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et les enfants?

Posté : lun. juin 21, 2010 4:14 pm
par k_tastrof
On entend les réactions d'adultes sur tes textes pour la jeunesse. Comment réagissent les petits?
As-tu l'occasion de les rencontrer dans l es écoles? sur les salons? ... ?
Sont-ils sensibles à la violence qu'on évoquait ici?
Te font-ils des remarques, des reproches, des demandes?

Kt

Motivations...

Posté : lun. juin 21, 2010 4:43 pm
par Jacques Ah !
:shock: Bien, je viens d'arriver et je suis aussi écrivain, certes moins illustre que toi, Jérome, toutefois une question me semble importante : qu'est-ce qui te pousse à écrire aujourd'hui ?

Les sous, certes, puisque tu vis de ta plume, mais il y a sans doute d'autres facteurs... le bonheur de jouer à être Dieu ? Une quête ? L'envie de raconter des histoire ? Une course désespérée dans le but d'être sain d'esprit ? L'amour que tu portes à tes personnages ? L'ennui ? Le besoin de t'exprimer ? etc... :lol:

Peut-être tout ça à la fois, d'autant que les motivations changent avec les livres qui passent, mais peux-tu nous parler un peu de quelles sont tes motivations actuelles et peut-être les comparer aux motivations que tu avais il y a seulement quelques années ou quant tu t'es dis pour la première "Eh bien, il y a là suffisamment de pages pour faire un roman correct !" ?...

Cordialement. A+. Jake. :?

Posté : lun. juin 21, 2010 5:19 pm
par eidolon
On entend les réactions d'adultes sur tes textes pour la jeunesse. Comment réagissent les petits?
As-tu l'occasion de les rencontrer dans l es écoles? sur les salons? ... ?
Sont-ils sensibles à la violence qu'on évoquait ici?
Te font-ils des remarques, des reproches, des demandes?



Je rencontre une soixantaine de classes dans une année, la plupart niveau collège, quelques lycéens, quelques primaires. Certaines de ces rencontres sont très superficielles, avec leur lot de questions formatées (je n'en fais pas reproche aux mouflets, j'ai la dent moins tendre avec leurs enseignants) et d'inhibitions. D'autres sont plus riches, il arrive même qu'on parle vraiment de littérature. Les plus endurants, aventureux sont les élèves de primaire, on peut les emmener très loin. J'ai, bien entendu des remarques, des reproches (plus rares, à cause de la peur qu'inspirent mon autorité naturelle et l'arme que je porte toujours à la ceinture). Il est arrivé deux trois fois que l'on m'interroge sur la violence, mais c'est rarissime. On ne peut pas dire que le sujet tracasse considérablement mes jeunes lecteurs. Il y a peu, dans une bibliothèque où se trouvaient plusieurs de mes livres, j'ai montré Le Diapason des Mots et des Misères, disant à l'assistance que ce livre-là ne lui était pas destiné. Pourquoi ? m'a-t-on demandé. Et oui, en effet, pourquoi ? Je leur ai répondu que, sans doute, ce livre ne les intéresserait pas, tout simplement, et je leur en ai lu un passage (Shirley's doll). Ils ont ouvert de grands yeux.
J'aime bien quand ils écarquillent les yeux.

Posté : lun. juin 21, 2010 5:46 pm
par eidolon
Bien, je viens d'arriver et je suis aussi écrivain, certes moins illustre que toi, Jérome, toutefois une question me semble importante : qu'est-ce qui te pousse à écrire aujourd'hui ?

Qu'est-ce qui pousse l'homme à s'abîmer dans la résolution d'une grille de Sudoku ? Je ne serai capable de répondre à ta question que lorsque j'aurai résolu celle-ci.



Les sous, certes, puisque tu vis de ta plume, mais il y a sans doute d'autres facteurs... le bonheur de jouer à être Dieu ? Une quête ? L'envie de raconter des histoire ? Une course désespérée dans le but d'être sain d'esprit ? L'amour que tu portes à tes personnages ? L'ennui ? Le besoin de t'exprimer ? etc...

Peut-être tout ça à la fois, d'autant que les motivations changent avec les livres qui passent, mais peux-tu nous parler un peu de quelles sont tes motivations actuelles et peut-être les comparer aux motivations que tu avais il y a seulement quelques années ou quant tu t'es dis pour la première "Eh bien, il y a là suffisamment de pages pour faire un roman correct !" ?...


Ce qui me motive, c'est la curiosité (le truc qui permet de différencier les vivants des morts, en plus de l'odeur). Chaque année, je plante des légumes différents dans mon potager, par curiosité. Parfois, je ne les cueille même pas (j'ai laissé fleurir la moutarde chinoise, elle est devenue imbouffable, mais les fleurs sont jolies). J'écris avant tout par curiosité pour l'objet livresque que je serai (ou non) en mesure de bricoler. J'ai l'esprit entomologique. J'aime observer les insectes, soulever les pierres pour voir ce qui se cache en dessous. L'écriture participe de cette scrutation curieuse. Et ça n'a rien à voir avec le démiurgique, le psychiatrique, ou un quelconque besoin de m'exprimer.

Posté : lun. juin 21, 2010 6:03 pm
par Bruno
Bonjour Jérôme,
eidolon a écrit :C'est ce grotesque de la corporalité à son comble qui m'intéresse et non la violence en elle-même. Ce que les Japonais appellent "guro". C'est un art graphique.
Justement, comment en es-tu venu à t'intéresser à ce grotesque de la corporalité ? Y a-t-il un "acte fondateur", ou est-ce venu au fur et à mesure, une découverte en amenant une autre ?
En outre, considères-tu qu'il y a une part de voyeurisme dans ton intérêt pour ces livres et films glauques/déviants dont tu parles régulièrement ?

Posté : lun. juin 21, 2010 6:20 pm
par Don Lorenjy
eidolon a écrit : Ce qui me motive, c'est la curiosité (le truc qui permet de différencier les vivants des morts, en plus de l'odeur). [...] J'ai l'esprit entomologique. J'aime observer les insectes, soulever les pierres pour voir ce qui se cache en dessous. L'écriture participe de cette scrutation curieuse. Et ça n'a rien à voir avec le démiurgique, le psychiatrique, ou un quelconque besoin de m'exprimer.
J'aime ça, on dirait du Noirez !

Posté : lun. juin 21, 2010 6:22 pm
par arsenie
Bonjour, m'sieur Noirez
Un grand merci pour vos livres, leur rencontre ne fut pas facile ! ... matériellement
Le titre "le diapason des mots et des misères " me fascinait - avant les bonnes critiques du net-
mais impossible à trouver dans les hautes-alpes ou environs !
j'ai fini par le commander directement à l'éditeur - ( une occasion d'être chouchoutée 8)

Mais auparavant, j'ai trouvé en poche "fleurs de dragon" puis "l'empire invisible" -
Je me réjouis que la mention "jeunesse" n'y figure pas, car je me suis régalée!
pareil pour "le shogun de l'ombre"
(vi-vi - je suis un peu attardée pour ma dizaine de lustres, mais pas que!)
Ce type de roman n'existait pas dans ma jeunesse ou celle de mes enfants -
Si j'ai des petits-enfants, un jour, ce sera "Noirez au biberon"!
L'unité que j'ai ressentie est "l'exorcisme de la peur" -pour moi, c'est elle "l'impératrice"invisible ou au masculin, "le shogun de l'ombre"
- je ne crois pas avoir vu une remarque de votre lectorat en ce sens,
Alors - question : est-ce une démarche de votre part?
J'ai aussi apprécié ... la dimension subversive ? et les délires ... de la sake-do et autres
Bonne continuation - encore merci

Posté : lun. juin 21, 2010 6:35 pm
par Fabien Lyraud
Fantasy, fantastique, surréalisme, littérature générale... tu as beaucoup de genre à ton actif. Mais la SF coeur de cible manque encore à ton palmarés. Quand est ce que tu nous écrit un grand space opera avec des vaisseaux, des planètes et des aliens à la façon Noirez ?

Posté : lun. juin 21, 2010 7:30 pm
par eidolon
Rebondissons.
Pouvez-vous nous communiquer une liste des oeuvres cinématographiques qui vous ont profondément impressionné et, éventuellement, préciser dans quel sens ?


Pardon, j'avais laissé passer cette question.
Je cite quelques films, sans commenter parce que je suis flemmard. C'est un pêle-mêle, y a des choses vues autrefois et d'autres plus récemment, dans divers genres...

Harakiri de Kobayashi.
Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper.
L'Aurore de Murnau.
Totoro de Miyazaki.
Elephant de Gus Van Sant.
Un paquet de Buster Keaton.
Ah, et puis, tiens, un western : Le Jardin du Diable... Je ne me souviens plus du réalisateur, mais c'est avec Gary Cooper. J'adore ce film.

Posté : lun. juin 21, 2010 7:36 pm
par eidolon
Justement, comment en es-tu venu à t'intéresser à ce grotesque de la corporalité ? Y a-t-il un "acte fondateur", ou est-ce venu au fur et à mesure, une découverte en amenant une autre ?

Un acte fondateur, je ne crois pas. Le corps m'a toujours paru un truc formidable, car susceptible de se panner la gueule dans un escalier (le mien fait ça admirablement), aptitude dont l'âme est privée. Tout est résumé dans la chair et la langage qui en est le souffle : les plaisirs, les douleurs et la mort. On n'a pas besoin d'autre chose. Il s'agit pour moi d'une sorte de criante évidence.


En outre, considères-tu qu'il y a une part de voyeurisme dans ton intérêt pour ces livres et films glauques/déviants dont tu parles régulièrement ?


Voyeurisme, bien sûr, oui. Comme un type qui va sous le chapiteau des freaks dans une fête foraine. Il ne s'agit pas d'un goût morbide pour le glauque, plutôt d'une certaine attraction pour le bizarre, l'anormal. Mais j'en fais pas une profession de foi. Ce sont des parenthèses que je considère avec une grande louche de second degré.

Posté : lun. juin 21, 2010 7:47 pm
par kibu
Merci M. Noirez.
Je note.

Posté : lun. juin 21, 2010 7:51 pm
par fabrice
Jérôme Noirez, bonsoir. J'ai cru comprendre que vous n'aviez jamais foutu les pieds au Japon, ou en Afrique, ou même au Nevada. Nonobstant d'éventuelles considérations financières, pensez-vous que voyager serait dommageable à vos livres ? En d'autres termes, préférez-vous imaginer les villes et les paysages, voire : pensez-vous que vivre les choses pourrait vous dissuader de les écrire ?
A part ça, on écrit un truc quand tu veux. Mais pas trop gros, hein.

Posté : lun. juin 21, 2010 7:51 pm
par eidolon
Si j'ai des petits-enfants, un jour, ce sera "Noirez au biberon"!

Commencez avec du lait maternel, quand même.

L'unité que j'ai ressentie est "l'exorcisme de la peur" -pour moi, c'est elle "l'impératrice"invisible ou au masculin, "le shogun de l'ombre"
- je ne crois pas avoir vu une remarque de votre lectorat en ce sens,
Alors - question : est-ce une démarche de votre part?


Le second problème des gamins vis-à-vis du livre est qu'ils apprennent durant leur scolarité qu'il est un objet inoffensif, ronflant, sage... (Le premier problème étant qu'on oublie parfois de leur apprendre à lire). Et moi, je leur dis qu'un livre fait pleurer, fait pisser de trouille, suffoquer parfois. La peur est un objet très intéressant à ce titre. Il n'y a pas d'émotion négative dans l'expérience de la fiction. Mes premiers souvenirs de lecture, de lecture intense, sont liés à la peur. Lire englouti dans ses draps des histoires qui font peur, vraiment peur... qui vous engagent... physiquement... Donc oui, c'est une démarche. Absolument.

Posté : lun. juin 21, 2010 7:56 pm
par eidolon
Fantasy, fantastique, surréalisme, littérature générale... tu as beaucoup de genre à ton actif. Mais la SF coeur de cible manque encore à ton palmarés. Quand est ce que tu nous écrit un grand space opera avec des vaisseaux, des planètes et des aliens à la façon Noirez ?


Le space opera, ça va pas être possible. L'espace, ça m'emmerde. C'est comme l'océan, c'est beau vu des côtes, mais quand tu es en plein milieu, putain... Je vais peut-être faire de la sf, pure, dure et blonde comme les blés, mais ça sera pour les enfants et je ferai l'impasse sur le cosmos. Par contre, je promets de donner mon maximum en ce qui concerne les aliens.

Posté : lun. juin 21, 2010 8:09 pm
par eidolon
Jérôme Noirez, bonsoir. J'ai cru comprendre que vous n'aviez jamais foutu les pieds au Japon, ou en Afrique, ou même au Nevada. Nonobstant d'éventuelles considérations financières, pensez-vous que voyager serait dommageable à vos livres ? En d'autres termes, préférez-vous imaginer les villes et les paysages, voire : pensez-vous que vivre les choses pourrait vous dissuader de les écrire ?

Monsieur Colin, bonsoir pareil.

En effet, comme vous le savez, je ne suis pas un grand voyageur. Je ne dirais pas que vivre les choses pourraient me dissuader de les écrire, car, alors, ma prose s'appauvrirait funestement. J'ai, néanmoins, la faiblesse de croire qu'on connaît parfois mieux une contrée, plus intimement, en n'y foutant jamais les pieds, en refusant d'endosser ce statut infâme : celui de touriste. Par contre, si je peux, à loisir, adopter celui de contemplateur, je signe.

A part ça, on écrit un truc quand tu veux. Mais pas trop gros, hein.

Nous avons, hélas, quelques affaires préalables, ayant trait à des sortes de volatiles, à régler, et dont il nous faudra d'ailleurs débattre un de ces quatre.

La bise à votre épouse et à vos enfants.

Votre ami dévoué.