L'Appel de Cthulhu

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erispoe
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Message par erispoe » ven. avr. 01, 2011 7:16 pm

En même temps, même avec l'automitrailleuse et le canon de 75, si tu rates un jet de SAN au mauvais moment...

Omnibus
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Message par Omnibus » ven. avr. 01, 2011 9:17 pm

Ah non effectivement. Mon gardien permissif fonctionnait en conjonction avec un ami plutôt axé action, l'auteur du mythique professeur d'histoire antique, 90% en esquive, 90% en armes à feu, 10% en latin. Et dans les années 20, il trimballait toujours son fusil à éléphant.

Au moins, on était en sécurité.

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Nébal
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Message par Nébal » ven. avr. 01, 2011 9:31 pm

Hum.

Perso, je ne suis pas aussi, euh, "permissif" ni aussi "orienté action"... 8)

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Nébal
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Message par Nébal » lun. avr. 18, 2011 9:38 am

Les Secrets de New York

[...] Cette fois, nous entamons la série des « Secrets », qui décrit des lieux géographiques réels, et y insère des vrais morceaux de Mythe. On commence avec ce qui fut d’ailleurs le premier supplément traduit pour cette 6e édition de L’Appel de Cthulhu, le court volume (environ 150 pages) consacré à Big Apple, « la ville qui ne dort jamais », etc.



Et on va commencer ce compte rendu par un coup de gueule. Bon, d’accord, c’était le premier supplément traduit ; pour ce que j’en ai lu, ça s’est dans l’ensemble amélioré depuis, même si c’est loooooooooiiiiiiiiiiiiiin d’être parfait (c’est le moins qu’on puisse dire) ; mais là, c’était juste une horreur. Avis, donc, aux psychopathes dans mon genre : Les Secrets de New York est traduit et « relu » par dé jens ki sé viziblemant pa ékriturer la fransse, j’eggsajerre à penne. Et putain, c’est atroce. Un petit effort, merde, il coûte quand même 30 €, votre bouquin !

[...] Bon.

Les Secrets de New York, donc. Un supplément dû pour l’essentiel à William Jones. Étrangement court pour une ville aussi gigantesque, mais on aura l’occasion d’y revenir.

On pourrait commencer par se demander : « Pourquoi New York ? »

« Parce que ! »

Oui, merci, cette réponse en vaut bien une autre. Mais on pourrait également noter la puissance symbolique de cette capitale mondiale de la finance qui, dans les années 1920, va connaître le petit incident que l’on sait un certain jeudi noir. On pourrait évoquer aussi – toujours au rang des symboles – sa figure de porte d’entrée de l’Amérique, avec Ellis Island ; et la Statue de la Liberté qui brandit sa torche sur Bedloe Island, juste à côté ou presque…

Mais on pourrait aussi – voire surtout – évoquer Lovecraft lui-même, et son expérience new-yorkaise déterminante pour sa carrière. C’est en effet à New York qu’il a connu le bonheur avec son épouse Sonia Greene, et sa correspondance témoigne de la joie qui l’envahit alors, de la fascination qu’il éprouvait pour cette ville titanesque et animée, qu’il décrivait en termes hallucinés et enthousiastes ; mais c’est aussi là, quelque temps plus tard, qu’il subit les affres du chômage, de la misère… et sombra dans le racisme paranoïaque qui devait déboucher sur les « grands textes ». Rappelons-nous sa tristement fameuse description de la population immigrée du Lower East Side :

« Les choses organiques qui hantent cet affreux cloaque ne sauraient, même en se torturant l’imagination, être qualifiées d’humaines. C’étaient de monstrueuses et nébuleuses esquisses du pitécanthrope et de l’amibe, vaguement modelées dans quelque limon puant et visqueux résultant de la corruption de la terre, rampant et suintant dans et sur les rues crasseuses, entrant et sortant des fenêtres et des portes d’une façon qui ne faisait penser à rien d’autre qu’à des vers envahissants, ou à des choses peu agréables issues des profondeurs de la mer. Ces choses – ou la substance dégénérée en fermentation gélatineuse dont elles étaient composées – avaient l’air de suinter, de s’infiltrer et de couler à travers les crevasses béantes de ces horribles maisons, et j’ai pensé à un alignement de cuves cyclopéennes et malsaines, pleines jusqu’à déborder d’ignominies gangrenées, sur le point de se déverser pour inonder le monde entier dans un cataclysme lépreux de pourriture à demi liquide.

« De ce cauchemar d’infection malsaine, je n’ai pu emporter le souvenir d’aucun visage vivant. Le grotesque individuel se perdait dans cette dévastation collective ; ce qui ne laissait sur la rétine que les larges et fantomatique linéaments de l’âme morbide de la désintégration et de la décadence… un masque jaune ricanant avec des ichors acides, collants, suintant des yeux, des oreilles, du nez, de la bouche, sortant en tous ces points avec un bouillonnement anormal de monstrueux et incroyables ulcères… »

Bien évidemment, je n’entends pas, en reproduisant ce texte aussi répugnant que fascinant ici (« indiscutablement, c’est du grand Lovecraft », nous dit Houellebecq, et je suis largement d’accord), le prendre pour argent comptant ; simplement montrer comment New York peut – et doit – avant tout, dans le cadre d’une campagne de L’Appel de Cthulhu, être une ville de contradictions, où les gratte-ciel ont les pieds dans la fange, et où le Mythe, finalement, peut assez facilement s’intégrer, que ce soit dans les clapiers surpeuplés comme dans le texte ci-dessus, en dessous ou au-dessus, dans les quartiers d’affaires de Manhattan, dans les coins les plus reculés des autres bourgs, etc.

New York – pour les raisons évoquées, mais on pourrait sans doute en trouver bien davantage – présente donc bien des atouts qui en font un merveilleux terrain de jeu pour L’Appel de Cthulhu. Hélas, autant le dire de suite, j’ai pour ma part le sentiment que William Jones n’a pas su tirer parti de ces opportunités pour livrer un supplément à la hauteur (démesurée il est vrai) de son sujet. Avec Les Secrets de New York, c’est en effet la première fois que je suis déçu par un supplément de L’Appel de Cthulhu… Voyons pourquoi.

Le volume – agrémenté de superbes photographies, de nombreuses cartes correctes, et d’illustrations tout simplement hideuses – s’ouvre sur « Festoyeurs des ténèbres », une courte nouvelle de William Jones, donc. En VO, cette histoire de goules d’un genre bien particulier – détaillées plus loin dans le livre – ne devait déjà pas être fameuse ; en « français », elle est illisible. Passons, vite, vite.

Suit le chapitre le plus intéressant – mais bordélique – de ce supplément, « L’Histoire de New York ». Le Mythe s’installe dans la ville dès l’arrivée de la Demi-Lune de l’explorateur anglais au service des Hollandais Henry Hudson, qui pose dans un sens les fondations de ce qui deviendra bientôt la Nouvelle-Amsterdam, puis New York. L’histoire de la ville est ensuite rapidement esquissée jusqu’aux Années Folles, où diverses thématiques sont évoquées (la Prohibition, la Renaissance de Harlem et la question raciale, « L’Autre Moitié », les déplacements en ville, puis les loisirs).

Et on passe ensuite illico aux chapitres descriptifs. Trois sont consacrés à la seule Manhattan (« Uptown Manhattan », « Midtown Manhattan » et « Downtown Manhattan »), puis un dernier aux « Bourgs extérieurs » (Bronx, Queens, Brooklyn, Staten Island). On n’y retrouve pas de système de références chiffrées, comme dans la série des « Terres de Lovecraft », aussi doit-on se contenter des adresses, ce qui n’est pas toujours évident. Mais le vrai problème – à mon sens tout du moins – est ailleurs, et se présente sous un double aspect. D’une part, le « guide » est lacunaire et expéditif ; souvent, il m’a donné l’impression de présenter certaines choses comme allant de soi – sauf que hey, je suis pas new-yorkais, moi… D’autre part – et c’est là surtout que le bât blesse – j’ai trouvé que ces pages étaient relativement pauvres en Mythe. À peine si l’on en trouve un élément toutes les quatre ou cinq pages… Certes, l’excès inverse – un cultiste à chaque coin de rue, un Grand Ancien au sommet de chaque gratte-ciel – aurait été pire encore, mais je trouve que le potentiel d’une ville aussi gigantesque et surpeuplée que New York n’a pas été pleinement exploité. C’est le moins qu’on puisse dire ! On a parfois l’impression de feuilleter un guide touristique – lacunaire, donc –, et on les cherche en vain, ces fameux « secrets » ! Bref, échec sur toute la ligne, ou presque. C’est embêtant…

Restent deux scénarios. « La Demi-Lune » est bon, voire très bon : chouette enquête, avec beaucoup de possibilités, assez délicate ceci dit. Le seul véritable point fort du supplément. « Transgression », par contre, est une vraie merde : désolé, mais ce machin ultra court, moi, je n’appelle pas ça un scénario ; ou alors à la limite une introduction, mais même là, je trouve ça d’un intérêt douteux, et de toute façon pas hyper new-yorkais…

Bref : supplément très décevant. [...]

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Nébal
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Message par Nébal » lun. avr. 25, 2011 9:03 am

Les Secrets de la Nouvelle-Orléans

Après la déception causée par Les Secrets de New York, on poursuit aujourd’hui la série des « Secrets » avec le très bref volume (110 pages ; je crois que c’est le plus court de tous) consacré à la Nouvelle-Orléans, dû essentiellement à la plume de Fred Van Lente.

La Nouvelle-Orléans, outre le fameux épisode de l’inspecteur Legrasse rapporté dans « L’Appel de Cthulhu », semble être le terrain idéal pour une campagne du jeu de rôle éponyme. La simple mention de ce nom – du moins avant les récentes catastrophes qui ont défiguré la région… – est évocatrice de bien des choses : le quartier français, le carnaval, le vaudou, le bayou, les Cajuns… Ce cadre si particulier – à vrai dire unique en son genre – a été exploité à merveille par bon nombre d’auteurs du genre (on pense immédiatement à Anne Rice ou Poppy Z. Brite, mais on pourrait sans doute en citer bien d’autres – en étendant à la Louisiane, prenez par exemple Lucius Shepard). Et les singularités de la « ville croissant » sont à bien des égards éminemment lovecraftiennes : Créoles et Cajuns sont aisément évocateurs de dégénérescence, le vaudou de cultes secrets aux connotations obscures, etc. Rien d’étonnant, dès lors, à ce qu’un supplément pour L’Appel de Cthulhu ait été consacré à « la plus française des villes américaines ».

Encore que cette désignation ait quelque chose d’une imposture, ainsi que je l’ai découvert en lisant ce guide, dès le premier et passionnant chapitre, « Histoire de la Nouvelle-Orléans » : la ville n’a en effet été française que peu de temps, somme toute, puisque, fondée en 1718, elle a été cédée aux Espagnols en 1762, avant d’être retournée à la France (1800), puis vendue avec toute la Louisiane aux jeunes Etats-Unis d’Amérique en 1803. Cela a cependant suffi pour imposer un certain caractère à la ville, comme on aura bientôt l’occasion de le constater. Le reste du chapitre aborde différentes thématiques « d’introduction », de plus ou moins grande importance ; si l’on peut s’attarder sur le jazz et le carnaval, logiquement (mais on y reviendra plus en détail en abordant le guide), le point qui me paraît le plus nécessaire ici concerne « Jim Crow », la ségrégation… Le chapitre se conclut enfin sur des occupations spécifiques à la Nouvelle-Orléans : Chasseur cajun, Propriétaire créole, Hounsi, Musicien de jazz, Capitaine de bateau, Traiteur/Sage-femme.

On passe alors au « Guide du quartier français », le petit centre historique de la Nouvelle-Orléans, mais immanquablement l’endroit qui mérite qu’on s’y attarde. Contrairement à ce que je reprochais aux Secrets de New York, le guide est cette fois très bien conçu : assez clair et complet pour quelqu’un qui n’a jamais mis les pieds à la Nouvelle-Orléans, il dose en outre avec exactitude et sagesse les éléments de Mythe qui viennent infecter le quotidien de la cité. La lecture de l’ensemble est passionnante, regorgeant d’anecdotes et d’amorces de scénarios, et – de même que les autres chapitres – abondamment illustrée par de très belles photographies d’époque. On peut d’ores et déjà noter l’importance qu’accorde le guide aux sociétés secrètes, plusieurs étant décrites au fil de ces pages – l’une d’entre elles, non négligeable bien que d’une influence limitée dans la ville elle-même, étant le Ku Klux Klan, décrit dans le chapitre suivant…

Il s’agit du « guide de l’agglomération » : c’est-à-dire tout sauf le quartier français… C’est dire la spécificité de ce dernier ! Là encore, on pourrait faire les mêmes remarques que précédemment. Inutile donc de s’étendre sur le sujet, c’est du très beau travail.

Chapitre suivant : « guide du bayou ». Après quelques considérations sur les difficultés inhérentes aux voyages dans les marécages, c’est surtout l’occasion d’en apprendre davantage sur les Cajuns, mais aussi sur le forage de pétrole dans les environs de la ville… et enfin sur les événements rapportés dans « L’Appel de Cthulhu ».

Puis, inévitablement : « Vaudou » ! La présentation du culte vaudou est à la fois claire et complète – je n’y connais pas grand-chose, c’est le moins que je puisse dire, mais pour une fois j’ai eu l’impression de dépasser les clichés habituels, sans être noyé sous les informations –, ce qui le rend utilisable en jeu de manière « naturelle ». Cela dit, à mon sens, cela ne va pas sans poser de problèmes : le vaudou des bokors faisant appel aux loas Petro s’inscrit sans problème dans les thématiques du jeu, surtout si l’on considère que ces loas correspondent à des Grands Anciens, comme c’est proposé ; je ne suis pas certain qu’il en aille de même de « l’autre » vaudou, à bien des égards le « vrai », le « bon » vaudou, celui des mambos et houngans, et dans une moindre mesure des docteurs magiciens, faisant appel aux loas Rada, esprits… bienfaisants. Pas très « horreur cosmique et matérialiste », tout ça… Faut voir, donc. Quoi qu’il en soit, le chapitre est très intéressant, et le système indéniablement jouable, complété par un grimoire in fine.

Jusqu’ici, tout va bien. Très bien, même. Hélas, les deux scénarios qui concluent l’ouvrage – le second étant de création française – ne sont franchement pas à la hauteur du guide… « Le Lever du cinquième soleil », qui se veut une introduction à la Nouvelle-Orléans, a beau user du thème du carnaval, il se montre assez peu convaincant. Quant à « Le Guetteur des Marais », malgré le bayou, malgré le Ku Klux Klan, c’est un scénario totalement raté, très dirigiste, trop orienté sur l’action, et manquant cruellement d’ambiance : un comble !

Un excellent guide desservi par deux mauvais scénarios : Les Secrets de la Nouvelle-Orléans vaut à mon sens franchement le détour, mais vos joueurs devront compter sur vos talents de créateur. Ça serait dommage de gâcher un si beau cadre avec des scénarios « moyens »…

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