Du sense of wonder à la SF métaphysique

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Lensman
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Message par Lensman » sam. nov. 28, 2009 7:42 pm

Lem a écrit :On peut dénier pour des raisons inconscientes et c'est encore plus difficile à résoudre.
Tout de même, attention à ces pistes là. Ou il nous faudrait faire trop appel à la psychologie, voire la psychanalyse (j'avoue que je suis encore moins compétent dans ce domaine qu'en... métaphysique). As-ton vraiment envie de partir sur ces pistes? (j'aurai du mal à suivre, même si je pourrai encore casser les pieds à tout le monde...)
Un déni, concernant un domaine aussi visible, ça ne me paraît pas possible qu'on ne puisse pas en trouver des expressions claires, en cherchant, et surtout, il faut réponde d'abord aux choses flagrantes, ce que nous n'avons pas fait: pourquoi cette accusation de "quincaillerie SF" est-elle si prise au séreux, y compris au sein du milieu?
Bon, j'avoue que je tourne en rond, je suis revenu à mon obsession.
Oncle Joe

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Lensman
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Message par Lensman » sam. nov. 28, 2009 7:46 pm

Roland C. Wagner a écrit :
Lem a écrit :Je te rappelle ce que Michel Tournier a écrit autrefois :
science-fiction. Ces deux mots jurent à mon oreille et le fruit de leurs amours malheureuses ne saurait être qu'un avorton minable.
Le jour où j'ai lu cette phrase, Tournier a perdu un lecteur. À jamais.

Et je peux te dire que j'avais les boules d'avoir apprécié les ouvrages d'un tel con.
Hum... je te sens dans la catégorie des passionnés...
Oncle Joe

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MF
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Message par MF » sam. nov. 28, 2009 7:47 pm

HS
Roland C. Wagner a écrit :Et je peux te dire que j'avais les boules d'avoir apprécié les ouvrages d'un tel con.
Pourquoi cela.
Je suis toujours surpris des telles positions.
Il y a les auteurs.
Et il y a leurs textes.
Dans des continuum différents

/HS
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » sam. nov. 28, 2009 7:48 pm

MF a écrit :Je vais en profiter pour reposer ma question : qu'est-ce qui a fait que la BD est sortie de ce mode de fonctionnement en boucle interne
J'ai ôté "via Angoulème" de la citation car, comme toujours dans ces cas-là, il est très difficile de savoir si le marqueur du succès (le festival) a été sa cause ou sa conséquence.
Tu poses une question vraiment ardue, si on veut énoncer autre chose que des clichés. J'étais vraiment très proche du milieu BD quand il a pris ce virage. Je travaillais dans les premières librairies Album, j'avais créé la première émission de radio FM sur le sujet en 82. Je connaissais bien Pratt, Comès, Liberatore et une foule de jeunes auteurs du côté Métal ou Futuro, du côté des fanzines aussi. La meillure façon de décire le phénomène me semble être cumulative. A partir de 81/82, Métal est devenu un journal plus généraliste qui traitait de tout (le plus souvent sous l'influence délétère de Manœuvre), la jonction avec la télé s'est faite. Les galeries d'art ont commencé à exposer des planches. Une petite industrie de l'objet s'est créée (beaucoup autour d'hergé). La notoriété de Bilal a explosé. Glénat a capitalisé sur le succès commercial des Passagers du vent de Bourgeon pour développer la BD historique qui est devenu un truc important. A Suivre a proposé l'image d'une BD assez intello, littéraire et publié de gros romans graphiques noir et blanc. Et dans tous les cas : ça a duré. Ça n'a pas été qu'une bouffée sans lendemain, les tendances se sont stabilisées et elles ont pris racine. Au bout de quelques années, la BD s'est retrouvée profondément inscrite dans le paysage culturel, on a réalisé que tout le monde en lisait, que ce n'était plus un truc pour enfants/ado, qu'il ya avait des connexions avec la peinture, le cinéma, la télé, la presse, l'édition, l'artisanat. Et certaines séries se sont mises à atteindre des chiffres de vente absolument énormes. Pivot invitait souvent des auteurs de BD à Apostrophes. La mayonnaise a pris. Dire pourquoi, c'est difficile. Une chose est sûre : à aucun moment ceux qui étaient en situation de produire un rejet/déni éventuel n'ont eu l'idée d'exploiter l'argument : "pas français". Tout simplement parce que ce n'était pas possible.

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Message par Lensman » sam. nov. 28, 2009 7:49 pm

C'est terrible, la remarque de Dieu.
J'avais oublié ce fameux Effet... ça en dit long, sur mon état d'esprit actuel.
Oncle Joe

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » sam. nov. 28, 2009 7:49 pm

MF a écrit :HS
Réponse en MP pour ne pas brouiller la discussion.
« Regarde vers Lorient / Là tu trouveras la sagesse. » (Les Cravates à Pois)

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Message par MF » sam. nov. 28, 2009 7:49 pm

Lensman a écrit :pourquoi cette accusation de "quincaillerie SF" est-elle si prise au séreux, y compris au sein du milieu?
Parce que l'usage des outils scientifiques, encore plus que celui des outils littéraires, est réservé.
Hors le Collège de France, point de salut ?
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » sam. nov. 28, 2009 7:53 pm

"Scotty, passe-moi la clé dimensionnelle que je répare ce chronotransducteur".
Une scène typique de vie quotidienne au Collège de France.

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » sam. nov. 28, 2009 7:57 pm

Lem a écrit :"Scotty, passe-moi la clé dimensionnelle que je répare ce chronotransducteur".
Mais c'est ça qui est bon.

Tu n'as décidément aucune poésie.
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Message par systar » sam. nov. 28, 2009 7:57 pm

Lensman a écrit :C'est terrible, la remarque de Dieu.
J'avais oublié ce fameux Effet... ça en dit long, sur mon état d'esprit actuel.
Oncle Joe
Ce serait très chouette que Dieu parvînt à le rééditer; il y avait aussi quelques belles déclarations d'amour au genre, de la part de certaines personnalités.
Ce qui, en soi, constitue une des dimensions de l'énigme que Lem veut ici prendre en considération: d'où vient ce déni, alors qu'au fond, quand on leur demandait leur avis sur la SF, les personnalités montraient de grandes différences, depuis l'adhésion franche et enthousiaste (Depardieu, par exemple, si ma mémoire est bonne), jusqu'au rejet définitif.

Côté philo, je me souviens que ce n'était pas très glorieux. Derrida, interrogé sur la SF, répondait en parlant... de lui. Je crois que Deleuze botte en touche. Foucault, je ne sais plus ce qu'il dit, ni Lyotard.
Je crois par contre que Jodorowsky fait une réponse typiquement... "métaphysique" ;-) (je ne sais plus si c'est dans ce livre que j'avais lu sa position sur la SF, ou dans un autre)
Modifié en dernier par systar le sam. nov. 28, 2009 7:57 pm, modifié 1 fois.

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Message par Lensman » sam. nov. 28, 2009 7:57 pm

A propos de la BD, il y a aussi que ce n'est pas un genre littéraire (c'est comme si on disait: le cinéma a acquis une reconnaissance). Il y a eu un moment en France, me semble-t-il, où la BD fonctionnait un peu comme un genre. Et puis, c'est devenu un média. Mais si on part là dessus, on va beaucoup dériver...
Oncle Joe
PS: d'ailleurs, dans ce fil, nous sommes tous d'accord pour parler de la SF littéraire (en laissant de côté ses autres expressions). Ce qui est d'ailleurs symptomatique de... de quoi, au fait? Il y a eu un brusque intermède où Serge, tu as cité des BD de SF...

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Message par MF » sam. nov. 28, 2009 7:58 pm

Lem a écrit :[Tu poses une question vraiment ardue, si on veut énoncer autre chose que des clichés. J'étais vraiment très proche du milieu BD quand il a pris ce virage. Je travaillais dans les premières librairies Album, j'avais créé la première émission de radio FM sur le sujet en 82. Je connaissais bien Pratt, Comès, Liberatore et une foule de jeunes auteurs du côté Métal ou Futuro, du côté des fanzines aussi. La meillure façon de décire le phénomène me semble être cumulative. A partir de 81/82, Métal est devenu un journal plus généraliste qui traitait de tout (le plus souvent sous l'influence délétère de Manœuvre), la jonction avec la télé s'est faite. Les galeries d'art ont commencé à exposer des planches. Une petite industrie de l'objet s'est créée (beaucoup autour d'hergé). La notoriété de Bilal a explosé. Glénat a capitalisé sur le succès commercial des Passagers du vent de Bourgeon pour développer la BD historique qui est devenu un truc important. A Suivre a proposé l'image d'une BD assez intello, littéraire et publié de gros romans graphiques noir et blanc. Et dans tous les cas : ça a duré. Ça n'a pas été qu'une bouffée sans lendemain, les tendances se sont stabilisées et elles ont pris racine. Au bout de quelques années, la BD s'est retrouvée profondément inscrite dans le paysage culturel, on a réalisé que tout le monde en lisait, que ce n'était plus un truc pour enfants/ado, qu'il ya avait des connexions avec la peinture, le cinéma, la télé, la presse, l'édition, l'artisanat. Et certaines séries se sont mises à atteindre des chiffres de vente absolument énormes. Pivot invitait souvent des auteurs de BD à Apostrophes. La mayonnaise a pris.
D'accord avec tout ça.
J'ai mis en rouge ce qui me paraît un facteur clé.
Tac au Tac de Frapat a été un moment essentiel (Druillet, Giraud ou Gotlib en cadavre exquis, ça popularisait).
En face, on avait quoi ? Les Bogdanoff...
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » sam. nov. 28, 2009 8:05 pm

Roland C. Wagner a écrit :
Lem a écrit :"Scotty, passe-moi la clé dimensionnelle que je répare ce chronotransducteur".
Mais c'est ça qui est bon.
Je ne dis pas le contraire. Je signale juste à MF que ce n'est pas un cas typique "d'usage d'outils scientifique" – alors que c'est un cas typique "d'usage de technoblabla".

Et sur le mélo : je ne cherche pas à t'embrouiller. Je te demande de préciser la teneur de l'hypothèse. Sinon comment veux-tu qu'on l'évalue ?

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Message par Lensman » sam. nov. 28, 2009 8:06 pm

Gérard Klein a écrit :
Quant à la citation du japonais, elle ne nous apprend pas grand chose. C'est, à la même époque, la position du naturalisme positiviste de Zola selon laquelle le romancier "scientifique" doit photographier la réalité sociale. Zola était du reste un grand photographe. C'est contre cette position que va du reste s'élever quelques années plus tard Rosny Aîné, non pas du reste comme romancier conjectural mais comme romancier réaliste.
Ce japonais pauvrement inspiré était-il au courant des écoles françaises et même européennes de son temps? Peut-être. En tout cas, si l'on considère la place que tient l'imaginaire dans la littérature et plus généralement la culture japonaises, du Dit du Genji aux mangas, il n'a guère été entendu.
Le Jap a tenu à désigner comme cible quelque chose qui semble être la SF. Pourquoi? Dans les excommunications littéraires de l'époque, nombreuses, je n'en vois pas qui désignent le roman scientifique ou quelque chose d'équivalent comme cible. Cela va être difficile de compulser toute la littérature critique japonaise du temps pour voir si c'est symptomatique de quelque chose, mais quel travail excitant!
Oncle Joe
Modifié en dernier par Lensman le sam. nov. 28, 2009 8:08 pm, modifié 1 fois.

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Erion
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Message par Erion » sam. nov. 28, 2009 8:07 pm

Lem a écrit : Accepté car je n'ai aucune compétence dans ce domaine. Avec quand même un étonnement : la protosf japonaise était à ce point consistante qu'elle menaçait (ou même empêchait d'éclore) un "roman japonais" encore dans les limbes ? Je trouve ça curieux. La protosf japonaise n'était donc pas composée de… romans ?
C'est la forme du roman qui posait question, ce que ce critique voulait, c'est à la fois s'opposer au roman de type confucianiste (didactique) mais aussi aux romans politiques de l'ère Meiji. Ce qu'il voulait, c'est faire émerger le roman en tant qu'art. La proto-SF de l'époque était majoritairement politique, de l'anticipation sur l'avenir du Japon.
Et sinon, pour répondre à Gérard, oui, ce critique a été entendu. La littérature japonaise ne serait pas ce qu'elle est sans tout ce travail critique. Tout le questionnement d'un Soseki ou d'autres, qui arriveront plus tard, ce n'est pas de mépriser le roman occidental, mais de trouver une forme japonaise du roman. Et ils l'ont trouvé.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
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