Richard Comballot et la science fiction aujourd'hui

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jerome
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Richard Comballot et la science fiction aujourd'hui

Message par jerome » ven. oct. 22, 2010 9:41 am

Richard Comballot est en interview sur le site du Cafard à propos de son recueil d'interviews Voix du Futur.

C'est ici.
Extrait :
Vous qui avez interviewé plusieurs générations d’auteurs, quel regard portez-vous sur la SF d’aujourd’hui ?
Richard Comballot : Ough ! Ça, c’est la question qui tue ! Déjà, je commencerai par dire que je n’ai interviewé jusqu’ici que des auteurs français, ce qui permettra de resituer mon champ d’intervention et de compétence. Cela étant… J’ai le sentiment, partagé par beaucoup d’auteurs et d’observateurs, que la SF se situe à un carrefour important de son histoire. Si les littératures de l’imaginaire se portent globalement bien, tractées par un cinéma populaire de qualité, si la science-fiction a rencontré le réel et est présente partout (cinéma, publicité, bande dessinée), elle n’en demeure pas moins le parent pauvre en ce qui concerne le romanesque. Il suffit de jeter un œil sur les tables des librairies pour constater que le gros de ce qui se publie relève de la fantasy et du fantastique (les vampires, depuis quelque temps). La SF ambitieuse, elle, est globalement en voie de disparition, la SF ballardo-dickienne en voie de « classement ». Les meilleurs auteurs du genre sont marginalisés. Pour preuve, l’intégrale des nouvelles de Ballard paraît chez Tristram, hors-collection donc. Celle de Sturgeon, que Jacques Chambon devait sortir chez Flammarion, n’est toujours pas publiée, sans doute jugée trop casse-gueule sur un plan commercial. Les derniers romans de Spinrad sortent chez Fayard, en littérature générale. Le Dhalgren de Delany, que l’on attend depuis plus de trente ans, est annoncé chez un petit éditeur non spécialisé. Idem pour l’œuvre de Lafferty. Jeter a disparu corps et biens. Shepard ne voit pratiquement aucun de ses ouvrages récents traduits en langue française. Pour ce qui est des nouveaux auteurs, je suppose qu’il y en a de très bons aux États-Unis et en Angleterre, mais ils sont peu traduits, juste une poignée de titres en grand format, chez Laffont et Denoël. Quant aux éditeurs indépendants de qualité, tels que Le Bélial’, Les Moutons Électriques ou La Volte, ils publient de très bonnes choses, mais n’ont que rarement les moyens de financer des traductions ; ils font donc assez souvent du patrimonial, des rééditions augmentées, des éditions « définitives », et sont prêts à accueillir les auteurs français : une situation relativement nouvelle, si on la compare à celle qui existait il y a vingt ou trente ans. Aujourd’hui, avec le tassement général des ventes, ils préfèrent vendre mille exemplaires d’un autochtone que mille cinq-cents d’un Américain qui leur aura coûté une fortune à traduire ; surtout que l’on a actuellement tendance à écrire de gros livres ! Sur le papier, la situation n’a donc peut-être jamais été aussi favorable pour nos auteurs.
Malheureusement, en pratique, la fantasy et surtout la littérature jeunesse, bien plus porteuses financièrement que la SF, ont créé un appel d’air et tous nos auteurs de talent se sont fait emporter. Conclusion : la SF dans son ensemble est redevenue une littérature de niche destinée aux intellos et la SF française en particulier une littérature en voie de disparition. C’est la vie… Et ça peut revenir, qui sait…
Jérôme
'Pour la carotte, le lapin est la parfaite incarnation du Mal.' Robert Sheckley

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