ActuSF : Votre premier roman a été publié alors que vous aviez 35 ans. Aviez-vous déjà écrit avant cela ? Qu'est-ce qui a fait que ce roman a été publié ?
Gary Kilworth : J'écris des histoires depuis que j'ai 12 ans, gagnant même une compétition scolaire en 1953. In Solitary n'était pas le premier roman que j'écrivais – c'était le quatrième. Les trois autres romans n'ont jamais été publiés. Je pense que dans celui-là j'essayais de trouver une nouvelle approche pour un vieux thème – l'invasion de la Terre par des extraterrestres – en le racontant du point de vue d'un homme qui a été élevé par les extraterrestres et donc éprouvait de la sympathie envers eux – comme un poussin qui suit la première créature vivante qu'il voit en la prenant pour sa mère. Mon héros ne voit pas sa fraternisation avec l'ennemi comme de la traîtrise mais comme une chose naturelle.
ActuSF : Beaucoup de vos romans sont des livres de fantasy, en particulier bien sûr Les Rois navigateurs. Pour quelle raison ? Qu'est-ce qui vous plaît dans ce genre de littérature ?
Gary Kilworth : J'aime les histoires enracinées dans le folklore et les mythes : des histoires qui pourraient être arrivées mais qui n'ont probablement jamais eu lieu. Nathaniel Hawthorne, ce formidable écrivain américain d'histoires courtes, les appelait les histoires "Deux fois dites", c'est-à-dire des histoires qui ont été dites et redites. Mais à chaque fois elles varient, ne serait-ce qu'un petit peu, parfois drastiquement. J'aime aussi inventer des créatures étranges par moi-même. Avec Les Rois navigateurs, j'ai tissé mes propres longues histoires sur la base de courts mythes polynésiens, altérant (au grand dam de certains) la géographie de la planète pour rendre l'histoire plus intéressante. Les Rois navigateurs est probablement mon travail le plus ambitieux et une trilogie dans laquelle j'ai mis mon cœur et mon âme. J'ai vraiment apprécié chaque pas dans ma découverte des Polynésiens, et les révélations qui en ont découlé par la suite.
ActuSF : Même question sur vos romans historiques. Vous semblez très intéressé par les guerres coloniales du 19ème siècle, si je ne m'abuse. Pourquoi ?
Gary Kilworth : En fait la plupart de mes romans historiques traitent de la guerre de Crimée, qui n'était pas une guerre coloniale. C'était une guerre dans laquelle les Français, les Turcs et les Britanniques s'allièrent pour tenter de stopper l'expansion russe en Europe. Cependant, j'ai continué à écrire trois romans de plus en suivant le même personnage qui m'a emmené en Inde et en Nouvelle-Zélande simplement à cause de la date. La guerre de Crimée s'est terminée en 1856 et la rébellion indienne a commencé en 1857, donc c'était une évolution naturelle pour mon héros. J'aime faire des recherches historiques et j'ai été militaire moi-même pendant près de 20 ans, mais plus récemment – depuis 10 ans – je suis devenu un Quaker, et les Quakers sont pacifistes. Les livres de Guerre ne soutiennent pas la guerre, ils parlent de ses horreurs. Ils parlent d'hommes et de femmes plongés dans l'adversité. C'est la condition humaine sous tension qui m'intéresse. L'histoire, c'est encore la même chose que pour les légendes – vérité ou mensonge ? Nous ne savons pas vraiment, nous ne pouvons que présumer.
ActuSF : Vous écrivez des romans s'adressant aux adultes et aussi des romans pour adolescents. Comment choisissez-vous la cible de lecteurs concernée par les histoires que vous imaginez ?
Gary Kilworth : Je n'écris pas les livres pour adolescents seulement pour les enfants. Je les écris pour les adultes et enfants qui pourraient les apprécier. Quand j'étais enfant, je vivais à Aden (maintenant Sud Yémen) et je lisais des livres de Rudyard Kipling, d'H.G. Wells et de Jules Verne. Furent-ils écrits pour des adultes ou pour des enfants ? Les deux les lirent, et les deux les aimèrent. J'ai vraiment adoré Kim, La Guerre des mondes et 20000 lieux sous les mers à la fois en tant qu'enfant et en tant qu'adulte. Mais le marketing est roi de nos jours et les éditeurs veulent une cible, donc ils choisissent ce qui leur paraît le public le plus approprié pour un livre.
ActuSF : Vous avez remporté plusieurs prix, en particulier un World Fantasy Award et un British Science Fiction award. Qu'est-ce que cela a changé pour vous ? Cela vous a-t-il imposé une pression supplémentaire pour les histoires que vous avez imaginées par la suite ?
Gary Kilworth : J'étais ravi. J'espère en gagner d'autres, simplement parce qu'ils me font me sentir bien et me disent que les gens aiment mes livres. Trop de mes romans n'ont pas trouvé de public et sont tombés dans l'oubli. Non, je ne pense pas ressentir aucune pression. Je peux juste écrire ce que j'écris. Je crois que mon meilleur format est l'histoire courte, mais il n'y presque aucun marché pour cela de nos jours. L'écrivain d'histoires courtes que j'admire le plus au monde est Julio Cortazar, un homme brillant, malheureusement disparu.
ActuSF : Comment est né Les Rois navigateurs ?
Gary Kilworth : Je peux exactement vous dire quand, comment et où est née l'idée. 1975 dans la salle d'attente d'un dentiste. Je lisais un exemplaire du National Géographic (Vol 146, N°6) de décembre 1974. Il contenait trois articles sur les mythes et la navigation polynésiens. Ce fut une révélation. Durant 20 ans j'ai pris des notes, lu des livres, rassemblé des informations et visité les îles polynésiennes, jusqu'à ce que je me sente prêt à commencer la trilogie.
ActuSF : Pourquoi choisir un monde proche de la Polynésie ? Qu'est ce qui vous a plu chez ce peuple ?
Gary Kilworth : Ce qui m'a attiré dans ce peuple, c'est son courage et son audace. Nous, en Europe, avons passé des siècles accrochés à nos côtes avec nos vaisseaux, alors que les polynésiens se lançaient en plein océan sur des milliers de kilomètres sans cartes ni instruments, sans savoir où ils allaient arriver, emmenant avec eux famille et animaux, leurs plantes et leurs dieux, tout ce qu'ils possédaient. Quel courage ! Qui n'admirerait pas tant d'audace ?
ActuSF : Avez-vous besoin de beaucoup de documentation ? Comment travaillez-vous ?
Gary Kilworth : J'ai besoin de cartes, anciennes et nouvelles. J'ai besoin de livres, d'anciens et de nouveaux. J'accroche des images sur mes études sur les canoës, les gens, les îles. Je lis énormément avant de commencer un roman, et je picore et je plonge dans ces choses une fois que je suis vraiment en train d'écrire. Je contacte les musées, les ministères de la Culture, et j'ai eu la grande chance de rencontrer un descendant des migrants d'origine qui naviguèrent de Raiatea à Aitutaki – un homme nommé Papa Tunui – dont le grand-père lui a transmit le récit du voyage qu'il tenait lui-même de son grand-père 'The Speaker for the 7th Canoe' , l'homme dont la fonction était de perpétuer le récit de l'histoire de mémoire. Alors que j'écrivais, le roman est devenu vivant pour moi. C'est presque comme si j'étais en contact spirituel avec ces anciens marins et pouvait les atteindre et les toucher.
ActuSF : Trois tomes ont été publiés en France. Que pouvez-vous nous dire sur la suite ? Qu'est ce que vous nous réservez ?
Gary Kilworth : Je suis en ce moment en train d'écrire un roman qui se place dans les Guerre Maori en Nouvelle Zélande qui touche à ces vieux mythes et légendes, cependant bien sûr c'est rigoureusement de l'histoire, pas de la fantasy. J'adorerais revisiter la Polynésie dans mes futurs écrits, si je pouvais trouver un éditeur désireux de publier le travail.
ActuSF : Quels sont vos projets ? Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Gary Kilworth : Mes projets pour l'année prochaine sont Kiwi Wars (publié par Seven House) dont nous venons déjà de parler, avec mon personnage Captain Fancy Jack Crossman en Nouvelle-Zélande. Je viens juste de terminer un roman de voyage dans le temps qui se passe en 1903 à Prague, où trois enfants rencontrent Franz Kafka (chez Orbit) et je termine une collection d'histoires courtes écrites alors que j'étais à Hong Kong appelée Tales from the Fragrant Harbour, qui se compose de deux parties – des histoires paranormales et non paranormales (à publier chez PS Publishing).
Gary Kilworth : J'écris des histoires depuis que j'ai 12 ans, gagnant même une compétition scolaire en 1953. In Solitary n'était pas le premier roman que j'écrivais – c'était le quatrième. Les trois autres romans n'ont jamais été publiés. Je pense que dans celui-là j'essayais de trouver une nouvelle approche pour un vieux thème – l'invasion de la Terre par des extraterrestres – en le racontant du point de vue d'un homme qui a été élevé par les extraterrestres et donc éprouvait de la sympathie envers eux – comme un poussin qui suit la première créature vivante qu'il voit en la prenant pour sa mère. Mon héros ne voit pas sa fraternisation avec l'ennemi comme de la traîtrise mais comme une chose naturelle.
ActuSF : Beaucoup de vos romans sont des livres de fantasy, en particulier bien sûr Les Rois navigateurs. Pour quelle raison ? Qu'est-ce qui vous plaît dans ce genre de littérature ?
Gary Kilworth : J'aime les histoires enracinées dans le folklore et les mythes : des histoires qui pourraient être arrivées mais qui n'ont probablement jamais eu lieu. Nathaniel Hawthorne, ce formidable écrivain américain d'histoires courtes, les appelait les histoires "Deux fois dites", c'est-à-dire des histoires qui ont été dites et redites. Mais à chaque fois elles varient, ne serait-ce qu'un petit peu, parfois drastiquement. J'aime aussi inventer des créatures étranges par moi-même. Avec Les Rois navigateurs, j'ai tissé mes propres longues histoires sur la base de courts mythes polynésiens, altérant (au grand dam de certains) la géographie de la planète pour rendre l'histoire plus intéressante. Les Rois navigateurs est probablement mon travail le plus ambitieux et une trilogie dans laquelle j'ai mis mon cœur et mon âme. J'ai vraiment apprécié chaque pas dans ma découverte des Polynésiens, et les révélations qui en ont découlé par la suite.
ActuSF : Même question sur vos romans historiques. Vous semblez très intéressé par les guerres coloniales du 19ème siècle, si je ne m'abuse. Pourquoi ?
Gary Kilworth : En fait la plupart de mes romans historiques traitent de la guerre de Crimée, qui n'était pas une guerre coloniale. C'était une guerre dans laquelle les Français, les Turcs et les Britanniques s'allièrent pour tenter de stopper l'expansion russe en Europe. Cependant, j'ai continué à écrire trois romans de plus en suivant le même personnage qui m'a emmené en Inde et en Nouvelle-Zélande simplement à cause de la date. La guerre de Crimée s'est terminée en 1856 et la rébellion indienne a commencé en 1857, donc c'était une évolution naturelle pour mon héros. J'aime faire des recherches historiques et j'ai été militaire moi-même pendant près de 20 ans, mais plus récemment – depuis 10 ans – je suis devenu un Quaker, et les Quakers sont pacifistes. Les livres de Guerre ne soutiennent pas la guerre, ils parlent de ses horreurs. Ils parlent d'hommes et de femmes plongés dans l'adversité. C'est la condition humaine sous tension qui m'intéresse. L'histoire, c'est encore la même chose que pour les légendes – vérité ou mensonge ? Nous ne savons pas vraiment, nous ne pouvons que présumer.
ActuSF : Vous écrivez des romans s'adressant aux adultes et aussi des romans pour adolescents. Comment choisissez-vous la cible de lecteurs concernée par les histoires que vous imaginez ?
Gary Kilworth : Je n'écris pas les livres pour adolescents seulement pour les enfants. Je les écris pour les adultes et enfants qui pourraient les apprécier. Quand j'étais enfant, je vivais à Aden (maintenant Sud Yémen) et je lisais des livres de Rudyard Kipling, d'H.G. Wells et de Jules Verne. Furent-ils écrits pour des adultes ou pour des enfants ? Les deux les lirent, et les deux les aimèrent. J'ai vraiment adoré Kim, La Guerre des mondes et 20000 lieux sous les mers à la fois en tant qu'enfant et en tant qu'adulte. Mais le marketing est roi de nos jours et les éditeurs veulent une cible, donc ils choisissent ce qui leur paraît le public le plus approprié pour un livre.
ActuSF : Vous avez remporté plusieurs prix, en particulier un World Fantasy Award et un British Science Fiction award. Qu'est-ce que cela a changé pour vous ? Cela vous a-t-il imposé une pression supplémentaire pour les histoires que vous avez imaginées par la suite ?
Gary Kilworth : J'étais ravi. J'espère en gagner d'autres, simplement parce qu'ils me font me sentir bien et me disent que les gens aiment mes livres. Trop de mes romans n'ont pas trouvé de public et sont tombés dans l'oubli. Non, je ne pense pas ressentir aucune pression. Je peux juste écrire ce que j'écris. Je crois que mon meilleur format est l'histoire courte, mais il n'y presque aucun marché pour cela de nos jours. L'écrivain d'histoires courtes que j'admire le plus au monde est Julio Cortazar, un homme brillant, malheureusement disparu.
ActuSF : Comment est né Les Rois navigateurs ?
Gary Kilworth : Je peux exactement vous dire quand, comment et où est née l'idée. 1975 dans la salle d'attente d'un dentiste. Je lisais un exemplaire du National Géographic (Vol 146, N°6) de décembre 1974. Il contenait trois articles sur les mythes et la navigation polynésiens. Ce fut une révélation. Durant 20 ans j'ai pris des notes, lu des livres, rassemblé des informations et visité les îles polynésiennes, jusqu'à ce que je me sente prêt à commencer la trilogie.
ActuSF : Pourquoi choisir un monde proche de la Polynésie ? Qu'est ce qui vous a plu chez ce peuple ?
Gary Kilworth : Ce qui m'a attiré dans ce peuple, c'est son courage et son audace. Nous, en Europe, avons passé des siècles accrochés à nos côtes avec nos vaisseaux, alors que les polynésiens se lançaient en plein océan sur des milliers de kilomètres sans cartes ni instruments, sans savoir où ils allaient arriver, emmenant avec eux famille et animaux, leurs plantes et leurs dieux, tout ce qu'ils possédaient. Quel courage ! Qui n'admirerait pas tant d'audace ?
ActuSF : Avez-vous besoin de beaucoup de documentation ? Comment travaillez-vous ?
Gary Kilworth : J'ai besoin de cartes, anciennes et nouvelles. J'ai besoin de livres, d'anciens et de nouveaux. J'accroche des images sur mes études sur les canoës, les gens, les îles. Je lis énormément avant de commencer un roman, et je picore et je plonge dans ces choses une fois que je suis vraiment en train d'écrire. Je contacte les musées, les ministères de la Culture, et j'ai eu la grande chance de rencontrer un descendant des migrants d'origine qui naviguèrent de Raiatea à Aitutaki – un homme nommé Papa Tunui – dont le grand-père lui a transmit le récit du voyage qu'il tenait lui-même de son grand-père 'The Speaker for the 7th Canoe' , l'homme dont la fonction était de perpétuer le récit de l'histoire de mémoire. Alors que j'écrivais, le roman est devenu vivant pour moi. C'est presque comme si j'étais en contact spirituel avec ces anciens marins et pouvait les atteindre et les toucher.
ActuSF : Trois tomes ont été publiés en France. Que pouvez-vous nous dire sur la suite ? Qu'est ce que vous nous réservez ?
Gary Kilworth : Je suis en ce moment en train d'écrire un roman qui se place dans les Guerre Maori en Nouvelle Zélande qui touche à ces vieux mythes et légendes, cependant bien sûr c'est rigoureusement de l'histoire, pas de la fantasy. J'adorerais revisiter la Polynésie dans mes futurs écrits, si je pouvais trouver un éditeur désireux de publier le travail.
ActuSF : Quels sont vos projets ? Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Gary Kilworth : Mes projets pour l'année prochaine sont Kiwi Wars (publié par Seven House) dont nous venons déjà de parler, avec mon personnage Captain Fancy Jack Crossman en Nouvelle-Zélande. Je viens juste de terminer un roman de voyage dans le temps qui se passe en 1903 à Prague, où trois enfants rencontrent Franz Kafka (chez Orbit) et je termine une collection d'histoires courtes écrites alors que j'étais à Hong Kong appelée Tales from the Fragrant Harbour, qui se compose de deux parties – des histoires paranormales et non paranormales (à publier chez PS Publishing).