBJECT IDENTIFIER (DOI)
10.1111/j.1743-6109.2008.01033.x About DOI
3) Analyse des data :
-La dépêche AFP, que l'on retrouve un peu partout sur internet, notamment sur les sites de médias US parle, en gros, d'une explication génétique pour l'éjaculation précoce

-La conclusion de l'article scientifique laisse entendre, en gros, qu'un polymorphisme génétique est associé avec une augmentation/diminution de "100%/90%" du temps d'éjaculation

-Mais

MAIS


En fait la comparaison entre les 89 hommes et 92 souffrant d'éjaculation précoce ou non n'a montré AUCUNE différence au niveau génétique.

Il s'agit de cette phrase :
There were no significant differences in the 5-HTT polymorphism alleles and genotypes between 89 Dutch Caucasian men with LPE (S 47%, L 53%/LL 29%, SL 48%, SS 22%) and 92 Dutch Caucasian controls (S 48%, L 52%/LL 29%, SL 45%, SS 26%)
Première rectification importante.

Donc tout ces résultats génétiques ne concernent que le sous groupe "Ejaculation précoce" pour distinguer une différence entre une éjacluation en dix, vingt, trente ou quarante secondes.

Pour cela trois groupes génétiques :
Homozygote : LL ou SS
Hétérozygote : LS ou SL

Et bien il semble que pour le groupe LL l'éjacultaion est en moyenne de 13s et que pour le groupe SS, l'éjaculation moyenne est de 26s.

D'où la différence de "100%/90%"

Sachant que le temps d'éjaculation est mesuré par le couple lui-même. Au chronometre.
The couples measured the IELT at home over the following 4 weeks. The female partners had to handle the stopwatch. Couples were instructed not to have interrupted intromission or to change their usual way or frequency of intercourse.
Aucune mesure de la sérotonine n'a été fait. Mais c'est vrai que le gène dont le polymorphisme a été étudié est le gène 5-HTTLPR a un lien avec la sérotonine.


Je laisse maintenant chaqun se faire son opinion.


Mais mon avis personnel :
-La dépêche AFP est fausse
-Les data de l'article sont sur-interprétées et présentées de manière assez troublante

Tout ça parce que "génétique" et "éjaculation précoce" est un sujet qui va très certainement attirer l'attention.


Je trouve tout cela lamentable.

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dracosolis
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Message par dracosolis » dim. oct. 12, 2008 6:00 pm

n'empêche avoir une excuse génétique pour ne pas troubler bibiche, ça c'est cool...
cela dit ça va désespérer ceux qui essayaient techniques tantriques et autres relaxations pour s'en tirer
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Bull
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Message par Bull » dim. oct. 12, 2008 6:07 pm

Ben justement, il n'y a PAS de différences génétique entre les deux groupes (précoce/pas précoce).

Me suis-je confusionné dans mes explications ?

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Message par Herbefol » dim. oct. 12, 2008 6:11 pm

Tu ne t'es nullement trompé, Draco pointait juste le fait que pouvoir invoquer la génétique c'est toujours pratique. Même si c'est faux. :)

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dracosolis
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Message par dracosolis » dim. oct. 12, 2008 6:37 pm

Bull a écrit :Ben justement, il n'y a PAS de différences génétique entre les deux groupes (précoce/pas précoce).

Me suis-je confusionné dans mes explications ?
:D j'ai bien compris

(mais combien d'entre nous ont un Bull rien qu'à eux pour leur démontrer le contraire ? mhm ? (smiley coeur ) )
(non Mâ'âme Bull, frappez pas, c'est pour rire, aïe !)

combien vont quand même sauter sur l'occase ? (puisque pas sur Bibiche ?) 8)

(et là dessus je démonte également à quel point du coup - hum - le truc peut être envisagé d'un point de vue déspérant)
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Erion
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Message par Erion » dim. oct. 12, 2008 7:29 pm

dracosolis a écrit : combien vont quand même sauter sur l'occase ? (puisque pas sur Bibiche ?) 8)
(et là dessus je démonte également à quel point du coup - hum - le truc peut être envisagé d'un point de vue déspérant)
Cela étant, certes, l'éjaculation précoce est gênante (pour les deux), mais on peut se débrouiller pour en donner une interprétation favorable ("promis, la prochaine fois, je penserai à ta mère"), contrairement à l'impuissance.
Donc l'excuse génétique, je ne vois pas l'avantage (parce que, si c'est une corvée, l'impuissance est quand même plus pratique). Je sais que les hommes trouvent des tas d'excuses pratiques, mais je n'en connais aucun qui pratique l'éjaculation précoce par choix....
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Message par dracosolis » dim. oct. 12, 2008 7:40 pm

8) euh
en fait, je connais aucun tennisman non plus...
ceci explique peut-être ma mauvaise appréciation de ce sujet douloureux
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jp the z
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Message par jp the z » dim. oct. 12, 2008 8:53 pm

Ce qui serait interessant c est de savoir comment on donne la preuve qu une chose est d origine genetique ou non.
Suffit il d identifier un gene codant pour une fonction specifique ?
est on sur qu il y a relation biunivoque entre le gene et la fonction?
Plusieurs genes ne peuvent ils pas coder pour une meme fonction ? ce qui voudrait dire que l on ne peut pas tirer de conclusion tant qu on est pas sur d avoir identifie tout les genes.

Au passage, Bull, tu pourrais m eclairer sur le rapport entre la vitesse d ejaculation et la production de serotonine ?

S il n y a pas de difference significative dans le premier groupe et qu il y en a dans le second, alors qu on retrouve les meme populations respectives de genotypes, on ne peut pas en conclure grand chose quand au role du gene suspect.
Le probleme avec ce genre de recherche c est que trop de variables jouent et rendent difficile les arguiments du type "toutes choses etant egales par ailleurs"
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Message par jp the z » dim. oct. 12, 2008 8:57 pm

Une autre question pour Bull : (j ai poste trop vite, je suis un posteur precoce)

dasn un cas d ejaculation rapide, passer de 13 a 26 secondes, c est significatif ?
un difference dans la production de serotonine pleut expliquer ca ?
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Bull
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Message par Bull » dim. oct. 12, 2008 10:23 pm

Beaucoup de questions JP !

Tout d'abord, même si la dépêche de l'AFP a écrit le contraire, la sérotonine n'a PAS été mesuré dans cette étude...

Ensuite, d'après leurs stats, le passage de 13 sec à 26 sec est significatif.

Ce que je remets en cause car la mesure de ce temps n'était pas très fiable.

Entre vingt minutes et moins de trente secondes, OK.

Entre 26 et 13 sec, je suis plus prudent.

Ensuite la relation de cause à effet gène-maladie.


Dans l'ordre des choses :

-Constatation épidémiologique : telle population repéresentant telle pathologie a significativement plus souvent tel gène par rapport à telle population ne présentant pas cette pathologie.

-Donc présence d'un gène suspect.

-Après la "biologie" intervient : fonction de ce gène, régulation, transmission du signal etc...
Egalement des études animales : un animal sain, on lui clone ce gène, il présente la maladie etc...
L'ensemble aboutit à une connaissance au niveau fondamentale de la maladie avec à la toute fin du processus une explication du mécanisme :
Un gène/groupe de gène X puis implication au niveau intra-cellulaire et extra-cellulaire et enfin conséquences phénotypiques.

Mais ça, c'est uniquement à la fin.




Le problème majeur de cet article est, amha, une inversion de ce processus.
Ils ont une explication génétique et métabolique très pertinente et bien appuyé sur les données de la littérature pouvant expliquer le rôle de ce polymophisme génétique précis et le rôle de la sérotonine dans l'éjaculation précoce.

Ils ont donc (enfin c'est l'impression que cela donne) triturer les données épidémiologiques dans tous les sens pour trouver un cas de figure où sortirait un p significatif appuyant leur hypothèse biologique.


C'est faire de la science à l'envers.



Reprenons les fondamentaux :

-Un groupe de 89 sujets avec éjaculation précoce

-Un groupe de 92 sujet sans.


Pas de différence significative dans le polymorphisme étudié.

Donc "End of the story".

Avoir après coup créé des sous populations au sein du groupe "éjaculation précoce", ce qui n'était pas dans le protocol initial, différenciant : éjaculation en dix, vingt, trente sec etc me trouble.

Je n'enterre pas ce polymophisme ou la génétique de manière générale comme cause d'éjaculation précoce.

Mais cet article ne m'a pas convaincu. Du tout.

En tant que reviewer je l'aurai rejeté.

L'éditeur l'a accepté, c'est sa responsabilité.
Hypothèse purement personnelle : même si l'étude est "nulle", la base fondamentale sous-jascente est peut-être correcte. Et ce journal pourra se vanter, si jamais d'autres études dans l'avenir vont dans ce sens, qu'il a été le premier à le publier.

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