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ITW Joe Haldeman
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ITW Joe Haldeman

Actusf : Votre roman le plus connu est La Guerre éternelle. Comment est-il né ? Quelle idée aviez-vous à la base ?
Joe Haldeman : Je pense que chaque auteur qui a une expérience de la guerre écrit à ce sujet. J'ai écrit un roman « traditionnel », Au service de la guerre (qui est paru en France aux éditions de l'Amitié, Rageot, 1978 (trad. Patrice Duvic)). J'ai toujours su que j’allais écrire un roman de science-fiction de guerre, mais celui-ci a débuté de la manière la plus prosaïque qui soit. Je me suis assis et j’ai tapé : « Ce soir, nous allons vous montrer huit façons silencieuses de tuer un homme » – première ligne dont je me suis souvenu de la formation de base à l'armée. J’ai continué à taper, et après une trentaine de pages, je savais que j'écrivais un roman.

Actusf : Avec le recul, quel regard portez vous sur ce roman ? Ce genre de succès est-il une chose positive ou une malédiction ?
Joe Haldeman : Je viens de relire le roman et pense que c'est du bon boulot. Je ferais mieux maintenant. Le succès, je dirais que c’est environ 90% de bénédiction et 10% de malédiction – la malédiction, ce sont les fans qui m’écrivent en demandant « Pourquoi n’écrivez vous pas un autre La Guerre éternelle ? » Ma réponse est « Bien sûr, si vous me rendez mes 27 ans. »

Actusf : Pourquoi être revenu à La Guerre éternelle avec La Paix éternelle en 2001 ?
Joe Haldeman : La Paix éternelle est un roman qui a été, de deux façons, une révision de  La Guerre éternelle : l'auteur avait 25 ans de plus et le monde avait 25 ans de plus aussi. Au lieu de la folie du Vietnam, nous avons eu la folie de la guerre du Golfe.

Actusf : Ridley Scott a évoqué une adaptation au cinéma pour La Guerre éternelle. Où en est ce projet ?
Joe Haldeman : En ce moment, je crois que M. Scott est toujours à la recherche d'un scénario. Certaines sources ont dit que La Guerre éternelle serait son prochain film, mais je n'ai pas entendu quoi que ce soit qui vienne directement de son bureau. (Ce n'est pas rare à Hollywood. Quand un film est adapté d'un livre, ils aiment autant que l'auteur du livre ne soit pas impliqué.)

Actusf : Il y a eu une adaption BD avec Marvano, quel regard avez-vous dessus ?
Joe Haldeman : J'aime toutes les adaptations de Marvano. Nous avons fait une douzaine de livres. Il a l’imagination visuelle dont je manque.

Actusf : Autre roman marquant, En mémoire de mes péchés. Il y était question de non-violence, c'est un thème qui vous tient toujours à coeur ?
Joe Haldeman : Beaucoup de mon travail est anti-guerre, anti-violence explicitement ou implicitement. Je suppose que ce n'est pas rare chez les écrivains qui ont été enrôlés.

Actusf : Des souvenirs truqués, une vie qui lui échappe, des choix (tuer généralement) pris en dehors de lui... Dans ce récit Otto le héros n'est qu'un outil, un parmi d'autres, pas irremplaçable. Est-ce là votre vision de l'homme?
Joe Haldeman : C'est certainement le cas de certains hommes et femmes. Dans le cas d’Otto, son aptitude à choisir une vie différente lui a été enlevée. C'est une vision métaphorique de la plupart d'entre nous, bien sûr. Que nous l'admettions ou non, nous apprécions la sécurité et la respectabilité plus que l'individualité.

Actusf : Plus généralement vous parlez souvent d'immortalité. C'est un sujet qui semble vous passionner. Pour quelles raisons ?
Joe Haldeman : Principalement une aversion pour le fait de mourir. Mais aussi, en tant que romancier, je trouve que l'idée de prolonger la vie et celle de l'immortalité sont des veines profondes et précieuses pour moi.

Actusf : Vous avez étudié l'informatique dans les années 60-70. Quel regard portez-vous aujourd'hui sur les nouvelles technologies?
Joe Haldeman : Elles sont belles et mystérieuses, elles sont horribles et mécanistes. Je suppose que cela dépend de la façon dont mon ordinateur fonctionne un jour donné.

Actusf : Et quelle est la place d'Internet dans votre travail d'écrivain ?
Joe Haldeman : C'est un précieux outil de recherche. C’est aussi un regrettable mangeur de temps. Je reçois beaucoup de mails de fans en ligne, et j’aime y répondre. Mais je ferais mieux d’écrire, je suppose.

Actusf : Parlez-nous de Marsbound qui vient de sortir en anglais mais que nous n'avons pas encore pu lire en France. De quoi ce roman parle-t-il ?
Joe Haldeman : Il s'agit d'une jeune femme près de cinquante ans dans le futur, qui va avec ses parents sur Mars, pour participer à une expérience sociale visant à savoir comment les familles peuvent s'adapter aux conditions martiennes. Elle déteste et a des ennuis, mais finalement elle se retrouve être la première ambassadrice auprès des aliens.

Actusf : Quels sont vos projets ? Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Joe Haldeman : En ce moment je travaille sur Starbound, la suite de Marsbound. En outre je fais un peu de poésie et des histoires courtes occasionnellement. Le prochain livre sera probablement EarthBound, achevant la trilogie.

Actusf : Vous qui avez imaginé l'une des plus vastes guerres de la littérature, quel regard portez-vous sur celles qui déchirent notre planète, comme la guerre du Golfe, le conflit israëlo-palestinien ou les conflits au Zimbabwe et au Congo ? Notamment, la vision que nous en avons, nous occidentaux, ne vous paraît-elle pas aussi déformée que peut l'être l'appréhension à l'échelle humaine d'un conflit galactique ? Etait-ce l'un de vos buts, en écrivant La Guerre éternelle, d'établir un tel parallèle avec ce que nous pouvons vivre sur Terre ?
Joe Haldeman : Notre guerre avec l'Irak est illégale, mal conçue, et vouée à l'échec. Bush et Cheney devraient être présentés à la Cour internationale de justice comme criminels de guerre. Ca n’arrivera jamais, mais ils le devraient.
Il y a beaucoup de négatif et pas beaucoup de positif à dire sur les deux camps du conflit israélo-palestinien. Vengeance et religion travaillent ensemble pour rendre toute solution peu probable. J'ai peur que cela ne puisse "finir" en un échange nucléaire dans une guerre qui opposerait Israël à une coalition d'intérêts du Moyen-Orient. Si l'Amérique se rallie à Israël, cela pourrait être le début de la dernière guerre mondiale.
La fin de La Guerre éternelle n'est pas une suggestion sur la manière dont nous pourrions vivre sur Terre. Certaines personnes la considèrent comme une fin heureuse (puisque les personnages principaux se remettent ensemble et ont un bébé). Ça a été écrit pour être ambigu et sarcastique.

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