Moustique utilisé comme vecteur de lutte contre la malaria ?

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Sand
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Moustique utilisé comme vecteur de lutte contre la malaria ?

Message par Sand » lun. mars 22, 2010 5:42 pm

info "Maxi science" (ça vaut ce que ça vaut...)
je la mets en "section 2" parce que j'ai un gros doute et que je n'arrive pas à trouver la référence exacte de la publication...
(à remonter en section 1 si l'info est confirmée)
Japon - Des scientifiques sont parvenus à transformer par manipulation génétique un moustique en véritable vaccin volant. L'insecte pourrait permettre de lutter radicalement contre la malaria.

Les scientifiques japonais ont mis au point un moustique anophèle produisant un vaccin naturel contre la malaria. Les glandes salivaires de ce dernier produisent en fait une protéine efficace contre le développement de la malaria dans l'organisme. Lorsque le moustique pique un individu, sa salive est directement injectée dans le sang. Chaque année la malaria provoque entre un et deux millions de décès dans le monde, surtout chez les enfants africains.Le moustique "prototype" est également porteur d'un vaccin contre la leishmaniose, une maladie potentiellement mortelle transmise par les mouches de sable. L'infection de leishmaniose peut provoquer des plaies douloureuses, une fièvre ainsi qu'une perte de poids. Si elle n'est pas soignée à temps, elle peut en outre détruire le foie et la rate. Les souris mordues par le moustique en question ont produit des anticorps contre la leishmaniose, indiquant l'immunisation.

"Suite aux piqures, les réponses immunitaires protectrices sont déclenchées, de la même façon qu'avec une vaccination conventionnelle, mais gratuitement et sans la douleur" a déclaré le Professeur Shigeto Yoshida, de l'université médicale Jichi, au Japon.

Ajoutant que "l'exposition continue aux piqures maintiendra un haut niveau d'immunité, d'une façon naturelle et pour toute une vie."

"Le moustique passe de l'état d'insecte nuisible à l'état d'insecte bénéfique pour la santé" a conclu le chercheur.

Cette avancée scientifique a été publiée dans le journal Insect Molecular Biology.
je ne suis pas dans le "bain" scientifique pur et dur et n'ai pas accès à l'Insect (Biochemistry and) Molecular Biology (nom complet) (je n'ai pas plus de référence que le titre de la revue, désolée), aussi je suis preneuse de tout autre source d'info sur le sujet.

(notamment, le terme "vaccin" me parait abusif, d'autant qu'il n'existe pas de vaccin contre la malaria à ma connaissance... si je me trompe c'est tant mieux, les cachets de quinine c'est dégueulasse et contraignant)

EDIT : en googlant un peu, je trouve cet article du 1er octobre 2009, un peu mieux référencé :
Le paludisme est l'un des principaux fléaux planétaires. Il affecte plus particulièrement l'Afrique sub-saharinne et provoque au moins un million de morts prématurées (et 250 millions d'infections) par an et d'incalculables conséquences médicales, sociales et aussi économiques dans les pays les plus touchés qui sont souvent impuissants à combattre la maladie.

Depuis des décennies tout ou presque a été tenté pour rompre la chaîne parasite -> un moustique-vecteur -> un humain récepteur via la piqûre sanguine du moustique infecté: élaborer des parades vaccinales contre le parasite (pour l'heure sans succès probants), détruire au mieux le moustique-vecteur (au risque de subir les foudres de défenseurs de l'environnement). On a aussi cherché (avec des succès statistiquement démontrés) que l'on pouvait défendre les personnes exposées en les protégeant (via des moustiquaires imprégnées de produits chimiques) de l'action des moustiques, une solution souvent économiquement inaccessible.

Mais il existe aussi en théorie une autre possibilité d'action préventive: transformer le moustique ennemi en un allié radical. La version parasitaire, en somme, du classique retournement de l'agent secret. Les dernières nouvelles en provenance du front scientifiques des combattants antipaludéens offrent de ce point de vue un beau thème pour écrivains à succès. On pourrait peut-être la transmettre au plus vite à John Le Carré dont on sait à quel point il excelle dans le concept du retournement; à quel point aussi il se passionne pour l'utilisation qui peut être faite de certains corps humains à des fins sanitaires collectives.

Des scientifiques travaillant en France et en Allemagne viennent donc d'identifier un gène à l'origine de la résistance au paludisme chez certains des moustiques vecteurs du parasite paludéen. Les résultats de ce travail seront publiés dans la revue américaine Science datée du 2 octobre 2009. Ces chercheurs (de l'EMBL, Heidelberg et de l'unité Inserm «Réponse immunitaire et développement chez les insectes - analyse post-génomique de la réponse antiparasitaire chez l'anophèle», Strasbourg) expliquent comment ils ont découvert que de subtiles variations dans un seul gène jouent ou non sur la capacité des moustiques à résister à l'infection par le parasite du paludisme.

«Le parasite du paludisme doit passer une partie de sa vie dans le moustique, et une autre partie chez l'homme. En comprenant comment le moustique résiste au paludisme, nous pourrions mettre au point de nouveaux outils pour limiter sa transmission à l'homme dans les zones endémiques», précise Stéphanie Blandin (Inserm) qui a conduit ce travail en collaboration avec Rui Wang-Sattler et avec le groupe de Lars Steinmetz à l'EMBL à Heidelberg.

En pratique, ces chercheurs ont entrepris méthodiquement d'enquêter sur les indices moléculaires potentiellement présents au sein de la totalité du génome du moustique Anopheles gambiae (principal vecteur du parasite responsable de la forme la plus sévère du paludisme en Afrique). Ils ont ensuite focalisé leurs efforts sur la résistance du moustique à un parasite du paludisme couramment utilisé comme modèle expérimental: Plasmodium berghei, responsable du paludisme chez les rongeurs. «Lorsqu'ils ont comparé les génomes des moustiques capables de résister à cette infection à ceux des moustiques non-résistants, les scientifiques ont découvert que la différence majeure se situait au niveau d'un seul fragment de chromosome, résume-t-on auprès de l'Inserm. Parmi les quelques 975 gènes contenus dans ce morceau d'ADN, un en particulier semble jouer un rôle important dans la détermination de la résistance d'un moustique au paludisme. Ce gène, appelé TEP1, encode une protéine connue pour se lier au parasite Plasmodium berghei et promouvoir sa destruction au sein de l'intestin du moustique. »

Ils ont ainsi pu mettre au point une nouvelle technique de lutte. «C'est une avancée importante, car la nouvelle technique peut s'appliquer à un grand nombre d'organismes très différents, déclare Lars Steinmetz. Elle étend le pouvoir que nous avions acquis chez les levures: nous pouvons aller d'une région complète d'ADN au gène causal lui-même: une prouesse rarement réalisable chez les organismes complexes.» En pratique les chercheurs ont réussi à créer des moustiques «résistants» et d'autres «porteurs» potentiels du parasite paludéen. Puis ils ont pu génétiquement «éteindre» la potentialité infectieuse. «Bien que cette étude ait été menée avec un parasite responsable du paludisme chez les rongeurs, il existe des indications montrant que ce gène serait également impliqué dans la réponse immunitaire des moustiques au paludisme humain, reconnaît-on, non sans une courageuse modestie auprès de l'Inserm».

Cette piste est actuellement explorée par les chercheurs. Elle pourrait, selon eux, grandement améliorer l'efficacité des multiples et coûteux programmes en cours visant (sans réel espoir) à l'éradication du paludisme. Encore faudra-t-il pour cela obtenir l'autorisation de créer (de répandre et de laisser proliférer) des moustiques génétiquement modifiés.

(1) «Dissecting the genetic basis of resistance to malaria parasites in Anopheles gambiae».

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Le_navire
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Message par Le_navire » lun. mars 22, 2010 9:31 pm

Buuuuuuuuuuuuuuuuuuuull !!!
Dis nous que c'est vrai, dis nous que ça va marcher !!!!
"Ils ne sont grands que parce que vous êtes à genoux"

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Bull
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Message par Bull » lun. mars 22, 2010 10:01 pm

Sand, l'article de Science est intéressant, mais c'est encore très très loin de la "clinique".
Abstract ci-dessous (1).

Je cherche encore les ref du premier travail que tu cites. pas trace y compris dans le journal Insect Biochemistry and Molecular Biology. Peut-être est-ce un papier accépté et non encore publié.

Ce qui m'étonne c'est que dans les bases de données scientifiques, aucun papier ne sort avec "leishmanioses anopheles gambiae"

Sinon, Shigeto Yoshida a publié plusieurs travaux sur palu et vaccin (et oui, malheureusement pas de vaccin commercialisé pour le moment contre cette maladie).

Le plus récent que je trouve est très loin de ce que tu cites (abstract de IAI ci-dessous) (2).

Maintenant se servir de moustiques "OGM" contre le palu n'est pas nouveau (3) (ref PNAS), et le débat "bénéfice/coût" est déjà lancé (4) (papier trends in parasitologie)


Bref, si vous voulez je peux déplacer ce sujet en section 1, ou nous pouvons changer le titre de celui-ci, en le laissant là, avec un titre type "Place des OGM en thérapeutique humaine"


1.
Science. 2009 Oct 2;326(5949):147-50.
Dissecting the genetic basis of resistance to malaria parasites in Anopheles gambiae.

Blandin SA, Wang-Sattler R, Lamacchia M, Gagneur J, Lycett G, Ning Y, Levashina EA, Steinmetz LM.

European Molecular Biology Laboratory (EMBL), Meyerhofstrasse 1, 69117 Heidelberg, Germany.

The ability of Anopheles gambiae mosquitoes to transmit Plasmodium parasites is highly variable between individuals. However, the genetic basis of this variability has remained unknown. We combined genome-wide mapping and reciprocal allele-specific RNA interference (rasRNAi) to identify the genomic locus that confers resistance to malaria parasites and demonstrated that polymorphisms in a single gene encoding the antiparasitic thioester-containing protein 1 (TEP1) explain a substantial part of the variability in parasite killing. The link between TEP1 alleles and resistance to malaria may offer new tools for controlling malaria transmission. The successful application of rasRNAi in Anopheles suggests that it could also be applied to other organisms where RNAi is feasible to dissect complex phenotypes to the level of individual quantitative trait alleles.
2.
Infect Immun. 2010 Feb;78(2):595-602. Epub 2009 Nov 9.
Baculovirus-based nasal drop vaccine confers complete protection against malaria by natural boosting of vaccine-induced antibodies in mice.

Yoshida S, Araki H, Yokomine T.

Division of Medical Zoology, Department of Infection and Immunity, Jichi Medical University, 3311-1 Yakushiji, Shimotsuke, Tochigi 329-0498, Japan. shigeto@jichi.ac.jp

Blood-stage malaria parasites ablate memory B cells generated by vaccination in mice, resulting in diminishing natural boosting of vaccine-induced antibody responses to infection. Here we show the development of a new vaccine comprising a baculovirus-based Plasmodium yoelii 19-kDa carboxyl terminus of merozoite surface protein 1 (PyMSP1(19)) capable of circumventing the tactics of parasites in a murine model. The baculovirus-based vaccine displayed PyMSP1(19) on the surface of the virus envelope in its native three-dimensional structure. Needle-free intranasal immunization of mice with the baculovirus-based vaccine induced strong systemic humoral immune responses with high titers of PyMSP1(19)-specific antibodies. Most importantly, this vaccine conferred complete protection by natural boosting of vaccine-induced PyMSP1(19)-specific antibody responses shortly after challenge. The protective mechanism is a mixed Th1/Th2-type immunity, which is associated with the Toll-like receptor 9 (TLR9)-dependent pathway. The present study offers a novel strategy for the development of malaria blood-stage vaccines capable of naturally boosting vaccine-induced antibody responses to infection.
3.
Proc Natl Acad Sci U S A. 2007 Mar 27;104(13):5580-3. Epub 2007 Mar 19.
Transgenic malaria-resistant mosquitoes have a fitness advantage when feeding on Plasmodium-infected blood.

Marrelli MT, Li C, Rasgon JL, Jacobs-Lorena M.

Department of Molecular Microbiology and Immunology, Bloomberg School of Public Health and Malaria Research Institute, The Johns Hopkins University, Baltimore, MD 21205, USA.

The introduction of genes that impair Plasmodium development into mosquito populations is a strategy being considered for malaria control. The effect of the transgene on mosquito fitness is a crucial parameter influencing the success of this approach. We have previously shown that anopheline mosquitoes expressing the SM1 peptide in the midgut lumen are impaired for transmission of Plasmodium berghei. Moreover, the transgenic mosquitoes had no noticeable fitness load compared with nontransgenic mosquitoes when fed on noninfected mice. Here we show that when fed on mice infected with P. berghei, these transgenic mosquitoes are more fit (higher fecundity and lower mortality) than sibling nontransgenic mosquitoes. In cage experiments, transgenic mosquitoes gradually replaced nontransgenics when mosquitoes were maintained on mice infected with gametocyte-producing parasites (strain ANKA 2.34) but not when maintained on mice infected with gametocyte-deficient parasites (strain ANKA 2.33). These findings suggest that when feeding on Plasmodium-infected blood, transgenic malaria-resistant mosquitoes have a selective advantage over nontransgenic mosquitoes. This fitness advantage has important implications for devising malaria control strategies by means of genetic modification of mosquitoes.
4.
Trends Parasitol. 2008 Jan;24(1):4-7. Epub 2007 Dec 27.
Can transgenic mosquitoes afford the fitness cost?

Lambrechts L, Koella JC, Boëte C.

Department of Entomology, University of California, One Shields Avenue, Davis, CA 95616, USA.

In a recent study, SM1-transgenic Anopheles stephensi, which are resistant partially to Plasmodium berghei, had higher fitness than non-transgenic mosquitoes when they were maintained on Plasmodium-infected blood. This result should be interpreted cautiously with respect to malaria control using transgenic mosquitoes because, despite the evolutionary advantage conferred by the transgene, a concomitant cost prevents it from invading the entire population. Indeed, for the spread of a resistance transgene in a natural situation, the transgene's fitness cost and the efficacy of the gene drive will be more crucial than any evolutionary advantage.

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Sand
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Message par Sand » lun. mars 22, 2010 11:49 pm

merci Bull.

Je me doutais un peu qu'on était très loin d'essais clinique, mais c'est déjà intéressant qu'il existe plusieurs recherches dans ce sens. Il y a des chances que quelque chose aboutisse avant qu'on meure !

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Message par Bull » mar. mars 23, 2010 1:06 am

Sand a écrit :merci Bull.

Je me doutais un peu qu'on était très loin d'essais clinique, mais c'est déjà intéressant qu'il existe plusieurs recherches dans ce sens. Il y a des chances que quelque chose aboutisse avant qu'on meure !
Mhouais. Je n'en jurerai pas.
La parasitologie médicale est vraiment le "parent pauvre" de la microbiologie. En terme de moyens humains, de budget, ou même de puissance politique, d'influence etc...

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Message par Sand » mar. mars 23, 2010 1:08 am

j'espère tenir encore 50 ans, ça laisse de la marge ^^

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