- le  
Des Sorciers et des hommes
Commenter

Des Sorciers et des hommes

Actusf : Comment est né ce roman ?
Thomas Geha : Des Sorciers et des hommes est né un peu par hasard. Un éditeur (via son directeur d’ouvrage, Fabien Lyraud) m’avait demandé une nouvelle de sword & sorcery pour une anthologie. Aguiché par un tarif ma foi fort séduisant, j’ai dit banco à tous ces euros. Et ainsi, est née une nouvelle qui s’intitule Rubans de soie rouge. Hélas, l’anthologie ne s’est pas faite, je n’ai pas eu tous ces beaux euros, et j’ai récupéré mon texte, sans savoir réellement qu’en faire. Il se trouve que j’avais vraiment pris beaucoup de plaisir à son écriture et qu’il me paraissait, du coup, assez dommage d’abandonner mes deux acolytes, Hent Guer le barbare de Scalèpe et Pic Caram le sorcier aux rubans. Comme j’avais un peu de temps devant moi, j’ai entamé la rédaction d’une seconde nouvelle, une aventure un chouia plus sombre, qui développait un peu plus la personnalité de mes deux anti-héros. C’est à partir de ce moment que l’idée d’un fix-up s’est mise en branle dans ma tête, sans vouloir me lâcher. J’avais commencé un autre roman dans le même univers, mais je l’ai (momentanément) laissé en plan pour développer la trame globale de mon fix-up. Ainsi, j’ai rédigé deux autres épisodes (je les ai rebaptisés ainsi), plus longs encore que les deux premiers déjà assez costauds. La période de Noël m’a ensuite un peu coupé de mon projet (étant libraire, cette période est intense et le soir on est bien cramés), puis j’ai mis deux mois supplémentaires à finir avec deux épisodes, les 5 et 6. Le cinquième est le plus court du fix-up, mais s’avère l’épisode charnière. Le sixième est le plus long, et de très loin, puisqu’il est, en taille, équivalent à tout le reste du fix-up.



Actusf : De quoi cela parle-t-il ?
Thomas Geha : Indubitablement d’un guerrier et d’un magicien, qui s’acoquinent pour le meilleur et surtout pour le pire. Tous les deux ont sans doute des raisons pour être ce qu’ils sont, mais il n’empêche qu’il pillent, volent, spolient, assassinent sans vergogne (et avec parfois un peu d’humour… noir bien sûr). Le tout, pour s’enrichir un maximum. Petit à petit, au fur et à mesure des récits, cette trame simple se complexifie par l’apport de nouveaux personnages et de ce que l’on apprend du passé de Hent Guer et Pic Caram. Il n’y a pas dans mon roman de grande quête pour sauver le monde, voire l’univers, il n’y a pas d’élus, il y a juste des (sorciers et des) hommes et des femmes (beaucoup, même) qui se rencontrent, s’aiment, se haïssent, se déchirent, se retrouvent parfois… il y a de la vengeance dans l’air, aussi, car une des questions que pose ce roman, c’est : « mais que deviennent les victimes ? ». En trame de fond, se dessine aussi une dimension sociale, que révèlent les actes de Hent Guer et Pic Caram.

Actusf : Des Sorciers et des hommes est un roman de sword and sorcery atypique de par la personnalité des deux protagonistes, Hent Guer, le barbare et Pic Caram, le sorcier. Est-ce que vous pouvez-nous parler d'eux ?
Thomas Geha : Difficile de parler de leur personnalité sans dévoiler tout ce qu’ils sont mais on peut dire que la vie les a parfois gâtés, parfois pourris, et que leur rencontre est une jonction d’intérêts. Hent Guer est plutôt expansif, sans peur, parce qu’il dégage une très grande force, mentale et physique. Pic Caram, lui, est plutôt l’inverse, physiquement quelconque, plus réservé, mais pas moins dangereux, notamment en raison du pouvoir, énorme, dont il est le détenteur. On peut dire que, malgré toute leur bonne volonté, où qu’ils aillent, ils ne passent pas vraiment inaperçus.

"Ce qu’il y a d’intéressant avec les crapules, c’est que, de base, elles peuvent à peu près tout se permettre. Il n’y a pas forcément de limite à leur noirceur."

Actusf : Ce sont de vrais crapules ! Est-ce plus difficile d’écrire ce genre de personnages que des « gentils » ?
Thomas Geha : Je crois que l’inverse est plus difficile. Quand j’ai écrit Le Sabre de sang (toujours dispos chez Folio SF), il y a de cela quelques années, j’ai eu plus de difficultés a écrire la deuxième partie du diptyque, notamment en raison de la personnalité plus « douce » et gentille du héros du deuxième tome. Ce qu’il y a d’intéressant avec les crapules, c’est que, de base, elles peuvent à peu près tout se permettre. Il n’y a pas forcément de limite à leur noirceur. Un personnage « gentil », a contrario, a des limites et elles sont je le crois plus difficiles à cerner, et à équilibrer dans un récit. Le dosage est plus subtil, peut-être. En revanche, dans Des Sorciers et des hommes, c’est ce qu’il y avait d’intéressant à entreprendre, surtout en profitant des largesses du fix-up qui permet beaucoup de libertés, c’était de trouver et de développer, mine de rien, des nuances à mes deux méchants. Du coup, c’est un jeu que l’auteur (moi) joue avec le lecteur parce que, d’une certaine façon, il le piège dans son appréhension globale des personnages. Si rien n’est tout blanc, eh bien rien n’est tout noir non plus. Je n’ai pas figé mes personnages dans un marbre incassable.



Actusf : Ce roman a aussi été l’occasion de créer un système de magie des plus intéressant. Pouvez-vous nous expliquer son fonctionnement ? Est-ce difficile de construire un système de magie pour qu’il soit crédible, fonctionnel et en adéquation avec l’univers ?
Thomas Geha : Je suis un paysan, je viens de la campagne, j’aime la nature, j’aime la regarder et l’imaginer autre, aussi. J’aime décrire de nouvelles faunes, d’autres flores (mon planet-opera Sous l’ombre des étoiles, chez Rivière Blanche, est, je crois, l’exemple le plus criant de ma biblio) et ma magie ne pouvait que procéder d’une autre façon d’appréhender la nature. Par exemple, une « sorcière » très puissante apparaît dans Des sorciers et des hommes. Sa magie semble résider dans sa connaissance des poissons qui vivent dans une mer appelée la mer d’Os. Ses poissons transmettent une magie à qui les consomment. Mais ce n’est jamais la même, d’une personne à l’autre. La magie de Pic Caram est quant à elle organique, elle modifie l’appréhension du corps par celui qui possède ce don, lequel voit un corps entouré de rubans de soie rouge, des gros, des fins, des moins fins, bref toute une gamme de rubans. Et quand il voit, les mains du sorcier sont capables de les manipuler à distance. Ainsi, il devient capable d’agir sur la personne. De la guérir d’une maladie autant que de la tuer. Il existe d’autres types de sorciers que le sorcier aux rubans. Je n’ai pas encore tout exploré, mais par exemple mes personnages rencontrent des branchesèves (capables de manipuler la sève) ou encore des Feux-Follets (le feu est leur domaine, mais ils ne sont pas si puissants que cela). Comme ma magie est en prise directe avec ce que vivent mes personnages, il était finalement assez aisé de l’intégrer au mieux dans la trame des événements et dans la logique de mon univers.

"Je n’ai pas encore tout exploré, mais par exemple mes personnages rencontrent des branchesèves (capables de manipuler la sève) ou encore des Feux-Follets (le feu est leur domaine, mais ils ne sont pas si puissants que cela)."


Actusf : Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Thomas Geha : J’ai quelques nouvelles en cours, parce que l’on recommence à m’en demander. J’accepte bien volontiers, même si parfois le temps me manque hélas. Je travaille aussi sur un nouveau roman, une fantasy uchronique d’inspiration bretonne. C’est un projet que je mature depuis – trop – longtemps, il est donc venu le temps de m’y mettre sérieusement. À part cela, je travaille sur un gros projet BD que l’on ma soumis, mais il reste encore très incertain… d’autant que ce n’est pas de la fiction.

Actusf : Où pourrons-nous vous rencontrer dans les mois à venir ?
Thomas Geha : Le 18 juillet au festival de Trémelin (près de Rennes). Rien d’autre à l’horizon pour le moment.

 

à lire aussi

Genres / Mots-clés

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?