
Julien Bétan : Dans sa version historique, Fiction a été pendant près de cinquante ans un pilier des littératures de l’imaginaire en France, un vivier d’auteurs, un lieu de débats, d’expérimentations… Il est passionnant, encore aujourd’hui de replonger dans ce foisonnement.
Sinon, c’est dans les pages de Fiction, version Moutons électriques, que j’ai débuté en tant qu’essayiste et traducteur, c’est quelque chose qui ne s’oublie pas !
Actusf : Qu'est-ce qui t'a donné envie de t'investir dans ce projet ?
Julien Bétan : Les Indés m’ont fait une proposition que je ne pouvais pas refuser.
Plus sérieusement, ça m’a paru un moyen privilégié de poursuivre le travail entamé dans le cadre la de la Bibliothèque des Miroirs, la collection que je dirige avec André-François Ruaud chez les Moutons. Une démarche d’ouverture, de décloisonnement des genres, des supports culturels et des approches.
Par ailleurs, je bénéficie d’une liberté totale en ce qui concerne le volet rédactionnel, ce qui est plutôt appréciable. Le cœur de la revue reste évidemment la fiction, des traductions de textes issus du Magazine of Fantasy and Science-Fiction, auxquelles s’ajoutent des nouvelles francophones ou venues d’ailleurs, le tout étant sélectionné avec patience et amour par notre comité de lecture, placé depuis dix ans sous la houlette de Jean-Jacques Régnier.
Une revue éditée par un collectif d’éditeur, et qui fonctionne elle-même comme un collectif : voilà qui correspondait parfaitement à mes propres envies et convictions.
Actusf : Quelles étaient tes envies pour cette nouvelle formule ? Et comment as-tu choisi les nouvelles rubriques ?
Julien Bétan : J’avais envie que la revue évolue sans perdre son identité. Qu’elle prenne à la fois en compte les nouvelles habitudes de lecture liées au numérique tout en revendiquant son caractère d’objet matériel. Nous avons donc décidé d’en faire un « mook », un « magazine-book », format très à la mode en ce moment. En fait elle était déjà, depuis 2005, une revue livre vendue exclusivement en librairie, mais elle est désormais tout en couleur, avec une nouvelle maquette très graphique, un nouveau format, un nouveau prix revu à la baisse, et un rythme de publication plus soutenu.
En ce qui concerne les rubriques, j’ai contacté un certain nombre d’auteurs, dont certains collaborateurs du premier Fiction, en fixant une ligne éditoriale simple : pas de critique littéraire et pas de réflexion théorique sur les « genres ». D’autres font ça très bien, sur papier ou sur le web, et comme les Indés sont avant tout des éditeurs, il nous paraissait peu éthique de prendre position sur la qualité du reste de la production. Mais l’idée était surtout de venir combler les manques, de proposer plutôt que de réclamer et de fabriquer in fine, la revue que nous avions envie de lire. Au bout du compte, nous avons trois rédacteurs permanents : Alex Nikolavitch, Nicolas Nova et Julie Proust Tanguy, dont les rubriques explorent, avec un regard décalé, différentes facettes des imaginaires contemporains.

Julien Bétan : Le choix de la maquette s’est fait collectivement, suite à un appel d’offre. Nous avons ensuite affiné ensemble sa proposition et continuons à travailler ensemble : Aurélien a non seulement conçu la maquette, mais est le directeur artistique de la revue.
Actusf : Que peux-tu nous dire du numéro 19 ?
Julien Bétan : Il est encore tôt, le numéro de printemps vient de sortir ! Cependant, difficile de ne pas partager quelques infos. Ainsi, on y trouvera par exemple une nouvelle inédite de Robert Silverberg, appartenant au cycle de Majipoor. Je me souviens avoir dévoré Le Château de Lord Valentin lors de l’une de mes premières nuits blanches préadolescentes, et Silverberg reste un des auteurs qui ont marqué ma vie de lecteur.
Il y aura aussi, en vrac, un portfolio revisitant les grandes figures liées à l’imaginaire parisien à la sauce steampunk ; la bande-dessinée fera un retour coloré et délicieusement non-sensique…
Plus généralement, le numéro 19 sera encore plus riche, encore plus beau, affirmant de manière plus marquée l’identité propre de cette nouvelle formule.
Actusf : Quelles sont tes envies et tes idées pour la suite ?
Julien Bétan : Continuer à faire évoluer la revue et à défier la gravité ! Nous voulons également, depuis la mise en place de ce projet, développer un pendant numérique à la revue, qui porte pour l’instant le nom de code de FictionLab. Il s’agirait, plutôt que d’une version électronique, d’un espace communautaire et expérimental, évidemment en lien avec la création littéraire et l’imaginaire. Mais je ne peux pas vous en dire plus pour le moment…
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