Du sense of wonder à la SF métaphysique

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Sand
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Message par Sand » lun. déc. 07, 2009 2:02 pm

Lem a écrit :Dans le texte de Volkovitch, une formule résume bien ce ressenti. Ce qui est rejeté, c'est "tout ce bazar à dormir debout".
l'auteur de la critique me semble faire du second degré...

Ceci dit, je n'ai pas besoin de Volkovitch pour savoir que les personnes qui rejettent la SF, c'est parce que (sic) "c'est con la SF".

En revanche, je ne sais toujours pas pourquoi le "bazar" sfien est "à dormir debout". Enfin si, le vocabulaire, la quincaillerie, toutes explications déjà données.

Lem nous donne une autre explication, que c'est parce que ce bazar est métaphysique, et que la métaphysique est "à dormir debout" depuis Nietzche et Freud (si j'ai bien suivi).

Et là, je suis un peu perdue dans le raisonnement. L'hypothèse est-elle "la métaphysique cause le rejet de la SF" ou "la cause du rejet de la métaphysique est aussi la cause du rejet de la SF" ?

Ce n'est pas exactement la même chose...

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silramil
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Message par silramil » lun. déc. 07, 2009 2:03 pm

Lem a écrit :Silramil >
Je ne sais pas. La remarque de Guillebaud appuie la première partie de l'hypothèse (pas de métaphysique dans la formation intellectuelle au XXème siècle). Ce n'est que ça mais c'est déjà ça.
OK, je vois. Je note cet argument, d'autant que je suis d'accord sur cet aspect.

rmd
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Message par rmd » lun. déc. 07, 2009 2:04 pm

Roland C. Wagner a écrit :Bizarre, bizarre…
C'est parce qu'il y a écrit "roland C Wagner" sur la couverture. Tout le monde est persuadé qu'un bouquin de toi est forcément de la SF.
Après des années de cérémonie du Thé, il n’y a rien de meilleur que de vomir de la Bière.

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silramil
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Message par silramil » lun. déc. 07, 2009 2:07 pm

MF a écrit :
Lem a écrit :Que veux-tu dire, Oncle ?
Que quand un livre porte l'étiquette SF, cela implique par principe que tout le surnaturel qu'on y trouve est potentiellement rationalisable ?
Ah, là je peux dédouaner Joe.
Ça, c'est la théorie de silramil...
Toutafé.

Et même que j'irais beaucoup plus loin que ce que disait Joe : s'il y a un fantôme dans un roman de SF, ce n'est pas un fantôme, mais quelque chose qui ressemble à ce que les superstitions diverses racontent des fantômes. Et si c'est un vrai fantôme, alors c'est de la fantasy (ou du fantastique, etc).

Pour ce qui est d'Ubik, il y a effectivement une inscription de la transcendance dans le texte lui-même. Je l'interpréterais, si on me demandait mon avis, comme une ambiguïté laissée à l'appréciation du lecteur (après tout, cette déclaration grandiloquente n'a aucun effet dans le texte et n'aboutit qu'à créer un trouble).

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silramil
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Message par silramil » lun. déc. 07, 2009 2:10 pm

Roland C. Wagner a écrit :
MF a écrit :
Roland C. Wagner a écrit :Et La Saison de la sorcière ?

Juste par curiosité.
Malsaine la curiosité !

Ben oui, il est dans mon corpus, tu t'en doutes.
Voilà quelque chose qui m'étonnera toujours : j'ai écrit un roman fantastique, ou de fantasy urbaine, sans aucune rationalisation de la magie (elle existe, point à la ligne), et tu n'es pas le premier à vouloir le ranger dans la science-fiction.

Bizarre, bizarre…
Ouais, fantasy urbaine, c'est net. Au contraire de Celui qui bave et qui glougloute, par exemple, qui joue avec des images surnaturelles mais les rationalise.

Lem

Message par Lem » lun. déc. 07, 2009 2:11 pm

Roland C. Wagner a écrit :Ce qui nous ramène ci-dessus.
Je ne fais aucun commentaire sur la nature humaine ou quoi que ce soit : je rends compte d'une perception publique.

L'association d'idées étant ce qu'elle est, je vais musarder dans ma bribe de bibliothèque et j'en ressors un essai de 1960, publié chez Fayard : Pierre Gauroy, Les mondes du ciel (tu connais ça, Oncle ?). C'est un livre pour le grand public français sur la conquête spatiale qui commence et sur la possibilité de vie extraterrestre ; il n'est pas absurde d'y chercher un état des représentations de l'époque sur ces questions et de se dire qu'elles ont joué un rôle dans la perception de la sf comme "littérature de l'espace"
Extrait de l'avant-propos :
C'est Platon, c'est Anaxagore, qui enseignaient l'habitabilité de la Lune, y voyant eaux, montagnes, vallées. A défaut d'autre mérite, ce dernier eut celui du courage en un temps où il pouvait en cuire – dans tous les sens du mot – ayant manqué de peu la mise à mort pour avoir suggéré que le Soleil était peut-être plus grand que le Péloponnèse.
Mais voici que, sur les ténèbres, tombe la lumière de Copernic qui fait de la Terre une planète comme les autres. Lui déniant sa place usurpée au centre de l'Univers, il l'oblige à graviter plus humblement autour du soleil. Ce qui conduit le philosophe italien Giordano Bruno à prétendre qu'il existe "d'innombrables soleils et d'innombrables terres gravitant autour de leurs soleils de la même façon que nos sept planètes tournent autour de notre soleil… Ces mondes sont habités par des êtres vivants." De tels mots ont valeur d'hérésie en un âge où on ne badine point avec les vérités imposées. Par surcroît, le philosophe récidive en se convertissant au protestantisme. La flambée purificatrice qui s'élève de son bûcher, à Rome, va faire pour toujours son audace.
C'est Képler, Gallilée, Descartes, Newton… C'est Fontenelle qui pubie en 1686 ses Entretiens sur la pluralité des mondes habités, aimables dialogues où la fantaisie se donne libre cours… C'est le P. Secchi, avec quelques autres de haute lignée… Enfin, en 1962, paraît l'ouvrage célèbre sur La pluralité des mondes habités, étude où sont exposées les conditions d'habitabilité des terres célestes, par Camille Flammarion, ancien élève-astronome de l'Observatoire de Paris.
Jusqu'à ces dernières années cependant, les motifs de croyance et d'incroyance étaient d'ordre plus sensible ou métaphysique qu'intellectuel, et l'adhésion à pareille éventualité n'avait guère matière à légitimer…
Et je reprécise : je ne discute pas le contenu de ce texte. Je le cite comme pièce à verser au dossier de la perception publique de la sf et de ses grands thèmes. Ici, il me semble que ce qui était souligné par Maurice Renard à propos des "métaphysiques" que Camille Flammarion essaie de "concrétiser un peu" par la sf est toujours impliqué. Flammarion a été une figure très importante et très populaire, en France. Son Astronomie a été un gigantesque best-seller (dans le monde entier, je crois) et elle est toujours rééditée aujourd'hui. C'est pour publier ses livres que les éditions Flammarion ont été créées. Que le grand public français a eu durablement l'impression que "l'espace" était un sujet dont s'élevait le fameux "brouillard métaphysique" me semble plausible.

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Message par jlavadou » lun. déc. 07, 2009 2:12 pm

Autant je suis d'accord avec ça :
Roland C. Wagner a écrit :Et puis, l'être humain, il n'est "fait" pour rien, à part éventuellement se reproduire.
autant je le suis moins avec ça :
Roland C. Wagner a écrit :Pas de "noblesse" là-dedans, juste de la curiosité ou la nécessité de trouver à manger.
La curiosité est pour moi une attitude emprunte d'une certaine noblesse, dans le sens "élévation des idées" : la curiosité n'a pas que des finalités pragmatiques. Je doute que tous les chercheurs en aérospatiale, astrophysique ou astronomie aient choisi cette voie par pur souci du bien être de l'humanité.

Mais encore une fois, on jour sur les mots, pas sur les idées...

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Hoêl
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Message par Hoêl » lun. déc. 07, 2009 2:13 pm

Et même que j'irais beaucoup plus loin que ce que disait Joe : s'il y a un fantôme dans un roman de SF, ce n'est pas un fantôme, mais quelque chose qui ressemble à ce que les superstitions diverses racontent des fantômes. Et si c'est un vrai fantôme, alors c'est de la fantasy (ou du fantastique, etc).
Tu as lu Rupture dans le réel de PeterF. Hamilton ?
Parce que c'est de la S.F. et ça ne me semble pas cadrer avec ta théorie . Pour mémoire , on y trouve des fantômes , des revenants qui possèdent des vivants et même un dieu .
"Tout est relatif donc rien n'est relatif !"

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Message par Hoêl » lun. déc. 07, 2009 2:16 pm

La curiosité est pour moi une attitude emprunte d'une certaine noblesse, dans le sens "élévation des idées" : la curiosité n'a pas que des finalités pragmatiques.


"Eve vit que le fruit était bon à manger , désirable pour atteindre la connaissance "
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Message par Lem » lun. déc. 07, 2009 2:24 pm

Sand a écrit :L'hypothèse est-elle "la métaphysique cause le rejet de la SF" ou "la cause du rejet de la métaphysique est aussi la cause du rejet de la SF" ?
L'hypothèse est : le rejet de la sf (en France) vient de plusieurs facteurs connus depuis longtemps. Je propose d'en ajouter un autre qui n'était pas cité jusqu'ici et qui semble pouvoir rendre compte de la perception du genre comme "ridicule". Ce qui est rejeté sous cette perception, c'est l'élément métaphysique de la sf (car au XXème siècle, la métaphysique a été jugée comme globalement "ridicule").
Est-ce que ça répond à ta question ?

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » lun. déc. 07, 2009 2:29 pm

Hoêl a écrit :
Et même que j'irais beaucoup plus loin que ce que disait Joe : s'il y a un fantôme dans un roman de SF, ce n'est pas un fantôme, mais quelque chose qui ressemble à ce que les superstitions diverses racontent des fantômes. Et si c'est un vrai fantôme, alors c'est de la fantasy (ou du fantastique, etc).
Tu as lu Rupture dans le réel de PeterF. Hamilton ?
Parce que c'est de la S.F. et ça ne me semble pas cadrer avec ta théorie . Pour mémoire , on y trouve des fantômes , des revenants qui possèdent des vivants et même un dieu .
Oui, une fin totalement décevante.
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Message par Sand » lun. déc. 07, 2009 2:38 pm

Lem a écrit :
Sand a écrit :L'hypothèse est-elle "la métaphysique cause le rejet de la SF" ou "la cause du rejet de la métaphysique est aussi la cause du rejet de la SF" ?
L'hypothèse est : le rejet de la sf (en France) vient de plusieurs facteurs connus depuis longtemps. Je propose d'en ajouter un autre qui n'était pas cité jusqu'ici et qui semble pouvoir rendre compte de la perception du genre comme "ridicule". Ce qui est rejeté sous cette perception, c'est l'élément métaphysique de la sf (car au XXème siècle, la métaphysique a été jugée comme globalement "ridicule").
Est-ce que ça répond à ta question ?
heu, pas vraiment, mais je n'ai pas assez dormi, en fait je ne comprends pas cette phrase. Peut-être en mettant dans un autre ordre les mots... (je maitrise mieux les hypothèses quand elles sont présentées de façon "mathématique". Point A, point B, point C, Si... alors...)

je tente :

la métaphysique est perçue comme "ridicule"

(donc) l'élément métaphysique de la sf est la cause de la perception de la SF comme "ridicule" (avec d'autres causes, mais ça c'est acquis)

Lem

Message par Lem » lun. déc. 07, 2009 2:39 pm

Sand a écrit :la métaphysique est perçue comme "ridicule"
(donc) l'élément métaphysique de la sf est la cause de la perception de la SF comme "ridicule" (avec d'autres causes, mais ça c'est acquis)
Voilà.

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Message par Roland C. Wagner » lun. déc. 07, 2009 2:49 pm

Lem a écrit :
Sand a écrit :la métaphysique est perçue comme "ridicule"
(donc) l'élément métaphysique de la sf est la cause de la perception de la SF comme "ridicule" (avec d'autres causes, mais ça c'est acquis)
Voilà.
C'est ridicule.

:lol:
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Message par bormandg » lun. déc. 07, 2009 2:54 pm

Lensman a écrit :Une autre question qui n'a rien à voir, mais qui m'intrigue beaucoup sur le fonctionnement de la SF.
Gérard Klein a fat remarquer en passant que la SF n'était pas une littérature "populaire".
Non seulement ce n'est pas une littérature populaire, mais encore il y a un phénomène curieux qui est celui de l'existence de revues spécifiques.
Je sais bien que leur époque glorieuse est passée depuis longtemps, mais justement, le fait qu'elles survivent encore vaille de vaille est un sujet d'étonnement pour moi. Elles devraient avoir disparu depuis longtemps. Au USA, il y a toujours F&SF, Analog et Isaac Asimov Magazine.
Il y a-t-il d'autres littératures dans ce cas?
Quelle serait la raison "forte" (à part l'inertie, le hasard, la bonne volonté de deux ou trois cinglés, etc) qui sous-tend cette existence aussi prolongée?
Oncle Joe
Tu m'interpelles là sur le statut de la SF en France et le fait que la visibilité de la SF hors milieu a été profondément liée à deux revues, Fiction et Galaxie (2° série), et que, aujourd'hui, les revues spécifiques qui ne sauraient se vanter d'une existence aussi ancienne que celle de F&SF, Analog, IAM, ne sont pas diffusées hors "milieu". C'est un sujet hors fil, mais pas du tout hors sujet du forum.... 8)
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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