systar a écrit :Hello Laurent,
je voudrais évoquer ta thèse Architecture du livre-univers de science-fiction, en te posant quelques questions:
- comment avais-tu délimité le corpus, les 5 oeuvres que tu as analysées? Le choix concernant La Compagnie des Glaces, oeuvre que j'apprécie énormément pour sa générosité et son sens du grand récit populaire, notamment, par quoi fut-il motivé? (car tu aurais pu sélectionner sans doute d'autres oeuvres encore qui avaient l'ampleur d'un livre-univers...)
- comment définirais-tu cette notion de livre-univers, avec le recul? Qu'est-ce qui fait, outre la longueur du texte et la profusion de détails, qu'il y a "univers" et non pas seulement un "monde"?
- Tu avais pu soutenir à l'université une thèse sur la SF. Cela pose, une fois encore, l'éternelle question de la reconnaissance intellectuelle et universitaire du genre SF: celle-ci te semble-t-elle aujourd'hui acquise? compromise? et Si non, te paraît-il important ou urgent d'oeuvrer pour qu'elle s'impose avec une légitimité définitive dans les amphis de lettres, ou bien te semble-t-il préférable qu'elle demeure une littérature des marges, toujours plus ou moins suspecte aux yeux d'un certain public? (ce qui, en un sens, garantirait sa "liberté", en la préservant de l'institutionnalisation...?)
- Si aujourd'hui tu devais choisir un autre corpus, quelles oeuvres relativement récentes intégrerais-tu à ton travail?
Autre question, à propos d'un tout autre thème: il y a sur internet une vidéo où tu devises savamment, avec l'incontournable Serge Lehman, de la théorie de la Singularité, chère à Vernor Vinge. Cette idée d'une sorte de mur absolu auquel toutes les tentatives de prévision de l'avenir (et donc de limite définitive imposée à l'activité de théorisation, de modélisation du réel grâce à des schémas descriptifs et explicatifs) viennent se heurter te semble-t-elle toujours pertinente? Cette idée a-t-elle fait son chemin?
- Le corpus initial que j'avais proposé à Denise Terrel, ma directrice de thèse, se limitait à
Noô. C'est elle qui m'a suggéré de l'étendre au sous-genre que je tentais de définir; voilà pourquoi je l'ai étendu à 5 oeuvres. Je dois dire qu'il ne m'a fallu que quelques minutes pour les trouver, tant les choix me paraissaient évidents.
- Ce serait un peu long de redéfinir ici le livre-univers. La différence avec un "simple" planet opera ou un roman planétaire, se trouve au coeur intime de l'auteur : une thèse, une vision particulière, qui s'exprime à travers le monde décrit et qui fait qu'il ne peut être poursuivi, imité ou décliné par autrui sans qu'aussitôt il se dénature.
- Sur la reconnaissance de la SF à l'université, je ne pourrais te fournir une réponse bien informée. De surcroît, ma soutenance remonte à onze ans. Il faudrait poser la question à un prof en activité, ou un étudiant actuel. Quant au caractère souhaitable ou non du travail universitaire sur la SF... je ne sais pas. Tout ce que je peux dire, c'est qu'étudier la SF a été pour moi un plaisir aussi grand que d'en écrire.
- Aujourd'hui, je crois que le cycle martien de K.S. Robinson répondrait assez bien aux critères.
- Je n'ai moi-même jamais utilisé cette notion de Singularité, qui a quelque chose de tautologique selon moi. Prédire de l'inprédictibilité... En fait, elle a perdu de son sens à force d'être galvaudée. Un peu comme l'effet papillon, théorie mise à toutes les sauces, et à laquelle on a fait dire n'importe quoi.
