est-ce que la dépolitisation de la vie publique...

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caliban
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Message par caliban » lun. nov. 28, 2011 12:00 pm

Erion a écrit : Je rebondissais sur l'idée que, finalement, Apple et d'autres, n'auraient été que des
intégrateurs. Outre le fait que Wozniak était un pur ingénieur, je pense que ce qu'a fait
cette génération va bien au-delà. Ce n'est pas juste du design ou de l'ergonomie.
Le "juste" est sans doute un peu violent, en effet. Mais, en termes de composants ou,
plus généralement de technologie hard, ils m'ont toujours semblé très en retrait, et
rarement même à la pointe (et je suis un fidèle client...)

Erion a écrit : Et sinon la techno lourde des années 1990/2000 et rendue possible par les
investissement des années 70, j'en vois une : Internet.
Pour moi, Internet ne se qualifie pas du tout comme de la technologie lourde.
Fondamentalement, son hardware se réduit d'une part à de l'informatique classique,
d'autre part à de l'électronique modérément rapide (modems, etc). Les avancées
essentielles concernant internet stricto sensu auraient pu être développées dans
des garages (et certaines l'ont été...).
On pourrait peut-être, en effet, évoquer les technologies de transport de l'information
à très haut début (fibres optiques, etc.) — mais là, on parle plutôt des années 80/90.

Erion a écrit : On peut aussi évoquer les satellites, avec le GPS dont le premier satellite date
de 1978. Tout ça n'est pas de la technologie purement intellectuelle. Ca demande des
investissements lourds, sur des dizaines et des dizaines d'années, il me semble, non ?
Oui et non. La techno de lancement elle-même est celle des années 50, et les
progrès de l'électronique ne me semblent dépendre que modérément de cette
application particulière.
L'apport des décennies suivantes se ramène à une question de nombre de satellites
en position — chacun étant justifié par un calcul de rentabilité au coup par coup, ou
par un enjeu daté.
Erion a écrit : C'est quand même un investissement planétaire, avec des consortiums, des
organisations transnationales afin de définir des normes.
Là, tu mets le doigt sur un point qui me semble plus pertinent : il y a sans doute en effet
une "technologie" — uh, politique ? organisationnelle ? — de la mondialisation, qui
prend racine dans les années 70. Mais c'est une autre histoire.... (et que tu connais
bien mieux que moi).
MF a écrit : ce qui conduirait à penser (...) que l'auteur de SF, confronté à un lectorat "segmenté"
jusqu'à l'individualité dans ses aspirations politiques, ne peut plus s'adresser à un
ensemble "social" et abandonne ce champ prospectif ? (sauf, peut-être, publication très
pointues)
Brrrrrrrr.
:(

Cela dit, c'est un élément de réponse à ta question initiale.

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MF
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Message par MF » lun. nov. 28, 2011 12:36 pm

caliban a écrit :
MF a écrit : ce qui conduirait à penser (...) que l'auteur de SF, confronté à un lectorat "segmenté"
jusqu'à l'individualité dans ses aspirations politiques, ne peut plus s'adresser à un
ensemble "social" et abandonne ce champ prospectif ? (sauf, peut-être, publication très
pointues)
Brrrrrrrr.
:(

Cela dit, c'est un élément de réponse à ta question initiale.
c'est vrai que ça, ajouté à la difficulté de jouer avec les peurs, ça refroidit...
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

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bormandg
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Message par bormandg » lun. nov. 28, 2011 12:39 pm

caliban a écrit : Bref : il me semble que, faute de créateur majeur dans leurs rangs, les auteurs
d'anticipation des années 60/70 se sont simplement faits les interprètes de leur
génération. Ce qui n'est déjà pas si mal, au vrai.
Je sais, j'aurais du réagir plus tôt, mais c'est seulement maintenant que je lis cette horreur. Herbert? Tu le classes années 50 ou 80? Dick? Farmer? Zelazny?
Ou alors tu leur refuse le qualificatif de créateur majeur?
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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Erion
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Message par Erion » lun. nov. 28, 2011 12:47 pm

caliban a écrit :
Erion a écrit : Et sinon la techno lourde des années 1990/2000 et rendue possible par les
investissement des années 70, j'en vois une : Internet.
Pour moi, Internet ne se qualifie pas du tout comme de la technologie lourde.
Fondamentalement, son hardware se réduit d'une part à de l'informatique classique,
d'autre part à de l'électronique modérément rapide (modems, etc). Les avancées
essentielles concernant internet stricto sensu auraient pu être développées dans
des garages (et certaines l'ont été...).
On pourrait peut-être, en effet, évoquer les technologies de transport de l'information
à très haut début (fibres optiques, etc.) — mais là, on parle plutôt des années 80/90.
Hm, je ne suis pas d'accord si l'enjeu est de considérer la technologie sur le plan de son investissement à long terme. Entre l'Arpanet des années 70 et l'Internet actuel, il y a quand même une structuration massive qui implique des planifications à long terme.
Que ça ne soit pas l'équivalent des centrales nucléaires, je suis d'accord, mais c'est quand même loin d'être du court terme.
Ensuite, ce qui me gène dans ton raisonnement, c'est qu'il semble montrer que l'innovation importante doit concerner le hardware. Est-ce que les idées ne sont pas des innovations majeures ?
Prenons un exemple qui n'a rien à voir avec l'informatique : l'imprimerie. Entre le premier livre imprimé et ce qui paraît au XXe siècle, on peut pas dire qu'il y ait une innovation majeure dans le principe. Pourtant, certaines idées ont profondément changé l'usage et les considérations autour du livre.

Si on ramène ça à notre époque, on peut très bien dire qu'on a toujours la même capacité à projeter des investissements à long terme, mais que ça correspond avant tout à des percées conceptuelles, plus qu'à des avancées techniques. L'informatique personnelle est une percée conceptuelle (vu que beaucoup des concepteurs d'ordinateurs ne voyaient pas très bien ce qu'un individu pouvait faire avec un ordinateur), internet aussi.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/

rmd
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Message par rmd » lun. nov. 28, 2011 12:54 pm

caliban a écrit : Pour moi, Internet ne se qualifie pas du tout comme de la technologie lourde.
Fondamentalement, son hardware se réduit d'une part à de l'informatique classique,
d'autre part à de l'électronique modérément rapide (modems, etc). Les avancées
essentielles concernant internet stricto sensu auraient pu être développées dans
des garages (et certaines l'ont été...).
Hum, quand tu te mets à installer du matériel comme ça, c'est pas vraiment léger.
Après des années de cérémonie du Thé, il n’y a rien de meilleur que de vomir de la Bière.

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Message par dracosolis » lun. nov. 28, 2011 1:24 pm

MF a écrit :
Erion a écrit :L'informatique personnelle fut le choix politique d'une certaine génération.
ce que tu dis là pour l'informatique -faire du personnel ou de l'individu un choix politique- me semble valoir pour de nombreux domaines (média d'information, marketing, accès aux technologies...)

ce qui conduirait à penser que l'engagement politique, qui va de pair avec une notion/vision "collective" de la politique en a pris un coup dans l'aile

et que l'auteur de SF, confronté à un lectorat "segmenté" jusqu'à l'individualité dans ses aspirations politiques, ne peut plus s'adresser à un ensemble "social" et abandonne ce champ prospectif ? (sauf, peut-être, publication très pointues)
c'est toute la notion de collectif qui en a pris un coup dans l'aile, je pense
justement à cause de la segmentation
(sur laquelle joue très bien naboléon)
Antéchrist N°4
Idéologue Relativiste à mi-temps
Antéchrist N°4 :

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Message par Erion » lun. nov. 28, 2011 1:38 pm

MF a écrit :
Erion a écrit :L'informatique personnelle fut le choix politique d'une certaine génération.
ce que tu dis là pour l'informatique -faire du personnel ou de l'individu un choix politique- me semble valoir pour de nombreux domaines (média d'information, marketing, accès aux technologies...)

ce qui conduirait à penser que l'engagement politique, qui va de pair avec une notion/vision "collective" de la politique en a pris un coup dans l'aile
Hm, enfin, il faut se placer dans la problématique américaine, où la libération du potentiel de chaque individu est un projet collectif, s'opposant à un Etat central, éloigné, qui bride cette liberté.

De notre point de vue français et jacobin, c'est un affaiblissement du projet collectif, mais c'est parce que nous avons du mal à concevoir le collectif en dehors du cadre étatique, juridico-légal.
Il y a une trèèèèès longue tradition en France (cf Loi le Chapelier 1791) qui refuse toute organisation en dehors de ce qui est autorisé-légitimé.
A l'inverse, dans les années 70, les Yippies (les hippies les plus extrémistes, pour simplifier grossièrement) n'ont pas besoin d'un cadre légal pour s'organiser, avoir des organes de communication et développer leurs idées (y compris dans le monde informatique).
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Message par JDB » lun. nov. 28, 2011 3:57 pm

Anne a écrit :Oncle Joe, on cause sérieux.

Si tu mets du Dan Simmons, ça va dégénérer.

Marrant mais je viens de réaliser qu'engagé, pour moi, c'était obligatoirement positif et dans mes convictions...
Non, non, l'Oncle a tout compris.
Une preuve récente.
Et je repense à ce mot de Willem : "De tous les curés millionnaires, Schulz est le plus dessinateur."
Par contre, quand Dieu a écrit que Dan Simmons était juif, il se trompait.
JDB
“Miss Judith Lee, vous êtes l’une des choses les plus étranges de ce monde très étrange.”

caliban
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Message par caliban » lun. nov. 28, 2011 7:58 pm

Erion a écrit :
caliban a écrit : Pour moi, Internet ne se qualifie pas du tout comme de la technologie lourde. (...)
Hm, je ne suis pas d'accord si l'enjeu est de considérer la technologie sur le plan de
son investissement à long terme. Entre l'Arpanet des années 70 et l'Internet actuel, il y
a quand même une structuration massive qui implique des planifications à long terme.
Oui et non... Je n'identifie pas d'investissements lourds avant le début des années 90.
Arpanet était un projet relativement modeste. Pas mal de choses ont aussi été faites
au CERN dans les années 80 — Big Science, mais sous-projets très annexes,
pas vraiment "planifiés".

Une fois que le bidule existait, comme il a toute de suite excité une forte demande,
on est rapidement passé à la bulle spéculative qui a crevé en 2000 — pas exactement
une planification raisonnée, ni un modèle d'investissement désintéressé en faveur des
générations futures.
rmd a écrit : Hum, quand tu te mets à installer du matériel comme ça, c'est pas vraiment léger.
Je n'en doute pas. En revanche, je doute que ce soit à l'occasion d'un investissement
à très long terme au bénéfice des générations futures, là encore : la boîte qui se dote
d'un bousin pareil a sans doute un business plan très précis pour sa rentabilisation
à court terme...
Erion a écrit :Ensuite, ce qui me gène dans ton raisonnement, c'est qu'il semble montrer
que l'innovation importante doit concerner le hardware. Est-ce que les idées ne sont
pas des innovations majeures ?
On parlait d'anticipation politiques, et du "liant temporel" entre générations (ou de
son affaiblisement dans les années 70). Pour moi, les investissements lourds
en termes de recherche, d'équipement ou d'ouverture de nouvelles frontières
sont une signature du souci d'une génération pour les suivantes.

Cela ne signifie nullement que les idées nouvelles ne sont pas tout aussi importantes,
voire beaucoup plus sur le long terme, les investissements arrivant toujours tôt ou tard.
Mais celles-ci me semblent relever de la créativité individuelle, qu'on ne saurait
programmer tant les coups de génie sont rares et imprévisibles, et qui n'a aucune
signification statistique. Pour le coup, je ne doute pas que la génération 68 ait eu sa
part d'esprits brillants.

Erion a écrit :Si on ramène ça à notre époque, on peut très bien dire qu'on a toujours la même
capacité à projeter des investissements à long terme, mais que ça correspond avant
tout à des percées conceptuelles, plus qu'à des avancées techniques.
Ah ? Tu as un exemple en tête ?
Erion a écrit : L'informatique personnelle est une percée conceptuelle (vu que beaucoup
des concepteurs d'ordinateurs ne voyaient pas très bien ce qu'un individu pouvait
faire avec un ordinateur), internet aussi.
Non, pas vraiment. D'une part, je ne vois pas vraiment la "percée" : n'importe quel
ingénieur et n'importe quel auteur de SF pouvait aisément imaginer que la miniaturisation
déjà bien engagéeucherait les ordinateurs à un moment ou un autre. Pour les boîtes
informatiques les problème était surtout de ne pas se lancer trop tôt à trop grande
échelle. Et pour les ingénieurs un peu imaginatifs de faire des trucs rigolos (au début
des années 80, j'ai cotoyé d'assez près François Gernelle, le père du Micral (1973),
qui en était déjà à s'éclater avec des réseaux primitifs, bien loind 'être rentables, alors
même que le marché des micros s'épanouissait enfin)

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Message par Anne » lun. nov. 28, 2011 8:24 pm

JDB a écrit :
Anne a écrit :Oncle Joe, on cause sérieux.
Ca ne fait aucun doute!

caliban
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Message par caliban » mar. nov. 29, 2011 12:53 am

bormandg a écrit :
caliban a écrit : Bref : il me semble que, faute de créateur majeur dans leurs rangs, les auteurs
d'anticipation des années 60/70 se sont simplement faits les interprètes de leur
génération.
Je sais, j'aurais du réagir plus tôt, mais c'est seulement maintenant que je lis cette horreur.
Herbert? Tu le classes années 50 ou 80? Dick? Farmer? Zelazny?
Ou alors tu leur refuse le qualificatif de créateur majeur?
Plutôt d'auteurs d'anticipation politique "engagée"...

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Message par Lensman » mar. nov. 29, 2011 8:53 am

caliban a écrit :
bormandg a écrit :
caliban a écrit : Bref : il me semble que, faute de créateur majeur dans leurs rangs, les auteurs
d'anticipation des années 60/70 se sont simplement faits les interprètes de leur
génération.
Je sais, j'aurais du réagir plus tôt, mais c'est seulement maintenant que je lis cette horreur.
Herbert? Tu le classes années 50 ou 80? Dick? Farmer? Zelazny?
Ou alors tu leur refuse le qualificatif de créateur majeur?
Plutôt d'auteurs d'anticipation politique "engagée"...
Ursula Le Guin ? Evidemment, on ne peut pas parler d'"engagé" au sens militantisme et slogan, je suppose, mais la mise en avant de la sociologie me semble avoir une véritable importance politique, en montrant au moins que la recherche de la "bonne société" peut ne pas se résumer à la volonté d'imposer un modèle unique de société. C'est tout de même une pensée politique, ça...

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Message par caliban » mar. nov. 29, 2011 10:37 am

Lensman a écrit : Ursula Le Guin ? Evidemment, on ne peut pas parler d'"engagé" au sens
militantisme et slogan, je suppose,
Pour moi, c'était le thème de ce fil. Sinon, je t'accorde volontiers que toute SF, ou presque,
est politique au sens large.
la recherche de la "bonne société" peut ne pas se résumer à la volonté d'imposer un
modèle unique de société. C'est tout de même une pensée politique, ça...
Certes. Mais c'était déjà un thème majeur de la philosophie politique du XVIe siècle...

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Message par Lensman » mar. nov. 29, 2011 11:26 am

caliban a écrit :Certes. Mais c'était déjà un thème majeur de la philosophie politique du XVIe siècle...
Mais comme le problème n'a pas encore été résolu, quelques piqures de rappel à telle ou telle époque ne font pas de mal... Sans compter que quelques données nouvelles sont apparues, les approches ont varié...

Oncle Joe

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