jerome a écrit :Tout d'abord comment as-tu composé le recueil Notre-Dame-aux-Écailles ?
C'est Stéphane Marsan, fin 2005, qui a lancé l'idée d'un nouveau recueil. A l'époque, j'avais une poignée d'inédits en réserve, par exemple des textes prévus pour des anthos qui ne se sont jamais faites. Il y avait aussi des textes que j'avais envie de republier parce qu'ils étaient parus sur des supports devenus introuvables ou amenés à le devenir à plus ou moins long terme. Tout ça ne faisait pas encore un sommaire complet (je n'ai jamais beaucoup de textes d'avance, ce qui me pose souvent problème). Pendant l'année qui a suivi, j'ai écrit quelques nouvelles pour le compléter, puis j'ai soumis l'ensemble à Stéphane. Il a été question de retirer du sommaire l'une des nouvelles, "Mardi gras", à moins que je ne la retravaille de manière satisfaisante. La version présente dans le recueil a une structure assez différente de celle que j'avais soumise au départ.
Quels sont les premiers retours ? Comment se passent les premières dédicaces ?
Tout se passe bien pour l'instant. Les premiers retours sont positifs, avec parfois quelques réserves, mais globalement enthousiastes donc. Ce qui me surprend par contre, c'est de recevoir autant d'avis, si ce n'est plus, sur
Serpentine que sur
Notre-Dame-aux-Ecailles. On dirait que le livre commence une nouvelle vie (déjà qu'il en a eu plusieurs...).
Aux premières dédicaces, outre des lecteurs qui connaissaient mes livres et attendaient cette nouvelle parution, j'ai vu pas mal de gens qui achetaient par curiosité, soit parce qu'on venait de leur conseiller l'un ou l'autre recueil, soit parce qu'ils avaient flashé sur les couvertures. J'aime vraiment beaucoup ces couvertures et j'ai l'impression qu'elles attirent bien le regard quand elles sont placées ensemble sur une table de dédicaces.
Sur la quatrième de couverture, il y a une citation de Jean-Claude Dunyach : « Il y a chez Fazi une petite musique poignante, extrêmement lucide, et surtout un art de la fêlure qui transcende la moindre de ses histoires. » Te retrouves-tu dans ses propos ?
C'est malin, y a Jean-Claude qui surveille maintenant...
Je suis forcément la personne la moins bien placée pour juger de ce que j'écris. Je suis toujours étonnée quand on parle de "lucidité" ou de "justesse" à propos de mes textes : il y a pas mal de choses que j'ai écrites à partir d'une expérience ou d'un ressenti personnels, mais beaucoup de textes aussi pour lesquels j'avance à tâtons. Quand j'adopte le point de vue d'une mère qui a perdu ses enfants dans la nouvelle "Elégie" par exemple, j'essaie de deviner ses réactions, mais en réalité je n'y connais strictement rien. Donc ça m'étonne toujours (même si ça me fait évidemment plaisir).
La notion de "fêlure", j'aime assez. Je vois bien le fantastique comme un fêlure du réel qui soulignerait à son tour les fêlures des personnages. De ce point de vue, effectivement, je me retrouve dans cette description.
Et puis c'est en encore un recueil. A quand un nouveau roman ?

Tout de suite, le sujet qui fâche... Pas de nouveau roman prévu, et si ça se trouve, il n'y en aura jamais. Je suis nouvelliste avant tout, c'est ce que je sais faire, ce que j'ai envie de faire, les romans ont été un accident plus qu'autre chose. J'avais envie de tenter le coup, je ne suis pas sûre d'avoir bien compris comment ça marche, pas sûre non plus de vouloir recommencer dans l'immédiat. Un troisième recueil, par contre, j'aimerais bien.
J'entends souvent dire que les éditeurs et les lecteurs n'aiment pas les nouvelles. J'ai la chance qu'on me laisse en publier, et je constate que non seulement il n'y a pas eu d'écart flagrant entre les chiffres de vente de
Serpentine et ceux de mes deux romans, mais qu'en plus, c'est très nettement le livre sur lequel j'ai eu les retours les plus enthousiastes pour l'instant. Les lecteurs avec qui j'en ai parlé n'ont pas semblé réfractaires à la nouvelle, et en plus, ils donnent l'impression de m'encourager dans cette voie. Pourquoi est-ce que je me casserais la tête à faire quelque chose dont je n'ai pas vraiment envie, juste par conformisme ? L'envie d'écrire des romans reviendra peut-être, mais je ne vais pas me forcer en attendant.